Conseil d'État
N° 416966
ECLI:FR:CECHR:2020:416966.20200212
Inédit au recueil Lebon
4ème - 1ère chambres réunies
Mme Françoise Tomé, rapporteur
M. Raphaël Chambon, rapporteur public
SCP RICHARD, avocats
Lecture du mercredi 12 février 2020
Vu la procédure suivante :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de la Réunion d'annuler le titre de pension le concernant délivré le 5 octobre 2015, en tant qu'il ne prend pas en compte le bénéfice de campagne prévu par le c) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, au titre de son affectation à la Réunion. Par un jugement n° 1600191 du 29 septembre 2017, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire et deux nouveaux mémoires enregistrés le 29 décembre 2017, le 29 mars 2018 et le 24 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le décret n°2011-1429 du 3 novembre 2011 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Françoise Tomé, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de M. C... A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces soumises au juge du fond que M. B... A..., né à la Réunion en 1974, a effectué une carrière militaire ayant donné lieu à des affectations en métropole et, à compter du 23 juillet 2004, à la Réunion, jusqu'à ce qu'il soit admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er septembre 2015. Par le jugement attaqué du 29 septembre 2017, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté la demande de M. B... A... tendant à l'annulation du titre de pension le concernant délivré le 5 octobre 2015, en tant que ce titre de pension ne prend pas en compte le bénéfice de campagne prévu par le c) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, au titre de son affectation à La Réunion du 23 juillet 2004 au 31 août 2015.
2. Aux termes de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Aux services effectifs s'ajoutent, dans les conditions déterminées par un décret en Conseil d'Etat, les bonifications ci-après : (...) / c) Bénéfices de campagne dans le cas de services militaires, notamment pour services à la mer et outre-mer (...) ". Aux termes de l'article R. 14 du même code : " Les bénéfices de campagne prévus à l'article L. 12, c attribués en sus de la durée effective des services militaires sont décomptés selon les règles ci-après : (...) / C. - Totalité en sus ou moitié en sus de la durée effective, selon le degré d'insalubrité ou les conditions d'insécurité du territoire envisagé déterminés aux articles R. 15 à R. 17 le service accompli, soit à terre, soit à bord des bâtiments de l'Etat ou des bâtiments de commerce au compte de l'Etat : / 1° En Algérie, dans les territoires et pays d'outre-mer, Maroc et Tunisie, pour les militaires envoyés de la métropole, d'Algérie, d'un autre territoire ou pays d'outre-mer, Maroc et Tunisie. / Sont considérés à cet égard comme envoyés d'Europe les militaires français originaires d'Europe ou nés dans un territoire ou pays d'outre-mer, Maroc et Tunisie, de passage dans ces régions et n'y étant pas définitivement fixés (...) ".
3. Il résulte des dispositions de l'article R. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite citées ci-dessus qu'à l'exception des militaires qui reçoivent comme première affectation opérationnelle le territoire dans lequel ils sont installés, les militaires envoyés dans un des territoires qui y est mentionné pour y accomplir des services ont droit aux bénéfices de campagne, peu important qu'ils en soient originaires ou qu'à l'occasion de cette affectation, ils s'y fixent définitivement. Par suite, en relevant, pour apprécier si M. B... A... avait droit aux bénéfices de campagne prévus à ces dispositions, qu'il était originaire de La Réunion et qu'il devait être regardé comme s'y étant définitivement installé, le tribunal administratif de la Réunion a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. B... A... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... A... d'une somme de 3 000 euros.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 29 septembre 2017 du tribunal administratif de La Réunion est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de La Réunion.
Article 3 : L'Etat versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 3 000 euros à M. B... A....
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C... A..., au ministre de l'action et des comptes publics et à la ministre des armées.
N° 416966
ECLI:FR:CECHR:2020:416966.20200212
Inédit au recueil Lebon
4ème - 1ère chambres réunies
Mme Françoise Tomé, rapporteur
M. Raphaël Chambon, rapporteur public
SCP RICHARD, avocats
Lecture du mercredi 12 février 2020
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de la Réunion d'annuler le titre de pension le concernant délivré le 5 octobre 2015, en tant qu'il ne prend pas en compte le bénéfice de campagne prévu par le c) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, au titre de son affectation à la Réunion. Par un jugement n° 1600191 du 29 septembre 2017, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire et deux nouveaux mémoires enregistrés le 29 décembre 2017, le 29 mars 2018 et le 24 janvier 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- le décret n°2011-1429 du 3 novembre 2011 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Françoise Tomé, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Richard, avocat de M. C... A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces soumises au juge du fond que M. B... A..., né à la Réunion en 1974, a effectué une carrière militaire ayant donné lieu à des affectations en métropole et, à compter du 23 juillet 2004, à la Réunion, jusqu'à ce qu'il soit admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er septembre 2015. Par le jugement attaqué du 29 septembre 2017, le tribunal administratif de la Réunion a rejeté la demande de M. B... A... tendant à l'annulation du titre de pension le concernant délivré le 5 octobre 2015, en tant que ce titre de pension ne prend pas en compte le bénéfice de campagne prévu par le c) de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, au titre de son affectation à La Réunion du 23 juillet 2004 au 31 août 2015.
2. Aux termes de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Aux services effectifs s'ajoutent, dans les conditions déterminées par un décret en Conseil d'Etat, les bonifications ci-après : (...) / c) Bénéfices de campagne dans le cas de services militaires, notamment pour services à la mer et outre-mer (...) ". Aux termes de l'article R. 14 du même code : " Les bénéfices de campagne prévus à l'article L. 12, c attribués en sus de la durée effective des services militaires sont décomptés selon les règles ci-après : (...) / C. - Totalité en sus ou moitié en sus de la durée effective, selon le degré d'insalubrité ou les conditions d'insécurité du territoire envisagé déterminés aux articles R. 15 à R. 17 le service accompli, soit à terre, soit à bord des bâtiments de l'Etat ou des bâtiments de commerce au compte de l'Etat : / 1° En Algérie, dans les territoires et pays d'outre-mer, Maroc et Tunisie, pour les militaires envoyés de la métropole, d'Algérie, d'un autre territoire ou pays d'outre-mer, Maroc et Tunisie. / Sont considérés à cet égard comme envoyés d'Europe les militaires français originaires d'Europe ou nés dans un territoire ou pays d'outre-mer, Maroc et Tunisie, de passage dans ces régions et n'y étant pas définitivement fixés (...) ".
3. Il résulte des dispositions de l'article R. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite citées ci-dessus qu'à l'exception des militaires qui reçoivent comme première affectation opérationnelle le territoire dans lequel ils sont installés, les militaires envoyés dans un des territoires qui y est mentionné pour y accomplir des services ont droit aux bénéfices de campagne, peu important qu'ils en soient originaires ou qu'à l'occasion de cette affectation, ils s'y fixent définitivement. Par suite, en relevant, pour apprécier si M. B... A... avait droit aux bénéfices de campagne prévus à ces dispositions, qu'il était originaire de La Réunion et qu'il devait être regardé comme s'y étant définitivement installé, le tribunal administratif de la Réunion a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. B... A... est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. B... A... d'une somme de 3 000 euros.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 29 septembre 2017 du tribunal administratif de La Réunion est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de La Réunion.
Article 3 : L'Etat versera, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 3 000 euros à M. B... A....
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. C... A..., au ministre de l'action et des comptes publics et à la ministre des armées.