Conseil d'État
N° 438062
ECLI:FR:CECHR:2020:438062.20200617
Inédit au recueil Lebon
6ème - 5ème chambres réunies
M. Bruno Bachini, rapporteur
M. Stéphane Hoynck, rapporteur public
SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP ZRIBI, TEXIER, avocats
Lecture du mercredi 17 juin 2020
Vu la procédure suivante :
La SNC Roybon Cottages, à l'appui de sa requête d'appel tendant à l'annulation du jugement du 16 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du préfet de l'Isère du 3 octobre 2014 lui délivrant une autorisation au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, a produit un mémoire, enregistré le 23 décembre 2019 au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel elle soulève une question prioritaire de constitutionnalité.
Par une ordonnance n° 18LY04149 du 28 janvier 2020, enregistrée le 28 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le président de la deuxième chambre de la cour administrative d'appel de Lyon, avant qu'il soit statué sur la requête d'appel de la SNC Roybon Cottages, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 23 de la loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019 portant création de l'office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations de chasseurs et renforçant la police de l'environnement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- l'article L. 211-1 du code de l'environnement modifié par l'article 23 de la loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019 ;
;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bruno Bachini, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la SNC Roybon Cottages et à la SCP Zribi et Texier, avocat de l'Union régionale fédération Rhône-Alpes de protection de la nature et autre ;
Considérant ce qui suit :
1. Il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
2. La SNC Roybon Cottages soutient, en premier lieu, que les dispositions de l'article 23 de la loi du 24 juillet 2019 portant création de l'office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations de chasseurs et renforçant la police de l'environnement, qui modifient les dispositions du 1° du I de l'article L. 211-1 du code de l'environnement relatives à la définition d'une zone humide, portent atteinte au droit à un procès équitable garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, faute de comporter des dispositions transitoires. Toutefois, ces dispositions, qui se bornent à modifier la définition de la notion de " zone humide " pour prévoir que les deux critères qu'elle comporte sont alternatifs et pas cumulatifs, n'ont pas un caractère rétroactif et n'ont pu, par elles-mêmes, porter atteinte au droit à un procès équitable. Si la requérante se prévaut de ce qu'il appartiendra aux juges du fond d'apprécier la conformité de l'autorisation que lui a délivrée le préfet de l'Isère avec cette nouvelle règle de fond introduite en cours d'instance, cette circonstance ne résulte pas, en tout état de cause, des dispositions contestées. Par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux.
3. La société requérante soutient, en second lieu, que les dispositions contestées méconnaissent les stipulations de l'article 7 de la Charte de l'environnement en ce qu'elles ont été adoptées sans la participation du public et sans que celui-ci ait été informé de leurs incidences sur l'environnement. Toutefois, le grief tiré de la méconnaissance de la procédure d'adoption d'une loi ne peut, en tout état de cause, être invoqué à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution.
4. Il résulte de tout ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SNC Roybon cottages, à l'association Union régionale fédération Rhône-Alpes de protection de la nature, à l'association " pour les Chambaran sans Center Parcs ", à la fédération de la Drôme pour la pêche et la protection du milieu aquatique, à l'association Union régionale des fédérations départementales des associations agrées de pêche, au département de l'Isère et à la ministre de la transition écologique et solidaire.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre ainsi qu'à la cour administrative d'appel de Lyon.
N° 438062
ECLI:FR:CECHR:2020:438062.20200617
Inédit au recueil Lebon
6ème - 5ème chambres réunies
M. Bruno Bachini, rapporteur
M. Stéphane Hoynck, rapporteur public
SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP ZRIBI, TEXIER, avocats
Lecture du mercredi 17 juin 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
La SNC Roybon Cottages, à l'appui de sa requête d'appel tendant à l'annulation du jugement du 16 juillet 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté du préfet de l'Isère du 3 octobre 2014 lui délivrant une autorisation au titre de l'article L. 214-3 du code de l'environnement, a produit un mémoire, enregistré le 23 décembre 2019 au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel elle soulève une question prioritaire de constitutionnalité.
Par une ordonnance n° 18LY04149 du 28 janvier 2020, enregistrée le 28 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le président de la deuxième chambre de la cour administrative d'appel de Lyon, avant qu'il soit statué sur la requête d'appel de la SNC Roybon Cottages, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 23 de la loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019 portant création de l'office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations de chasseurs et renforçant la police de l'environnement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- l'article L. 211-1 du code de l'environnement modifié par l'article 23 de la loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019 ;
;
- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Bruno Bachini, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Stéphane Hoynck, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat de la SNC Roybon Cottages et à la SCP Zribi et Texier, avocat de l'Union régionale fédération Rhône-Alpes de protection de la nature et autre ;
Considérant ce qui suit :
1. Il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
2. La SNC Roybon Cottages soutient, en premier lieu, que les dispositions de l'article 23 de la loi du 24 juillet 2019 portant création de l'office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations de chasseurs et renforçant la police de l'environnement, qui modifient les dispositions du 1° du I de l'article L. 211-1 du code de l'environnement relatives à la définition d'une zone humide, portent atteinte au droit à un procès équitable garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, faute de comporter des dispositions transitoires. Toutefois, ces dispositions, qui se bornent à modifier la définition de la notion de " zone humide " pour prévoir que les deux critères qu'elle comporte sont alternatifs et pas cumulatifs, n'ont pas un caractère rétroactif et n'ont pu, par elles-mêmes, porter atteinte au droit à un procès équitable. Si la requérante se prévaut de ce qu'il appartiendra aux juges du fond d'apprécier la conformité de l'autorisation que lui a délivrée le préfet de l'Isère avec cette nouvelle règle de fond introduite en cours d'instance, cette circonstance ne résulte pas, en tout état de cause, des dispositions contestées. Par suite, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux.
3. La société requérante soutient, en second lieu, que les dispositions contestées méconnaissent les stipulations de l'article 7 de la Charte de l'environnement en ce qu'elles ont été adoptées sans la participation du public et sans que celui-ci ait été informé de leurs incidences sur l'environnement. Toutefois, le grief tiré de la méconnaissance de la procédure d'adoption d'une loi ne peut, en tout état de cause, être invoqué à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution.
4. Il résulte de tout ce qui précède qu'il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par la cour administrative d'appel de Lyon.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la SNC Roybon cottages, à l'association Union régionale fédération Rhône-Alpes de protection de la nature, à l'association " pour les Chambaran sans Center Parcs ", à la fédération de la Drôme pour la pêche et la protection du milieu aquatique, à l'association Union régionale des fédérations départementales des associations agrées de pêche, au département de l'Isère et à la ministre de la transition écologique et solidaire.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre ainsi qu'à la cour administrative d'appel de Lyon.