Base de jurisprudence


Analyse n° 479613
10 juillet 2024
Conseil d'État

N° 479613
Publié au recueil Lebon

Lecture du mercredi 10 juillet 2024



60-02-01-01-005 : Responsabilité de la puissance publique- Responsabilité en raison des différentes activités des services publics- Service public de santé- Établissements publics d'hospitalisation- Responsabilité sans faute-

Action récursoire de l'établissement public de santé condamné au titre de la responsabilité sans faute du fait des produits de santé défectueux à l'encontre du producteur (1) - Fondements - 1) Responsabilité du fait des produits défectueux - Existence - 2) Responsabilité pour faute du producteur - a) Existence (2) - b) Faits présentant un caractère fautif - i) Illustrations (3) - ii) Espèce.




Le service public hospitalier est responsable, même en l'absence de faute de sa part, des conséquences dommageables pour les usagers de la défaillance des produits et appareils de santé qu'il utilise, y compris lorsqu'il implante, au cours de la prestation de soins, un produit défectueux dans le corps d'un patient. Lorsqu'un établissement de santé a, en raison de ce que sa responsabilité était engagée sur ce fondement, indemnisé un patient des dommages ayant résulté de l'utilisation, lors de soins pratiqués dans l'établissement, d'un produit de santé défectueux, 1) il a la possibilité de rechercher, à titre récursoire, la responsabilité du producteur de ce produit sur le fondement particulier des dispositions des articles 1245 à 1245-17 du code civil. 2) a) Il est par ailleurs loisible à l'établissement de santé, s'il s'y croit fondé, d'engager une action récursoire contre le producteur de ce produit en invoquant la responsabilité pour faute de ce dernier. b) La responsabilité du producteur peut être mise en cause sur un fondement distinct de celui prévu aux articles 1245 à 1245-17 du code civil si, indépendamment de la circonstance que le produit n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, ses agissements présentent un caractère fautif. i) Il peut en aller ainsi, notamment, du fait du maintien en circulation d'un produit dont le producteur connaît le défaut ou encore d'un manquement de celui-ci à son devoir de vigilance quant aux risques présentés par le produit. Une telle faute peut également être caractérisée en cas de manquement du producteur à son devoir d'information ou de négligence dans l'élaboration du produit faute de respecter les règles de l'art ou une norme technique applicable. ii) Usure prématurée d'une prothèse tibiale trouvant son origine dans le choix, par son fabricant, d'un conditionnement inapproprié, perméable à l'oxygène et causant ainsi, pendant le stockage, la dégradation et l'usure prématurée du polyéthylène dont est constituée la prothèse en cause. Requérante à laquelle la prothèse a été implantée dans un établissement de santé ayant présenté des douleurs et des épanchements persistants en raison de la mauvaise qualité du polyéthylène de cette prothèse, qui a connu une usure prématurée résultant de la stérilisation dans des sachets non appropriés. Le producteur de la prothèse doit être regardé comme ayant commis dans le choix de l'emballage dans lequel était commercialisée cette prothèse, une négligence constitutive d'une faute susceptible d'engager sa responsabilité sur un fondement distinct de celui prévu aux articles 1245 à 1245-17 du code civil. Cette faute présente un lien direct et certain avec les dommages subis par la requérante. Condamnation du producteur de la prothèse à garantir l'établissement de santé de la condamnation prononcée à son encontre en référé-provision.





61-049 : Santé publique- Responsabilité du fait des produits de santé (voir : Responsabilité de la puissance publique)-

Action récursoire de l'établissement public de santé condamné au titre de la responsabilité sans faute du fait des produits de santé défectueux à l'encontre du producteur (1) - Fondements - 1) Responsabilité du fait des produits défectueux - Existence - 2) Responsabilité pour faute du producteur - a) Existence (2) - b) Faits présentant un caractère fautif - i) Illustrations (3) - ii) Espèce.




Le service public hospitalier est responsable, même en l'absence de faute de sa part, des conséquences dommageables pour les usagers de la défaillance des produits et appareils de santé qu'il utilise, y compris lorsqu'il implante, au cours de la prestation de soins, un produit défectueux dans le corps d'un patient. Lorsqu'un établissement de santé a, en raison de ce que sa responsabilité était engagée sur ce fondement, indemnisé un patient des dommages ayant résulté de l'utilisation, lors de soins pratiqués dans l'établissement, d'un produit de santé défectueux, 1) il a la possibilité de rechercher, à titre récursoire, la responsabilité du producteur de ce produit sur le fondement particulier des dispositions des articles 1245 à 1245-17 du code civil. 2) a) Il est par ailleurs loisible à l'établissement de santé, s'il s'y croit fondé, d'engager une action récursoire contre le producteur de ce produit en invoquant la responsabilité pour faute de ce dernier. b) La responsabilité du producteur peut être mise en cause sur un fondement distinct de celui prévu aux articles 1245 à 1245-17 du code civil si, indépendamment de la circonstance que le produit n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, ses agissements présentent un caractère fautif. i) Il peut en aller ainsi, notamment, du fait du maintien en circulation d'un produit dont le producteur connaît le défaut ou encore d'un manquement de celui-ci à son devoir de vigilance quant aux risques présentés par le produit. Une telle faute peut également être caractérisée en cas de manquement du producteur à son devoir d'information ou de négligence dans l'élaboration du produit faute de respecter les règles de l'art ou une norme technique applicable. ii) Usure prématurée d'une prothèse tibiale trouvant son origine dans le choix, par son fabricant, d'un conditionnement inapproprié, perméable à l'oxygène et causant ainsi, pendant le stockage, la dégradation et l'usure prématurée du polyéthylène dont est constituée la prothèse en cause. Requérante à laquelle la prothèse a été implantée dans un établissement de santé ayant présenté des douleurs et des épanchements persistants en raison de la mauvaise qualité du polyéthylène de cette prothèse, qui a connu une usure prématurée résultant de la stérilisation dans des sachets non appropriés. Le producteur de la prothèse doit être regardé comme ayant commis dans le choix de l'emballage dans lequel était commercialisée cette prothèse, une négligence constitutive d'une faute susceptible d'engager sa responsabilité sur un fondement distinct de celui prévu aux articles 1245 à 1245-17 du code civil. Cette faute présente un lien direct et certain avec les dommages subis par la requérante. Condamnation du producteur de la prothèse à garantir l'établissement de santé de la condamnation prononcée à son encontre en référé-provision.


(1) Cf., sur la responsabilité sans faute des établissements publics de santé à ce titre, CE, 9 juillet 2003, Assistance publique-Hôpitaux de Paris c/ Mme , n° 220437, p. 338 ; CE, Section, 25 juillet 2013, M. , n° 339922, p. 226 ; sur l'action récursoire à l'égard du producteur, CE, 30 décembre 2016, Centre hospitalier de Chambéry, n° 375406, T. pp. 682-942 ; CE, 27 mai 2021, Société hospitalière d'assurances mutuelles, n° 433822, T. pp. 769-909-925. (2) Cf., sur l'ouverture d'une action fondée sur la faute du producteur concurrente à celle tirée de la responsabilité du fait des produits défectueux, CE, 25 mai 2022, Centre hospitalier universitaire de Rennes, n° 446692, T. pp. 601-912. (3) Rappr. Cass. civ. 1re, 15 novembre 2023, n° 22-21.174, Bull. civ. I.