Conseil d'État
N° 422482
ECLI:FR:CECHR:2020:422482.20200224
Inédit au recueil Lebon
3ème - 8ème chambres réunies
Mme Pauline Berne, rapporteur
Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public
SCP FOUSSARD, FROGER, avocats
Lecture du lundi 24 février 2020
Vu la procédure suivante :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du président du Conseil départemental de la Manche du 15 octobre 2015, par lequel il a été suspendu de ses fonctions à compter du lendemain, et celui du 23 décembre 2015, prononçant son exclusion temporaire de fonctions du 1er janvier au 31 décembre 2016. Par un jugement n° 1502456-1600391 du 13 juillet 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté ces demandes.
Par un arrêt n° 16NT03131 du 22 mai 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de M. C..., annulé la sanction d'exclusion temporaire de fonction d'un an prononcée le 23 décembre 2015 à l'encontre de M. C..., annulé le jugement du tribunal de Caen dans cette mesure et rejeté le surplus des conclusions de M. C... et du département de la Manche.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juillet et 16 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département de la Manche demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de M. C... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Pauline Berne, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat du département de la Manche ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 15 octobre 2015, le président du conseil départemental de la Manche a provisoirement suspendu de ses fonctions M. A... C..., agent polyvalent au collège de Saint-James, puis lui a infligé, par un arrêté du 23 décembre 2015, une sanction d'exclusion temporaire d'un an, après qu'il a fait l'objet d'une plainte pour harcèlement sexuel par une de ses collègues. Par un jugement du 13 juillet 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté les demandes d'annulation de ces deux arrêtés présentées par M. C.... Le département de la Manche se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 22 mai 2018 de la cour administrative d'appel de Nantes qui a, sur appel de M. C..., annulé la sanction d'exclusion temporaire en date du 23 décembre 2015.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 3221-3 du code général des collectivités territoriales : " Le président du conseil départemental est le chef des services du département. Il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, donner délégation de signature en toute matière aux responsables desdits services ".
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'arrêté du 4 novembre 2015 donnant délégation de signature à M. B..., directeur général des services du département de la Manche, ne vise expressément, au titre de ses attributions et compétences pour la gestion des agents du département, que la signature des " pièces relatives aux ordres de mission, à la gestion des congés, aux autorisations d'absences, aux états de frais de déplacement et aux heures supplémentaires " et ne comporte aucune référence aux sanctions disciplinaires. En outre, si cette même délégation attribue compétence à M. B... pour signer les actes, courriers, pièces et documents pour lesquels l'arrêté de délégation de signature du même jour relatif à la direction générale des services donne délégation de signature à divers responsables de services, ce dernier arrêté ne procède lui-même à aucune délégation de signature en matière de sanctions disciplinaires. A cet égard, la mention, par ce second arrêté, des " arrêtés et [...] contrats concernant le personnel " ne saurait, faute de précision en ce sens, être considérée comme visant les mesures disciplinaires. Dès lors, en jugeant que M. B... n'était pas habilité par ces deux arrêtés à signer des décisions prononçant des sanctions disciplinaires à l'encontre des agents du département, la cour administrative d'appel ne s'est méprise sur la portée d'aucun des deux arrêtés.
4. La cour ne s'est pas davantage méprise sur la portée des dispositions de l'arrêté donnant délégation de signature à M. B... l'habilitant à signer " / [...] plus généralement, en application des délibérations du conseil départemental et de sa commission permanente et dans le cadre de l'exercice des pouvoirs du président du conseil départemental, tous actes, courriers, pièces et documents concernant les affaires administratives et contentieuses du département de la Manche, à l'exception : / des rapports du conseil départemental et de sa commission permanente " en jugeant que ces dispositions ne visent que les actes que le président du conseil départemental prend en tant qu'organe exécutif de la collectivité, à l'exclusion des mesures, telles que les sanctions disciplinaires, par lesquelles il met en oeuvre ses compétences propres, notamment celles qu'il tient, en tant que chef des services du département, de l'article L. 3221-3 du code général des collectivités territoriales.
5. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi du département de la Manche doit être rejeté ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi du département de la Manche est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au département de la Manche et à M. A... C....
N° 422482
ECLI:FR:CECHR:2020:422482.20200224
Inédit au recueil Lebon
3ème - 8ème chambres réunies
Mme Pauline Berne, rapporteur
Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public
SCP FOUSSARD, FROGER, avocats
Lecture du lundi 24 février 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du président du Conseil départemental de la Manche du 15 octobre 2015, par lequel il a été suspendu de ses fonctions à compter du lendemain, et celui du 23 décembre 2015, prononçant son exclusion temporaire de fonctions du 1er janvier au 31 décembre 2016. Par un jugement n° 1502456-1600391 du 13 juillet 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté ces demandes.
Par un arrêt n° 16NT03131 du 22 mai 2018, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de M. C..., annulé la sanction d'exclusion temporaire de fonction d'un an prononcée le 23 décembre 2015 à l'encontre de M. C..., annulé le jugement du tribunal de Caen dans cette mesure et rejeté le surplus des conclusions de M. C... et du département de la Manche.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 juillet et 16 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le département de la Manche demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de M. C... la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Pauline Berne, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat du département de la Manche ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 15 octobre 2015, le président du conseil départemental de la Manche a provisoirement suspendu de ses fonctions M. A... C..., agent polyvalent au collège de Saint-James, puis lui a infligé, par un arrêté du 23 décembre 2015, une sanction d'exclusion temporaire d'un an, après qu'il a fait l'objet d'une plainte pour harcèlement sexuel par une de ses collègues. Par un jugement du 13 juillet 2016, le tribunal administratif de Caen a rejeté les demandes d'annulation de ces deux arrêtés présentées par M. C.... Le département de la Manche se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 22 mai 2018 de la cour administrative d'appel de Nantes qui a, sur appel de M. C..., annulé la sanction d'exclusion temporaire en date du 23 décembre 2015.
2. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 3221-3 du code général des collectivités territoriales : " Le président du conseil départemental est le chef des services du département. Il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, donner délégation de signature en toute matière aux responsables desdits services ".
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'arrêté du 4 novembre 2015 donnant délégation de signature à M. B..., directeur général des services du département de la Manche, ne vise expressément, au titre de ses attributions et compétences pour la gestion des agents du département, que la signature des " pièces relatives aux ordres de mission, à la gestion des congés, aux autorisations d'absences, aux états de frais de déplacement et aux heures supplémentaires " et ne comporte aucune référence aux sanctions disciplinaires. En outre, si cette même délégation attribue compétence à M. B... pour signer les actes, courriers, pièces et documents pour lesquels l'arrêté de délégation de signature du même jour relatif à la direction générale des services donne délégation de signature à divers responsables de services, ce dernier arrêté ne procède lui-même à aucune délégation de signature en matière de sanctions disciplinaires. A cet égard, la mention, par ce second arrêté, des " arrêtés et [...] contrats concernant le personnel " ne saurait, faute de précision en ce sens, être considérée comme visant les mesures disciplinaires. Dès lors, en jugeant que M. B... n'était pas habilité par ces deux arrêtés à signer des décisions prononçant des sanctions disciplinaires à l'encontre des agents du département, la cour administrative d'appel ne s'est méprise sur la portée d'aucun des deux arrêtés.
4. La cour ne s'est pas davantage méprise sur la portée des dispositions de l'arrêté donnant délégation de signature à M. B... l'habilitant à signer " / [...] plus généralement, en application des délibérations du conseil départemental et de sa commission permanente et dans le cadre de l'exercice des pouvoirs du président du conseil départemental, tous actes, courriers, pièces et documents concernant les affaires administratives et contentieuses du département de la Manche, à l'exception : / des rapports du conseil départemental et de sa commission permanente " en jugeant que ces dispositions ne visent que les actes que le président du conseil départemental prend en tant qu'organe exécutif de la collectivité, à l'exclusion des mesures, telles que les sanctions disciplinaires, par lesquelles il met en oeuvre ses compétences propres, notamment celles qu'il tient, en tant que chef des services du département, de l'article L. 3221-3 du code général des collectivités territoriales.
5. Il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi du département de la Manche doit être rejeté ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi du département de la Manche est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée au département de la Manche et à M. A... C....