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Ariane Web: Conseil d'État 428362, lecture du 17 juillet 2019, ECLI:FR:CECHS:2019:428362.20190717

Décision n° 428362
17 juillet 2019
Conseil d'État

N° 428362
ECLI:FR:CECHS:2019:428362.20190717
Inédit au recueil Lebon
1ère chambre
M. Thibaut Félix, rapporteur
M. Charles Touboul, rapporteur public


Lecture du mercredi 17 juillet 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



Vu la procédure suivante :

M. I...E..., Mme H...D...et M. F...G...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées les 25 novembre et 2 décembre 2018 en vue de l'élection de trois des conseillers municipaux de Montbrun-des-Corbières (Aude). Par un jugement n° 1805853 du 29 janvier 2019, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur protestation.

Par une requête, enregistrée le 20 février 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M.E..., Mme D...et M. G...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les opérations électorales des 25 novembre et 2 décembre 2018.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- le code électoral ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Thibaut Félix, auditeur,

- les conclusions de M. Charles Touboul, rapporteur public ;



Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de la démission de plus d'un tiers des membres du conseil municipal de Montbrun-des-Corbières, le préfet de l'Aude a, par un arrêté du 12 octobre 2018, convoqué les électeurs de cette commune pour procéder à l'élection de trois conseillers municipaux les 25 novembre et 2 décembre 2018. A l'issue du premier tour des opérations électorales, ont été proclamés élus M. A...L...et M. K... B..., qui s'étaient présentés au titre de la liste " Union pour Montbrun ", avec respectivement 97 et 95 voix. A l'issue du second tour a été proclamé élu M. J...C..., qui s'était présenté au même titre. M.E..., Mme D...et M. G...relèvent appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur protestation.

2. Aux termes de l'article L. 48-2 du code électoral : " Il est interdit à tout candidat de porter à la connaissance du public un élément nouveau de polémique électorale à un moment tel que ses adversaires n'aient pas la possibilité d'y répondre utilement avant la fin de la campagne électorale ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 49 du même code : " A partir de la veille du scrutin à zéro heure, il est interdit de distribuer ou faire distribuer des bulletins, circulaires et autres documents ".

3. Il résulte de l'instruction que le 24 novembre 2018, veille du premier tour de scrutin, en fin de matinée, les candidats de la liste " Union pour Montbrun " ont fait déposer, dans les boîtes aux lettres de la plupart des habitants de la commune, un tract faisant le bilan des réalisations de la municipalité en place depuis 2014, annonçant certains projets nouveaux et comportant diverses insinuations à l'encontre des candidats de la liste adverse, accompagné de leur profession de foi et d'un bulletin de vote au nom de leur liste, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 49 du code électoral. Eu égard au contenu pour partie nouveau de ce document, auquel les candidats adverses n'ont pu réagir utilement, au caractère général de sa distribution et à la circonstance que le dernier candidat élu a recueilli un nombre de voix égal à la majorité absolue, nécessaire pour être élu au premier tour, cette diffusion a été de nature à altérer la sincérité du scrutin.

4. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M.E..., Mme D...et M. G...sont fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs conclusions tendant à l'annulation des opérations électorales qui se sont déroulées le 25 novembre 2018 ainsi que, par voie de conséquence, le 2 décembre 2018, en vue de l'élection des conseillers municipaux de la commune de Montbrun-des-Corbières.



D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 29 janvier 2019 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.
Article 2 : Les opérations électorales qui se sont déroulées les 25 novembre et 2 décembre 2018 sont annulées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. I...E..., représentant unique des demandeurs, à M. A... L...et au ministre de l'intérieur.