Base de jurisprudence


Analyse n° 464412
9 novembre 2023
Conseil d'État

N° 464412
Publié au recueil Lebon

Lecture du jeudi 9 novembre 2023



10-01-04-01 : Associations et fondations- Questions communes- Dissolution- Associations et groupements de fait loi du janvier -

Motif de dissolution d'une association ou d'un groupement de fait - Provocation à des manifestations armées ou à des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens (1° de l'art. L. 212-1 du CSI) - 1) Articles 10 et 11 de la convention EDH - Méconnaissance - Absence - 2) Espèce - Dissolution d'un groupement de fait « antifasciste » ayant publié et diffusé des propos haineux à l'encontre des forces de l'ordre, sur le fondement du 1° de l'article L. 212-1 du CSI (1) - Faits de nature à justifier la dissolution sur ce fondement eu égard, à la teneur, à la gravité et à la récurrence des actes (2).




1) Il résulte des articles 10 et 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (convention EDH) que l'exercice de la liberté d'expression et de la liberté de réunion et d'association qu'ils garantissent peut faire l'objet de restrictions prévues par la loi et constituant des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime. Compte tenu, d'une part, de la portée du 1° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure (CSI) et dès lors que la légalité de la mesure de dissolution est subordonnée à son caractère adapté, nécessaire et proportionné à la gravité des troubles susceptibles d'être portés à l'ordre public, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que ces dispositions autoriseraient, par principe, des ingérences injustifiées dans les libertés garanties par ces stipulations. En outre, la circonstance que les dispositions introduites au 1° de cet article L. 212-1 par la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 peuvent légalement fonder la dissolution d'une association ou d'un groupement à raison de faits antérieurs à l'entrée en vigueur de cette loi ne caractérise pas une méconnaissance des stipulations invoquées, dès lors que ces dispositions étaient en vigueur à la date du décret attaqué et que les restrictions apportées aux libertés précédemment mentionnées étaient ainsi, à cette date, prévues par la loi au sens de ces stipulations 2) Décret prononçant la dissolution du groupement de fait Groupe Antifasciste Lyon et environs (dit « la GALE ») sur le fondement du 1° de l'article L. 212-1 du CSI. Ce groupement a publié sur les réseaux sociaux, de façon répétée et pendant plusieurs années, des messages dans lesquels étaient insérés des photographies ou dessins représentant des policiers ou des véhicules de police incendiés, recevant des projectiles ou faisant l'objet d'autres agressions ou dégradations, en particulier lors de manifestations, assortis de textes haineux et injurieux à l'encontre de la police nationale, justifiant l'usage de la violence envers les représentants des forces de l'ordre, leurs locaux et leurs véhicules, se réjouissant de telles exactions, voire félicitant leurs auteurs. Il a également diffusé des messages approuvant et justifiant, au nom de « l'antifascisme », des violences graves commises à l'encontre de militants d'extrême-droite et de leurs biens. D'autres publications du groupement sur les réseaux sociaux ont en outre conduit à des appels, formulés par des tiers, à la violence, voire au meurtre, dirigés contre des internautes se réclamant de l'ultra-droite, sans donner lieu à une quelconque modération de la part de l'organisation, qui n'était pas dépourvue de moyens pour y procéder. Il résulte de ce qui précède que le groupement a provoqué à des agissements violents à l'encontre des personnes et des biens entrant dans le champ du 1° de l'article L. 212-1 du CSI. Eu égard, à la teneur, à la gravité et à la récurrence, pendant plusieurs années, des actes de provocation explicite et implicite à la commission d'agissements violents imputables au groupement litigieux, et à la gravité des atteintes ainsi portées à l'ordre public, la mesure de dissolution contestée ne peut être regardée, en l'espèce, comme dépourvue de caractère nécessaire ni comme présentant un caractère disproportionné. Rejet de la requête.





49-05-13 : Police- Polices spéciales- Police des associations et groupements de fait (loi du janvier ) (voir : Associations et fondations)-

Motif de dissolution d'une association ou d'un groupement de fait - Provocation à des manifestations armées ou à des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens (1° de l'art. L. 212-1 du CSI) - 1) Articles 10 et 11 de la convention EDH - Méconnaissance - Absence - 2) Espèce - Dissolution d'un groupement de fait « antifasciste » ayant publié et diffusé des propos haineux à l'encontre des forces de l'ordre, sur le fondement du 1° de l'article L. 212-1 du CSI (1) - Faits de nature à justifier la dissolution sur ce fondement eu égard, à la teneur, à la gravité et à la récurrence des actes (2).




1) Il résulte des articles 10 et 11 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (convention EDH) que l'exercice de la liberté d'expression et de la liberté de réunion et d'association qu'ils garantissent peut faire l'objet de restrictions prévues par la loi et constituant des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime. Compte tenu, d'une part, de la portée du 1° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure (CSI) et dès lors que la légalité de la mesure de dissolution est subordonnée à son caractère adapté, nécessaire et proportionné à la gravité des troubles susceptibles d'être portés à l'ordre public, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que ces dispositions autoriseraient, par principe, des ingérences injustifiées dans les libertés garanties par ces stipulations. En outre, la circonstance que les dispositions introduites au 1° de cet article L. 212-1 par la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 peuvent légalement fonder la dissolution d'une association ou d'un groupement à raison de faits antérieurs à l'entrée en vigueur de cette loi ne caractérise pas une méconnaissance des stipulations invoquées, dès lors que ces dispositions étaient en vigueur à la date du décret attaqué et que les restrictions apportées aux libertés précédemment mentionnées étaient ainsi, à cette date, prévues par la loi au sens de ces stipulations 2) Décret prononçant la dissolution du groupement de fait Groupe Antifasciste Lyon et environs (dit « la GALE ») sur le fondement du 1° de l'article L. 212-1 du CSI. Ce groupement a publié sur les réseaux sociaux, de façon répétée et pendant plusieurs années, des messages dans lesquels étaient insérés des photographies ou dessins représentant des policiers ou des véhicules de police incendiés, recevant des projectiles ou faisant l'objet d'autres agressions ou dégradations, en particulier lors de manifestations, assortis de textes haineux et injurieux à l'encontre de la police nationale, justifiant l'usage de la violence envers les représentants des forces de l'ordre, leurs locaux et leurs véhicules, se réjouissant de telles exactions, voire félicitant leurs auteurs. Il a également diffusé des messages approuvant et justifiant, au nom de « l'antifascisme », des violences graves commises à l'encontre de militants d'extrême-droite et de leurs biens. D'autres publications du groupement sur les réseaux sociaux ont en outre conduit à des appels, formulés par des tiers, à la violence, voire au meurtre, dirigés contre des internautes se réclamant de l'ultra-droite, sans donner lieu à une quelconque modération de la part de l'organisation, qui n'était pas dépourvue de moyens pour y procéder. Il résulte de ce qui précède que le groupement a provoqué à des agissements violents à l'encontre des personnes et des biens entrant dans le champ du 1° de l'article L. 212-1 du CSI. Eu égard, à la teneur, à la gravité et à la récurrence, pendant plusieurs années, des actes de provocation explicite et implicite à la commission d'agissements violents imputables au groupement litigieux, et à la gravité des atteintes ainsi portées à l'ordre public, la mesure de dissolution contestée ne peut être regardée, en l'espèce, comme dépourvue de caractère nécessaire ni comme présentant un caractère disproportionné. Rejet de la requête.


(1) Cf., sur le cadre juridique, CE, Section, 9 novembre 2023, Les Soulèvements de la Terre et autres, n°s 476384 et autres, p. 379. (2) Rappr., sur la proportionnalité de dissolutions prononcées sur le fondement du 6° de l'article L. 212-1 du CSI, CE, Section, décision du même jour, M. , n° 460457, p. 368 ; CE, Section, décision du même jour, Association coordination contre le racisme et l'islamophobie et M. , n°s 459704, 459737, p. 365 ; Comp., sur la proportionnalité d'une dissolution prononcée sur le fondement du 1° de ce même article, CE, Section, décision du même jour, Les Soulèvements de la Terre et autres, n°s 476384 et autres, p. 379.