Conseil d'État
N° 259004
ECLI:FR:CESEC:2005:259004.20050727
Publié au recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Genevois, président
Mme Isabelle Lemesle, rapporteur
M. Glaser, commissaire du gouvernement
SCP BARADUC, DUHAMEL, avocats
Lecture du mercredi 27 juillet 2005
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 juillet et 15 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Charles Z, demeurant ... ; M. Z demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 10 juillet 2003 de la cour administrative d'appel de Lyon, en tant que, ne faisant que partiellement droit à son appel formé à l'encontre des jugements n°s 01-04233 et 01-04234 du 19 mars 2002 du tribunal administratif de Lyon rejetant ses demandes en tierce opposition tendant à ce que le tribunal déclare nuls et non avenus d'une part, son jugement n° 98-02244 du 26 juin 2001 annulant la décision du bureau du conseil régional de Rhône-Alpes du 24 novembre 1989 permettant au président dudit conseil de bénéficier d'un logement de fonction et d'autre part, son jugement n° 98-03781 du 26 juin 2001, en ce qu'il annule la décision du bureau précité du 10 février 1989 autorisant le président du conseil régional à signer un bail pour la location d'un appartement, ensemble la décision du président du 21 avril 1989 de signer le bail, il a après évocation rejeté ses demandes en tierce-opposition ;
2°) de faire droit à ses demandes en tierce-opposition ;
3°) de mettre à la charge de M. Etienne la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le décret n° 73-854 du 5 septembre 1973 relatif à la composition et au fonctionnement des conseils régionaux institués par la loi n° 72-619 du 5 juillet 1972 portant création et organisation des régions, et plus particulièrement son article 25 ;
Vu le décret n° 88-139 du 10 février 1988 relatif au règlement financier et comptable des régions et portant abrogation de dispositions relatives aux établissements publics régionaux ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de M. Z,
- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. Z a formé tierce-opposition contre deux jugements en date du 26 juin 2001 par lesquels le tribunal administratif de Lyon a annulé, à la demande de MM. et Y, d'une part, la décision du bureau du conseil régional de Rhône-Alpes en date du 10 février 1989 autorisant la prise à bail d'un logement ainsi que la décision du président du 21 avril 1989 de signer ledit bail et, d'autre part, la décision du bureau du 24 novembre 1989 attribuant au président du conseil régional un logement de fonction par nécessité absolue de service ; que ces requêtes en tierce-opposition ont été rejetées par deux nouveaux jugements du 19 mars 2002, dont M. Z a interjeté appel ; que par un arrêt du 10 juillet 2003, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé les deux jugements du 19 mars 2002 et rejeté les requêtes en tierce-opposition de M. Z ; que ce dernier se pourvoit contre cet arrêt en tant qu'il a statué après évocation ;
Sur la composition de la cour :
Considérant que si, d'après l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement d'une cour administrative d'appel réunit en principe son président, le magistrat rapporteur et un autre magistrat affecté à la chambre, l'article R. 222-27 du même code permet au président de la cour, lorsque la nature ou la difficulté de l'affaire le justifie, d'adjoindre à ces trois magistrats un autre magistrat affecté à la chambre, désigné en suivant l'ordre du tableau parmi les magistrats présents, ainsi qu'un magistrat affecté à une autre chambre, désigné en suivant l'ordre du tableau parmi les magistrats présents autres que les présidents de chambres ; qu'en vertu de l'article R. 721-1 du même code le membre de la juridiction qui suppose en sa personne une cause de récusation ou estime en conscience devoir s'abstenir se fait remplacer par un autre membre désigné par le président de la juridiction ; qu'il ressort des pièces du dossier que c'est en application de ces dispositions que la formation de jugement, présidée par le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel, comportait quatre autres magistrats dont un seul appartenait à cette chambre ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la cour était irrégulièrement composée ;
Sur la recevabilité de la requête de M. devant le tribunal :
Considérant que la publication d'une décision administrative dans un recueil autre que le journal officiel fait courir le délai du recours contentieux à l'égard de tous les tiers si l'obligation de publier cette décision dans ce recueil résulte d'un texte législatif ou réglementaire lui-même publié au Journal officiel de la République française ; qu'en l'absence d'une telle obligation, cet effet n'est attaché à la publication que si le recueil peut, eu égard à l'ampleur et aux modalités de sa diffusion, être regardé comme aisément consultable par toutes les personnes susceptibles d'avoir un intérêt leur donnant qualité pour contester la décision ; que le décret du 5 septembre 1973 relatif à la composition et au fonctionnement des conseils régionaux, dont l'article 25 imposait la publication des décisions et avis du conseil régional dans un recueil des actes administratifs, a été abrogé par le décret du 10 février 1988 susvisé ; qu'ainsi, lorsque les décisions litigieuses ont été publiées en septembre et décembre 1989 au recueil des actes administratifs de la région Rhône Alpes, ce mode de publicité n'était rendu obligatoire par aucun texte ; que, par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit ni dénaturer les pièces du dossier que la cour administrative d'appel a jugé que l'insertion des délibérations litigieuses dans le recueil des actes administratifs de la région Rhône-Alpes n'avait pas constitué, eu égard aux modalités de diffusion de ce recueil, une mesure de publicité suffisante pour faire courir le délai de recours contentieux à l'égard des administrés ;
Considérant que M. n'a été élu conseiller régional qu'en 1992 ; que la cour n'a commis aucune erreur de droit en jugeant que la connaissance éventuellement acquise de l'existence et du contenu des délibérations litigieuses par l'intéressé, après son élection comme conseiller régional en 1992, notamment lors de débats survenus en octobre 1995 à la commission permanente du conseil régional, n'était pas de nature à faire regarder comme tardive la requête qu'il a présentée le 13 mai 1998 devant le tribunal administratif contre ces délibérations ;
Sur les autres moyens :
Considérant que la mise à disposition d'un logement de fonction, même par nécessité absolue de service et assortie, le cas échéant, de contraintes ou servitudes, implique l'attribution d'un avantage en nature, hors le cas où la consistance dudit logement imposerait à l'intéressé l'obligation de maintenir simultanément des dépenses afférentes à une autre habitation pour y loger sa famille ; qu'un tel avantage n'est pas au nombre des indemnités et remboursements qui, par dérogation au principe de gratuité des mandats locaux, pouvaient être attribués en vertu soit de l'article 14-1 de la loi du 10 août 1871 modifiée par l'article 11-1 de la loi du 5 juillet 1972, soit de l'article 38 de la loi du 27 février 1912 portant fixation du budget général de l'exercice 1912, rendu applicable aux conseils régionaux et à leurs présidents par l'article 11 de la loi du 5 juillet 1972, dans sa rédaction issue de l'article 6 de la loi du 6 janvier 1986 relative à l'organisation des régions ; que c'est seulement l'article 86 II de la loi du 27 février 2002, codifié à l'article L. 4135-19-2 du code général des collectivités territoriales, qui a prévu les conditions dans lesquelles un logement de fonction pouvait être attribué au président du conseil régional ; qu'ainsi la cour, qui n'a pas commis d'irrégularité en s'abstenant de répondre aux moyens inopérants tirés, d'abord, de l'intérêt financier qu'aurait eu la région à financer un logement de fonction plutôt qu'à supporter des frais de déplacement, ensuite, de la méconnaissance du principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales, enfin, de la rupture d'égalité entre les candidats à la présidence d'une région selon qu'ils résident ou non au chef-lieu de la région, n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit en jugeant illégales les décisions litigieuses ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Z n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Sur les conclusions relatives à l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce soit mise à la charge de M. , qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. Z demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de M. Z est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Charles Z, à M. Etienne , à M. Pierre Y, à la région Rhône-Alpes et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
N° 259004
ECLI:FR:CESEC:2005:259004.20050727
Publié au recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Genevois, président
Mme Isabelle Lemesle, rapporteur
M. Glaser, commissaire du gouvernement
SCP BARADUC, DUHAMEL, avocats
Lecture du mercredi 27 juillet 2005
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 juillet et 15 octobre 2003 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Charles Z, demeurant ... ; M. Z demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 10 juillet 2003 de la cour administrative d'appel de Lyon, en tant que, ne faisant que partiellement droit à son appel formé à l'encontre des jugements n°s 01-04233 et 01-04234 du 19 mars 2002 du tribunal administratif de Lyon rejetant ses demandes en tierce opposition tendant à ce que le tribunal déclare nuls et non avenus d'une part, son jugement n° 98-02244 du 26 juin 2001 annulant la décision du bureau du conseil régional de Rhône-Alpes du 24 novembre 1989 permettant au président dudit conseil de bénéficier d'un logement de fonction et d'autre part, son jugement n° 98-03781 du 26 juin 2001, en ce qu'il annule la décision du bureau précité du 10 février 1989 autorisant le président du conseil régional à signer un bail pour la location d'un appartement, ensemble la décision du président du 21 avril 1989 de signer le bail, il a après évocation rejeté ses demandes en tierce-opposition ;
2°) de faire droit à ses demandes en tierce-opposition ;
3°) de mettre à la charge de M. Etienne la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la Constitution du 4 octobre 1958 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le décret n° 73-854 du 5 septembre 1973 relatif à la composition et au fonctionnement des conseils régionaux institués par la loi n° 72-619 du 5 juillet 1972 portant création et organisation des régions, et plus particulièrement son article 25 ;
Vu le décret n° 88-139 du 10 février 1988 relatif au règlement financier et comptable des régions et portant abrogation de dispositions relatives aux établissements publics régionaux ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de M. Z,
- les conclusions de M. Emmanuel Glaser, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que M. Z a formé tierce-opposition contre deux jugements en date du 26 juin 2001 par lesquels le tribunal administratif de Lyon a annulé, à la demande de MM. et Y, d'une part, la décision du bureau du conseil régional de Rhône-Alpes en date du 10 février 1989 autorisant la prise à bail d'un logement ainsi que la décision du président du 21 avril 1989 de signer ledit bail et, d'autre part, la décision du bureau du 24 novembre 1989 attribuant au président du conseil régional un logement de fonction par nécessité absolue de service ; que ces requêtes en tierce-opposition ont été rejetées par deux nouveaux jugements du 19 mars 2002, dont M. Z a interjeté appel ; que par un arrêt du 10 juillet 2003, la cour administrative d'appel de Lyon a annulé les deux jugements du 19 mars 2002 et rejeté les requêtes en tierce-opposition de M. Z ; que ce dernier se pourvoit contre cet arrêt en tant qu'il a statué après évocation ;
Sur la composition de la cour :
Considérant que si, d'après l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement d'une cour administrative d'appel réunit en principe son président, le magistrat rapporteur et un autre magistrat affecté à la chambre, l'article R. 222-27 du même code permet au président de la cour, lorsque la nature ou la difficulté de l'affaire le justifie, d'adjoindre à ces trois magistrats un autre magistrat affecté à la chambre, désigné en suivant l'ordre du tableau parmi les magistrats présents, ainsi qu'un magistrat affecté à une autre chambre, désigné en suivant l'ordre du tableau parmi les magistrats présents autres que les présidents de chambres ; qu'en vertu de l'article R. 721-1 du même code le membre de la juridiction qui suppose en sa personne une cause de récusation ou estime en conscience devoir s'abstenir se fait remplacer par un autre membre désigné par le président de la juridiction ; qu'il ressort des pièces du dossier que c'est en application de ces dispositions que la formation de jugement, présidée par le président de la 4ème chambre de la cour administrative d'appel, comportait quatre autres magistrats dont un seul appartenait à cette chambre ; que, dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la cour était irrégulièrement composée ;
Sur la recevabilité de la requête de M. devant le tribunal :
Considérant que la publication d'une décision administrative dans un recueil autre que le journal officiel fait courir le délai du recours contentieux à l'égard de tous les tiers si l'obligation de publier cette décision dans ce recueil résulte d'un texte législatif ou réglementaire lui-même publié au Journal officiel de la République française ; qu'en l'absence d'une telle obligation, cet effet n'est attaché à la publication que si le recueil peut, eu égard à l'ampleur et aux modalités de sa diffusion, être regardé comme aisément consultable par toutes les personnes susceptibles d'avoir un intérêt leur donnant qualité pour contester la décision ; que le décret du 5 septembre 1973 relatif à la composition et au fonctionnement des conseils régionaux, dont l'article 25 imposait la publication des décisions et avis du conseil régional dans un recueil des actes administratifs, a été abrogé par le décret du 10 février 1988 susvisé ; qu'ainsi, lorsque les décisions litigieuses ont été publiées en septembre et décembre 1989 au recueil des actes administratifs de la région Rhône Alpes, ce mode de publicité n'était rendu obligatoire par aucun texte ; que, par suite, c'est sans commettre d'erreur de droit ni dénaturer les pièces du dossier que la cour administrative d'appel a jugé que l'insertion des délibérations litigieuses dans le recueil des actes administratifs de la région Rhône-Alpes n'avait pas constitué, eu égard aux modalités de diffusion de ce recueil, une mesure de publicité suffisante pour faire courir le délai de recours contentieux à l'égard des administrés ;
Considérant que M. n'a été élu conseiller régional qu'en 1992 ; que la cour n'a commis aucune erreur de droit en jugeant que la connaissance éventuellement acquise de l'existence et du contenu des délibérations litigieuses par l'intéressé, après son élection comme conseiller régional en 1992, notamment lors de débats survenus en octobre 1995 à la commission permanente du conseil régional, n'était pas de nature à faire regarder comme tardive la requête qu'il a présentée le 13 mai 1998 devant le tribunal administratif contre ces délibérations ;
Sur les autres moyens :
Considérant que la mise à disposition d'un logement de fonction, même par nécessité absolue de service et assortie, le cas échéant, de contraintes ou servitudes, implique l'attribution d'un avantage en nature, hors le cas où la consistance dudit logement imposerait à l'intéressé l'obligation de maintenir simultanément des dépenses afférentes à une autre habitation pour y loger sa famille ; qu'un tel avantage n'est pas au nombre des indemnités et remboursements qui, par dérogation au principe de gratuité des mandats locaux, pouvaient être attribués en vertu soit de l'article 14-1 de la loi du 10 août 1871 modifiée par l'article 11-1 de la loi du 5 juillet 1972, soit de l'article 38 de la loi du 27 février 1912 portant fixation du budget général de l'exercice 1912, rendu applicable aux conseils régionaux et à leurs présidents par l'article 11 de la loi du 5 juillet 1972, dans sa rédaction issue de l'article 6 de la loi du 6 janvier 1986 relative à l'organisation des régions ; que c'est seulement l'article 86 II de la loi du 27 février 2002, codifié à l'article L. 4135-19-2 du code général des collectivités territoriales, qui a prévu les conditions dans lesquelles un logement de fonction pouvait être attribué au président du conseil régional ; qu'ainsi la cour, qui n'a pas commis d'irrégularité en s'abstenant de répondre aux moyens inopérants tirés, d'abord, de l'intérêt financier qu'aurait eu la région à financer un logement de fonction plutôt qu'à supporter des frais de déplacement, ensuite, de la méconnaissance du principe constitutionnel de la libre administration des collectivités territoriales, enfin, de la rupture d'égalité entre les candidats à la présidence d'une région selon qu'ils résident ou non au chef-lieu de la région, n'a pas entaché sa décision d'erreur de droit en jugeant illégales les décisions litigieuses ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Z n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Sur les conclusions relatives à l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à ce soit mise à la charge de M. , qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. Z demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : La requête de M. Z est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. Charles Z, à M. Etienne , à M. Pierre Y, à la région Rhône-Alpes et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.