Conseil d'État
N° 437006
ECLI:FR:CECHS:2020:437006.20201231
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre
Mme Marie Walazyc, rapporteur
Mme Marie Sirinelli, rapporteur public
SCP KRIVINE, VIAUD ; SCP FOUSSARD, FROGER, avocats
Lecture du jeudi 31 décembre 2020
Vu la procédure suivante :
Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision de la présidente du conseil de Paris du 21 octobre 2016 renouvelant son agrément d'assistante maternelle en tant qu'elle limite à deux le nombre d'enfants qu'elle est autorisée à accueillir, ainsi que la décision du 31 janvier 2017 rejetant son recours gracieux contre cette décision. Par un jugement n° 1705449 du 27 juillet 2018, le tribunal administratif de Paris a annulé ces décisions dans cette mesure et enjoint à la présidente du conseil de Paris de réexaminer la demande de Mme D... dans un délai de deux mois.
Par un arrêt n° 18PA03198 du 22 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par le département de Paris contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 décembre 2019, 23 mars 2020 et 13 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Ville de Paris demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel.
Vu les autres pièces du dossier :
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme A... C..., maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme A... E..., rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la Ville de Paris, et à la SCP Viaud, Krivine, avocat de Mme D... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme D... bénéficiait d'un agrément en qualité d'assistante maternelle délivré pour une durée de cinq ans à compter du 13 décembre 2011. Par une décision du 21 octobre 2016, la présidente du conseil de Paris a fait droit à la demande de Mme D... tendant au renouvellement de son agrément mais en limitant à deux, au lieu de trois précédemment, le nombre d'enfants qu'elle était autorisée à accueillir. Par un jugement du 27 juillet 2018, le tribunal administratif de Paris a annulé cette décision dans cette mesure, ainsi que la décision du 31 janvier 2017 rejetant le recours gracieux de Mme D..., et enjoint à la présidente du conseil de Paris de réexaminer la demande de l'intéressée. Par un arrêt du 22 octobre 2019 contre lequel la Ville de Paris se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par cette dernière contre ce jugement.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 421-4 du code de l'action sociale et des familles : " L'agrément de l'assistant maternel précise le nombre et l'âge des mineurs qu'il est autorisé à accueillir simultanément ainsi que les horaires de l'accueil (...) ". Aux termes de l'article D. 421-12 du même code : " L'agrément d'assistant maternel est accordé pour une durée de cinq ans, sauf dans les cas prévus à l'article D. 421-21. / La décision accordant l'agrément mentionne le nombre d'enfants que l'assistant maternel est autorisé à accueillir simultanément, ainsi que, le cas échéant, leur âge et les périodes durant lesquelles ils peuvent être accueillis. Elle précise notamment que la présence d'un enfant de moins de trois ans de l'assistant maternel rend indisponible une place d'accueil autorisée par l'agrément ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. En cas d'urgence, le président du conseil départemental peut suspendre l'agrément. Tant que l'agrément reste suspendu, aucun enfant ne peut être confié. / Toute décision de retrait de l'agrément, de suspension de l'agrément ou de modification de son contenu doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés. / La composition, les attributions et les modalités de fonctionnement de la commission présidée par le président du conseil départemental ou son représentant, mentionnée au troisième alinéa, sont définies par voie réglementaire (...) ". Aux termes de l'article R. 421-23 du même code : " Lorsque le président du conseil départemental envisage de retirer un agrément, d'y apporter une restriction ou de ne pas le renouveler, il saisit pour avis la commission consultative paritaire départementale mentionnée à l'article R. 421-27 en lui indiquant les motifs de la décision envisagée. / L'assistant maternel (...) concerné est informé, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission, (...) des motifs de la décision envisagée à son encontre, de la possibilité de consulter son dossier administratif et de présenter devant la commission ses observations écrites ou orales. La liste des représentants élus des assistants maternels et des assistants familiaux à la commission lui est communiquée dans les mêmes délais (...) ". L'article R. 421-27 de ce code précise que cette commission " comprend, en nombre égal, des membres représentant le département et des membres représentant les assistants maternels et les assistants familiaux agréés résidant dans le département. (...) ".
4. En premier lieu, il résulte de ces dispositions que le président du conseil départemental doit saisir la commission consultative paritaire départementale prévue à l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles lorsqu'il envisage de ne pas renouveler l'agrément d'un assistant maternel, y compris lorsqu'il envisage, de sa propre initiative, d'apporter une restriction au nouvel agrément par rapport à l'agrément dont l'intéressé bénéficiait jusque-là. Par suite, la cour administrative d'appel de Paris n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la décision du 21 octobre 2016 qui renouvelait l'agrément de Mme D... en qualité d'assistante maternelle en limitant à deux, au lieu de trois précédemment, le nombre d'enfants qu'elle était autorisée à accueillir aurait dû être précédée de la consultation de la commission consultative paritaire départementale.
5. En second lieu, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
6. En estimant que l'absence de consultation de la commission consultative paritaire départementale avait, en l'espèce, privé Mme D... d'une garantie, la cour administrative d'appel, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas dénaturé les pièces du dossier.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la Ville de Paris n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
8. Mme D... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Krivine, Viaud, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 1 500 euros à verser à cette SCP.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la Ville de Paris est rejeté.
Article 2 : La Ville de Paris versera à la SCP Krivine, Viaud, avocat de Mme D..., une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette SCP renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Ville de Paris et à Mme B... D....
Copie en sera adressée au ministre des solidarités et de la santé.
N° 437006
ECLI:FR:CECHS:2020:437006.20201231
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre
Mme Marie Walazyc, rapporteur
Mme Marie Sirinelli, rapporteur public
SCP KRIVINE, VIAUD ; SCP FOUSSARD, FROGER, avocats
Lecture du jeudi 31 décembre 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision de la présidente du conseil de Paris du 21 octobre 2016 renouvelant son agrément d'assistante maternelle en tant qu'elle limite à deux le nombre d'enfants qu'elle est autorisée à accueillir, ainsi que la décision du 31 janvier 2017 rejetant son recours gracieux contre cette décision. Par un jugement n° 1705449 du 27 juillet 2018, le tribunal administratif de Paris a annulé ces décisions dans cette mesure et enjoint à la présidente du conseil de Paris de réexaminer la demande de Mme D... dans un délai de deux mois.
Par un arrêt n° 18PA03198 du 22 octobre 2019, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par le département de Paris contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 décembre 2019, 23 mars 2020 et 13 novembre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Ville de Paris demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel.
Vu les autres pièces du dossier :
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme A... C..., maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme A... E..., rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la Ville de Paris, et à la SCP Viaud, Krivine, avocat de Mme D... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme D... bénéficiait d'un agrément en qualité d'assistante maternelle délivré pour une durée de cinq ans à compter du 13 décembre 2011. Par une décision du 21 octobre 2016, la présidente du conseil de Paris a fait droit à la demande de Mme D... tendant au renouvellement de son agrément mais en limitant à deux, au lieu de trois précédemment, le nombre d'enfants qu'elle était autorisée à accueillir. Par un jugement du 27 juillet 2018, le tribunal administratif de Paris a annulé cette décision dans cette mesure, ainsi que la décision du 31 janvier 2017 rejetant le recours gracieux de Mme D..., et enjoint à la présidente du conseil de Paris de réexaminer la demande de l'intéressée. Par un arrêt du 22 octobre 2019 contre lequel la Ville de Paris se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par cette dernière contre ce jugement.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 421-4 du code de l'action sociale et des familles : " L'agrément de l'assistant maternel précise le nombre et l'âge des mineurs qu'il est autorisé à accueillir simultanément ainsi que les horaires de l'accueil (...) ". Aux termes de l'article D. 421-12 du même code : " L'agrément d'assistant maternel est accordé pour une durée de cinq ans, sauf dans les cas prévus à l'article D. 421-21. / La décision accordant l'agrément mentionne le nombre d'enfants que l'assistant maternel est autorisé à accueillir simultanément, ainsi que, le cas échéant, leur âge et les périodes durant lesquelles ils peuvent être accueillis. Elle précise notamment que la présence d'un enfant de moins de trois ans de l'assistant maternel rend indisponible une place d'accueil autorisée par l'agrément ".
3. D'autre part, aux termes de l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. En cas d'urgence, le président du conseil départemental peut suspendre l'agrément. Tant que l'agrément reste suspendu, aucun enfant ne peut être confié. / Toute décision de retrait de l'agrément, de suspension de l'agrément ou de modification de son contenu doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés. / La composition, les attributions et les modalités de fonctionnement de la commission présidée par le président du conseil départemental ou son représentant, mentionnée au troisième alinéa, sont définies par voie réglementaire (...) ". Aux termes de l'article R. 421-23 du même code : " Lorsque le président du conseil départemental envisage de retirer un agrément, d'y apporter une restriction ou de ne pas le renouveler, il saisit pour avis la commission consultative paritaire départementale mentionnée à l'article R. 421-27 en lui indiquant les motifs de la décision envisagée. / L'assistant maternel (...) concerné est informé, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission, (...) des motifs de la décision envisagée à son encontre, de la possibilité de consulter son dossier administratif et de présenter devant la commission ses observations écrites ou orales. La liste des représentants élus des assistants maternels et des assistants familiaux à la commission lui est communiquée dans les mêmes délais (...) ". L'article R. 421-27 de ce code précise que cette commission " comprend, en nombre égal, des membres représentant le département et des membres représentant les assistants maternels et les assistants familiaux agréés résidant dans le département. (...) ".
4. En premier lieu, il résulte de ces dispositions que le président du conseil départemental doit saisir la commission consultative paritaire départementale prévue à l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles lorsqu'il envisage de ne pas renouveler l'agrément d'un assistant maternel, y compris lorsqu'il envisage, de sa propre initiative, d'apporter une restriction au nouvel agrément par rapport à l'agrément dont l'intéressé bénéficiait jusque-là. Par suite, la cour administrative d'appel de Paris n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la décision du 21 octobre 2016 qui renouvelait l'agrément de Mme D... en qualité d'assistante maternelle en limitant à deux, au lieu de trois précédemment, le nombre d'enfants qu'elle était autorisée à accueillir aurait dû être précédée de la consultation de la commission consultative paritaire départementale.
5. En second lieu, si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
6. En estimant que l'absence de consultation de la commission consultative paritaire départementale avait, en l'espèce, privé Mme D... d'une garantie, la cour administrative d'appel, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a pas dénaturé les pièces du dossier.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la Ville de Paris n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
8. Mme D... ayant obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que la SCP Krivine, Viaud, son avocat, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 1 500 euros à verser à cette SCP.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la Ville de Paris est rejeté.
Article 2 : La Ville de Paris versera à la SCP Krivine, Viaud, avocat de Mme D..., une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette SCP renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Ville de Paris et à Mme B... D....
Copie en sera adressée au ministre des solidarités et de la santé.