Conseil d'État
N° 320295
ECLI:FR:CESSR:2009:320295.20090703
Mentionné au tables du recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Martin, président
Mme Mireille Imbert-Quaretta, rapporteur
M. Boucher Julien, rapporteur public
FOUSSARD, avocats
Lecture du vendredi 3 juillet 2009
Vu le pourvoi, enregistré le 2 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES (O.F.P.R.A), dont le siège est 201, rue Carnot à Fontenay-sous-Bois (94136) cedex ; l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 27 juin 2008 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile, faisant partiellement droit à la demande de M. Thangarajah A, a, d'une part, annulé la décision du 19 mai 2006 du directeur général de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES rejetant sa demande d'admission au statut de réfugié, d'autre part, accordé à l'intéressé le bénéfice de la protection subsidiaire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;
Vu la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Mireille Imbert-Quaretta, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Foussard, avocat de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES,
- les conclusions de M. Julien Boucher, Rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES ;
Considérant que la Cour nationale du droit d'asile est tenue de faire application, comme toute juridiction administrative, des règles générales relatives à toutes les productions postérieures à la clôture de l'instruction ; que s'il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance des notes en délibéré et de les viser, elle n'a l'obligation d'en tenir compte que si ces documents contiennent soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et qu'elle ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou qu'elle devrait relever d'office ; que dans cette hypothèse, elle doit soumettre ces notes en délibéré au débat contradictoire en renvoyant l'affaire à une audience ultérieure ; qu'en l'espèce, la demande mentionnée dans la note en délibéré produite par les conseils de M A était liée à la procédure suivie devant la cour et n'impliquait pas pour cette dernière, contrairement à ce qui est soutenu par L'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES, l'obligation de soumettre cette demande au débat contradictoire ; que la circonstance que la Cour nationale du droit d'asile ait choisi d'y répondre est, dans les circonstances de l'espèce, sans incidence sur la régularité de la procédure ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve des dispositions de l'article L. 712-2, le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mentionnées à l'article L. 711-1 et qui établit qu'elle est exposée dans son pays à l'une des menaces graves suivantes : (...) / c) S'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la violence généralisée à l'origine de la menace justifiant la demande de protection subsidiaire est inhérente à une situation de conflit armé et la caractérise ; que l'article L. 712-1 précité n'a pas entendu donner une interprétation différente de celle de la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 sur les normes minimales relatives aux conditions d'octroi du statut de réfugié ou du statut conféré par la protection subsidiaire, qui est à son origine, en exigeant que la violence et la situation de conflit armé coexistent en tout point sur la même zone géographique ; que dès lors, la cour n'a entaché son arrêt d'aucune contradiction de motifs en soulignant que le district de Batticaloa dont était originaire M. A ne présentait aucune garantie de sécurité en dépit du contrôle récent exercé sur la zone par l'armée sri-lankaise ;
Considérant que la cour a énuméré de façon circonstanciée les éléments établissant que la zone dont était issu M. A faisait l'objet d'une violence aveugle et généralisée, caractérisée par des attentats et des exactions visant la population civile et la contraignant à des déplacements forcés ; qu'elle a noté que les différentes parties au conflit, forces armées sri-lankaises, mouvement séparatiste des tigres libérateurs de l'Eelam tamoul (LTTE) ainsi que les mouvements tamouls rivaux, se rendaient coupables de graves violations du droit international humanitaire sur les populations civiles ; que ce faisant, elle a suffisamment motivé sa décision ;
Considérant qu'en estimant qu'il existait un climat de violence généralisée résultant d'une situation de conflit interne ou international, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits, exempte de toute dénaturation, qui n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;
Considérant que l'existence d'une menace grave, directe et individuelle contre la vie ou la personne d'un demandeur à la protection subsidiaire n'est pas subordonnée à la condition qu'il rapporte la preuve qu'il est visé spécifiquement en raison d'éléments propres à sa situation personnelle dès lors que le degré de violence aveugle caractérisant le conflit armé atteint un niveau si élevé qu'il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'un civil renvoyé dans le pays ou la région concernés courrait, du seul fait de sa présence sur le territoire, un risque réel de subir lesdites menaces ; que la cour, en déduisant du niveau élevé de violence généralisée existant dans l'est du Sri Lanka, dont M. A est originaire, le risque réel pour ce dernier de subir des menaces graves, directes et individuelles, n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 27 juin 2008 ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES et à M. Thangarajah A.
N° 320295
ECLI:FR:CESSR:2009:320295.20090703
Mentionné au tables du recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Martin, président
Mme Mireille Imbert-Quaretta, rapporteur
M. Boucher Julien, rapporteur public
FOUSSARD, avocats
Lecture du vendredi 3 juillet 2009
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu le pourvoi, enregistré le 2 septembre 2008 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présenté pour l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES (O.F.P.R.A), dont le siège est 201, rue Carnot à Fontenay-sous-Bois (94136) cedex ; l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision du 27 juin 2008 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile, faisant partiellement droit à la demande de M. Thangarajah A, a, d'une part, annulé la décision du 19 mai 2006 du directeur général de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES rejetant sa demande d'admission au statut de réfugié, d'autre part, accordé à l'intéressé le bénéfice de la protection subsidiaire ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;
Vu la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Mireille Imbert-Quaretta, Conseiller d'Etat,
- les observations de Me Foussard, avocat de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES,
- les conclusions de M. Julien Boucher, Rapporteur public ;
La parole ayant été à nouveau donnée à Me Foussard, avocat de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES ;
Considérant que la Cour nationale du droit d'asile est tenue de faire application, comme toute juridiction administrative, des règles générales relatives à toutes les productions postérieures à la clôture de l'instruction ; que s'il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance des notes en délibéré et de les viser, elle n'a l'obligation d'en tenir compte que si ces documents contiennent soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et qu'elle ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou qu'elle devrait relever d'office ; que dans cette hypothèse, elle doit soumettre ces notes en délibéré au débat contradictoire en renvoyant l'affaire à une audience ultérieure ; qu'en l'espèce, la demande mentionnée dans la note en délibéré produite par les conseils de M A était liée à la procédure suivie devant la cour et n'impliquait pas pour cette dernière, contrairement à ce qui est soutenu par L'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES, l'obligation de soumettre cette demande au débat contradictoire ; que la circonstance que la Cour nationale du droit d'asile ait choisi d'y répondre est, dans les circonstances de l'espèce, sans incidence sur la régularité de la procédure ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sous réserve des dispositions de l'article L. 712-2, le bénéfice de la protection subsidiaire est accordé à toute personne qui ne remplit pas les conditions pour se voir reconnaître la qualité de réfugié mentionnées à l'article L. 711-1 et qui établit qu'elle est exposée dans son pays à l'une des menaces graves suivantes : (...) / c) S'agissant d'un civil, une menace grave, directe et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d'une violence généralisée résultant d'une situation de conflit armé interne ou international ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la violence généralisée à l'origine de la menace justifiant la demande de protection subsidiaire est inhérente à une situation de conflit armé et la caractérise ; que l'article L. 712-1 précité n'a pas entendu donner une interprétation différente de celle de la directive 2004/83/CE du Conseil du 29 avril 2004 sur les normes minimales relatives aux conditions d'octroi du statut de réfugié ou du statut conféré par la protection subsidiaire, qui est à son origine, en exigeant que la violence et la situation de conflit armé coexistent en tout point sur la même zone géographique ; que dès lors, la cour n'a entaché son arrêt d'aucune contradiction de motifs en soulignant que le district de Batticaloa dont était originaire M. A ne présentait aucune garantie de sécurité en dépit du contrôle récent exercé sur la zone par l'armée sri-lankaise ;
Considérant que la cour a énuméré de façon circonstanciée les éléments établissant que la zone dont était issu M. A faisait l'objet d'une violence aveugle et généralisée, caractérisée par des attentats et des exactions visant la population civile et la contraignant à des déplacements forcés ; qu'elle a noté que les différentes parties au conflit, forces armées sri-lankaises, mouvement séparatiste des tigres libérateurs de l'Eelam tamoul (LTTE) ainsi que les mouvements tamouls rivaux, se rendaient coupables de graves violations du droit international humanitaire sur les populations civiles ; que ce faisant, elle a suffisamment motivé sa décision ;
Considérant qu'en estimant qu'il existait un climat de violence généralisée résultant d'une situation de conflit interne ou international, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des faits, exempte de toute dénaturation, qui n'est pas susceptible d'être discutée devant le juge de cassation ;
Considérant que l'existence d'une menace grave, directe et individuelle contre la vie ou la personne d'un demandeur à la protection subsidiaire n'est pas subordonnée à la condition qu'il rapporte la preuve qu'il est visé spécifiquement en raison d'éléments propres à sa situation personnelle dès lors que le degré de violence aveugle caractérisant le conflit armé atteint un niveau si élevé qu'il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'un civil renvoyé dans le pays ou la région concernés courrait, du seul fait de sa présence sur le territoire, un risque réel de subir lesdites menaces ; que la cour, en déduisant du niveau élevé de violence généralisée existant dans l'est du Sri Lanka, dont M. A est originaire, le risque réel pour ce dernier de subir des menaces graves, directes et individuelles, n'a pas commis d'erreur de droit ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 27 juin 2008 ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'OFFICE FRANÇAIS DE PROTECTION DES REFUGIES ET APATRIDES et à M. Thangarajah A.