Conseil d'État
N° 387835
ECLI:FR:CEORD:2015:387835.20150210
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
Lecture du mardi 10 février 2015
Vu, 1°, sous le n° 387835, la requête, enregistrée le 10 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'association de Lutte pour un Football Populaire, représentée par son président, dont le siège social est situé 29 rue comte A...à Saint-Etienne (42100) ; l'association requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1501915/9 du 10 février 2015 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 6 février 2015 par lequel le préfet de police a interdit la circulation et le stationnement des personnes se prévalant de la qualité de supporters du club de l'AS Saint-Etienne ou se comportant comme tel et domiciliés dans les communes des départements de la Loire, du Rhône, de la Drôme, de l'Ardèche, de la Haute-Loire, du Puy de Dôme, de l'Allier, de la Saône et Loire et de la Loire, aux environs du stade Jean Bouin du 10 février 2015 midi au même jour minuit ;
2°) réglant l'affaire au titre de la procédure de référé, de faire droit à sa demande de première instance ;
elle soutient que, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge dans l'ordonnance attaquée, l'arrêté du préfet de police repose, en tant qu'il vise à prévenir un trouble à l'ordre public, sur une inexacte appréciation des faits et sur une erreur de droit ;
Vu, 2°, sous le n° 387836, la requête, enregistrée le 10 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'association Magic Fans 1991, dont le siège social est situé zone industrielle du puits Camille, à Saint-Etienne (42000) ; l'association requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1501915/9 du 10 février 2015 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 6 février 2015 par lequel le préfet de police a interdit la circulation et le stationnement des personnes se prévalant de la qualité de supporters du club de l'AS Saint-Etienne ou se comportant comme tel et domiciliés dans les communes des départements de la Loire, du Rhône, de la Drôme, de l'Ardèche, de la Haute-Loire, du Puy de Dôme, de l'Allier, de la Saône et Loire et de la Loire, aux environs du stade Jean Bouin du 10 février 2015 midi au même jour minuit ;
2°) réglant l'affaire au titre de la procédure de référé, de faire droit à sa demande de première instance ;
elle invoque les mêmes moyens que ceux présentés dans la requête n° 387835 ;
Vu l'arrêté dont la suspension de l'exécution est demandée ;
Vu les ordonnances attaquées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code du sport ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, l'association de Lutte pour un Football Populaire et l'association Magic Fans 1991, d'autre part, le ministre de l'intérieur ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 10 février 2015 à 14 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Nicolaÿ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'association de Lutte pour un Football Populaire et de l'association Magic Fans 1991 ;
- le représentant de l'association de Lutte pour un Football Populaire ;
- le représentant de l'association Magic Fans 1991 ;
- les représentants du ministre de l'intérieur qui conclut au rejet des requêtes qui, vu l'urgence, lui ont été communiquées à cette occasion ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;
1. Considérant que les requêtes sont dirigées contre deux ordonnances rejetant la demande de suspension de l'exécution du même arrêté ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule ordonnance ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 332-16-2 du code du sport : " Le représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, le préfet de police peut, par arrêté, restreindre la liberté d'aller et de venir des personnes se prévalant de la qualité de supporter d'une équipe ou se comportant comme tel sur les lieux d'une manifestation sportive et dont la présence est susceptible d'occasionner des troubles graves pour l'ordre public. L'arrêté énonce la durée, limitée dans le temps, de la mesure, les circonstances précises de fait et de lieu qui la motivent, ainsi que le territoire sur lequel elle s'applique " ; que le préfet de police a pris, sur le fondement de ces dispositions, le 6 février 2015, un arrêté qui interdit la circulation et le stationnement des personnes se prévalant de la qualité de supporters du club de l'AS Saint-Etienne ou se comportant comme tel et domiciliés dans les communes des départements de la Loire, du Rhône, de la Drôme, de l'Ardèche, de la Haute-Loire, du Puy de Dôme, de l'Allier, de la Saône et Loire et de la Loire, aux environs du stade Jean Bouin du 10 février 2015 midi au même jour minuit ; que les associations requérantes relèvent appel des ordonnances du 10 février 2015 par lesquelles le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions tendant à la suspension de l'exécution de cet arrêté qu'elles avaient présentées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ;
4. Considérant qu'il appartient aux autorités de l'Etat d'assurer la préservation de l'ordre public et sa conciliation avec les libertés fondamentales que sont notamment la liberté d'aller et venir, la liberté de réunion et la liberté d'expression ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lors de rencontres sportives impliquant l'AS Saint-Etienne, des incidents sont survenus à plusieurs reprises ; qu'ainsi, en 2013 et en 2014, des échauffourées, entraînant des blessures et des dégradations de biens, sont survenues entre supporters des équipes se rencontrant, ainsi qu'entre supporters et forces de l'ordre ; que si la sécurité à l'intérieur du stade incombe au premier chef aux clubs sportifs et si le stade Jean Bouin a été homologué pour accueillir le match du 10 février 2015 par la Fédération française de football, il n'en résulte pas moins de l'instruction que sa configuration, notamment en l'absence de grilles séparatives entre les tribunes et de circuits permettant d'organiser les déplacements des spectateurs de manière à éviter tout contact direct entre eux, n'est pas appropriée à l'encadrement de plusieurs centaines de supporters et constitue, dès lors, une circonstance renchérissant le risque de trouble à l'ordre public ; que, dans ces conditions, et alors même que l'AS Saint-Etienne et le Red Star ne se sont pas rencontrés depuis 2000 et qu'il n'est fait état d'aucune inimitié particulière entre ces deux clubs ou leurs supporters, il ne résulte pas manifestement de l'instruction que l'interdiction litigieuse ne serait pas nécessaire à la préservation de l'ordre public ; qu'il ne résulte pas davantage manifestement de l'instruction que, dans les circonstances de l'espèce, des mesures moins contraignantes que l'interdiction litigieuse, dont le champ d'application est limité aux supporters en provenance des huit départements dont la majorité d'entre eux est originaire, seraient de nature à éviter la survenance, aux environs du stade Jean Bouin, des troubles graves à l'ordre public qu'elle a pour but de prévenir ; qu'ainsi que l'a jugé à bon droit le premier juge, l'interdiction litigieuse ne révèle aucune atteinte manifestement illégale à la liberté d'aller et venir, à la liberté d'association, à la liberté de réunion et à la liberté d'expression ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association Lutte pour un Football Populaire et l'association Magic Fans 1991 ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par les ordonnances attaquées, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : Les requêtes de l'association Lutte pour un Football Populaire et de l'association Magic Fans 1991 sont rejetées.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association de Lutte pour un Football Populaire, à l'association Magic Fans 1991 et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de police.
N° 387835
ECLI:FR:CEORD:2015:387835.20150210
Inédit au recueil Lebon
Juge des référés
Lecture du mardi 10 février 2015
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu, 1°, sous le n° 387835, la requête, enregistrée le 10 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'association de Lutte pour un Football Populaire, représentée par son président, dont le siège social est situé 29 rue comte A...à Saint-Etienne (42100) ; l'association requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1501915/9 du 10 février 2015 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 6 février 2015 par lequel le préfet de police a interdit la circulation et le stationnement des personnes se prévalant de la qualité de supporters du club de l'AS Saint-Etienne ou se comportant comme tel et domiciliés dans les communes des départements de la Loire, du Rhône, de la Drôme, de l'Ardèche, de la Haute-Loire, du Puy de Dôme, de l'Allier, de la Saône et Loire et de la Loire, aux environs du stade Jean Bouin du 10 février 2015 midi au même jour minuit ;
2°) réglant l'affaire au titre de la procédure de référé, de faire droit à sa demande de première instance ;
elle soutient que, contrairement à ce qu'a estimé le premier juge dans l'ordonnance attaquée, l'arrêté du préfet de police repose, en tant qu'il vise à prévenir un trouble à l'ordre public, sur une inexacte appréciation des faits et sur une erreur de droit ;
Vu, 2°, sous le n° 387836, la requête, enregistrée le 10 février 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée par l'association Magic Fans 1991, dont le siège social est situé zone industrielle du puits Camille, à Saint-Etienne (42000) ; l'association requérante demande au juge des référés du Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 1501915/9 du 10 février 2015 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Paris, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 6 février 2015 par lequel le préfet de police a interdit la circulation et le stationnement des personnes se prévalant de la qualité de supporters du club de l'AS Saint-Etienne ou se comportant comme tel et domiciliés dans les communes des départements de la Loire, du Rhône, de la Drôme, de l'Ardèche, de la Haute-Loire, du Puy de Dôme, de l'Allier, de la Saône et Loire et de la Loire, aux environs du stade Jean Bouin du 10 février 2015 midi au même jour minuit ;
2°) réglant l'affaire au titre de la procédure de référé, de faire droit à sa demande de première instance ;
elle invoque les mêmes moyens que ceux présentés dans la requête n° 387835 ;
Vu l'arrêté dont la suspension de l'exécution est demandée ;
Vu les ordonnances attaquées ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code du sport ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, l'association de Lutte pour un Football Populaire et l'association Magic Fans 1991, d'autre part, le ministre de l'intérieur ;
Vu le procès-verbal de l'audience publique du 10 février 2015 à 14 heures au cours de laquelle ont été entendus :
- Me Nicolaÿ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de l'association de Lutte pour un Football Populaire et de l'association Magic Fans 1991 ;
- le représentant de l'association de Lutte pour un Football Populaire ;
- le représentant de l'association Magic Fans 1991 ;
- les représentants du ministre de l'intérieur qui conclut au rejet des requêtes qui, vu l'urgence, lui ont été communiquées à cette occasion ;
et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;
1. Considérant que les requêtes sont dirigées contre deux ordonnances rejetant la demande de suspension de l'exécution du même arrêté ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule ordonnance ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures " ;
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 332-16-2 du code du sport : " Le représentant de l'Etat dans le département ou, à Paris, le préfet de police peut, par arrêté, restreindre la liberté d'aller et de venir des personnes se prévalant de la qualité de supporter d'une équipe ou se comportant comme tel sur les lieux d'une manifestation sportive et dont la présence est susceptible d'occasionner des troubles graves pour l'ordre public. L'arrêté énonce la durée, limitée dans le temps, de la mesure, les circonstances précises de fait et de lieu qui la motivent, ainsi que le territoire sur lequel elle s'applique " ; que le préfet de police a pris, sur le fondement de ces dispositions, le 6 février 2015, un arrêté qui interdit la circulation et le stationnement des personnes se prévalant de la qualité de supporters du club de l'AS Saint-Etienne ou se comportant comme tel et domiciliés dans les communes des départements de la Loire, du Rhône, de la Drôme, de l'Ardèche, de la Haute-Loire, du Puy de Dôme, de l'Allier, de la Saône et Loire et de la Loire, aux environs du stade Jean Bouin du 10 février 2015 midi au même jour minuit ; que les associations requérantes relèvent appel des ordonnances du 10 février 2015 par lesquelles le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté les conclusions tendant à la suspension de l'exécution de cet arrêté qu'elles avaient présentées sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative ;
4. Considérant qu'il appartient aux autorités de l'Etat d'assurer la préservation de l'ordre public et sa conciliation avec les libertés fondamentales que sont notamment la liberté d'aller et venir, la liberté de réunion et la liberté d'expression ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, lors de rencontres sportives impliquant l'AS Saint-Etienne, des incidents sont survenus à plusieurs reprises ; qu'ainsi, en 2013 et en 2014, des échauffourées, entraînant des blessures et des dégradations de biens, sont survenues entre supporters des équipes se rencontrant, ainsi qu'entre supporters et forces de l'ordre ; que si la sécurité à l'intérieur du stade incombe au premier chef aux clubs sportifs et si le stade Jean Bouin a été homologué pour accueillir le match du 10 février 2015 par la Fédération française de football, il n'en résulte pas moins de l'instruction que sa configuration, notamment en l'absence de grilles séparatives entre les tribunes et de circuits permettant d'organiser les déplacements des spectateurs de manière à éviter tout contact direct entre eux, n'est pas appropriée à l'encadrement de plusieurs centaines de supporters et constitue, dès lors, une circonstance renchérissant le risque de trouble à l'ordre public ; que, dans ces conditions, et alors même que l'AS Saint-Etienne et le Red Star ne se sont pas rencontrés depuis 2000 et qu'il n'est fait état d'aucune inimitié particulière entre ces deux clubs ou leurs supporters, il ne résulte pas manifestement de l'instruction que l'interdiction litigieuse ne serait pas nécessaire à la préservation de l'ordre public ; qu'il ne résulte pas davantage manifestement de l'instruction que, dans les circonstances de l'espèce, des mesures moins contraignantes que l'interdiction litigieuse, dont le champ d'application est limité aux supporters en provenance des huit départements dont la majorité d'entre eux est originaire, seraient de nature à éviter la survenance, aux environs du stade Jean Bouin, des troubles graves à l'ordre public qu'elle a pour but de prévenir ; qu'ainsi que l'a jugé à bon droit le premier juge, l'interdiction litigieuse ne révèle aucune atteinte manifestement illégale à la liberté d'aller et venir, à la liberté d'association, à la liberté de réunion et à la liberté d'expression ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'association Lutte pour un Football Populaire et l'association Magic Fans 1991 ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par les ordonnances attaquées, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande ;
O R D O N N E :
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Article 1er : Les requêtes de l'association Lutte pour un Football Populaire et de l'association Magic Fans 1991 sont rejetées.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association de Lutte pour un Football Populaire, à l'association Magic Fans 1991 et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de police.