Base de jurisprudence

Ariane Web: Conseil d'État 459225, lecture du 23 décembre 2021, ECLI:FR:CEORD:2021:459225.20211223

Décision n° 459225
23 décembre 2021
Conseil d'État

N° 459225
ECLI:FR:CEORD:2021:459225.20211223
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
BALAT, avocats


Lecture du jeudi 23 décembre 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

I. Sous le n° 459225, par une requête, enregistrée le 8 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association France Nature Environnement demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision de la ministre de la mer rejetant implicitement sa demande d'adoption de mesures pour réduire les prises accessoires de dauphins communs dans le golfe de Gascogne ;

2°) d'ordonner à titre provisoire à la ministre de la mer, d'une part, la fermeture spatio-temporelle en application du scénario dit " N " du Conseil international pour l'exploration des mers, c'est à dire la fermeture pendant trois mois, de janvier à mars 2022, des pêcheries françaises concernées par les captures de cétacés dans le golfe de Gascogne et, d'autre part, de prendre toute mesure visant à l'exécution de cette mesure provisoire d'urgence ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Elle soutient que :
- sa requête est recevable dès lors que, d'une part, elle dispose de la capacité pour agir en ce qu'elle possède un agrément au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement et, d'autre part, elle justifie d'un intérêt à agir ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en premier lieu, l'ouverture de la prochaine période de pêche, cause de mortalité extrême pour les dauphins, est imminente, en deuxième lieu, les taux records de captures des dauphins ne sont pas soutenables à terme compte tenu de l'état de conservation de l'espèce, en troisième lieu, il n'existe pas actuellement de mesures concrètes et efficaces susceptibles de minimiser et d'éliminer les prises accessoires de dauphins dans les pêcheries du golfe de Gascogne, en quatrième lieu, des mesures provisoires sont nécessaires afin de faire cesser l'atteinte aux droits conférés par l'ordre juridique de l'Union européenne, en cinquième lieu, l'urgence est caractérisée en raison du délai séparant l'ordonnance à venir de celle de l'intervention prévisible du jugement et, en dernier lieu, la fermeture spatio-temporelle de la pêche pour la période de janvier à mars 2022 est une mesure qui permet de préserver efficacement la biodiversité ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
- la décision contestée méconnaît, d'une part, les dispositions de l'article 12 de la directive 92/43/CEE " Habitats " en ce qu'elle ne règlemente pas suffisamment les activités de pêche pour prévenir les effets négatifs sur les espèces nécessitant une protection stricte et, d'autre part, les dispositions de l'article 6 de cette directive dès lors qu'aucun dispositif de protection renforcée n'est prévu pour les dauphins protégés au sein de zones spéciales de conservation ;
- l'exception selon laquelle l'interdiction de capture intentionnelle ne s'applique pas à la capture accidentelle dans les engins de pêche au sens du règlement n° 812/2004 du 26 avril 2004 n'empêche pas l'Etat français de légiférer et réglementer pour éviter au maximum les captures accidentelles ;
- la décision contestée méconnaît le règlement européen n° 2019-1241 du 20 juin 2019 en ce qu'elle ne prend pas de mesures pour réduire au maximum les captures accidentelles d'espèces marines sensibles, auxquelles appartiennent les dauphins ;
- elle est entachée d'incompétence négative dès lors que la ministre de la mer refuse de prendre des mesures concrètes préventives de fermeture spatio-temporelle des pêches pour atteindre un taux de mortalité permettant de contribuer à l'objectif de maintien de l'espèce à long terme ou de rétablissement de sa population alors qu'elle est compétente en vertu de l'article 11 du règlement européen n° 2019/1241 ;
- la fermeture spatio-temporelle des pêches, d'une part, est une mesure économiquement supportable et socialement acceptable eu égard à l'existence du fonds européen pour les affaires maritimes, la pêche et l'aquaculture qui permet d'indemniser les pêcheurs pour les pertes liées à leur arrêt d'activité dû à des mesures de conservation et, d'autre part, elle permettrait d'atteindre les objectifs européens de réduction des captures accidentelles de dauphins.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2021, la ministre de la mer conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au Premier ministre et à la ministre de la transition écologique qui n'ont pas produit d'observations.


II. Sous le n° 459309, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 et 21 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Sea Shepherd France demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre la décision par laquelle la ministre de la mer a implicitement rejeté sa demande du 18 avril 2021 de prendre des mesures concrètes en vue de limiter les échouages de mammifères marins dans le golfe de Gascogne ;

2°) d'enjoindre à la ministre de prendre toutes les mesures visant à limiter de manière effective les captures accidentelles de mammifères marins, notamment la fermeture pendant les trois mois d'hiver et un mois l'été des pêcheries françaises concernées par la capture des cétacés dans le golfe de Gascogne, l'obligation pour les bateaux de pêche de disposer d'un système de " Remote E-monitoring " et d'admettre la présence d'observateurs à bord, ainsi que l'application de l'arrêté du 1er juillet 2011 sanctionnant les captures de dauphins ;

3°) d'enjoindre à la ministre de la mer de lui transmettre toutes informations sur l'état de la procédure d'infraction en cours devant les instances de l'Union européenne ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


Elle soutient que :
- sa requête est recevable dès lors qu'elle justifie d'un intérêt à agir comme le démontrent ses statuts ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en premier lieu, le pic d'échouage des dauphins est imminent en ce qu'il intervient entre décembre et mars, en deuxième lieu, les mesures d'arrêt de la pêche pendant les mois d'hiver permettraient de limiter le nombre de captures, en troisième lieu, le nombre d'échouages de dauphins intervenu en 2021 est bien supérieur à celui des années précédentes, en quatrième lieu, les taux de capture actuels ne sont pas soutenables au regard de la préservation des dauphins et, en dernier lieu, la ministre de la mer refuse d'exécuter les décisions de la commission européenne ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
- la décision contestée méconnaît le règlement (UE) 2019/1241 du 20 juin 2019 dès lors que la ministre de la mer ne prend aucune des mesures préconisées en vue de réduire au minimum les captures de cétacés ;
- elle méconnaît les dispositions de la directive " Habitats " 92/43/CEE dès lors que, en premier lieu, elle n'a pas mis en oeuvre de mesure efficace qui permet de garantir l'état de conservation favorable des cétacés et ne règlemente pas suffisamment les conditions de pêche des dauphins, en deuxième lieu, aucun système efficace de surveillance des captures des mammifères marins n'est appliqué, en troisième lieu, la présence des observateurs à bord est laissée à la discrétion des capitaines des navires et, en dernier lieu, aucune évaluation des incidences n'a été mise en place concernant les activités de pêche dans les zones protégées pour lesquelles il existe des carences dans l'application de la législation sur les zones Natura 2000 ;
- les captures de dauphins qui peuvent être sanctionnées en application des dispositions de l'arrêté du 1er juillet 2011 ne concernent que celles qui relèvent de l'ordre de l'intentionnel et non pas de l'accidentel ;
- la décision contestée méconnaît le principe de précaution dès lors que la ministre de la mer ne prend pas de mesures de fermeture spatio-temporelles alors qu'il existe une corrélation spatiale établie entre les captures de cétacés et les activités de pêche ;
- elle méconnaît les dispositions de la directive 2008/56/CE du 17 juin 2008 dès qu'elle ne démontre pas que la ministre de la mer ait entrepris des efforts pour atteindre le bon état écologique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2021, la ministre de la mer conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au Premier ministre et à la ministre de la transition écologique qui n'ont pas produit d'observations.

Par deux mémoires en intervention volontaire, enregistrés le 14 décembre 2021, l'association Défense des milieux aquatiques demande qu'il soit fait droit aux conclusions des deux requêtes. Elle soutient que son intervention est recevable et que la condition d'urgence est satisfaite.


Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- le code de l'environnement ;
- le règlement (UE) n° 2019-1241 du 20 juin 2019 du Parlement européen et du Conseil ;
- le règlement (UE) n° 812/2004 du 26 avril 2004 du Parlement européen et du Conseil ;
- la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 du Parlement européen et du Conseil ;
- le code de justice administrative ;


Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, l'association France Nature Environnement et l'association Sea Shepherd France, et d'autre part, la ministre de la transition écologique, la ministre de la mer et le Premier ministre ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 21 décembre 2021, à 10 heures 30:

- Me Guermonprez, avocate au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocate des associations France Nature Environnement et Sea Shepherd France ;

- les représentants de l'association France Nature Environnement ;

- les représentants de l'association Sea Shepherd France;

- les représentants de la ministre de la transition écologique et de la ministre de la mer ;

à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;

Une note en délibéré, enregistrée le 22 décembre 2021, a été présentée par l'association Sea Shepherd France.

Une note en délibéré, enregistrée le 23 décembre 2021, a été présentée par l'association France Nature Environnement.


Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes des associations France Nature Environnement et Sea Shepherd France présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

Sur l'intervention de l'association Défense des milieux aquatiques :

2. Eu égard à son objet, l'association Défense des milieux aquatiques a intérêt à la suspension de l'exécution des décisions contestées de la ministre de la mer. Son intervention est admise.

Sur les conclusions à fin de suspension et d'injonction :

3. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". La possibilité pour le juge des référés d'ordonner la suspension de l'exécution d'une décision administrative est subordonnée notamment à la condition qu'il y ait urgence. Il lui appartient d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à porter à sa situation une atteinte suffisamment grave et immédiate pour caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

4. L'association France Nature Environnement et l'association Sea Shepherd France ont demandé à la ministre de la mer de prendre les mesures urgentes nécessaires pour réduire les prises accidentelles de dauphins dans le golfe de Gascogne, notamment la fermeture pendant trois mois chaque hiver et un mois l'été des pêcheries concernées par ces captures de cétacés. Ces deux associations demandent, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution des décisions de la ministre de la mer rejetant implicitement leur demande. Elles concluent aussi à ce qu'il soit enjoint à la ministre de la mer de prendre toutes mesures visant à limiter de manière effective les captures accidentelles de mammifères marins, notamment par la fermeture pendant les mois de janvier à mars 2022 des pêcheries françaises concernées par leur capture dans le golfe de Gascogne et par l'obligation pour les bateaux de pêche à la fois de disposer d'un système de " Remote E-monitoring " et d'admettre la présence d'observateurs à bord.

5. Pour justifier de l'urgence de la suspension du refus de la ministre de la mer de prendre des mesures pour limiter les prises accidentelles de mammifères marins dans le golfe de Gascogne, les associations requérantes se prévalent de l'imminence du pic de mortalité des dauphins au cours de la période hivernale et des risques qui en résultent pour la survie de l'espèce, de l'absence de mesures prises par le ministère de la mer pour minimiser les prises accidentelles de dauphins par les bateaux de pêche et la violation qui en résulte du droit de l'Union européenne applicable, qu'il s'agisse de la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 dite directive " Habitats " ou du règlement (UE) n° 2019/1241du Parlement européen et du Conseil du 20 juin 2019 relatif à la conservation des ressources halieutiques et à la protection des écosystèmes marins. Les associations requérantes font en outre valoir que la fermeture des pêcheries françaises pendant les trois mois d'hiver est la seule mesure efficace pour limiter réellement les prises accessoires de dauphins et qu'elle est par ailleurs économiquement et socialement acceptable dès lors que les pêcheurs pourront se voir indemniser des conséquences de l'arrêt de leur activité notamment par les fonds européens.

6. Il résulte de l'instruction que les échouages de petits cétacés, essentiellement de dauphins communs, interviennent de manière importante dans le golfe de Gascogne et que ce phénomène s'est fortement accru depuis 2016. Le pic de ces échouages a lieu durant les mois d'hiver. Les traces retrouvées sur les animaux échoués confirment dans la plupart des cas la mort dans un engin de pêche. Cette situation préoccupante a mené la Commission européenne à saisir le Conseil international pour l'exploration des mers d'une demande d'avis relative à des mesures urgentes visant à empêcher les prises accessoires de dauphin commun dans le golfe de Gascogne. Cet avis, publié le 26 mai 2020, a relevé que " compte tenu du cycle de vie des petits cétacés, toute mesure de protection ne peut être efficace que si elle est appliquée de manière continue pendant une longue période ". Il a également noté " des problèmes permanents concernant la disponibilité et la qualité des données, ce qui contribue à des niveaux élevés d'incertitude dans l'estimation de l'abondance et de la distribution des populations, des prises accessoires et d'autres menaces pour les petits cétacés ". Il a ainsi recommandé " de renforcer la surveillance afin d'évaluer l'efficacité des mesures de gestion et d'accroître la précision des estimations de l'abondance de la population et de la mortalité due aux prises accessoires de dauphin commun dans le golfe de Gascogne ". Il a enfin conseillé " une combinaison de fermetures temporelles de tous les métiers concernés et l'application d'émetteurs d'ultrasons " sur certains chalutiers. Par une décision du 8 juillet 2020, le Conseil d'Etat, statuant sur une demande d'annulation d'un arrêté relatif au régime national de gestion pour la pêche professionnelle de bar dans le golfe de Gascogne, a enjoint à l'administration d'adopter des mesures réglementaires de protection complémentaire de nature à réduire l'incidence sur l'écosystème de la pêche au bar dans le golfe de Gascogne. Un arrêté de la ministre de la mer du 27 novembre 2020 a modifié l'arrêté du 26 décembre 2019 pour étendre l'utilisation des dispositifs de dissuasion acoustique dits " pingers " dans le golfe de Gascogne à l'ensemble des navires français de longueur hors-tout supérieur à 12 mètres pêchant au moyen d'un chalut pélagique. Par ailleurs, l'administration a adopté un plan d'action qui réitère le caractère obligatoire des déclarations des captures accidentelles, prévu à l'article 4 de l'arrêté du 1er juillet 2018, en intégrant le respect de cette obligation déclarative dans ses plans de contrôle, ce qui a entraîné une augmentation du nombre de déclarations même si ce dernier reste inférieur aux échouages constatés. Ce plan a aussi organisé le renforcement des mesures de surveillance par la mise en place de programmes d'observation aérienne qui se sont déroulés du 1er janvier au 31 mars 2021 pour estimer l'abondance et l'aire de distribution des dauphins communs, la mise en oeuvre d'une campagne d'observation volontaire des pêches à bord des chalutiers et des fileyeurs entre décembre 2020 et avril 2021 et un test de l'embarquement de caméras à bord sur 20 fileyeurs du golfe de Gascogne à des fins de connaissances scientifiques à compter de février 2021. La ministre de la mer a également lancé un projet international avec l'Espagne et le Portugal sur les captures accidentelles de cétacés, les navires de ces deux pays contribuant également à la capture accidentelle des dauphins communs dans le golfe de Gascogne.

7. Il ressort des explications fournies à l'audience par les représentants des ministres de la transition écologique et de la mer que les mesures rappelées au point précédent vont d'abord permettre une meilleure connaissance de la situation des dauphins dans le golfe de Gascogne ainsi que des interactions entre eux et les bateaux de pêche. Il a ainsi été indiqué qu'à la suite de la campagne de survol de la zone qui a eu lieu l'hiver dernier, l'Observatoire Pelagis allait pouvoir, l'été prochain, remettre un état de lieux de la population des dauphins. Cet organisme a déjà relevé que la population des dauphins dans l'Atlantique Nord-Est était stable mais qu'elle comportait des groupes plus petits et plus proches des côtes. Par ailleurs, les représentants des ministres de la transition écologique et de la mer ont aussi fait état de l'ensemble des recherches en cours pour améliorer tant les dispositifs de dissuasion acoustique que les systèmes de contrôle embarqués dans les chalutiers. L'ensemble des mesures ainsi mises en place depuis la fin de l'année 2020 s'inscrivent dans la mise en oeuvre du point 4 de l'article 12 de la directive " Habitats " qui impose aux Etats membres d'instaurer un système de contrôle des captures accidentelles afin de prendre les mesures nécessaires pour éviter que ces captures n'aient d'incidence négative importante sur les espèces protégées. Il en résulte que même si les éléments avancés par les associations requérantes montrent que les mesures prises sont à la fois tardives et insuffisantes individuellement, ils ne conduisent pas à remettre en cause ceux produits par la ministre de la mer qui fait valoir que, d'une part, il faut mesurer de façon globale les effets des mesures déjà adoptées et, d'autre part, que la fermeture des pêcheries françaises pendant les trois mois de l'hiver 2022, demandée par les associations requérantes, n'aurait d'incidence que sur les bateaux français qui bien que majoritaires ne sont pas les seuls à pêcher dans le golfe de Gascogne et que le coût d'un tel arrêt de la pêche française pendant trois mois conduirait à un manque à gagner pour les pêcheurs de 41 millions d'euros et de 66 millions pour l'ensemble de la filière aval, alors que les fonds européens ne pourraient fournir qu'une indemnisation partielle. Il s'ensuit que, compte tenu de l'appréciation globale à laquelle le juge des référés doit procéder, il ne résulte ni de l'instruction écrite, ni des explications orales fournies à l'audience que les éléments invoqués par les associations requérantes permettent de caractériser une situation d'urgence de nature à justifier la suspension des décisions attaquées.

8. Il y a lieu, en conséquence, de rejeter l'ensemble des conclusions des requêtes, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.


O R D O N N E :
------------------

Article 1er : Les interventions de l'association Défense des milieux aquatiques sont admises.
Article 2 : Les requêtes des associations France Nature Environnement et Sea Shepherd France sont rejetées.
Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association France Nature Environnement, l'association Sea Shepherd France, à la ministre de la mer et à l'association Défense des milieux aquatiques.

Fait à Paris, le 23 décembre 2021
Signé : Nathalie Escaut