Base de jurisprudence


Analyse n° 490157
19 décembre 2024
Conseil d'État

N° 490157
Publié au recueil Lebon

Lecture du jeudi 19 décembre 2024



01-03-01 : Actes législatifs et administratifs- Validité des actes administratifs Forme et procédure- Questions générales-

Droit de se taire (art. 9 de la Déclaration de 1789) (1) - Discipline des agents publics (2) - Obligation d'informer l'agent de ce droit - 1) Champ - a) Inclusion - Conduite de la procédure disciplinaire - b) Exclusion - Exercice du pouvoir hiérarchique - Enquêtes et inspections diligentées hors du cadre d'une procédure disciplinaire - 2) Conséquences de l'absence d'information préalable - Vice entachant d'irrégularité la sanction - Condition - Sanction reposant de manière déterminante sur des propos tenus par l'intéressé alors qu'il n'avait pas été informé de ce droit (3) - 3) Espèce - Sanction d'un magistrat du parquet (4) - Légalité - Existence.




De l'article 9 de la Déclaration de 1789 résulte le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition. De telles exigences impliquent que l'agent public faisant l'objet d'une procédure disciplinaire ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'il soit préalablement informé du droit qu'il a de se taire. 1) a) A ce titre, il doit être avisé, avant d'être entendu pour la première fois, qu'il dispose de ce droit pour l'ensemble de la procédure disciplinaire. Dans le cas où l'autorité disciplinaire a déjà engagé une procédure disciplinaire à l'encontre d'un agent et que ce dernier est ensuite entendu dans le cadre d'une enquête administrative diligentée à son endroit, il incombe aux enquêteurs de l'informer du droit qu'il a de se taire. b) En revanche, sauf détournement de procédure, le droit de se taire ne s'applique ni aux échanges ordinaires avec les agents dans le cadre de l'exercice du pouvoir hiérarchique, ni aux enquêtes et inspections diligentées par l'autorité hiérarchique et par les services d'inspection ou de contrôle, quand bien même ceux-ci sont susceptibles de révéler des manquements commis par un agent. 2) Dans le cas où un agent sanctionné n'a pas été informé du droit qu'il a de se taire alors que cette information était requise en vertu de ces principes, cette irrégularité n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la sanction prononcée que lorsque, eu égard à la teneur des déclarations de l'agent public et aux autres éléments fondant la sanction, il ressort des pièces du dossier que la sanction infligée repose de manière déterminante sur des propos tenus alors que l'intéressé n'avait pas été informé de ce droit. 2) Magistrat du parquet ayant été entendu par l'inspection générale de la justice (IGJ) postérieurement à l'engagement de poursuites disciplinaires par le garde des sceaux à son encontre et sur les faits faisant l'objet de la procédure disciplinaire le concernant, sans qu'il ait été informé qu'il avait le droit de se taire. Magistrat ayant ensuite été entendu par le rapporteur désigné par le président de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), qui l'a informé, à titre liminaire, que, tant lors de son audition par le rapporteur que lors de l'audience au fond, il pouvait faire des observations, répondre aux questions, ou se taire. Magistrat ayant été sanctionné par le garde des sceaux, après avoir recueilli l'avis de la formation compétente du CSM. D'une part, dès lors que la sanction prononcée ne se fonde pas de manière déterminante sur les propos qu'il a tenus dans le cadre de l'enquête de l'IGJ, l'absence de notification du droit qu'il avait de se taire n'entache pas d'illégalité la sanction prononcée. D'autre part, la circonstance que le magistrat n'ait pas été de nouveau informé de la possibilité qu'il avait de se taire lors de sa comparution devant le CSM, compte tenu de l'information donnée par son rapporteur lors de son audition, n'entache pas davantage d'irrégularité la procédure ayant conduit à l'avis émis sur la sanction contestée.





36-09 : Fonctionnaires et agents publics- Discipline-

Droit de se taire (art. 9 de la Déclaration de 1789) (1) - Obligation d'informer l'agent de ce droit (2) - 1) Champ - a) Inclusion - Conduite de la procédure disciplinaire - b) Exclusion - Exercice du pouvoir hiérarchique - Enquêtes et inspections diligentées hors du cadre d'une procédure disciplinaire - 2) Conséquences de l'absence d'information préalable - Vice entachant d'irrégularité la sanction - Condition - Sanction reposant de manière déterminante sur des propos tenus par l'intéressé alors qu'il n'avait pas été informé de ce droit (3) - 3) Espèce - Sanction d'un magistrat du parquet (4) - Légalité - Existence.




De l'article 9 de la Déclaration de 1789 résulte le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition. De telles exigences impliquent que l'agent public faisant l'objet d'une procédure disciplinaire ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'il soit préalablement informé du droit qu'il a de se taire. 1) a) A ce titre, il doit être avisé, avant d'être entendu pour la première fois, qu'il dispose de ce droit pour l'ensemble de la procédure disciplinaire. Dans le cas où l'autorité disciplinaire a déjà engagé une procédure disciplinaire à l'encontre d'un agent et que ce dernier est ensuite entendu dans le cadre d'une enquête administrative diligentée à son endroit, il incombe aux enquêteurs de l'informer du droit qu'il a de se taire. b) En revanche, sauf détournement de procédure, le droit de se taire ne s'applique ni aux échanges ordinaires avec les agents dans le cadre de l'exercice du pouvoir hiérarchique, ni aux enquêtes et inspections diligentées par l'autorité hiérarchique et par les services d'inspection ou de contrôle, quand bien même ceux-ci sont susceptibles de révéler des manquements commis par un agent. 2) Dans le cas où un agent sanctionné n'a pas été informé du droit qu'il a de se taire alors que cette information était requise en vertu de ces principes, cette irrégularité n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la sanction prononcée que lorsque, eu égard à la teneur des déclarations de l'agent public et aux autres éléments fondant la sanction, il ressort des pièces du dossier que la sanction infligée repose de manière déterminante sur des propos tenus alors que l'intéressé n'avait pas été informé de ce droit. 2) Magistrat du parquet ayant été entendu par l'inspection générale de la justice (IGJ) postérieurement à l'engagement de poursuites disciplinaires par le garde des sceaux à son encontre et sur les faits faisant l'objet de la procédure disciplinaire le concernant, sans qu'il ait été informé qu'il avait le droit de se taire. Magistrat ayant ensuite été entendu par le rapporteur désigné par le président de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), qui l'a informé, à titre liminaire, que, tant lors de son audition par le rapporteur que lors de l'audience au fond, il pouvait faire des observations, répondre aux questions, ou se taire. Magistrat ayant été sanctionné par le garde des sceaux, après avoir recueilli l'avis de la formation compétente du CSM. D'une part, dès lors que la sanction prononcée ne se fonde pas de manière déterminante sur les propos qu'il a tenus dans le cadre de l'enquête de l'IGJ, l'absence de notification du droit qu'il avait de se taire n'entache pas d'illégalité la sanction prononcée. D'autre part, la circonstance que le magistrat n'ait pas été de nouveau informé de la possibilité qu'il avait de se taire lors de sa comparution devant le CSM, compte tenu de l'information donnée par son rapporteur lors de son audition, n'entache pas davantage d'irrégularité la procédure ayant conduit à l'avis émis sur la sanction contestée.





37-04-02-02 : Juridictions administratives et judiciaires- Magistrats et auxiliaires de la justice- Magistrats de l'ordre judiciaire- Discipline-

Droit de se taire (art. 9 de la Déclaration de 1789) - Obligation d'informer le magistrat de ce droit - Espèce - Sanction d'un magistrat du parquet (4) - Légalité - Existence.




Magistrat du parquet ayant été entendu par l'inspection générale de la justice (IGJ) postérieurement à l'engagement de poursuites disciplinaires par le garde des sceaux à son encontre et sur les faits faisant l'objet de la procédure disciplinaire le concernant, sans qu'il ait été informé qu'il avait le droit de se taire. Magistrat ayant ensuite été entendu par le rapporteur désigné par le président de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), qui l'a informé, à titre liminaire, que, tant lors de son audition par le rapporteur que lors de l'audience au fond, il pouvait faire des observations, répondre aux questions, ou se taire. Magistrat ayant été sanctionné par le garde des sceaux, après avoir recueilli l'avis de la formation compétente du CSM. D'une part, dès lors que la sanction prononcée ne se fonde pas de manière déterminante sur les propos qu'il a tenus dans le cadre de l'enquête de l'IGJ, l'absence de notification du droit qu'il avait de se taire n'entache pas d'illégalité la sanction prononcée. D'autre part, la circonstance que le magistrat n'ait pas été de nouveau informé de la possibilité qu'il avait de se taire lors de sa comparution devant le CSM, compte tenu de l'information donnée par son rapporteur lors de son audition, n'entache pas davantage d'irrégularité la procédure ayant conduit à l'avis émis sur la sanction contestée.





59-02-02-02 : Répression- Domaine de la répression administrative Régime de la sanction administrative- Régularité-

Droit de se taire (art. 9 de la Déclaration de 1789) (1) - Discipline des agents publics (2) - Obligation d'informer l'agent de ce droit - 1) Champ - a) Inclusion - Conduite de la procédure disciplinaire - b) Exclusion - Exercice du pouvoir hiérarchique - Enquêtes et inspections diligentées hors du cadre d'une procédure disciplinaire - 2) Conséquences de l'absence d'information préalable - Vice entachant d'irrégularité la sanction - Condition - Sanction reposant de manière déterminante sur des propos tenus par l'intéressé alors qu'il n'avait pas été informé de ce droit (3) - 3) Espèce - Sanction d'un magistrat du parquet (4) - Légalité - Existence.




De l'article 9 de la Déclaration de 1789 résulte le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, dont découle le droit de se taire. Ces exigences s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition. De telles exigences impliquent que l'agent public faisant l'objet d'une procédure disciplinaire ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'il soit préalablement informé du droit qu'il a de se taire. 1) a) A ce titre, il doit être avisé, avant d'être entendu pour la première fois, qu'il dispose de ce droit pour l'ensemble de la procédure disciplinaire. Dans le cas où l'autorité disciplinaire a déjà engagé une procédure disciplinaire à l'encontre d'un agent et que ce dernier est ensuite entendu dans le cadre d'une enquête administrative diligentée à son endroit, il incombe aux enquêteurs de l'informer du droit qu'il a de se taire. b) En revanche, sauf détournement de procédure, le droit de se taire ne s'applique ni aux échanges ordinaires avec les agents dans le cadre de l'exercice du pouvoir hiérarchique, ni aux enquêtes et inspections diligentées par l'autorité hiérarchique et par les services d'inspection ou de contrôle, quand bien même ceux-ci sont susceptibles de révéler des manquements commis par un agent. 2) Dans le cas où un agent sanctionné n'a pas été informé du droit qu'il a de se taire alors que cette information était requise en vertu de ces principes, cette irrégularité n'est susceptible d'entraîner l'annulation de la sanction prononcée que lorsque, eu égard à la teneur des déclarations de l'agent public et aux autres éléments fondant la sanction, il ressort des pièces du dossier que la sanction infligée repose de manière déterminante sur des propos tenus alors que l'intéressé n'avait pas été informé de ce droit. 2) Magistrat du parquet ayant été entendu par l'inspection générale de la justice (IGJ) postérieurement à l'engagement de poursuites disciplinaires par le garde des sceaux à son encontre et sur les faits faisant l'objet de la procédure disciplinaire le concernant, sans qu'il ait été informé qu'il avait le droit de se taire. Magistrat ayant ensuite été entendu par le rapporteur désigné par le président de la formation compétente du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), qui l'a informé, à titre liminaire, que, tant lors de son audition par le rapporteur que lors de l'audience au fond, il pouvait faire des observations, répondre aux questions, ou se taire. Magistrat ayant été sanctionné par le garde des sceaux, après avoir recueilli l'avis de la formation compétente du CSM. D'une part, dès lors que la sanction prononcée ne se fonde pas de manière déterminante sur les propos qu'il a tenus dans le cadre de l'enquête de l'IGJ, l'absence de notification du droit qu'il avait de se taire n'entache pas d'illégalité la sanction prononcée. D'autre part, la circonstance que le magistrat n'ait pas été de nouveau informé de la possibilité qu'il avait de se taire lors de sa comparution devant le CSM, compte tenu de l'information donnée par son rapporteur lors de son audition, n'entache pas davantage d'irrégularité la procédure ayant conduit à l'avis émis sur la sanction contestée.


(1) Rappr., sur l'existence de ce droit, Cons. const., 2 mars 2004, n° 2004-492 DC, Loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité ; 30 juillet 2010, n° 2010-14/22 QPC, M. Daniel W., cons. 28 ; sur son application à toute sanction ayant le caractère d'une punition, Cons. const., 8 décembre 2023, n° 2023-1074 QPC, M. Renaud N. ; sur la procédure disciplinaire des fonctionnaires, Cons. const., 4 octobre 2024, n° 2024-1105 QPC, M. Yannick L. (2) Rappr., s'agissant des principes applicables à une sanction infligée par une juridiction disciplinaire de l'ordre administratif, CE, Section, décision du même jour, M. , n° 490952, à publier au Recueil. (3) Rappr., s'agissant d'une décision de condamnation d'une juridiction pénale, de la recherche du point de savoir si la juridiction ne s'est fondée ni exclusivement ni même essentiellement sur des déclarations recueillies auprès d'un gardé à vue, Cass., crim., 6 décembre 2011, pourvoi n° 11-80.326, Bull. crim. 2011, n° 247. (4) Rappr., s'agissant des magistrats du siège, à l'égard desquels le pouvoir disciplinaire est exercé par le CSM, Cons. const., 26 juin 2024, n° 2024-1097 QPC, M. Hervé A.