Conseil d'État
N° 403989
ECLI:FR:CECHR:2018:403989.20180207
Publié au recueil Lebon
4ème et 1ère chambres réunies
M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur
Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public
SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE ; SCP DIDIER, PINET, avocats
Lecture du mercredi 7 février 2018
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 novembre 2015 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a validé l'accord collectif du 16 novembre 2015 fixant le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Polymont IT Services. Par un jugement n° 1601032 du 12 avril 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 16PA01718 du 4 août 2016, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études, annulé ce jugement et cette décision.
Procédures devant le Conseil d'Etat :
1° Sous le n° 403989, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 4 octobre et 14 novembre 2016 et le 18 janvier 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Polymont IT Services et la société Laureau-Jeannerot, administrateur judiciaire de cette société, demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études ;
3°) de mettre à la charge de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 404077, par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 octobre 2016 et 8 août 2017, la ministre du travail de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le même arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la société Polymont IT Services et de la SCP Laureau-Jeannerot et à la SCP Didier, Pinet, avocat de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études.
1. Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que le tribunal de commerce de Paris a, par un jugement du 30 juillet 2015, placé la société Polymont IT Services en redressement judiciaire ; que la société Laureau-Jeannerot, administrateur judiciaire de cette société, et le syndicat CFDT ont signé, le 16 novembre 2015, un accord collectif fixant, en application des dispositions de l'article L. 1233-24-1 du code du travail, le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi ; que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a validé cet accord par une décision du 24 novembre 2015 ; que, par un jugement du 12 avril 2016, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études tendant à l'annulation de cette décision ; que la société Polymont IT Services et la société Laureau-Jeannerot, d'une part, et, d'autre part, la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 4 août 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement ainsi que la décision de validation ; qu'il y a lieu de joindre leurs pourvois pour statuer par une seule décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-24-1 du code du travail : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 (...) " ; que l'article L. 1233-24-2 du même code dispose, dans sa rédaction alors applicable : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 / Il peut également porter sur : (...) 1° Les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-63 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le plan de sauvegarde de l'emploi détermine les modalités de suivi de la mise en oeuvre effective des mesures contenues dans le plan de reclassement prévu à l'article L. 1233-61. / Ce suivi fait l'objet d'une consultation régulière et détaillée du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, dont les avis sont transmis à l'autorité administrative (...) " ; qu'enfin l'article L. 1233-57-2 du code dispose, dans sa rédaction alors applicable : " L'autorité administrative valide l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 dès lors qu'elle s'est assurée de : / 1° Sa conformité aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-3 ; / 2° La régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de l'instance de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1 ; / 3° La présence dans le plan de sauvegarde de l'emploi des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et L. 1233-63 ; / 4° La mise en oeuvre effective, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'omission, dans un accord collectif fixant un plan de sauvegarde de l'emploi, de stipulations qui doivent obligatoirement y figurer, telles que les stipulations relatives aux modalités du suivi de la mise en oeuvre des mesures contenues dans le plan de reclassement, fait obstacle à sa validation par l'autorité administrative ; qu'en revanche, ces dispositions n'imposent pas qu'un tel accord fixe des modalités particulières d'information et de consultation du comité d'entreprise ; que, notamment, elles n'imposent pas que l'accord fixe des modalités particulières pour la consultation obligatoire du comité d'entreprise sur le suivi de la mise en oeuvre des mesures contenues dans le plan de reclassement ; que, par suite, l'absence de telles stipulations est, par elle-même, insusceptible de faire obstacle à la validation de l'accord par l'autorité administrative ;
3. Considérant que, pour annuler la décision validant l'accord majoritaire fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Polymont IT Services, la cour administrative d'appel de Paris s'est fondée sur la circonstance que, s'il avait fixé les modalités du suivi de la mise en oeuvre des mesures contenues dans le plan de sauvegarde de l'emploi, cet accord n'avait, en revanche, pas fixé les modalités selon lesquelles le comité d'entreprise serait consulté sur ce suivi ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la cour a, ce faisant, commis une erreur de droit ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leurs pourvois, les requérantes sont fondées à demander l'annulation de l'arrêt qu'elles attaquent ;
4. Considérant que, le délai de trois mois imparti à la cour administrative d'appel pour statuer par les dispositions de l'article L. 1235-7-1 du code du travail étant expiré, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, en application des mêmes dispositions, de statuer immédiatement sur l'appel formé par la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études contre le jugement du 12 avril 2016 du tribunal administratif de Paris ;
5. Considérant que l'article L. 1233-57-2 du code du travail cité ci-dessus fixe, notamment par renvoi à l'article L. 1233-24-3 du même code, les dispositions du code du travail auxquelles un accord collectif fixant un plan de sauvegarde de l'emploi ne peut déroger ; que, sauf à ce qu'il soit entaché de nullité, un tel accord ne peut faire l'objet d'un refus de validation par l'autorité administrative que s'il méconnaît ces dispositions ;
6. Considérant, en premier lieu, que si les conditions légales qui s'imposent à un accord collectif majoritaire fixant un plan de sauvegarde de l'emploi sont, ainsi qu'il vient d'être dit, distinctes de celles qui s'imposent à une décision unilatérale de l'employeur fixant un tel plan, cette circonstance est, en tout état de cause et contrairement à ce que soutient la fédération requérante, sans incidence sur le droit d'exercer un recours juridictionnel effectif, garanti par les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 1233-24-2 du code du travail : " L'accord collectif (...) peut également porter sur: / (...) 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées " ; que la circonstance que, pour déterminer les catégories professionnelles concernées par le licenciement, un accord collectif fixant un plan de sauvegarde de l'emploi se fonde sur des considérations étrangères à celles qui permettent de regrouper les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou ait pour but de permettre le licenciement de salariés affectés sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée, n'est pas, par elle-même, de nature à caractériser une méconnaissance des dispositions de l'article L. 1233-57-2 du code du travail ; qu'elle ne saurait, par suite, faire obstacle à la validation de cet accord ; qu'il en va autrement si les stipulations qui déterminent les catégories professionnelles sont entachées de nullité, en raison notamment de ce qu'elles revêtiraient un caractère discriminatoire :
8. Considérant, par suite, que, contrairement à ce que soutient la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études, la circonstance que les catégories professionnelles définies par l'accord litigieux procèdent à des regroupements de salariés en fonction de leur ancienneté dans l'emploi, ou à raison de leur affectation dans certains services, n'est pas de nature à entacher d'illégalité la décision de validation attaquée ;
9. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de ce que la décision de validation est illégale au motif que l'accord n'a pas déterminé le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements manque en fait ;
10. Considérant, en quatrième lieu, que, pour écarter le moyen de la fédération requérante tiré de ce que l'accord collectif litigieux était entaché de nullité en raison d'un vice affectant le consentement donné à cet accord par l'un de ses signataires, le tribunal administratif a jugé, d'une part, que le vice du consentement allégué n'était pas établi et, d'autre part et au surplus, qu'un tel moyen ne pouvait être utilement soulevé par un syndicat non signataire de l'accord ; qu'à l'appui de son appel, la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études, sans remettre en cause l'absence de vice du consentement, se borne à soutenir que le second motif du tribunal est entaché d'erreur de droit ; que, par suite, son moyen ne peut qu'être écarté ;
11. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2 que le moyen tiré de ce que l'accord collectif qui fixe le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Polymont IT Services ne fixe pas les modalités selon lesquelles le comité d'entreprise est consulté sur le suivi de la mise en oeuvre des mesures de reclassement est inopérant ;
12. Considérant, enfin, que si la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études indique, en outre, dans ses mémoires d'appel, procéder " par évocation " à un " renvoi aux mémoires communiqués en première instance ", elle n'a ni repris dans ses mémoires d'appel les autres moyens soulevés en première instance, ni joint à sa requête la copie de ces mémoires de première instance ; qu'il n'y a, par suite, pas lieu d'examiner d'autres moyens ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 12 avril 2016, qui, en tout état de cause, n'est pas entaché de contradiction de motifs et ne s'est pas mépris sur la portée de ses écritures, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 24 novembre 2015 validant le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Polymont IT Services ;
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, de la société Polymont IT Services ou de la société Laureau-Jeannerot, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études la somme que demandent la société Polymont IT Services et la société Laureau-Jeannerot, tant en appel qu'en cassation, au titre de ces mêmes dispositions ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 4 août 2016 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études devant la cour administrative d'appel de Paris est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la société Polymont IT Services et de la société Laureau-Jeannerot, présentées, tant en appel qu'en cassation, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Polymont IT Services, à la société Laureau-Jeannerot, à la ministre du travail et à la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études.
N° 403989
ECLI:FR:CECHR:2018:403989.20180207
Publié au recueil Lebon
4ème et 1ère chambres réunies
M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur
Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public
SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE ; SCP DIDIER, PINET, avocats
Lecture du mercredi 7 février 2018
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 24 novembre 2015 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a validé l'accord collectif du 16 novembre 2015 fixant le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Polymont IT Services. Par un jugement n° 1601032 du 12 avril 2016, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 16PA01718 du 4 août 2016, la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études, annulé ce jugement et cette décision.
Procédures devant le Conseil d'Etat :
1° Sous le n° 403989, par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 4 octobre et 14 novembre 2016 et le 18 janvier 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Polymont IT Services et la société Laureau-Jeannerot, administrateur judiciaire de cette société, demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études ;
3°) de mettre à la charge de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études la somme de 8 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° Sous le n° 404077, par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 octobre 2016 et 8 août 2017, la ministre du travail de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le même arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la société Polymont IT Services et de la SCP Laureau-Jeannerot et à la SCP Didier, Pinet, avocat de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études.
1. Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers soumis aux juges du fond que le tribunal de commerce de Paris a, par un jugement du 30 juillet 2015, placé la société Polymont IT Services en redressement judiciaire ; que la société Laureau-Jeannerot, administrateur judiciaire de cette société, et le syndicat CFDT ont signé, le 16 novembre 2015, un accord collectif fixant, en application des dispositions de l'article L. 1233-24-1 du code du travail, le contenu d'un plan de sauvegarde de l'emploi ; que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a validé cet accord par une décision du 24 novembre 2015 ; que, par un jugement du 12 avril 2016, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études tendant à l'annulation de cette décision ; que la société Polymont IT Services et la société Laureau-Jeannerot, d'une part, et, d'autre part, la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 4 août 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a annulé ce jugement ainsi que la décision de validation ; qu'il y a lieu de joindre leurs pourvois pour statuer par une seule décision ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-24-1 du code du travail : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 (...) " ; que l'article L. 1233-24-2 du même code dispose, dans sa rédaction alors applicable : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 / Il peut également porter sur : (...) 1° Les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 1233-63 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le plan de sauvegarde de l'emploi détermine les modalités de suivi de la mise en oeuvre effective des mesures contenues dans le plan de reclassement prévu à l'article L. 1233-61. / Ce suivi fait l'objet d'une consultation régulière et détaillée du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, dont les avis sont transmis à l'autorité administrative (...) " ; qu'enfin l'article L. 1233-57-2 du code dispose, dans sa rédaction alors applicable : " L'autorité administrative valide l'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 dès lors qu'elle s'est assurée de : / 1° Sa conformité aux articles L. 1233-24-1 à L. 1233-24-3 ; / 2° La régularité de la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de l'instance de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1 ; / 3° La présence dans le plan de sauvegarde de l'emploi des mesures prévues aux articles L. 1233-61 et L. 1233-63 ; / 4° La mise en oeuvre effective, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'omission, dans un accord collectif fixant un plan de sauvegarde de l'emploi, de stipulations qui doivent obligatoirement y figurer, telles que les stipulations relatives aux modalités du suivi de la mise en oeuvre des mesures contenues dans le plan de reclassement, fait obstacle à sa validation par l'autorité administrative ; qu'en revanche, ces dispositions n'imposent pas qu'un tel accord fixe des modalités particulières d'information et de consultation du comité d'entreprise ; que, notamment, elles n'imposent pas que l'accord fixe des modalités particulières pour la consultation obligatoire du comité d'entreprise sur le suivi de la mise en oeuvre des mesures contenues dans le plan de reclassement ; que, par suite, l'absence de telles stipulations est, par elle-même, insusceptible de faire obstacle à la validation de l'accord par l'autorité administrative ;
3. Considérant que, pour annuler la décision validant l'accord majoritaire fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de la société Polymont IT Services, la cour administrative d'appel de Paris s'est fondée sur la circonstance que, s'il avait fixé les modalités du suivi de la mise en oeuvre des mesures contenues dans le plan de sauvegarde de l'emploi, cet accord n'avait, en revanche, pas fixé les modalités selon lesquelles le comité d'entreprise serait consulté sur ce suivi ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la cour a, ce faisant, commis une erreur de droit ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de leurs pourvois, les requérantes sont fondées à demander l'annulation de l'arrêt qu'elles attaquent ;
4. Considérant que, le délai de trois mois imparti à la cour administrative d'appel pour statuer par les dispositions de l'article L. 1235-7-1 du code du travail étant expiré, il y a lieu pour le Conseil d'Etat, en application des mêmes dispositions, de statuer immédiatement sur l'appel formé par la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études contre le jugement du 12 avril 2016 du tribunal administratif de Paris ;
5. Considérant que l'article L. 1233-57-2 du code du travail cité ci-dessus fixe, notamment par renvoi à l'article L. 1233-24-3 du même code, les dispositions du code du travail auxquelles un accord collectif fixant un plan de sauvegarde de l'emploi ne peut déroger ; que, sauf à ce qu'il soit entaché de nullité, un tel accord ne peut faire l'objet d'un refus de validation par l'autorité administrative que s'il méconnaît ces dispositions ;
6. Considérant, en premier lieu, que si les conditions légales qui s'imposent à un accord collectif majoritaire fixant un plan de sauvegarde de l'emploi sont, ainsi qu'il vient d'être dit, distinctes de celles qui s'imposent à une décision unilatérale de l'employeur fixant un tel plan, cette circonstance est, en tout état de cause et contrairement à ce que soutient la fédération requérante, sans incidence sur le droit d'exercer un recours juridictionnel effectif, garanti par les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 1233-24-2 du code du travail : " L'accord collectif (...) peut également porter sur: / (...) 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées " ; que la circonstance que, pour déterminer les catégories professionnelles concernées par le licenciement, un accord collectif fixant un plan de sauvegarde de l'emploi se fonde sur des considérations étrangères à celles qui permettent de regrouper les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou ait pour but de permettre le licenciement de salariés affectés sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée, n'est pas, par elle-même, de nature à caractériser une méconnaissance des dispositions de l'article L. 1233-57-2 du code du travail ; qu'elle ne saurait, par suite, faire obstacle à la validation de cet accord ; qu'il en va autrement si les stipulations qui déterminent les catégories professionnelles sont entachées de nullité, en raison notamment de ce qu'elles revêtiraient un caractère discriminatoire :
8. Considérant, par suite, que, contrairement à ce que soutient la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études, la circonstance que les catégories professionnelles définies par l'accord litigieux procèdent à des regroupements de salariés en fonction de leur ancienneté dans l'emploi, ou à raison de leur affectation dans certains services, n'est pas de nature à entacher d'illégalité la décision de validation attaquée ;
9. Considérant, en troisième lieu, que le moyen tiré de ce que la décision de validation est illégale au motif que l'accord n'a pas déterminé le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements manque en fait ;
10. Considérant, en quatrième lieu, que, pour écarter le moyen de la fédération requérante tiré de ce que l'accord collectif litigieux était entaché de nullité en raison d'un vice affectant le consentement donné à cet accord par l'un de ses signataires, le tribunal administratif a jugé, d'une part, que le vice du consentement allégué n'était pas établi et, d'autre part et au surplus, qu'un tel moyen ne pouvait être utilement soulevé par un syndicat non signataire de l'accord ; qu'à l'appui de son appel, la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études, sans remettre en cause l'absence de vice du consentement, se borne à soutenir que le second motif du tribunal est entaché d'erreur de droit ; que, par suite, son moyen ne peut qu'être écarté ;
11. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2 que le moyen tiré de ce que l'accord collectif qui fixe le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Polymont IT Services ne fixe pas les modalités selon lesquelles le comité d'entreprise est consulté sur le suivi de la mise en oeuvre des mesures de reclassement est inopérant ;
12. Considérant, enfin, que si la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études indique, en outre, dans ses mémoires d'appel, procéder " par évocation " à un " renvoi aux mémoires communiqués en première instance ", elle n'a ni repris dans ses mémoires d'appel les autres moyens soulevés en première instance, ni joint à sa requête la copie de ces mémoires de première instance ; qu'il n'y a, par suite, pas lieu d'examiner d'autres moyens ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la fédération CGT des sociétés et bureaux d'études n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 12 avril 2016, qui, en tout état de cause, n'est pas entaché de contradiction de motifs et ne s'est pas mépris sur la portée de ses écritures, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 24 novembre 2015 validant le plan de sauvegarde de l'emploi de la société Polymont IT Services ;
14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, de la société Polymont IT Services ou de la société Laureau-Jeannerot, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études la somme que demandent la société Polymont IT Services et la société Laureau-Jeannerot, tant en appel qu'en cassation, au titre de ces mêmes dispositions ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 4 août 2016 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études devant la cour administrative d'appel de Paris est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de la société Polymont IT Services et de la société Laureau-Jeannerot, présentées, tant en appel qu'en cassation, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Polymont IT Services, à la société Laureau-Jeannerot, à la ministre du travail et à la fédération CGT des sociétés et des bureaux d'études.