Conseil d'État
N° 451898
ECLI:FR:CEORD:2021:451898.20210428
Inédit au recueil Lebon
Lecture du mercredi 28 avril 2021
Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 20 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) du 17 mars 2021 portant sanction à l'encontre de la société d'exploitation d'un service d'information (S.E.S.I.) ;
2°) de mettre à la charge du CSA la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable en ce que la décision contestée, qui constitue une prise de position publique de nature à produire des effets notables sur sa personne, lui fait grief dès lors que, en premier lieu, elle porte atteinte à sa réputation en le présentant comme l'auteur d'un délit passible d'emprisonnement, en deuxième lieu, elle est susceptible d'exercer une influence sur le comportement des tiers que sont les autres médias régulés par le CSA et, en dernier lieu, elle porte atteinte à sa présomption d'innocence ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la décision du CSA porte atteinte à la présomption d'innocence ainsi qu'à la liberté d'expression ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
- elle méconnaît le principe général des droits de la défense ainsi que les dispositions des articles L. 211-2 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'il n'a pas été mis en mesure de présenter ses observations écrites ou orales et d'être assisté par un avocat avant son adoption ;
- elle méconnaît l'article 42 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dès lors qu'elle prononce une sanction pécuniaire en raison de la méconnaissance d'une convention d'émission alors que cette loi autorise seulement le CSA à sanctionner les manquements aux obligations imposées par les textes législatifs et réglementaires et par les principes définis aux articles 1 et 3-1 de cette même loi ;
- elle méconnaît l'article 42-2 de la loi du 30 septembre 1986 dès lors qu'elle inflige une amende de 200 000 euros au titre d'une incitation à la haine et d'un encouragement à des comportements discriminatoires alors même que le montant de la sanction pécuniaire ne peut excéder celui prévu pour l'amende pénale soit 45 000 euros au titre de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;
- elle porte atteinte à sa présomption d'innocence dès lors que le CSA affirme qu'il aurait commis le délit de provocation à la haine raciale prévu à l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881, alors même qu'une enquête pénale est en cours ;
- elle est entachée de dénaturation des propos du requérant dès lors que le CSA affirme qu'il parlait des mineurs isolés étrangers alors que tout le propos est justement qu'il ne s'agit pas de mineurs et qu'ils ne sont pas isolés ;
- elle méconnaît l'article 25 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dès lors que les propos litigieux ne contiennent aucune incitation à la haine ou à la violence envers les soi-disant mineurs isolées.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Par une décision du 17 mars 2021, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a, sur le fondement de l'article 42-1 de la loi du 30 septembre 1986, infligé à la Société d'exploitation d'un service d'information (SESI) une sanction de 200 000 euros en raison notamment des propos tenus, au cours de l'émission " Face à l'info ", diffusée sur le service de télévision CNEWS, le 29 septembre 2020, par M. B..., chroniqueur de cette émission. Celui-ci demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de cette décision.
3. Il résulte des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 521-1 du code de justice administrative que le prononcé de la suspension d'un acte administratif est subordonné notamment à une condition d'urgence. L'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.
4. Le requérant fait valoir, à ce titre, que l'exécution de la décision du CSA méconnaît le droit au respect de la présomption d'innocence ainsi que la liberté d'expression dès lors que, d'une part, la décision litigieuse affirme qu'il aurait commis le délit de provocation à la haine raciale alors qu'une enquête pénale est toujours en cours et, d'autre part, cette décision a pour objet ou pour effet de le priver d'accès à certains médias. Toutefois, ce faisant, M. B... ne fait valoir, en tout état de cause, aucune circonstance pertinente de nature à justifier que l'exécution de la décision, c'est à dire le paiement par la SESI de la somme qui a été infligée à cette société à titre de sanction de la méconnaissance de ses propres obligations, qui ne cause par elle-même aucun préjudice au requérant, soit suspendue.
5. Il résulte ce qui précède, en l'absence d'une situation d'urgence au sens des dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de justice administrative et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée, que la requête doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du même code.
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B....
N° 451898
ECLI:FR:CEORD:2021:451898.20210428
Inédit au recueil Lebon
Lecture du mercredi 28 avril 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 20 avril 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) du 17 mars 2021 portant sanction à l'encontre de la société d'exploitation d'un service d'information (S.E.S.I.) ;
2°) de mettre à la charge du CSA la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable en ce que la décision contestée, qui constitue une prise de position publique de nature à produire des effets notables sur sa personne, lui fait grief dès lors que, en premier lieu, elle porte atteinte à sa réputation en le présentant comme l'auteur d'un délit passible d'emprisonnement, en deuxième lieu, elle est susceptible d'exercer une influence sur le comportement des tiers que sont les autres médias régulés par le CSA et, en dernier lieu, elle porte atteinte à sa présomption d'innocence ;
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la décision du CSA porte atteinte à la présomption d'innocence ainsi qu'à la liberté d'expression ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
- elle méconnaît le principe général des droits de la défense ainsi que les dispositions des articles L. 211-2 et L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'il n'a pas été mis en mesure de présenter ses observations écrites ou orales et d'être assisté par un avocat avant son adoption ;
- elle méconnaît l'article 42 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dès lors qu'elle prononce une sanction pécuniaire en raison de la méconnaissance d'une convention d'émission alors que cette loi autorise seulement le CSA à sanctionner les manquements aux obligations imposées par les textes législatifs et réglementaires et par les principes définis aux articles 1 et 3-1 de cette même loi ;
- elle méconnaît l'article 42-2 de la loi du 30 septembre 1986 dès lors qu'elle inflige une amende de 200 000 euros au titre d'une incitation à la haine et d'un encouragement à des comportements discriminatoires alors même que le montant de la sanction pécuniaire ne peut excéder celui prévu pour l'amende pénale soit 45 000 euros au titre de l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ;
- elle porte atteinte à sa présomption d'innocence dès lors que le CSA affirme qu'il aurait commis le délit de provocation à la haine raciale prévu à l'article 24 de la loi du 29 juillet 1881, alors même qu'une enquête pénale est en cours ;
- elle est entachée de dénaturation des propos du requérant dès lors que le CSA affirme qu'il parlait des mineurs isolés étrangers alors que tout le propos est justement qu'il ne s'agit pas de mineurs et qu'ils ne sont pas isolés ;
- elle méconnaît l'article 25 de la loi du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dès lors que les propos litigieux ne contiennent aucune incitation à la haine ou à la violence envers les soi-disant mineurs isolées.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. Par une décision du 17 mars 2021, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) a, sur le fondement de l'article 42-1 de la loi du 30 septembre 1986, infligé à la Société d'exploitation d'un service d'information (SESI) une sanction de 200 000 euros en raison notamment des propos tenus, au cours de l'émission " Face à l'info ", diffusée sur le service de télévision CNEWS, le 29 septembre 2020, par M. B..., chroniqueur de cette émission. Celui-ci demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de cette décision.
3. Il résulte des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 521-1 du code de justice administrative que le prononcé de la suspension d'un acte administratif est subordonné notamment à une condition d'urgence. L'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.
4. Le requérant fait valoir, à ce titre, que l'exécution de la décision du CSA méconnaît le droit au respect de la présomption d'innocence ainsi que la liberté d'expression dès lors que, d'une part, la décision litigieuse affirme qu'il aurait commis le délit de provocation à la haine raciale alors qu'une enquête pénale est toujours en cours et, d'autre part, cette décision a pour objet ou pour effet de le priver d'accès à certains médias. Toutefois, ce faisant, M. B... ne fait valoir, en tout état de cause, aucune circonstance pertinente de nature à justifier que l'exécution de la décision, c'est à dire le paiement par la SESI de la somme qui a été infligée à cette société à titre de sanction de la méconnaissance de ses propres obligations, qui ne cause par elle-même aucun préjudice au requérant, soit suspendue.
5. Il résulte ce qui précède, en l'absence d'une situation d'urgence au sens des dispositions précitées de l'article L. 521-1 du code de justice administrative et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée, que la requête doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du même code.
O R D O N N E :
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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B....