Conseil d'État
N° 452144
ECLI:FR:CEORD:2021:452144.20210506
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
SCP DELAMARRE, JEHANNIN, avocats
Lecture du jeudi 6 mai 2021
Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 30 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'enjoindre à l'Etat de faire droit à la demande formulée dans le courrier du recteur de la Grande mosquée de Paris au ministre de l'intérieur en date du 21 avril 2021, et d'autoriser en conséquence l'ouverture des mosquées en France du samedi 8 mai 2021 à 21 heures, au dimanche 9 mai 2021 à 2 heures, avec des consignes sanitaires strictes prévues par une circulaire interne ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- elles justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la fête religieuse de la " Nuit du Destin " aura lieu dans la nuit du 8 au 9 mai 2021 et que, compte tenu du contexte sanitaire actuel, il est essentiel que les associations requérantes disposent rapidement d'une décision du juge des référés, afin, d'une part, d'organiser la célébration dans les conditions les plus sûres et, d'autre part, d'avertir les fidèles des modalités particulières de cette célébration ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de culte ainsi qu'au principe d'égalité ;
- la décision de rejet du ministre de l'intérieur méconnaît la liberté de culte et apparaît disproportionnée dès lors que, en premier lieu, depuis le début de l'épidémie, les mosquées ont respecté scrupuleusement les consignes sanitaires, en deuxième lieu, l'impact de ce couvre-feu est particulièrement lourd pour les musulmans en cette période de Ramadan et, en dernier lieu, toutes les mesures de prévention nécessaires peuvent être prises pour éviter que des contaminations interviennent à la faveur de cet événement ;
- la situation présente se distingue de la question des veillées de Pâques en ce que, d'une part, l'intensité de la crise sanitaire n'est plus la même et, d'autre part, le juge des référés du Conseil d'Etat avait relevé que des solutions pouvaient être trouvées pour aménager les horaires des veillées pascales ;
- elle méconnaît le principe d'égalité dès lors que, pour la nuit de Noël 2020, les pouvoirs publics avaient levé le couvre-feu pour toute la nuit du 24 décembre 2020, et ce jusqu'au 25 décembre 2020 à 20 heures, laissant aux chrétiens la possibilité de célébrer une fête essentielle dans des conditions respectant la liberté du culte.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'il n'est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé qui n'ont pas produit d'observations.
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 5 mai 2021, par lequel ministre de l'intérieur maintient ses conclusions et ses moyens ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 5 mai 2021, par lequel les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris maintiennent leurs conclusions et leurs moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2021-160 du 15 février 2021 ;
- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris et, d'autre part, le Premier ministre, le ministre de l'intérieur et le ministre des solidarités et de la santé ;
Ont été entendus lors de l'audience publique du 4 mai 2021, à 15 heures :
- Me Delamarre, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat des associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris ;
- les représentants des requérants ;
- le représentant du ministre de l'intérieur ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a reporté la clôture de l'instruction au 5 mai 2021 à 20 heures.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ".
2. Les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à l'Etat de faire droit à la demande formulée dans le courrier du Recteur de la Grande mosquée de Paris au ministre de l'intérieur en date du 21 avril 2021, et d'autoriser en conséquence l'ouverture des mosquées en France du samedi 8 mai 2021 à 21 heures, au dimanche 9 mai 2021 à 2 heures du matin, avec des consignes sanitaires strictes prévues par une circulaire interne.
Sur le cadre juridique relatif à la situation sanitaire :
3. Aux termes de l'article L. 3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 : " L'état d'urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ". L'article L. 3131-13 du même code dispose que : " L'état d'urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application. (...). " Aux termes du I de l'article L. 3131-15 du même code : " Dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : / 1° Réglementer ou interdire la circulation des personnes et des véhicules et réglementer l'accès aux moyens de transport et les conditions de leur usage ; / 2° Interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé ; / (...) 5° Ordonner la fermeture provisoire et réglementer l'ouverture, y compris les conditions d'accès et de présence, d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, en garantissant l'accès des personnes aux biens et services de première nécessité ; / 6° Limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ainsi que les réunions de toute nature ; / (...). " Ce même article précise à son III que les mesures prises en application de ses dispositions " sont strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. ".
4. L'émergence d'un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou Covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d'urgence de santé publique de portée internationale par l'Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit les autorités compétentes à prendre diverses mesures destinées à réduire les risques de contagion. Une nouvelle progression de l'épidémie de Covid-19 sur le territoire national a conduit le Président de la République à prendre, le 14 octobre 2020, sur le fondement des articles L. 3131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique, un décret déclarant l'état d'urgence sanitaire à compter du 17 octobre 2020 sur l'ensemble du territoire de la République. L'article 1er de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire, modifié par la loi du 15 février 2021, proroge l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 1er juin 2021 inclus. Le Premier ministre a pris, sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'urgence sanitaire, dont l'article 4, dans sa version applicable à la date de la présente ordonnance, dispose : " I. -Tout déplacement de personne hors de son lieu de résidence est interdit entre 19 heures et 6 heures du matin (...). " Aux termes de l'article 47 du même décret : " I. - Les établissements de culte, relevant de la catégorie V, sont autorisés à rester ouverts. Tout rassemblement ou réunion en leur sein est interdit à l'exception des cérémonies religieuses, pour lesquelles l'accueil du public est organisé dans les conditions suivantes : / 1° Une distance minimale de deux emplacements est laissée entre ceux occupés par chaque personne ou groupe de personnes partageant le même domicile ; / 2° Une rangée sur deux est laissée inoccupée. / II. - Toute personne de onze ans ou plus qui accède ou demeure dans ces établissements porte un masque de protection. / L'obligation du port du masque ne fait pas obstacle à ce que celui-ci soit momentanément retiré pour l'accomplissement des rites qui le nécessitent. / (...). "
Sur la liberté de culte :
5. Aux termes de l'article 10 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : " Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi ". Aux termes des trois premières phrases du premier alinéa de l'article 1er de la Constitution : " La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. " Il en résulte notamment, ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2012-297 QPC du 21 février 2013, que " le principe de laïcité impose notamment le respect de toutes les croyances, l'égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion et que la République garantisse le libre exercice des cultes ".
6. Aux termes de l'article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites. / 2 - La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Aux termes de l'article 1er de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat : " La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public ". Aux termes de l'article 25 de la même loi : " Les réunions pour la célébration d'un culte tenues dans les locaux appartenant à une association cultuelle ou mis à sa disposition sont publiques. Elles sont dispensées des formalités de l'article 8 de la loi du 30 juin 1881, mais restent placées sous la surveillance des autorités dans l'intérêt de l'ordre public. ".
8. Il résulte de tout ce qui précède que la liberté du culte présente le caractère d'une liberté fondamentale. Cette liberté ne se limite pas au droit de tout individu d'exprimer les convictions religieuses de son choix dans le respect de l'ordre public. Elle comporte également, parmi ses composantes essentielles, le droit de participer collectivement, sous la même réserve, à des cérémonies, en particulier dans les lieux de culte. La liberté du culte doit, cependant, être conciliée avec l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé.
Sur la demande en référé :
9. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la situation épidémiologique sur le territoire métropolitain demeure préoccupante, avec des indicateurs épidémiologiques et hospitaliers très dégradés. Il résulte ainsi de l'instruction que le taux d'incidence s'élève à 279,7 pour 100 000 personnes, en baisse par rapport au pic de la fin mars mais encore en hausse par rapport aux taux constatés de décembre à la mi-mars. Le taux de positivité est de 9,2 % et le taux de dépistage de 3 028,4 pour 100 000 habitants. Si le taux d'occupation des lits de réanimation par des patients Covid vient de connaître, après un plateau très élevé, une légère baisse, il s'élève toutefois toujours à 112,2 %. Au 27 avril, 28 990 patients étaient hospitalisés et 5 692 patients admis en services de soins critiques. On constate depuis le début de l'épidémie 104 543 décès en milieu hospitalier, soit 8 235 décès de plus entre le 2 et le 27 avril. S'agissant de la circulation du virus, les tendances constatées révèlent un rythme de propagation qui demeure élevé sur l'ensemble du territoire. Le variant dit " britannique ", plus contagieux, représente désormais 82,7 % des contaminations en France, contre 3,3 % le 6 janvier dernier. Les variants dits " sud-africain " et " brésilien " représentent 5 % des nouvelles contaminations en France et présentent un risque d'échappement immunitaire post infection et post vaccinal. Même s'il est à ce stade très peu présent en France, le variant dit " indien " semble présenter une contagiosité plus forte que les autres variants et un possible échappement immunitaire.
10. En deuxième lieu, l'interdiction de sortir de son domicile entre 19 heures et 6 heures participe de la politique de mise en oeuvre par le gouvernement pour lutter contre la propagation de l'épidémie visant notamment à restreindre les déplacements de personnes hors de leur domicile, afin de limiter les interactions sociales à l'occasion desquelles la propagation du virus est facilitée, notamment dans les milieux clos. Eu égard à l'évolution de la crise sanitaire, et alors que les mesures de couvre-feu et de restriction des déplacements prises depuis l'automne dernier semblent avoir montré leur efficacité pour freiner la transmission de l'épidémie sur le territoire national, le gouvernement a choisi de maintenir l'interdiction des déplacements des personnes hors de leur lieu de résidence entre 19 heures et 6 heures du matin sur l'ensemble du territoire métropolitain.
11. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que, pour contribuer à endiguer la propagation de l'épidémie, les responsables de mosquées de France ont conçu et mis en oeuvre des protocoles sanitaires permettant de diminuer le risque lié à l'existence de rassemblements dans un espace clos et qu'aucun foyer infectieux n'a été recensé au sein de ces lieux de culte depuis le début de l'épidémie. Le recteur de la Grande Mosquée de Paris, pour sa part, a invité les fidèles à oeuvrer pour la préservation de la vie et a régulièrement diffusé des instructions précises sur les mesures sanitaires à respecter. Le recteur de la Grande Mosquée de Paris indique en outre que l'ouverture des mosquées pour la " Nuit du Destin " se ferait dans le respect de conditions sanitaires strictes, interdisant notamment tout regroupement et toute forme d'alimentation et assurant un espace de 6m2 à chacun pour la prière.
12. En quatrième lieu, contrairement à ce qui avait été décidé lors du premier confinement, les dispositions, citées au point 4, de l'article 47 du décret du 29 octobre 2020 ont autorisé la tenue dans les établissements de culte de cérémonies religieuses, dans le respect d'un protocole sanitaire défini à ce même article. Il est donc possible de participer collectivement aux cérémonies religieuses organisées entre 6 heures et 19 heures. Il résulte en outre de l'instruction que le ministre de l'intérieur a, pour la période du Ramadan, autorisé l'ouverture des mosquées dès la première prière du matin. Par ailleurs, des mesures alternatives ont été mises en place par de nombreuses mosquées pour permettre un suivi adapté des croyants au cours du mois de Ramadan et de la " Nuit du Destin ", avec un service religieux assuré par voie dématérialisée.
13. Il appartient aux différentes autorités compétentes de prendre, en vue de sauvegarder la santé de la population, toutes dispositions de nature à prévenir ou à limiter les effets de l'épidémie. Il y a lieu de mettre en balance, d'une part, l'objectif de maîtrise du risque épidémique et, d'autre part, la liberté fondamentale qu'est la liberté de culte, qui comprend le droit de participer collectivement à des cérémonies religieuses. Les conséquences d'une levée partielle des contraintes en vigueur cette nuit-là pour une fraction de la population suppose que les pouvoirs publics soient en mesure de s'assurer à tout instant que les personnes qui se prévalent de cette dérogation se rendent effectivement dans un lieu de culte. Par ailleurs, il ressort des débats lors de l'audience que le nombre de personnes amenées à se rendre dans une mosquée la nuit du 8 au 9 mai 2021 s'élève à environ 200 000, ce qui représente des déplacements non négligeables. Il en résulte que tant au regard de la précarité de la situation sanitaire décrite au point 9 que des modalités d'exercice du culte décrites au point 12, qui sont autorisées, la décision de refus de dérogation au couvre-feu pour la " Nuit du Destin " ne peut être regardée comme portant une atteinte manifestement illégale à la liberté de culte.
14. Par ailleurs, si les associations requérantes se prévalent d'une rupture d'égalité, une telle méconnaissance, à la supposer établie, n'est pas de nature à révéler, par elle-même, une atteinte à une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
15. Il résulte de tout ce qui précède que la requête présentée par les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête des associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée aux associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris ainsi qu'au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé.
N° 452144
ECLI:FR:CEORD:2021:452144.20210506
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
SCP DELAMARRE, JEHANNIN, avocats
Lecture du jeudi 6 mai 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 30 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) d'enjoindre à l'Etat de faire droit à la demande formulée dans le courrier du recteur de la Grande mosquée de Paris au ministre de l'intérieur en date du 21 avril 2021, et d'autoriser en conséquence l'ouverture des mosquées en France du samedi 8 mai 2021 à 21 heures, au dimanche 9 mai 2021 à 2 heures, avec des consignes sanitaires strictes prévues par une circulaire interne ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- elles justifient d'un intérêt leur donnant qualité pour agir ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la fête religieuse de la " Nuit du Destin " aura lieu dans la nuit du 8 au 9 mai 2021 et que, compte tenu du contexte sanitaire actuel, il est essentiel que les associations requérantes disposent rapidement d'une décision du juge des référés, afin, d'une part, d'organiser la célébration dans les conditions les plus sûres et, d'autre part, d'avertir les fidèles des modalités particulières de cette célébration ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté de culte ainsi qu'au principe d'égalité ;
- la décision de rejet du ministre de l'intérieur méconnaît la liberté de culte et apparaît disproportionnée dès lors que, en premier lieu, depuis le début de l'épidémie, les mosquées ont respecté scrupuleusement les consignes sanitaires, en deuxième lieu, l'impact de ce couvre-feu est particulièrement lourd pour les musulmans en cette période de Ramadan et, en dernier lieu, toutes les mesures de prévention nécessaires peuvent être prises pour éviter que des contaminations interviennent à la faveur de cet événement ;
- la situation présente se distingue de la question des veillées de Pâques en ce que, d'une part, l'intensité de la crise sanitaire n'est plus la même et, d'autre part, le juge des référés du Conseil d'Etat avait relevé que des solutions pouvaient être trouvées pour aménager les horaires des veillées pascales ;
- elle méconnaît le principe d'égalité dès lors que, pour la nuit de Noël 2020, les pouvoirs publics avaient levé le couvre-feu pour toute la nuit du 24 décembre 2020, et ce jusqu'au 25 décembre 2020 à 20 heures, laissant aux chrétiens la possibilité de célébrer une fête essentielle dans des conditions respectant la liberté du culte.
Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2021, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'il n'est porté aucune atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale.
La requête a été communiquée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé qui n'ont pas produit d'observations.
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 5 mai 2021, par lequel ministre de l'intérieur maintient ses conclusions et ses moyens ;
Vu le nouveau mémoire, enregistré le 5 mai 2021, par lequel les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris maintiennent leurs conclusions et leurs moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;
- le code de la santé publique ;
- la loi n° 2021-160 du 15 février 2021 ;
- le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris et, d'autre part, le Premier ministre, le ministre de l'intérieur et le ministre des solidarités et de la santé ;
Ont été entendus lors de l'audience publique du 4 mai 2021, à 15 heures :
- Me Delamarre, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat des associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris ;
- les représentants des requérants ;
- le représentant du ministre de l'intérieur ;
à l'issue de laquelle le juge des référés a reporté la clôture de l'instruction au 5 mai 2021 à 20 heures.
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du même code : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ".
2. Les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à l'Etat de faire droit à la demande formulée dans le courrier du Recteur de la Grande mosquée de Paris au ministre de l'intérieur en date du 21 avril 2021, et d'autoriser en conséquence l'ouverture des mosquées en France du samedi 8 mai 2021 à 21 heures, au dimanche 9 mai 2021 à 2 heures du matin, avec des consignes sanitaires strictes prévues par une circulaire interne.
Sur le cadre juridique relatif à la situation sanitaire :
3. Aux termes de l'article L. 3131-12 du code de la santé publique, issu de la loi du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19 : " L'état d'urgence sanitaire peut être déclaré sur tout ou partie du territoire métropolitain ainsi que du territoire des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution et de la Nouvelle-Calédonie en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population ". L'article L. 3131-13 du même code dispose que : " L'état d'urgence sanitaire est déclaré par décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé. Ce décret motivé détermine la ou les circonscriptions territoriales à l'intérieur desquelles il entre en vigueur et reçoit application. (...). " Aux termes du I de l'article L. 3131-15 du même code : " Dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, le Premier ministre peut, par décret réglementaire pris sur le rapport du ministre chargé de la santé, aux seules fins de garantir la santé publique : / 1° Réglementer ou interdire la circulation des personnes et des véhicules et réglementer l'accès aux moyens de transport et les conditions de leur usage ; / 2° Interdire aux personnes de sortir de leur domicile, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé ; / (...) 5° Ordonner la fermeture provisoire et réglementer l'ouverture, y compris les conditions d'accès et de présence, d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, en garantissant l'accès des personnes aux biens et services de première nécessité ; / 6° Limiter ou interdire les rassemblements sur la voie publique ainsi que les réunions de toute nature ; / (...). " Ce même article précise à son III que les mesures prises en application de ses dispositions " sont strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. ".
4. L'émergence d'un nouveau coronavirus, responsable de la maladie à coronavirus 2019 ou Covid-19 et particulièrement contagieux, a été qualifiée d'urgence de santé publique de portée internationale par l'Organisation mondiale de la santé le 30 janvier 2020, puis de pandémie le 11 mars 2020. La propagation du virus sur le territoire français a conduit les autorités compétentes à prendre diverses mesures destinées à réduire les risques de contagion. Une nouvelle progression de l'épidémie de Covid-19 sur le territoire national a conduit le Président de la République à prendre, le 14 octobre 2020, sur le fondement des articles L. 3131-12 et L. 3131-13 du code de la santé publique, un décret déclarant l'état d'urgence sanitaire à compter du 17 octobre 2020 sur l'ensemble du territoire de la République. L'article 1er de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire, modifié par la loi du 15 février 2021, proroge l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 1er juin 2021 inclus. Le Premier ministre a pris, sur le fondement de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de Covid-19 dans le cadre de l'urgence sanitaire, dont l'article 4, dans sa version applicable à la date de la présente ordonnance, dispose : " I. -Tout déplacement de personne hors de son lieu de résidence est interdit entre 19 heures et 6 heures du matin (...). " Aux termes de l'article 47 du même décret : " I. - Les établissements de culte, relevant de la catégorie V, sont autorisés à rester ouverts. Tout rassemblement ou réunion en leur sein est interdit à l'exception des cérémonies religieuses, pour lesquelles l'accueil du public est organisé dans les conditions suivantes : / 1° Une distance minimale de deux emplacements est laissée entre ceux occupés par chaque personne ou groupe de personnes partageant le même domicile ; / 2° Une rangée sur deux est laissée inoccupée. / II. - Toute personne de onze ans ou plus qui accède ou demeure dans ces établissements porte un masque de protection. / L'obligation du port du masque ne fait pas obstacle à ce que celui-ci soit momentanément retiré pour l'accomplissement des rites qui le nécessitent. / (...). "
Sur la liberté de culte :
5. Aux termes de l'article 10 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : " Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la loi ". Aux termes des trois premières phrases du premier alinéa de l'article 1er de la Constitution : " La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. " Il en résulte notamment, ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2012-297 QPC du 21 février 2013, que " le principe de laïcité impose notamment le respect de toutes les croyances, l'égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction de religion et que la République garantisse le libre exercice des cultes ".
6. Aux termes de l'article 9 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites. / 2 - La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
7. Aux termes de l'article 1er de la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat : " La République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes sous les seules restrictions édictées ci-après dans l'intérêt de l'ordre public ". Aux termes de l'article 25 de la même loi : " Les réunions pour la célébration d'un culte tenues dans les locaux appartenant à une association cultuelle ou mis à sa disposition sont publiques. Elles sont dispensées des formalités de l'article 8 de la loi du 30 juin 1881, mais restent placées sous la surveillance des autorités dans l'intérêt de l'ordre public. ".
8. Il résulte de tout ce qui précède que la liberté du culte présente le caractère d'une liberté fondamentale. Cette liberté ne se limite pas au droit de tout individu d'exprimer les convictions religieuses de son choix dans le respect de l'ordre public. Elle comporte également, parmi ses composantes essentielles, le droit de participer collectivement, sous la même réserve, à des cérémonies, en particulier dans les lieux de culte. La liberté du culte doit, cependant, être conciliée avec l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé.
Sur la demande en référé :
9. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la situation épidémiologique sur le territoire métropolitain demeure préoccupante, avec des indicateurs épidémiologiques et hospitaliers très dégradés. Il résulte ainsi de l'instruction que le taux d'incidence s'élève à 279,7 pour 100 000 personnes, en baisse par rapport au pic de la fin mars mais encore en hausse par rapport aux taux constatés de décembre à la mi-mars. Le taux de positivité est de 9,2 % et le taux de dépistage de 3 028,4 pour 100 000 habitants. Si le taux d'occupation des lits de réanimation par des patients Covid vient de connaître, après un plateau très élevé, une légère baisse, il s'élève toutefois toujours à 112,2 %. Au 27 avril, 28 990 patients étaient hospitalisés et 5 692 patients admis en services de soins critiques. On constate depuis le début de l'épidémie 104 543 décès en milieu hospitalier, soit 8 235 décès de plus entre le 2 et le 27 avril. S'agissant de la circulation du virus, les tendances constatées révèlent un rythme de propagation qui demeure élevé sur l'ensemble du territoire. Le variant dit " britannique ", plus contagieux, représente désormais 82,7 % des contaminations en France, contre 3,3 % le 6 janvier dernier. Les variants dits " sud-africain " et " brésilien " représentent 5 % des nouvelles contaminations en France et présentent un risque d'échappement immunitaire post infection et post vaccinal. Même s'il est à ce stade très peu présent en France, le variant dit " indien " semble présenter une contagiosité plus forte que les autres variants et un possible échappement immunitaire.
10. En deuxième lieu, l'interdiction de sortir de son domicile entre 19 heures et 6 heures participe de la politique de mise en oeuvre par le gouvernement pour lutter contre la propagation de l'épidémie visant notamment à restreindre les déplacements de personnes hors de leur domicile, afin de limiter les interactions sociales à l'occasion desquelles la propagation du virus est facilitée, notamment dans les milieux clos. Eu égard à l'évolution de la crise sanitaire, et alors que les mesures de couvre-feu et de restriction des déplacements prises depuis l'automne dernier semblent avoir montré leur efficacité pour freiner la transmission de l'épidémie sur le territoire national, le gouvernement a choisi de maintenir l'interdiction des déplacements des personnes hors de leur lieu de résidence entre 19 heures et 6 heures du matin sur l'ensemble du territoire métropolitain.
11. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que, pour contribuer à endiguer la propagation de l'épidémie, les responsables de mosquées de France ont conçu et mis en oeuvre des protocoles sanitaires permettant de diminuer le risque lié à l'existence de rassemblements dans un espace clos et qu'aucun foyer infectieux n'a été recensé au sein de ces lieux de culte depuis le début de l'épidémie. Le recteur de la Grande Mosquée de Paris, pour sa part, a invité les fidèles à oeuvrer pour la préservation de la vie et a régulièrement diffusé des instructions précises sur les mesures sanitaires à respecter. Le recteur de la Grande Mosquée de Paris indique en outre que l'ouverture des mosquées pour la " Nuit du Destin " se ferait dans le respect de conditions sanitaires strictes, interdisant notamment tout regroupement et toute forme d'alimentation et assurant un espace de 6m2 à chacun pour la prière.
12. En quatrième lieu, contrairement à ce qui avait été décidé lors du premier confinement, les dispositions, citées au point 4, de l'article 47 du décret du 29 octobre 2020 ont autorisé la tenue dans les établissements de culte de cérémonies religieuses, dans le respect d'un protocole sanitaire défini à ce même article. Il est donc possible de participer collectivement aux cérémonies religieuses organisées entre 6 heures et 19 heures. Il résulte en outre de l'instruction que le ministre de l'intérieur a, pour la période du Ramadan, autorisé l'ouverture des mosquées dès la première prière du matin. Par ailleurs, des mesures alternatives ont été mises en place par de nombreuses mosquées pour permettre un suivi adapté des croyants au cours du mois de Ramadan et de la " Nuit du Destin ", avec un service religieux assuré par voie dématérialisée.
13. Il appartient aux différentes autorités compétentes de prendre, en vue de sauvegarder la santé de la population, toutes dispositions de nature à prévenir ou à limiter les effets de l'épidémie. Il y a lieu de mettre en balance, d'une part, l'objectif de maîtrise du risque épidémique et, d'autre part, la liberté fondamentale qu'est la liberté de culte, qui comprend le droit de participer collectivement à des cérémonies religieuses. Les conséquences d'une levée partielle des contraintes en vigueur cette nuit-là pour une fraction de la population suppose que les pouvoirs publics soient en mesure de s'assurer à tout instant que les personnes qui se prévalent de cette dérogation se rendent effectivement dans un lieu de culte. Par ailleurs, il ressort des débats lors de l'audience que le nombre de personnes amenées à se rendre dans une mosquée la nuit du 8 au 9 mai 2021 s'élève à environ 200 000, ce qui représente des déplacements non négligeables. Il en résulte que tant au regard de la précarité de la situation sanitaire décrite au point 9 que des modalités d'exercice du culte décrites au point 12, qui sont autorisées, la décision de refus de dérogation au couvre-feu pour la " Nuit du Destin " ne peut être regardée comme portant une atteinte manifestement illégale à la liberté de culte.
14. Par ailleurs, si les associations requérantes se prévalent d'une rupture d'égalité, une telle méconnaissance, à la supposer établie, n'est pas de nature à révéler, par elle-même, une atteinte à une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
15. Il résulte de tout ce qui précède que la requête présentée par les associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête des associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée aux associations Société des Habous et Lieux Saints de l'Islam et Fédération de la Grande Mosquée de Paris ainsi qu'au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé.