Conseil d'État
N° 48570
ECLI:FR:CESJS:1984:48570.19840316
Publié au recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Heumann, président
M. Bonichot, rapporteur
M. Genevois, commissaire du gouvernement
Lecture du 16 mars 1984
Recours, du ministre de l'intérieur et de la décentralisation tendant :
1° à l'annulation du jugement du 3 décembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté d'expulsion pris à l'encontre de M. Ahmed X... le 11 décembre 1978 ainsi que la décision ministérielle en date du 18 juin 1982 prescrivant au préfet, commissaire de la République du Puy-de-Dôme, de mettre à exécution ledit arrêté ;
2° au rejet de la requête de M. X... contre les deux décisions précitées ;
Vu le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 et le décret n° 46-448 du 18 mars 1946 ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Sur la légalité de l'arrêté du 11 décembre 1978 ordonnant l'expulsion de M. X... : Considérant qu'en vertu des dispositions des articles 24 à 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, et des articles 4 et 5 du décret du 18 mars 1946 pris pour son application, l'étranger qui reçoit notification de l'intention du ministre de l'intérieur de prendre contre lui une mesure d'expulsion a le droit, s'il le demande dans les huit jours de cette notification, d'être entendu par une commission spéciale siégeant auprès du préfet et de lui présenter un mémoire ; que le procès-verbal enregistrant ses explications est ensuite transmis, avec l'avis de la commission, au ministre pour décision ;
Cons. qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. X..., qui a reçu le 5 juin 1978, alors qu'il était détenu à la maison d'arrêt de Saverne, la notification de l'intention du ministre de prononcer son expulsion, a manifesté le désir d'être entendu par la commission spéciale ; qu'il a été convoqué à cet effet pour le 11 juillet suivant ; que cette convocation lui a été envoyée après sa sortie de prison, par lettre recommandée avec accusé de réception, à l'adresse qu'il avait indiquée aux autorités pénitentiaires ; que ladite lettre n'a pu lui être remise et n'a pas été réclamée par lui au service des postes, l'intéressé ayant disparu sans laisser d'autre adresse ; que, devant cette situation, la commission s'est bornée à constater son absence ;
Cons. qu'il résulte de ce qui précède que la non comparution de M. X... devant la commission spéciale est exclusivement imputable à son propre fait ; que le ministre de l'intérieur et de la décentralisation est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté d'expulsion du 11 décembre 1978 par le motif que la commission spéciale du Bas-Rhin n'avait pas émis d'avis sur son cas ;
Sur la légalité de la décision du 18 juin 1982 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé d'abroger la mesure d'expulsion concernant M. X... : Cons. qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, tel qu'il résulte de la loi du 29 octobre 1981 " sous réserve des dispositions de l'article 25, l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. L'arrêté d'expulsion peut à tout moment être abrogé par le ministre de l'intérieur ... " ; que si l'article 25 de l'ordonnance, tel qu'il résulte de la même loi, interdit au ministre, sauf le cas d'urgence absolue prévu à l'article 26, de prononcer l'expulsion de certaines catégories d'étrangers, cette disposition ne saurait être utilement invoquée à l'appui d'une demande tendant à l'abrogation d'une mesure d'expulsion antérieurement prise ; qu'il appartient seulement au ministre, saisi d'une telle demande, d'apprécier en vertu de l'article 23 précité, si la présence de l'intéressé sur le territoire français constitue à la date à laquelle il se prononce une menace grave pour l'ordre public ;
Cons. d'une part, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que M. X... n'avait été condamné qu'à des peines d'emprisonnement inférieures à un an et n'aurait pu de ce fait, en vertu de l'article 25 nouveau de l'ordonnance, faire l'objet d'une mesure d'expulsion après l'entrée en vigueur de la loi du 29 octobre 1981, est sans valeur à l'encontre de la décision refusant de prononcer l'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 11 décembre 1978 ; que par ailleurs la date à laquelle ce dernier arrêté a été modifié est sans influence sur la légalité de la décision rejetant la demande d'abrogation ;
Cons. d'autre part, qu'il résulte des pièces versées au dossier que le ministre n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant, au vu des faits qui avaient motivé contre l'intéressé diverses interpellations et procédures pénales entre 1973 et 1978, que la présence de M. X... sur le territoire français constituait une menace grave pour l'ordre public ; qu'il suit de là que c'est à tort que le jugement attaqué a également annulé la décision du 18 juin 1982 ;
annulation du jugement et rejet de la demande .
N° 48570
ECLI:FR:CESJS:1984:48570.19840316
Publié au recueil Lebon
Section du Contentieux
M. Heumann, président
M. Bonichot, rapporteur
M. Genevois, commissaire du gouvernement
Lecture du 16 mars 1984
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Recours, du ministre de l'intérieur et de la décentralisation tendant :
1° à l'annulation du jugement du 3 décembre 1982 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté d'expulsion pris à l'encontre de M. Ahmed X... le 11 décembre 1978 ainsi que la décision ministérielle en date du 18 juin 1982 prescrivant au préfet, commissaire de la République du Puy-de-Dôme, de mettre à exécution ledit arrêté ;
2° au rejet de la requête de M. X... contre les deux décisions précitées ;
Vu le code des tribunaux administratifs ; l'ordonnance n° 45-2658 du 2 novembre 1945 et le décret n° 46-448 du 18 mars 1946 ; l'ordonnance du 31 juillet 1945 et le décret du 30 septembre 1953 ; la loi du 30 décembre 1977 ;
Sur la légalité de l'arrêté du 11 décembre 1978 ordonnant l'expulsion de M. X... : Considérant qu'en vertu des dispositions des articles 24 à 26 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, et des articles 4 et 5 du décret du 18 mars 1946 pris pour son application, l'étranger qui reçoit notification de l'intention du ministre de l'intérieur de prendre contre lui une mesure d'expulsion a le droit, s'il le demande dans les huit jours de cette notification, d'être entendu par une commission spéciale siégeant auprès du préfet et de lui présenter un mémoire ; que le procès-verbal enregistrant ses explications est ensuite transmis, avec l'avis de la commission, au ministre pour décision ;
Cons. qu'il ressort des pièces versées au dossier que M. X..., qui a reçu le 5 juin 1978, alors qu'il était détenu à la maison d'arrêt de Saverne, la notification de l'intention du ministre de prononcer son expulsion, a manifesté le désir d'être entendu par la commission spéciale ; qu'il a été convoqué à cet effet pour le 11 juillet suivant ; que cette convocation lui a été envoyée après sa sortie de prison, par lettre recommandée avec accusé de réception, à l'adresse qu'il avait indiquée aux autorités pénitentiaires ; que ladite lettre n'a pu lui être remise et n'a pas été réclamée par lui au service des postes, l'intéressé ayant disparu sans laisser d'autre adresse ; que, devant cette situation, la commission s'est bornée à constater son absence ;
Cons. qu'il résulte de ce qui précède que la non comparution de M. X... devant la commission spéciale est exclusivement imputable à son propre fait ; que le ministre de l'intérieur et de la décentralisation est dès lors fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé l'arrêté d'expulsion du 11 décembre 1978 par le motif que la commission spéciale du Bas-Rhin n'avait pas émis d'avis sur son cas ;
Sur la légalité de la décision du 18 juin 1982 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé d'abroger la mesure d'expulsion concernant M. X... : Cons. qu'aux termes de l'article 23 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, tel qu'il résulte de la loi du 29 octobre 1981 " sous réserve des dispositions de l'article 25, l'expulsion peut être prononcée par arrêté du ministre de l'intérieur si la présence sur le territoire français d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. L'arrêté d'expulsion peut à tout moment être abrogé par le ministre de l'intérieur ... " ; que si l'article 25 de l'ordonnance, tel qu'il résulte de la même loi, interdit au ministre, sauf le cas d'urgence absolue prévu à l'article 26, de prononcer l'expulsion de certaines catégories d'étrangers, cette disposition ne saurait être utilement invoquée à l'appui d'une demande tendant à l'abrogation d'une mesure d'expulsion antérieurement prise ; qu'il appartient seulement au ministre, saisi d'une telle demande, d'apprécier en vertu de l'article 23 précité, si la présence de l'intéressé sur le territoire français constitue à la date à laquelle il se prononce une menace grave pour l'ordre public ;
Cons. d'une part, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que M. X... n'avait été condamné qu'à des peines d'emprisonnement inférieures à un an et n'aurait pu de ce fait, en vertu de l'article 25 nouveau de l'ordonnance, faire l'objet d'une mesure d'expulsion après l'entrée en vigueur de la loi du 29 octobre 1981, est sans valeur à l'encontre de la décision refusant de prononcer l'abrogation de l'arrêté d'expulsion du 11 décembre 1978 ; que par ailleurs la date à laquelle ce dernier arrêté a été modifié est sans influence sur la légalité de la décision rejetant la demande d'abrogation ;
Cons. d'autre part, qu'il résulte des pièces versées au dossier que le ministre n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en estimant, au vu des faits qui avaient motivé contre l'intéressé diverses interpellations et procédures pénales entre 1973 et 1978, que la présence de M. X... sur le territoire français constituait une menace grave pour l'ordre public ; qu'il suit de là que c'est à tort que le jugement attaqué a également annulé la décision du 18 juin 1982 ;
annulation du jugement et rejet de la demande .