Conseil d'État
N° 427230
ECLI:FR:CECHS:2020:427230.20201113
Inédit au recueil Lebon
3ème chambre
M. Thomas Janicot, rapporteur
Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public
SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, avocats
Lecture du vendredi 13 novembre 2020
Vu la procédure suivante :
La société par actions simplifiée (SAS) ACILAM a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2007, ainsi que des intérêts correspondants. Par un jugement n° 1401738 du 20 décembre 2016, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 17LY00653 du 20 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la SAS ACILAM contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 21 janvier et 23 avril 2019 et les 8 et 16 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SAS ACILAM demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thomas Janicot, auditeur,
- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la société ACILAM ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Aciers Coste, filiale du groupe fiscalement intégré dont la société STPI, devenue en 2014 la SAS ACILAM, est la société mère, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a informé la société STPI des rectifications portant sur les résultats imposables de la société Aciers Coste et des conséquences financières en résultant pour elle, à savoir une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés assortie d'intérêts de retard au titre de l'exercice clos en 2007. Par un jugement du 20 décembre 2016, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de la SAS ACILAM, venant au droit de la société STPI, tendant à la décharge, en droits et intérêts, de cette imposition supplémentaire. La SAS ACILAM se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 20 novembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.
2. Aux termes de l'article 223 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 p. cent au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire des sociétés du groupe. / (...) / Les sociétés du groupe restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats qui peuvent être vérifiés dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales. La société mère supporte, au regard des droits et des pénalités visées à l'article 2 de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières, les conséquences des infractions commises par les sociétés du groupe. / (...) ". Aux termes du troisième alinéa de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure d'imposition en litige : " Lorsqu'en application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts la société mère d'un groupe est amenée à supporter les droits et pénalités résultant d'une procédure de rectification suivie à l'égard d'une ou de plusieurs sociétés du groupe, l'administration adresse à la société mère, préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement correspondant, un document l'informant du montant global par impôt des droits, des pénalités et des intérêts de retard dont elle est redevable. L'avis de mise en recouvrement, qui peut être alors émis sans délai, fait référence à ce document ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'alors même que la société mère d'un groupe fiscal intégré s'est constituée seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur le résultat d'ensemble déterminé par la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, celles-ci restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats et que c'est avec ces dernières que l'administration fiscale mène la procédure de vérification de comptabilité et de rectification, dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales. Les rectifications ainsi apportés aux résultats déclarés par les sociétés membres du groupe constituent cependant les éléments d'une procédure unique conduisant d'abord à la correction du résultat d'ensemble déclaré par la société mère du groupe, puis à la mise en recouvrement des rappels d'impôt établis à son nom sur les rehaussements de ce résultat d'ensemble. L'information qui doit être donnée à la société mère avant cette mise en recouvrement peut être réduite à une référence aux procédures de rectification qui ont été menées avec les sociétés membres du groupe et à un tableau chiffré qui en récapitule les conséquences sur le résultat d'ensemble, sans qu'il soit nécessaire de reprendre l'exposé de la nature, des motifs et des conséquences de chacun des chefs de rectification concernés.
4. En jugeant, pour écarter le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition était entachée d'irrégularité faute pour l'administration d'avoir indiqué à la société STPI les conséquences sur le résultat d'ensemble du groupe dont elle était la société mère des rectifications apportées aux résultats déclarés par sa filiale la société Acier Costes, que les documents communiqués par l'administration à la société STPI répondaient aux exigences imposées par les dispositions de l'article R. 256-1 et qu'aucun texte ou principe n'obligeait l'administration à détailler les conséquences de ces rectifications sur le résultat d'ensemble du groupe, la cour a commis une erreur de droit. La SAS ACILAM est fondée à demander pour ce motif, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SAS ACILAM de la somme de 3 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 20 novembre 2018 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : l'Etat versera à la société ACILAM la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société ACILAM et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
N° 427230
ECLI:FR:CECHS:2020:427230.20201113
Inédit au recueil Lebon
3ème chambre
M. Thomas Janicot, rapporteur
Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public
SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE, avocats
Lecture du vendredi 13 novembre 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La société par actions simplifiée (SAS) ACILAM a demandé au tribunal administratif de Clermont-Ferrand de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2007, ainsi que des intérêts correspondants. Par un jugement n° 1401738 du 20 décembre 2016, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 17LY00653 du 20 novembre 2018, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par la SAS ACILAM contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 21 janvier et 23 avril 2019 et les 8 et 16 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SAS ACILAM demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Thomas Janicot, auditeur,
- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la société ACILAM ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Aciers Coste, filiale du groupe fiscalement intégré dont la société STPI, devenue en 2014 la SAS ACILAM, est la société mère, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a informé la société STPI des rectifications portant sur les résultats imposables de la société Aciers Coste et des conséquences financières en résultant pour elle, à savoir une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés assortie d'intérêts de retard au titre de l'exercice clos en 2007. Par un jugement du 20 décembre 2016, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de la SAS ACILAM, venant au droit de la société STPI, tendant à la décharge, en droits et intérêts, de cette imposition supplémentaire. La SAS ACILAM se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 20 novembre 2018 par lequel la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.
2. Aux termes de l'article 223 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " Une société peut se constituer seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des résultats du groupe formé par elle-même et les sociétés dont elle détient 95 p. cent au moins du capital, de manière continue au cours de l'exercice, directement ou indirectement par l'intermédiaire des sociétés du groupe. / (...) / Les sociétés du groupe restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats qui peuvent être vérifiés dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales. La société mère supporte, au regard des droits et des pénalités visées à l'article 2 de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 modifiant les procédures fiscales et douanières, les conséquences des infractions commises par les sociétés du groupe. / (...) ". Aux termes du troisième alinéa de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la procédure d'imposition en litige : " Lorsqu'en application des dispositions de l'article 223 A du code général des impôts la société mère d'un groupe est amenée à supporter les droits et pénalités résultant d'une procédure de rectification suivie à l'égard d'une ou de plusieurs sociétés du groupe, l'administration adresse à la société mère, préalablement à la notification de l'avis de mise en recouvrement correspondant, un document l'informant du montant global par impôt des droits, des pénalités et des intérêts de retard dont elle est redevable. L'avis de mise en recouvrement, qui peut être alors émis sans délai, fait référence à ce document ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'alors même que la société mère d'un groupe fiscal intégré s'est constituée seule redevable de l'impôt sur les sociétés dû sur le résultat d'ensemble déterminé par la somme algébrique des résultats de chacune des sociétés du groupe, celles-ci restent soumises à l'obligation de déclarer leurs résultats et que c'est avec ces dernières que l'administration fiscale mène la procédure de vérification de comptabilité et de rectification, dans les conditions prévues par les articles L. 13, L. 47 et L. 57 du livre des procédures fiscales. Les rectifications ainsi apportés aux résultats déclarés par les sociétés membres du groupe constituent cependant les éléments d'une procédure unique conduisant d'abord à la correction du résultat d'ensemble déclaré par la société mère du groupe, puis à la mise en recouvrement des rappels d'impôt établis à son nom sur les rehaussements de ce résultat d'ensemble. L'information qui doit être donnée à la société mère avant cette mise en recouvrement peut être réduite à une référence aux procédures de rectification qui ont été menées avec les sociétés membres du groupe et à un tableau chiffré qui en récapitule les conséquences sur le résultat d'ensemble, sans qu'il soit nécessaire de reprendre l'exposé de la nature, des motifs et des conséquences de chacun des chefs de rectification concernés.
4. En jugeant, pour écarter le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition était entachée d'irrégularité faute pour l'administration d'avoir indiqué à la société STPI les conséquences sur le résultat d'ensemble du groupe dont elle était la société mère des rectifications apportées aux résultats déclarés par sa filiale la société Acier Costes, que les documents communiqués par l'administration à la société STPI répondaient aux exigences imposées par les dispositions de l'article R. 256-1 et qu'aucun texte ou principe n'obligeait l'administration à détailler les conséquences de ces rectifications sur le résultat d'ensemble du groupe, la cour a commis une erreur de droit. La SAS ACILAM est fondée à demander pour ce motif, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SAS ACILAM de la somme de 3 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt du 20 novembre 2018 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 3 : l'Etat versera à la société ACILAM la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société ACILAM et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.