Conseil d'État
N° 242238
ECLI:FR:CESSR:2004:242238.20040326
Mentionné au tables du recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Robineau, président
M. Gounin, rapporteur
M. Chauvaux, commissaire du gouvernement
SCP WAQUET, FARGE, HAZAN ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, avocats
Lecture du vendredi 26 mars 2004
Vu 1°), sous le n° 242238, la requête enregistrée le 23 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Yacine X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 20 novembre 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement en date du 11 avril 2000 du tribunal administratif de Marseille tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté d'expulsion en date du 7 octobre 1999 pris à son encontre par le ministre de l'intérieur, d'autre part à enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de deux mois à compter de l'intervention de la décision à venir ;
Vu 2°), sous le n° 248622, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 juillet et 15 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Yacine X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 20 novembre 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement en date du 11 avril 2000 du tribunal administratif de Marseille tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté d'expulsion en date du 7 octobre 1999 pris à son encontre par le ministre de l'intérieur, d'autre part à enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de deux mois à compter de l'intervention de la décision à venir ;
2°) statuant au fond, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 octobre 1999 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 28 décembre 1968 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Gounin, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. X,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le document enregistré sous le n° 242238 constitue en réalité un mémoire présenté par M. X qui se rattache au dossier de sa requête enregistrée sous le n° 248622 ; que, par suite, ce document doit être rayé des registres du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat et être joint à la requête enregistrée sous le n° 248622 ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X, ressortissant algérien, est né en France en 1957 ; qu'il y a résidé de manière habituelle depuis lors ; que sa mère et ses frères et soeurs, qui sont, pour la plupart, de nationalité française, y résident également de longue date ; qu'il vit depuis 1990 avec une ressortissante française dont il a eu un enfant en 1996 et avec laquelle il s'est marié en 1997 ; qu'il n'a aucune attache familiale en Algérie, pays dont il ne parle pas la langue officielle ; que s'il ressort des pièces du dossier que M. X s'est livré de 1980 à 1997 à de graves agissements délictueux, notamment à l'achat ou à la revente de stupéfiants, pour lesquels il a été condamné au total à plus de dix années de prison, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce en estimant que la mesure d'expulsion prise à son encontre n'avait pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi et n'avait, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. X est, dès lors, fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu, en l'espèce, de régler l'affaire au fond ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté ministériel du 7 octobre 1999 ordonnant son expulsion du territoire français ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant que l'exécution de la présente décision n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour à M. X qui n'était pas titulaire, à la date de l'arrêté ministériel ordonnant son expulsion, d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il appartiendra au préfet, si M. X le saisit d'une demande en ce sens, d'apprécier la situation de l'intéressé au regard de son droit au séjour en tenant compte des motifs de la présente décision et au vu de la situation de droit et de fait prévalant à la date de la décision statuant sur cette demande ; que, par suite, les conclusions de M. X tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Les productions enregistrées sous le n° 242238 seront rayées du registre du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat pour être jointes à la requête n° 248622.
Article 2 : L'arrêt du 20 novembre 2001 de la cour administrative d'appel de Marseille, le jugement du 11 avril 2000 du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 7 octobre 1999 du ministre de l'intérieur prononçant l'expulsion de M. X du territoire français sont annulés.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Yacine X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.
N° 242238
ECLI:FR:CESSR:2004:242238.20040326
Mentionné au tables du recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Robineau, président
M. Gounin, rapporteur
M. Chauvaux, commissaire du gouvernement
SCP WAQUET, FARGE, HAZAN ; SCP WAQUET, FARGE, HAZAN, avocats
Lecture du vendredi 26 mars 2004
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu 1°), sous le n° 242238, la requête enregistrée le 23 janvier 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentée pour M. Yacine X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 20 novembre 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement en date du 11 avril 2000 du tribunal administratif de Marseille tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté d'expulsion en date du 7 octobre 1999 pris à son encontre par le ministre de l'intérieur, d'autre part à enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de deux mois à compter de l'intervention de la décision à venir ;
Vu 2°), sous le n° 248622, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 15 juillet et 15 novembre 2002 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. Yacine X, demeurant ... ; M. X demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler l'arrêt du 20 novembre 2001 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement en date du 11 avril 2000 du tribunal administratif de Marseille tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté d'expulsion en date du 7 octobre 1999 pris à son encontre par le ministre de l'intérieur, d'autre part à enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai de deux mois à compter de l'intervention de la décision à venir ;
2°) statuant au fond, d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 octobre 1999 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
....................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 28 décembre 1968 ;
Vu l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Gounin, Maître des Requêtes,
- les observations de la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de M. X,
- les conclusions de M. Chauvaux, Commissaire du gouvernement ;
Considérant que le document enregistré sous le n° 242238 constitue en réalité un mémoire présenté par M. X qui se rattache au dossier de sa requête enregistrée sous le n° 248622 ; que, par suite, ce document doit être rayé des registres du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat et être joint à la requête enregistrée sous le n° 248622 ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. X, ressortissant algérien, est né en France en 1957 ; qu'il y a résidé de manière habituelle depuis lors ; que sa mère et ses frères et soeurs, qui sont, pour la plupart, de nationalité française, y résident également de longue date ; qu'il vit depuis 1990 avec une ressortissante française dont il a eu un enfant en 1996 et avec laquelle il s'est marié en 1997 ; qu'il n'a aucune attache familiale en Algérie, pays dont il ne parle pas la langue officielle ; que s'il ressort des pièces du dossier que M. X s'est livré de 1980 à 1997 à de graves agissements délictueux, notamment à l'achat ou à la revente de stupéfiants, pour lesquels il a été condamné au total à plus de dix années de prison, la cour a inexactement qualifié les faits de l'espèce en estimant que la mesure d'expulsion prise à son encontre n'avait pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but poursuivi et n'avait, ainsi, pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que M. X est, dès lors, fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
Considérant qu'en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, il y a lieu, en l'espèce, de régler l'affaire au fond ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté ministériel du 7 octobre 1999 ordonnant son expulsion du territoire français ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant que l'exécution de la présente décision n'implique pas nécessairement la délivrance d'un titre de séjour à M. X qui n'était pas titulaire, à la date de l'arrêté ministériel ordonnant son expulsion, d'un titre de séjour en cours de validité ; qu'il appartiendra au préfet, si M. X le saisit d'une demande en ce sens, d'apprécier la situation de l'intéressé au regard de son droit au séjour en tenant compte des motifs de la présente décision et au vu de la situation de droit et de fait prévalant à la date de la décision statuant sur cette demande ; que, par suite, les conclusions de M. X tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de lui délivrer un titre de séjour doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Les productions enregistrées sous le n° 242238 seront rayées du registre du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat pour être jointes à la requête n° 248622.
Article 2 : L'arrêt du 20 novembre 2001 de la cour administrative d'appel de Marseille, le jugement du 11 avril 2000 du tribunal administratif de Marseille et l'arrêté du 7 octobre 1999 du ministre de l'intérieur prononçant l'expulsion de M. X du territoire français sont annulés.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. Yacine X et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales.