Base de jurisprudence


Analyse n° 490952
19 décembre 2024
Conseil d'État

N° 490952
Publié au recueil Lebon

Lecture du jeudi 19 décembre 2024



37-03 : Juridictions administratives et judiciaires- Règles générales de procédure-

Droit de se taire (art. 9 de la Déclaration de 1789) (1) - Juridictions disciplinaires de l'ordre administratif - Obligation d'informer la personne poursuivie de ce droit (2) - 1) Portée - 2) Conséquences de l'absence d'information préalable - a) Lors de la comparution à l'audience - Principe - Irrégularité de la sanction - Exception - Personne poursuivie n'ayant pas tenu de propos susceptibles de lui préjudicier (3) - b) A l'audition tenue au cours de l'instruction - Impossibilité pour la juridiction de se fonder sur des propos de la personne auditionnée - 3) Vétérinaires - Application à la conciliation (II de l'art. R. 242-95 du CRPM) - Absence.




De l'article 9 de la Déclaration de 1789 résulte le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition. Ces exigences impliquent qu'une personne faisant l'objet d'une procédure disciplinaire ne puisse être entendue sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'elle soit préalablement informée du droit qu'elle a de se taire. Il en va ainsi, même sans texte, lorsqu'elle est poursuivie devant une juridiction disciplinaire de l'ordre administratif. 1) A ce titre, elle doit être avisée qu'elle dispose de ce droit tant lors de son audition au cours de l'instruction que lors de sa comparution devant la juridiction disciplinaire. En cas d'appel, la personne doit à nouveau recevoir cette information. 2) a) Il s'ensuit, d'une part, que la décision de la juridiction disciplinaire est entachée d'irrégularité si la personne comparaît à l'audience sans avoir été au préalable informée du droit qu'elle a de se taire, sauf s'il est établi que la personne poursuivie n'y a pas tenu de propos susceptibles de lui préjudicier. b) D'autre part, pour retenir que la personne poursuivie a commis des manquements et lui infliger une sanction, la juridiction disciplinaire ne peut, sans méconnaître les exigences mentionnées ci-dessus, se déterminer en se fondant sur les propos tenus par cette personne lors de son audition pendant l'instruction si elle n'avait pas été préalablement avisée du droit qu'elle avait de se taire à cette occasion. 3) Le vétérinaire doit, dans le cadre des procédures disciplinaires engagées en vertu des dispositions du chapitre II du titre IV du livre II du code rural et de la pêche maritime (CRPM), être informé du droit qu'il a de se taire dans les conditions précisées ci-dessus. En revanche, une telle information n'a pas à lui être dispensée à l'occasion de la conciliation prévue par le II de l'article R. 242-95 du CRPM, eu égard à l'objet d'une telle conciliation et à ce que les propos qui y sont tenus ne sauraient être ultérieurement utilisés dans la procédure disciplinaire.





55-04-01 : Professions, charges et offices- Discipline professionnelle- Procédure devant les juridictions ordinales-

Droit de se taire (art. 9 de la Déclaration de 1789) (1) - Obligation d'informer la personne poursuivie de ce droit (2) - 1) Portée - 2) Conséquences de l'absence d'information préalable - a) Lors de la comparution à l'audience - Principe - Irrégularité de la sanction - Exception - Personne poursuivie n'ayant pas tenu de propos susceptibles de lui préjudicier (3) - b) A l'audition tenue au cours de l'instruction - Impossibilité pour la juridiction de se fonder sur des propos de la personne auditionnée - 3) Vétérinaires - Application à la conciliation (II de l'art. R. 242-95 du CRPM) - Absence.




De l'article 9 de la Déclaration de 1789 résulte le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition. Ces exigences impliquent qu'une personne faisant l'objet d'une procédure disciplinaire ne puisse être entendue sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'elle soit préalablement informée du droit qu'elle a de se taire. Il en va ainsi, même sans texte, lorsqu'elle est poursuivie devant une juridiction disciplinaire de l'ordre administratif. 1) A ce titre, elle doit être avisée qu'elle dispose de ce droit tant lors de son audition au cours de l'instruction que lors de sa comparution devant la juridiction disciplinaire. En cas d'appel, la personne doit à nouveau recevoir cette information. 2) a) Il s'ensuit, d'une part, que la décision de la juridiction disciplinaire est entachée d'irrégularité si la personne comparaît à l'audience sans avoir été au préalable informée du droit qu'elle a de se taire, sauf s'il est établi que la personne poursuivie n'y a pas tenu de propos susceptibles de lui préjudicier. b) D'autre part, pour retenir que la personne poursuivie a commis des manquements et lui infliger une sanction, la juridiction disciplinaire ne peut, sans méconnaître les exigences mentionnées ci-dessus, se déterminer en se fondant sur les propos tenus par cette personne lors de son audition pendant l'instruction si elle n'avait pas été préalablement avisée du droit qu'elle avait de se taire à cette occasion. 3) Le vétérinaire doit, dans le cadre des procédures disciplinaires engagées en vertu des dispositions du chapitre II du titre IV du livre II du code rural et de la pêche maritime (CRPM), être informé du droit qu'il a de se taire dans les conditions précisées ci-dessus. En revanche, une telle information n'a pas à lui être dispensée à l'occasion de la conciliation prévue par le II de l'article R. 242-95 du CRPM, eu égard à l'objet d'une telle conciliation et à ce que les propos qui y sont tenus ne sauraient être ultérieurement utilisés dans la procédure disciplinaire.


(1) Rappr., sur l'existence de ce droit dans la procédure pénale, Cons. const., 2 mars 2004, n° 2004-492 DC, Loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, cons. 110 ; 30 juillet 2010, n° 2010-14/22 QPC, Daniel W., cons. 28 ; sur son application à la procédure préalable à l'édiction de toute sanction ayant le caractère d'une punition, Cons. const., 8 décembre 2023, n° 2023-1074 QPC, M. Renaud N, pt. 9. (2) Rappr., s'agissant des principes applicables à une sanction disciplinaire prise par l'administration à l'encontre de l'un de ses agents, CE, Section, décision du même jour, M. , n° 490157, à publier au Recueil. (3) Rappr., devant les juridictions pénales, lorsque le prévenu n'a pas pris la parole ou sur des éléments sans rapport avec les faits reprochés, Cass., ass. plén., 4 juin 2021, pourvoi n° 21-81.656, Bull. crim. 2021 ; Cass., crim., 18 octobre 2023, pourvoi n° 21-85.228, Bull. crim. 2023.