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Ariane Web: Conseil d'État 476847, lecture du 21 novembre 2023, ECLI:FR:CECHS:2023:476847.20231121

Décision n° 476847
21 novembre 2023
Conseil d'État

N° 476847
ECLI:FR:CECHS:2023:476847.20231121
Inédit au recueil Lebon
8ème chambre
M. Hervé Cassagnabère, président
M. François-René Burnod, rapporteur
M. Romain Victor, rapporteur public
SARL DELVOLVE ET TRICHET, avocats


Lecture du mardi 21 novembre 2023
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu les procédures suivantes :

Le Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Bastia, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative, d'ordonner l'expulsion de M. A... B... de la dépendance du domaine public qu'il occupe sans droit ni titre sur la parcelle cadastrée section B n° 1521 située sur le territoire de la commune de Furiani, de lui enjoindre de remettre en état les lieux en procédant à la démolition de cabanons et à l'enlèvement de toute clôture, installation et effets personnels dans le délai d'un mois à compter de son ordonnance, sous astreinte de 300 euros par jour de retard, et de l'autoriser à procéder à son expulsion à ses frais et au besoin avec le concours de la force publique.

Par une ordonnance n° 2300739 du 17 juillet 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a enjoint à M. B..., ainsi qu'à tous occupants de son chef, de libérer les lieux et de procéder au démontage des installations qui s'y trouvent, sous astreinte de 300 euros par jour de retard faute d'exécution dans le délai de quinze jours à compter de la notification de son ordonnance.

1° Sous le n° 476847, par un pourvoi, enregistré le 1er août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant au titre de la procédure de référé engagée, de rejeter les demandes du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres ;

3°) de mettre à la charge du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.




2° Sous le n° 477675, par une requête, enregistrée le 4 août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 821-5 du code de justice administrative, qu'il soit sursis à l'exécution de cette ordonnance jusqu'à qu'il soit statué sur le pourvoi en cassation qu'il a formé ;

2°) de mettre à la charge du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


....................................................................................


Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. François-René Burnod, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Krivine, Viaud, avocat de M. B... ;


Considérant ce qui suit :

1. Le pourvoi de M. B... et sa requête aux fins de sursis à exécution sont relatifs à l'ordonnance du 17 juillet 2023 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a fait droit aux demandes du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres tendant à son expulsion du domaine public et à la remise en état de celui-ci, à ses frais et risques. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

Sur le pourvoi :

2. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

3. Pour demander l'annulation de l'ordonnance qu'il attaque, M. B... soutient que le juge des référés du tribunal administratif de Bastia a :
- commis une erreur de droit en prescrivant, au-delà des conclusions dont il était saisi, un délai de quinze jours à compter de la notification de son ordonnance pour évacuer l'emplacement qu'il occupe et pour démonter les ouvrages qui s'y trouvent ;
- commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en estimant, pour juger que la condition d'urgence était satisfaite, que l'occupation de l'emplacement en cause faisait obstacle à la réalisation d'une opération de réaménagement, inscrite au plan France Relance et devant être achevée avant la fin de l'année 2023, dans un but de préservation de l'espace naturel et de son ouverture au public, alors qu'aucun élément n'avait été produit en ce sens par le conservatoire ;
- dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en jugeant que la demande d'expulsion présentait un caractère urgent sans tenir compte des circonstances tenant à ce que les projets successifs de protocoles prévoyaient d'autoriser les occupants à se maintenir sur place jusqu'au 4 septembre 2023 puis jusqu'au 20 du même mois, que l'entreprise chargée des travaux était fermée au mois d'août, que l'accès à la parcelle en litige et à la mer n'était pas entravé et que l'exécution des travaux prévus par le conservatoire ne pouvait être empêchée par la présence de bungalows dont la surface est modeste par rapport à celle de la parcelle, qui étaient de nature à l'en priver ;
- méconnu son office et les dispositions de l'article L. 521-3 du code de justice administrative et dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis en lui ordonnant de démonter deux cabanons en bois et une terrasse en béton surmontée d'une pergola implantés sans droit ni titre sur le domaine public, alors qu'une telle opération présentait le caractère d'une démolition et, à titre subsidiaire, l'a insuffisamment motivée et a commis une erreur de droit en ne recherchant pas si de tels ouvrages, eu égard à leurs caractéristiques, pouvaient faire l'objet d'un simple démontage.

4. Aucun de moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.

Sur la demande de sursis à exécution :

5. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi formé contre l'ordonnance attaquée n'est pas admis. Par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cet arrêt sont devenues sans objet. Il n'y a, dès lors, plus lieu d'y statuer.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre une somme à la charge de M. B... à ce même titre.


D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. B... n'est pas admis.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. B... tendant à ce que soit prononcé le sursis à exécution de l'ordonnance du 17 juillet 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Bastia.
Article 3 : Les conclusions présentées par les parties au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et au Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres.
Délibéré à l'issue de la séance du 25 octobre 2023 où siégeaient : M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat, présidant ; M. Jonathan Bosredon, conseiller d'Etat et M. François-René Burnod, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 21 novembre 2023.

Le président :
Signé : M. Hervé Cassagnabère
Le rapporteur :
Signé : M. François-René Burnod
La secrétaire :
Signé : Mme Catherine Meneyrol