Conseil d'État
N° 359884
ECLI:FR:CESJS:2014:359884.20140625
Inédit au recueil Lebon
5ème SSJS
M. Marc Lambron, rapporteur
Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public
SCP VINCENT, OHL ; BROUCHOT ; SCP PIWNICA, MOLINIE, avocats
Lecture du mercredi 25 juin 2014
Vu l'ordonnance en date du 23 mai 2012, enregistrée le 1er juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à cette cour par la SARL Uzès Location et M. B... C... ;
Vu la requête, enregistrée le 4 avril 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et le mémoire complémentaire, enregistré le 13 janvier 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SARL Uzès Location, dont le siège est 909, chemin du Redounet à Uzès (30700), représentée par son gérant en exercice, et pour M. B... C..., demeurant ... ; la société Uzès Location et M. C...demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 0903602 du 17 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Nîmes, saisi à leur demande de la question préjudicielle soulevée par le tribunal de grande instance de Nîmes dans son ordonnance du 20 novembre 2009, a rejeté leurs conclusions tendant à ce que la juridiction administrative déclare la commune de Collias responsable de l'accident survenu à M. C...alors qu'il conduisait un véhicule appartenant à la société Uzès Location ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Collias le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la voirie routière ;
Vu le code de la route ;
Vu l'arrêté du 7 juin 1977 relatif à la signalisation des routes et des autoroutes ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Marc Lambron, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SARL Uzès Location et de M. C..., à la SCP Vincent, Ohl, avocat de la commune de Collias et à Me Brouchot, avocat des consortsA... ;
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans la nuit du 19 au 20 janvier 2008, à Collias (Gard), un véhicule conduit par M. C... et appartenant à la société Uzès Location, circulant sur la voirie communale, a heurté un pont surplombant la voie et provoqué l'effondrement partiel de cet ouvrage privé appartenant aux consortsA... ; qu'ayant dû réaliser des travaux de confortement, la commune a recherché la responsabilité du conducteur et de l'entreprise propriétaire du véhicule devant le tribunal de grande instance de Nîmes ; que, par une ordonnance du 20 novembre 2009 confirmée par la cour d'appel de Nîmes le 1er juillet 2010, le juge de la mise en état a admis la compétence de la juridiction judiciaire mais estimé que la solution du litige dépendait de l'appréciation de la responsabilité de la collectivité publique et invité les parties à saisir le juge administratif d'une question préjudicielle ; que M. C... et la société Uzès Location ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de déclarer que la responsabilité de la commune de Collias était engagée au titre des conséquences de l'accident ; qu'ils relèvent appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté cette demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-2 du code de la voirie routière en vigueur : " Le maire exerce sur la voirie communale les attributions mentionnées au 1° et 5° de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales " ; qu'aux termes de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé : (...) 5°/ De pourvoir aux mesures relatives à la voirie communale (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 141-2 du code de la voirie routière : " Sous les ouvrages d'art qui franchissent une voie communale, un tirant d'air d'au moins 4,30 mètres doit être réservé sur toute la largeur de la chaussée " ; qu'aux termes de l'article R. 411-25 du même code : " Le ministre chargé de la voirie nationale et le ministre de l'intérieur fixent par arrêté conjoint publié au Journal officiel de la République française les conditions dans lesquelles est établie la signalisation routière pour signifier une prescription de l'autorité investie du pouvoir de police ou donner une information aux usagers " ; qu'en application de l'article 61 de l'instruction interministérielle sur la signalisation routière, qui figure dans la quatrième partie, approuvée par l'arrêté susvisé du 7 juin 1977, de cette instruction, tous les passages où la hauteur libre au-dessus d'un point quelconque de la chaussée est inférieure à 4,30 mètres doivent être signalés ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que la hauteur libre sous le pont appartenant aux consorts A...est comprise entre 2,45 mètres et 3,45 mètres ; qu'il est constant qu'aucune signalisation de la hauteur du pont n'a été mise en place par le maire de Collias ; qu'eu égard notamment aux dispositions précitées, cette absence de signalisation révèle un défaut d'entretien normal de la voie publique communale de nature à engager la responsabilité de la commune ; que la circonstance que M.C..., qui n'était pas un usager habituel de ce chemin, avait emprunté le même passage quelques heures auparavant, alors qu'il faisait jour, n'implique pas qu'il ait eu au moment de l'accident un comportement fautif de nature à exonérer la commune de Collias de tout ou partie de sa responsabilité ; que la société Uzès Location et M. C... sont, par suite, fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a déclaré que la responsabilité de la commune de Collias n'était pas engagée au titre de l'accident survenu à M. C... ;
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Collias une somme de 2 000 euros à verser à M. C...et à la société Uzès Location en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce que les sommes demandées par la commune et par les consorts A...soient mises à la charge de la société Uzès Location et de M. C... qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 17 février 2011 est annulé.
Article 2 : Il est déclaré que l'accident survenu à M. C...dans la nuit du 19 au 20 janvier 2008 engage la responsabilité de la commune de Collias au titre d'un défaut d'entretien normal de la voirie communale.
Article 3 : La commune de Collias versera à M. C...et à la société Uzès Location une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Collias et par les consorts A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Uzès Location, à M. B... C..., à la commune de Collias et aux consortsA....
N° 359884
ECLI:FR:CESJS:2014:359884.20140625
Inédit au recueil Lebon
5ème SSJS
M. Marc Lambron, rapporteur
Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public
SCP VINCENT, OHL ; BROUCHOT ; SCP PIWNICA, MOLINIE, avocats
Lecture du mercredi 25 juin 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu l'ordonnance en date du 23 mai 2012, enregistrée le 1er juin 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, la requête présentée à cette cour par la SARL Uzès Location et M. B... C... ;
Vu la requête, enregistrée le 4 avril 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille et le mémoire complémentaire, enregistré le 13 janvier 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SARL Uzès Location, dont le siège est 909, chemin du Redounet à Uzès (30700), représentée par son gérant en exercice, et pour M. B... C..., demeurant ... ; la société Uzès Location et M. C...demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 0903602 du 17 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Nîmes, saisi à leur demande de la question préjudicielle soulevée par le tribunal de grande instance de Nîmes dans son ordonnance du 20 novembre 2009, a rejeté leurs conclusions tendant à ce que la juridiction administrative déclare la commune de Collias responsable de l'accident survenu à M. C...alors qu'il conduisait un véhicule appartenant à la société Uzès Location ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Collias le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la voirie routière ;
Vu le code de la route ;
Vu l'arrêté du 7 juin 1977 relatif à la signalisation des routes et des autoroutes ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Marc Lambron, conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SARL Uzès Location et de M. C..., à la SCP Vincent, Ohl, avocat de la commune de Collias et à Me Brouchot, avocat des consortsA... ;
1. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, dans la nuit du 19 au 20 janvier 2008, à Collias (Gard), un véhicule conduit par M. C... et appartenant à la société Uzès Location, circulant sur la voirie communale, a heurté un pont surplombant la voie et provoqué l'effondrement partiel de cet ouvrage privé appartenant aux consortsA... ; qu'ayant dû réaliser des travaux de confortement, la commune a recherché la responsabilité du conducteur et de l'entreprise propriétaire du véhicule devant le tribunal de grande instance de Nîmes ; que, par une ordonnance du 20 novembre 2009 confirmée par la cour d'appel de Nîmes le 1er juillet 2010, le juge de la mise en état a admis la compétence de la juridiction judiciaire mais estimé que la solution du litige dépendait de l'appréciation de la responsabilité de la collectivité publique et invité les parties à saisir le juge administratif d'une question préjudicielle ; que M. C... et la société Uzès Location ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de déclarer que la responsabilité de la commune de Collias était engagée au titre des conséquences de l'accident ; qu'ils relèvent appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté cette demande ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 141-2 du code de la voirie routière en vigueur : " Le maire exerce sur la voirie communale les attributions mentionnées au 1° et 5° de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales " ; qu'aux termes de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales : " Sous le contrôle du conseil municipal et sous le contrôle administratif du représentant de l'Etat dans le département, le maire est chargé : (...) 5°/ De pourvoir aux mesures relatives à la voirie communale (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 141-2 du code de la voirie routière : " Sous les ouvrages d'art qui franchissent une voie communale, un tirant d'air d'au moins 4,30 mètres doit être réservé sur toute la largeur de la chaussée " ; qu'aux termes de l'article R. 411-25 du même code : " Le ministre chargé de la voirie nationale et le ministre de l'intérieur fixent par arrêté conjoint publié au Journal officiel de la République française les conditions dans lesquelles est établie la signalisation routière pour signifier une prescription de l'autorité investie du pouvoir de police ou donner une information aux usagers " ; qu'en application de l'article 61 de l'instruction interministérielle sur la signalisation routière, qui figure dans la quatrième partie, approuvée par l'arrêté susvisé du 7 juin 1977, de cette instruction, tous les passages où la hauteur libre au-dessus d'un point quelconque de la chaussée est inférieure à 4,30 mètres doivent être signalés ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que la hauteur libre sous le pont appartenant aux consorts A...est comprise entre 2,45 mètres et 3,45 mètres ; qu'il est constant qu'aucune signalisation de la hauteur du pont n'a été mise en place par le maire de Collias ; qu'eu égard notamment aux dispositions précitées, cette absence de signalisation révèle un défaut d'entretien normal de la voie publique communale de nature à engager la responsabilité de la commune ; que la circonstance que M.C..., qui n'était pas un usager habituel de ce chemin, avait emprunté le même passage quelques heures auparavant, alors qu'il faisait jour, n'implique pas qu'il ait eu au moment de l'accident un comportement fautif de nature à exonérer la commune de Collias de tout ou partie de sa responsabilité ; que la société Uzès Location et M. C... sont, par suite, fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nîmes a déclaré que la responsabilité de la commune de Collias n'était pas engagée au titre de l'accident survenu à M. C... ;
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Collias une somme de 2 000 euros à verser à M. C...et à la société Uzès Location en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font obstacle à ce que les sommes demandées par la commune et par les consorts A...soient mises à la charge de la société Uzès Location et de M. C... qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 17 février 2011 est annulé.
Article 2 : Il est déclaré que l'accident survenu à M. C...dans la nuit du 19 au 20 janvier 2008 engage la responsabilité de la commune de Collias au titre d'un défaut d'entretien normal de la voirie communale.
Article 3 : La commune de Collias versera à M. C...et à la société Uzès Location une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Collias et par les consorts A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Uzès Location, à M. B... C..., à la commune de Collias et aux consortsA....