Conseil d'État
N° 459704
Publié au recueil Lebon
Lecture du jeudi 9 novembre 2023
10-01-04-01 : Associations et fondations- Questions communes- Dissolution- Associations et groupements de fait loi du janvier -
Décret prononçant la dissolution d'une association ou d'un groupement de fait (1) - Espèce - Dissolution d'une association de lutte « contre le racisme et l'islamophobie » - 1) Provocation à des manifestations armées ou à des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens (1° de l'art. L. 212-1 du CSI) - Faits n'étant pas de nature à justifier la dissolution sur ce fondement - 2) Provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes (6° de l'art. L. 212-1 du CSI) - Faits de nature à justifier la dissolution sur ce fondement (2).
Décret prononçant la dissolution d'une association de lutte « contre le racisme et l'islamophobie » sur le fondement des 1° et 6° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure (CSI). 1) D'une part, en critiquant en public de façon véhémente, en 2016, l'action de la police, des autorités administratives et de la justice à la suite d'affrontements entre une famille musulmane et d'autres habitants d'un village, le représentant de l'association à Perpignan ne peut pas être regardé comme ayant, au sens du 1° de l'article L. 212-1 du CSI, provoqué à des agissements violents. D'autre part, si des messages que l'association a publiés par son compte sur un réseau social ont suscité des réactions de tiers sur ce même compte, celles-ci, bien qu'injurieuses ou menaçantes à l'encontre notamment du Président de la République, des forces de l'ordre ou d'une journaliste, n'appelaient pas à la violence. Il s'ensuit que les requérants sont fondés à soutenir que le décret attaqué a fait une inexacte application du 1° de l'article L. 212-1 du CSI en retenant que ces différents propos et messages entraient dans le champ de ces dispositions. 2) En revanche, par ses comptes sur les réseaux sociaux, l'association a publié en grand nombre, notamment dans la période comprise entre 2019 et sa dissolution en 2021, des propos, dont certains outranciers, sur l'actualité nationale et internationale, tendant, y compris explicitement, à imposer l'idée que les pouvoirs publics, la législation, les différentes institutions et autorités nationales ainsi que de nombreux partis politiques et médias seraient systématiquement hostiles aux croyants de religion musulmane et instrumentaliseraient l'antisémitisme pour nuire aux musulmans. Ces publications ont suscité, sur ces mêmes comptes, de nombreux commentaires haineux, antisémites, injurieux et appelant à la vindicte publique, sans que l'association ne tente de les contredire ou de les effacer. Ces agissements sont de nature à provoquer à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une nation, une prétendue race ou une religion déterminée ou à propager des idées ou théories tendant à les justifier ou les encourager, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que l'objet de l'association, tel que défini par ses statuts, n'était pas illicite. Ils entrent donc dans le champ du 6° de l'article L. 212-1 du CSI. Compte tenu du caractère grave et récurrent des agissements ainsi relevés et de la circonstance que l'association cherchait à propager ses thèses auprès du public le plus large, et alors même qu'elle fait valoir qu'elle entendait lutter contre les discriminations, la mesure de dissolution contestée ne peut être regardée, en l'espèce, comme présentant un caractère disproportionné au regard des risques de troubles à l'ordre public résultant de ces agissements. Il résulte de ce qui précède que l'auteur du décret n'a pas fait une inexacte application du 6° de l'article L. 212-1 du CSI. Il résulte par ailleurs de l'instruction qu'il aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ces dispositions.
49-05-13 : Police- Polices spéciales- Police des associations et groupements de fait (loi du janvier ) (voir : Associations et fondations)-
Décret prononçant la dissolution d'une association ou d'un groupement de fait (1) - Espèce - Dissolution d'une association de lutte « contre le racisme et l'islamophobie » - 1) Provocation à des manifestations armées ou à des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens (1° de l'art. L. 212-1 du CSI) - Faits n'étant pas de nature à justifier la dissolution sur ce fondement - 2) Provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes (6° de l'art. L. 212-1 du CSI) - Faits de nature à justifier la dissolution sur ce fondement (2).
Décret prononçant la dissolution d'une association de lutte « contre le racisme et l'islamophobie » sur le fondement des 1° et 6° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure (CSI). 1) D'une part, en critiquant en public de façon véhémente, en 2016, l'action de la police, des autorités administratives et de la justice à la suite d'affrontements entre une famille musulmane et d'autres habitants d'un village, le représentant de l'association à Perpignan ne peut pas être regardé comme ayant, au sens du 1° de l'article L. 212-1 du CSI, provoqué à des agissements violents. D'autre part, si des messages que l'association a publiés par son compte sur un réseau social ont suscité des réactions de tiers sur ce même compte, celles-ci, bien qu'injurieuses ou menaçantes à l'encontre notamment du Président de la République, des forces de l'ordre ou d'une journaliste, n'appelaient pas à la violence. Il s'ensuit que les requérants sont fondés à soutenir que le décret attaqué a fait une inexacte application du 1° de l'article L. 212-1 du CSI en retenant que ces différents propos et messages entraient dans le champ de ces dispositions. 2) En revanche, par ses comptes sur les réseaux sociaux, l'association a publié en grand nombre, notamment dans la période comprise entre 2019 et sa dissolution en 2021, des propos, dont certains outranciers, sur l'actualité nationale et internationale, tendant, y compris explicitement, à imposer l'idée que les pouvoirs publics, la législation, les différentes institutions et autorités nationales ainsi que de nombreux partis politiques et médias seraient systématiquement hostiles aux croyants de religion musulmane et instrumentaliseraient l'antisémitisme pour nuire aux musulmans. Ces publications ont suscité, sur ces mêmes comptes, de nombreux commentaires haineux, antisémites, injurieux et appelant à la vindicte publique, sans que l'association ne tente de les contredire ou de les effacer. Ces agissements sont de nature à provoquer à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une nation, une prétendue race ou une religion déterminée ou à propager des idées ou théories tendant à les justifier ou les encourager, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que l'objet de l'association, tel que défini par ses statuts, n'était pas illicite. Ils entrent donc dans le champ du 6° de l'article L. 212-1 du CSI. Compte tenu du caractère grave et récurrent des agissements ainsi relevés et de la circonstance que l'association cherchait à propager ses thèses auprès du public le plus large, et alors même qu'elle fait valoir qu'elle entendait lutter contre les discriminations, la mesure de dissolution contestée ne peut être regardée, en l'espèce, comme présentant un caractère disproportionné au regard des risques de troubles à l'ordre public résultant de ces agissements. Il résulte de ce qui précède que l'auteur du décret n'a pas fait une inexacte application du 6° de l'article L. 212-1 du CSI. Il résulte par ailleurs de l'instruction qu'il aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ces dispositions.
(1) Cf., sur le cadre juridique, CE, Section, 9 novembre 2023, Les Soulèvements de la Terre et autres, n°s 476384 et autres, à publier au Recueil. (2) Rappr., sur la proportionnalité de dissolutions prononcées sur le fondement du 6° de l'article L. 212-1 du CSI, CE, 24 septembre 2021, Association de défense des droits de l'homme - Collectif contre l'islamophobie en France et autres, n°s 449215 et autres, inédite ; CE, 2 juillet 2021, Association génération identitaire, n° 451741, inédite ; CE, Section, décision du même jour, M. , n° 460457, à publier au Recueil.
N° 459704
Publié au recueil Lebon
Lecture du jeudi 9 novembre 2023
10-01-04-01 : Associations et fondations- Questions communes- Dissolution- Associations et groupements de fait loi du janvier -
Décret prononçant la dissolution d'une association ou d'un groupement de fait (1) - Espèce - Dissolution d'une association de lutte « contre le racisme et l'islamophobie » - 1) Provocation à des manifestations armées ou à des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens (1° de l'art. L. 212-1 du CSI) - Faits n'étant pas de nature à justifier la dissolution sur ce fondement - 2) Provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes (6° de l'art. L. 212-1 du CSI) - Faits de nature à justifier la dissolution sur ce fondement (2).
Décret prononçant la dissolution d'une association de lutte « contre le racisme et l'islamophobie » sur le fondement des 1° et 6° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure (CSI). 1) D'une part, en critiquant en public de façon véhémente, en 2016, l'action de la police, des autorités administratives et de la justice à la suite d'affrontements entre une famille musulmane et d'autres habitants d'un village, le représentant de l'association à Perpignan ne peut pas être regardé comme ayant, au sens du 1° de l'article L. 212-1 du CSI, provoqué à des agissements violents. D'autre part, si des messages que l'association a publiés par son compte sur un réseau social ont suscité des réactions de tiers sur ce même compte, celles-ci, bien qu'injurieuses ou menaçantes à l'encontre notamment du Président de la République, des forces de l'ordre ou d'une journaliste, n'appelaient pas à la violence. Il s'ensuit que les requérants sont fondés à soutenir que le décret attaqué a fait une inexacte application du 1° de l'article L. 212-1 du CSI en retenant que ces différents propos et messages entraient dans le champ de ces dispositions. 2) En revanche, par ses comptes sur les réseaux sociaux, l'association a publié en grand nombre, notamment dans la période comprise entre 2019 et sa dissolution en 2021, des propos, dont certains outranciers, sur l'actualité nationale et internationale, tendant, y compris explicitement, à imposer l'idée que les pouvoirs publics, la législation, les différentes institutions et autorités nationales ainsi que de nombreux partis politiques et médias seraient systématiquement hostiles aux croyants de religion musulmane et instrumentaliseraient l'antisémitisme pour nuire aux musulmans. Ces publications ont suscité, sur ces mêmes comptes, de nombreux commentaires haineux, antisémites, injurieux et appelant à la vindicte publique, sans que l'association ne tente de les contredire ou de les effacer. Ces agissements sont de nature à provoquer à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une nation, une prétendue race ou une religion déterminée ou à propager des idées ou théories tendant à les justifier ou les encourager, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que l'objet de l'association, tel que défini par ses statuts, n'était pas illicite. Ils entrent donc dans le champ du 6° de l'article L. 212-1 du CSI. Compte tenu du caractère grave et récurrent des agissements ainsi relevés et de la circonstance que l'association cherchait à propager ses thèses auprès du public le plus large, et alors même qu'elle fait valoir qu'elle entendait lutter contre les discriminations, la mesure de dissolution contestée ne peut être regardée, en l'espèce, comme présentant un caractère disproportionné au regard des risques de troubles à l'ordre public résultant de ces agissements. Il résulte de ce qui précède que l'auteur du décret n'a pas fait une inexacte application du 6° de l'article L. 212-1 du CSI. Il résulte par ailleurs de l'instruction qu'il aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ces dispositions.
49-05-13 : Police- Polices spéciales- Police des associations et groupements de fait (loi du janvier ) (voir : Associations et fondations)-
Décret prononçant la dissolution d'une association ou d'un groupement de fait (1) - Espèce - Dissolution d'une association de lutte « contre le racisme et l'islamophobie » - 1) Provocation à des manifestations armées ou à des agissements violents à l'encontre des personnes ou des biens (1° de l'art. L. 212-1 du CSI) - Faits n'étant pas de nature à justifier la dissolution sur ce fondement - 2) Provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes (6° de l'art. L. 212-1 du CSI) - Faits de nature à justifier la dissolution sur ce fondement (2).
Décret prononçant la dissolution d'une association de lutte « contre le racisme et l'islamophobie » sur le fondement des 1° et 6° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure (CSI). 1) D'une part, en critiquant en public de façon véhémente, en 2016, l'action de la police, des autorités administratives et de la justice à la suite d'affrontements entre une famille musulmane et d'autres habitants d'un village, le représentant de l'association à Perpignan ne peut pas être regardé comme ayant, au sens du 1° de l'article L. 212-1 du CSI, provoqué à des agissements violents. D'autre part, si des messages que l'association a publiés par son compte sur un réseau social ont suscité des réactions de tiers sur ce même compte, celles-ci, bien qu'injurieuses ou menaçantes à l'encontre notamment du Président de la République, des forces de l'ordre ou d'une journaliste, n'appelaient pas à la violence. Il s'ensuit que les requérants sont fondés à soutenir que le décret attaqué a fait une inexacte application du 1° de l'article L. 212-1 du CSI en retenant que ces différents propos et messages entraient dans le champ de ces dispositions. 2) En revanche, par ses comptes sur les réseaux sociaux, l'association a publié en grand nombre, notamment dans la période comprise entre 2019 et sa dissolution en 2021, des propos, dont certains outranciers, sur l'actualité nationale et internationale, tendant, y compris explicitement, à imposer l'idée que les pouvoirs publics, la législation, les différentes institutions et autorités nationales ainsi que de nombreux partis politiques et médias seraient systématiquement hostiles aux croyants de religion musulmane et instrumentaliseraient l'antisémitisme pour nuire aux musulmans. Ces publications ont suscité, sur ces mêmes comptes, de nombreux commentaires haineux, antisémites, injurieux et appelant à la vindicte publique, sans que l'association ne tente de les contredire ou de les effacer. Ces agissements sont de nature à provoquer à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une nation, une prétendue race ou une religion déterminée ou à propager des idées ou théories tendant à les justifier ou les encourager, sans qu'ait d'incidence à cet égard la circonstance que l'objet de l'association, tel que défini par ses statuts, n'était pas illicite. Ils entrent donc dans le champ du 6° de l'article L. 212-1 du CSI. Compte tenu du caractère grave et récurrent des agissements ainsi relevés et de la circonstance que l'association cherchait à propager ses thèses auprès du public le plus large, et alors même qu'elle fait valoir qu'elle entendait lutter contre les discriminations, la mesure de dissolution contestée ne peut être regardée, en l'espèce, comme présentant un caractère disproportionné au regard des risques de troubles à l'ordre public résultant de ces agissements. Il résulte de ce qui précède que l'auteur du décret n'a pas fait une inexacte application du 6° de l'article L. 212-1 du CSI. Il résulte par ailleurs de l'instruction qu'il aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur ces dispositions.
(1) Cf., sur le cadre juridique, CE, Section, 9 novembre 2023, Les Soulèvements de la Terre et autres, n°s 476384 et autres, à publier au Recueil. (2) Rappr., sur la proportionnalité de dissolutions prononcées sur le fondement du 6° de l'article L. 212-1 du CSI, CE, 24 septembre 2021, Association de défense des droits de l'homme - Collectif contre l'islamophobie en France et autres, n°s 449215 et autres, inédite ; CE, 2 juillet 2021, Association génération identitaire, n° 451741, inédite ; CE, Section, décision du même jour, M. , n° 460457, à publier au Recueil.