Conseil d'État
N° 380743
ECLI:FR:CESJS:2014:380743.20140723
Inédit au recueil Lebon
6ème sous-section jugeant seule
Mme Sophie Roussel, rapporteur
M. Xavier de Lesquen, rapporteur public
Lecture du mercredi 23 juillet 2014
Vu 1°, sous le n° 380743, l'arrêt n° 192-694/695-1 du 22 mai 2014, enregistré le 28 mai 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel la Cour de discipline budgétaire et financière, avant de statuer sur deux déférés de la Cour des comptes du 9 décembre 2010 portant sur la gestion, d'une part, de l'établissement public de financement et de restructuration (EPFR) et, d'autre part, du consortium de réalisation (CDR), a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3, L. 314-4 et L. 314-18 du code des juridictions financières ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 mars 2014 au greffe de la Cour de discipline budgétaire et financière, présenté par M.B..., demeurant..., en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu 2°, sous le n° 380744, le même arrêt de la Cour de discipline budgétaire et financière du 22 mai 2014 ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 avril 2014 au greffe de la Cour de discipline budgétaire et financière, présenté par M.A..., demeurant..., en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
....................................................................................
Vu 3°, sous le n° 380745, le même arrêt de la Cour de discipline budgétaire et financière du 22 mai 2014 ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2014 au greffe de la Cour de discipline budgétaire et financière, présenté par M.C..., demeurant..., en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu le code des juridictions financières, notamment les articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3, L. 314-4 et L. 314-18 ;
Vu le décret n° 2005-677 du 17 juin 2005 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sophie Roussel, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;
1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
2. Considérant que les questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par MM.B..., A...et C...ont été transmises au Conseil d'Etat par un unique arrêt et portent sur les mêmes dispositions du code des juridictions financières ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
3. Considérant que les requérants soutiennent que les articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5 et L. 314-3, relatifs à la composition et à l'organisation de la Cour de discipline budgétaire et financière, méconnaissent les principes d'indépendance et d'impartialité des juridictions, résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; que les articles L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1 et L. 313-11, qui définissent les infractions réprimées par la Cour et le montant des sanctions encourues, méconnaissent, d'une part, le principe de légalité des délits et des peines, d'autre part, les principes de proportionnalité et de nécessité des peines ainsi que la règle " non bis in idem ", résultant de l'article 8 de la Déclaration de 1789 ; que l'article L. 314-4 méconnaît les droits de la défense, le principe du contradictoire et le droit à un procès équitable, protégés par l'article 16 de la Déclaration de 1789, ainsi que la présomption d'innocence garantie par l'article 9 de cette Déclaration ; que l'article L. 314-4 porte par ailleurs atteinte au secret de l'instruction ; que l'article L. 314-18 méconnaît le principe de nécessité des peines ainsi que la règle " non bis in idem " résultant de l'article 8 de la Déclaration de 1789 et porte atteinte au secret de l'instruction ;
4. Considérant que les articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3, L. 314-4 et L. 314-18 du code des juridictions financières sont applicables aux litiges dont la Cour de discipline budgétaire et financière est saisie ; que ces dispositions n'ont pas été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce que ces dispositions portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au regard des exigences de la garantie des droits telles qu'elles découlent de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité invoquées ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La question de la conformité à la Constitution des articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3, L. 314-4 et L. 314-18 du code des juridictions financières est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM.B..., A...etC....
Copie en sera adressée au Premier ministre, à la garde des sceaux, ministre de la justice, au ministre des finances et des comptes publics, au Parquet général près la Cour de discipline budgétaire et financière ainsi qu'à la Cour de discipline budgétaire et financière.
N° 380743
ECLI:FR:CESJS:2014:380743.20140723
Inédit au recueil Lebon
6ème sous-section jugeant seule
Mme Sophie Roussel, rapporteur
M. Xavier de Lesquen, rapporteur public
Lecture du mercredi 23 juillet 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu 1°, sous le n° 380743, l'arrêt n° 192-694/695-1 du 22 mai 2014, enregistré le 28 mai 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par lequel la Cour de discipline budgétaire et financière, avant de statuer sur deux déférés de la Cour des comptes du 9 décembre 2010 portant sur la gestion, d'une part, de l'établissement public de financement et de restructuration (EPFR) et, d'autre part, du consortium de réalisation (CDR), a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3, L. 314-4 et L. 314-18 du code des juridictions financières ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 mars 2014 au greffe de la Cour de discipline budgétaire et financière, présenté par M.B..., demeurant..., en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu 2°, sous le n° 380744, le même arrêt de la Cour de discipline budgétaire et financière du 22 mai 2014 ;
Vu le mémoire, enregistré le 24 avril 2014 au greffe de la Cour de discipline budgétaire et financière, présenté par M.A..., demeurant..., en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
....................................................................................
Vu 3°, sous le n° 380745, le même arrêt de la Cour de discipline budgétaire et financière du 22 mai 2014 ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2014 au greffe de la Cour de discipline budgétaire et financière, présenté par M.C..., demeurant..., en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
Vu le code des juridictions financières, notamment les articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3, L. 314-4 et L. 314-18 ;
Vu le décret n° 2005-677 du 17 juin 2005 ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sophie Roussel, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Xavier de Lesquen, rapporteur public ;
1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;
2. Considérant que les questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par MM.B..., A...et C...ont été transmises au Conseil d'Etat par un unique arrêt et portent sur les mêmes dispositions du code des juridictions financières ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
3. Considérant que les requérants soutiennent que les articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5 et L. 314-3, relatifs à la composition et à l'organisation de la Cour de discipline budgétaire et financière, méconnaissent les principes d'indépendance et d'impartialité des juridictions, résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; que les articles L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1 et L. 313-11, qui définissent les infractions réprimées par la Cour et le montant des sanctions encourues, méconnaissent, d'une part, le principe de légalité des délits et des peines, d'autre part, les principes de proportionnalité et de nécessité des peines ainsi que la règle " non bis in idem ", résultant de l'article 8 de la Déclaration de 1789 ; que l'article L. 314-4 méconnaît les droits de la défense, le principe du contradictoire et le droit à un procès équitable, protégés par l'article 16 de la Déclaration de 1789, ainsi que la présomption d'innocence garantie par l'article 9 de cette Déclaration ; que l'article L. 314-4 porte par ailleurs atteinte au secret de l'instruction ; que l'article L. 314-18 méconnaît le principe de nécessité des peines ainsi que la règle " non bis in idem " résultant de l'article 8 de la Déclaration de 1789 et porte atteinte au secret de l'instruction ;
4. Considérant que les articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3, L. 314-4 et L. 314-18 du code des juridictions financières sont applicables aux litiges dont la Cour de discipline budgétaire et financière est saisie ; que ces dispositions n'ont pas été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce que ces dispositions portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au regard des exigences de la garantie des droits telles qu'elles découlent de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité invoquées ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La question de la conformité à la Constitution des articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3, L. 314-4 et L. 314-18 du code des juridictions financières est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à MM.B..., A...etC....
Copie en sera adressée au Premier ministre, à la garde des sceaux, ministre de la justice, au ministre des finances et des comptes publics, au Parquet général près la Cour de discipline budgétaire et financière ainsi qu'à la Cour de discipline budgétaire et financière.