Conseil d'État
N° 449788
Publié au recueil Lebon
Lecture du lundi 20 mars 2023
01-05-01 : Actes législatifs et administratifs- Validité des actes administratifs motifs- Pouvoirs et obligations de l'administration-
Refus d'adopter des mesures de protection complémentaires relatives à la pêche maritime - Légalité - Appréciation - Date à laquelle le juge statue (1).
L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à une demande tendant à prendre des mesures complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles de petits cétacés à l'occasion des activités de pêche menées dans le golfe de Gascogne réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu de l'article L. 911-1 du code de justice administrative (CJA), pour l'autorité compétente, de prendre les mesures jugées nécessaires. La légalité de ce refus doit, dès lors, être appréciée par ce juge au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.
395-04-02 : Mer- Pêche maritime- Réglementation européenne-
Refus d'adopter des mesures de protection complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles d'espèces protégées - Légalité - 1) a) Obligations de réduction des captures accidentelles d'espèces protégées - Principe de précaution (art. 5 de la Charte de l'environnement, art. 191 du TFUE, art. 2 du règlement (UE) n° 1380/2013, art. 3 et 4 du règlement (UE) 2019/1241, art. 12 de la directive 92/43/CEE) - Portée - b) Mise en oeuvre par les autorités publiques - Méthode (2) - c) Office du juge saisi d'un recours contre un refus de mettre en oeuvre de telles mesures - i) Légalité s'appréciant à la date à laquelle il statue (1) - ii) Cas où il estime que l'application du principe de précaution est justifiée - Appréciation globale du choix des mesures de protection - Contrôle restreint - Injonction - Détermination des mesures à mettre en oeuvre (4) - 2) Espèce - Mesures applicables aux petits cétacés protégés du golfe de Gascogne - a) Mesures de protection - Insuffisance, y compris en ce qui concerne les sites Natura 2000 - Conséquences - b) Système de contrôle des captures - Insuffisance - Conséquences.
Requérants demandant l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à leur demande tendant à prendre des mesures complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles de petits cétacés à l'occasion des activités de pêche menées dans le golfe de Gascogne. 1) a) Il résulte des articles 2 du règlement (UE) n° 1380/2013 « PCP » et 3 et 4 du règlement (UE) 2019/1241 qu'il incombe à l'Etat de réduire au minimum et si possible éliminer les captures accidentelles d'espèces protégées imputables à la pêche, et de l'article 12 de la directive 92/43/CEE « Habitats » qu'il lui appartient de prendre les mesures de conservation nécessaires pour faire en sorte que les captures ou mises à mort involontaires n'aient pas une incidence négative importante sur ces espèces, au regard de l'objectif consistant à assurer leur maintien ou leur rétablissement dans un état de conservation favorable. Il résulte de l'article 11 du règlement (UE) 2019/1241 que l'Etat peut, sur la base des meilleurs avis scientifiques disponibles et pour les navires battant son pavillon, mettre en place, à cette fin, des mesures d'atténuation ou des restrictions relatives à l'utilisation de certains engins de pêche. Ainsi qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), l'article 12 de la directive 92/43/CEE doit être interprété à la lumière du principe de précaution mentionné au paragraphe 2 de l'article 191 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) pour apprécier la conformité aux objectifs qu'il définit des mesures adoptées. Celles-ci doivent, de même, s'inscrire dans l'approche de précaution en matière de gestion des pêches exigée par l'article 2 du règlement n° 1380/2013. Il appartient également à l'Etat, lorsqu'il prend des mesures qui ne découlent pas des prescriptions inconditionnelles résultant du droit de l'Union européenne (UE) mais supposent l'exercice d'un pouvoir d'appréciation, de veiller au respect du principe de précaution garanti par l'article 5 de la Charte de l'environnement. b) Dans ce cadre, il appartient aux autorités compétentes, saisies d'une demande de renforcement des mesures de protection existantes, de rechercher s'il existe des éléments circonstanciés de nature à accréditer l'hypothèse d'un risque de dommage grave et irréversible pour l'environnement, qui justifierait, en dépit des incertitudes subsistant quant à sa réalité et à sa portée en l'état des connaissances scientifiques, l'application du principe de précaution. Si cette condition est remplie, il leur incombe de veiller à ce que des procédures d'évaluation du risque identifié soient mises en oeuvre par les autorités publiques ou sous leur contrôle et de vérifier que des mesures de précaution soient prises. c) i) L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à cette demande réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour l'autorité compétente, de prendre les mesures jugées nécessaires. La légalité de ce refus doit, dès lors, être appréciée par ce juge au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision. ii) Il appartient au juge, saisi de conclusions dirigées contre la décision par laquelle les autorités compétentes ont refusé de prendre des mesures de précaution supplémentaires et au vu de l'argumentation dont il est saisi, de déterminer si l'application du principe de précaution est justifiée à la date à laquelle il se prononce, et dans l'affirmative, en cas d'erreur manifeste d'appréciation dans le choix des mesures de précaution déjà prises, caractérisant l'insuffisance globale de la protection assurée au regard des exigences résultant tant du droit de l'Union que du droit national, quelles sont les mesures qui doivent être ordonnées au titre de ses pouvoirs d'injonction. 2) a) D'une part, données démontrant que le niveau des captures se maintient à un niveau bien supérieur au prélèvement biologique potentiel pour le dauphin commun, et concluant à l'insuffisance des dispositifs de dissuasion acoustique et à la nécessité de les combiner avec des fermetures spatio-temporelles. D'autre part, absence d'analyses de risque et de mesures de protection spécifiques, sauf rares exceptions, pour les sites Natura 2000 désignés dans le golfe de Gascogne pour assurer la conservation du grand dauphin et du marsouin commun, protégés au titre de l'annexe II de la directive 92/43/CEE. Insuffisance des mesures de protection, justifiant l'annulation du refus de les assortir de mesures complémentaires. Injonction de modifier la réglementation de manière à permettre d'assurer le maintien ou le rétablissement dans un état de conservation favorable du dauphin commun, du grand dauphin et du marsouin commun, en portant une attention particulière, s'agissant de ces deux dernières espèces, aux zones spéciales de conservation désignées pour leur protection. Mesures qui ne sauraient se limiter à l'extension de l'équipement des navires en dispositifs de dissuasion acoustique, tant que n'est pas établie l'efficacité de ces dispositifs pour réduire le niveau des captures accidentelles à un niveau compatible avec un maintien en état de conservation favorable des espèces concernées, sans porter atteinte dans des conditions contraires à cet objectif à leur accès aux zones de nutrition essentielles à leur survie, mais doivent comprendre des mesures de fermeture spatiales et temporelles appropriées, dans un délai de six mois. b) Système de contrôle des captures et mises à mort accidentelles des espèces de petits cétacés protégées laissant persister des niveaux élevés d'incertitude sur la fréquence et les causes des captures accidentelles, aucun dispositif ne permettant de produire des données fiables et complètes. Insuffisance du dispositif de contrôle, justifiant l'annulation du refus de mettre en oeuvre des mesures complémentaires de nature à renforcer l'efficacité de ce système de contrôle. Injonction de mettre en oeuvre des mesures complémentaires permettant d'estimer de manière fiable le nombre de captures annuelles de petits cétacés, notamment en poursuivant le renforcement du dispositif d'observation en mer, et de disposer d'éléments suffisamment précis pour définir et évaluer les mesures de conservation nécessaires.
395-04-02 : Mer- Pêche maritime- Réglementation européenne-
Capture intentionnelle d'une espèce protégée (art. 12 de la directive « Habitats » et art. L. 411-1 du code de l'environnement) - Exclusion - Captures involontaires, lorsque les règles de prévention ont été respectées.
Il résulte des termes mêmes tant des règlements relatifs à la politique commune de la pêche, qui mentionnent l'impératif de réduction des captures accidentelles à un niveau tel qu'elles ne représentent pas une menace pour l'état de conservation de l'espèce, et énumèrent diverses mesures destinées à favoriser la réduction des captures accidentelles de cétacés, que de la directive « Habitats », dont l'article 12 impose aux Etats membres de mettre en place un système de contrôle des captures accidentelles d'espèces animales protégées et de prendre les mesures de conservation appropriées pour faire en sorte que ces captures involontaires n'aient pas une incidence négative importante sur les espèces en question, que la capture de cétacés relevant d'une espèce protégée, dans le cadre d'une activité de pêche d'autres espèces, ne saurait, sauf si le pêcheur concerné ne respecte pas les règles édictées pour prévenir ces captures, être qualifiée de capture intentionnelle au sens de l'article 12 de la directive « Habitats », prohibée par l'article L. 411-1 du code de l'environnement.
395-04-03 : Mer- Pêche maritime- Réglementation nationale-
Refus d'adopter des mesures de protection complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles d'espèces protégées - Légalité - 1) a) Obligations de réduction des captures accidentelles d'espèces protégées - Principe de précaution (art. 5 de la Charte de l'environnement, art. 191 du TFUE, art. 2 du règlement (UE) n° 1380/2013, art. 3 et 4 du règlement (UE) 2019/1241, art. 12 de la directive 92/43/CEE) - Portée - b) Mise en oeuvre par les autorités publiques - Méthode (2) - c) Office du juge saisi d'un recours contre un refus de mettre en oeuvre de telles mesures - i) Légalité s'appréciant à la date à laquelle il statue (1) - ii) Cas où il estime que l'application du principe de précaution est justifiée - Appréciation globale du choix des mesures de protection - Contrôle restreint - Injonction - Détermination des mesures à mettre en oeuvre (4) - 2) Espèce - Mesures applicables aux petits cétacés protégés du golfe de Gascogne - a) Mesures de protection - Insuffisance, y compris en ce qui concerne les sites Natura 2000 - Conséquences - b) Système de contrôle des captures - Insuffisance - Conséquences.
Requérants demandant l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à leur demande tendant à prendre des mesures complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles de petits cétacés à l'occasion des activités de pêche menées dans le golfe de Gascogne. 1) a) Il résulte des articles 2 du règlement (UE) n° 1380/2013 « PCP » et 3 et 4 du règlement (UE) 2019/1241 qu'il incombe à l'Etat de réduire au minimum et si possible éliminer les captures accidentelles d'espèces protégées imputables à la pêche, et de l'article 12 de la directive 92/43/CEE « Habitats » qu'il lui appartient de prendre les mesures de conservation nécessaires pour faire en sorte que les captures ou mises à mort involontaires n'aient pas une incidence négative importante sur ces espèces, au regard de l'objectif consistant à assurer leur maintien ou leur rétablissement dans un état de conservation favorable. Il résulte de l'article 11 du règlement (UE) 2019/1241 que l'Etat peut, sur la base des meilleurs avis scientifiques disponibles et pour les navires battant son pavillon, mettre en place, à cette fin, des mesures d'atténuation ou des restrictions relatives à l'utilisation de certains engins de pêche. Ainsi qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), l'article 12 de la directive 92/43/CEE doit être interprété à la lumière du principe de précaution mentionné au paragraphe 2 de l'article 191 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) pour apprécier la conformité aux objectifs qu'il définit des mesures adoptées. Celles-ci doivent, de même, s'inscrire dans l'approche de précaution en matière de gestion des pêches exigée par l'article 2 du règlement n° 1380/2013. Il appartient également à l'Etat, lorsqu'il prend des mesures qui ne découlent pas des prescriptions inconditionnelles résultant du droit de l'Union européenne (UE) mais supposent l'exercice d'un pouvoir d'appréciation, de veiller au respect du principe de précaution garanti par l'article 5 de la Charte de l'environnement. b) Dans ce cadre, il appartient aux autorités compétentes, saisies d'une demande de renforcement des mesures de protection existantes, de rechercher s'il existe des éléments circonstanciés de nature à accréditer l'hypothèse d'un risque de dommage grave et irréversible pour l'environnement, qui justifierait, en dépit des incertitudes subsistant quant à sa réalité et à sa portée en l'état des connaissances scientifiques, l'application du principe de précaution. Si cette condition est remplie, il leur incombe de veiller à ce que des procédures d'évaluation du risque identifié soient mises en oeuvre par les autorités publiques ou sous leur contrôle et de vérifier que des mesures de précaution soient prises. c) i) L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à cette demande réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour l'autorité compétente, de prendre les mesures jugées nécessaires. La légalité de ce refus doit, dès lors, être appréciée par ce juge au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision. ii) Il appartient au juge, saisi de conclusions dirigées contre la décision par laquelle les autorités compétentes ont refusé de prendre des mesures de précaution supplémentaires et au vu de l'argumentation dont il est saisi, de déterminer si l'application du principe de précaution est justifiée à la date à laquelle il se prononce, et dans l'affirmative, en cas d'erreur manifeste d'appréciation dans le choix des mesures de précaution déjà prises, caractérisant l'insuffisance globale de la protection assurée au regard des exigences résultant tant du droit de l'Union que du droit national, quelles sont les mesures qui doivent être ordonnées au titre de ses pouvoirs d'injonction. 2) a) D'une part, données démontrant que le niveau des captures se maintient à un niveau bien supérieur au prélèvement biologique potentiel pour le dauphin commun, et concluant à l'insuffisance des dispositifs de dissuasion acoustique et à la nécessité de les combiner avec des fermetures spatio-temporelles. D'autre part, absence d'analyses de risque et de mesures de protection spécifiques, sauf rares exceptions, pour les sites Natura 2000 désignés dans le golfe de Gascogne pour assurer la conservation du grand dauphin et du marsouin commun, protégés au titre de l'annexe II de la directive 92/43/CEE. Insuffisance des mesures de protection, justifiant l'annulation du refus de les assortir de mesures complémentaires. Injonction de modifier la réglementation de manière à permettre d'assurer le maintien ou le rétablissement dans un état de conservation favorable du dauphin commun, du grand dauphin et du marsouin commun, en portant une attention particulière, s'agissant de ces deux dernières espèces, aux zones spéciales de conservation désignées pour leur protection. Mesures qui ne sauraient se limiter à l'extension de l'équipement des navires en dispositifs de dissuasion acoustique, tant que n'est pas établie l'efficacité de ces dispositifs pour réduire le niveau des captures accidentelles à un niveau compatible avec un maintien en état de conservation favorable des espèces concernées, sans porter atteinte dans des conditions contraires à cet objectif à leur accès aux zones de nutrition essentielles à leur survie, mais doivent comprendre des mesures de fermeture spatiales et temporelles appropriées, dans un délai de six mois. b) Système de contrôle des captures et mises à mort accidentelles des espèces de petits cétacés protégées laissant persister des niveaux élevés d'incertitude sur la fréquence et les causes des captures accidentelles, aucun dispositif ne permettant de produire des données fiables et complètes. Insuffisance du dispositif de contrôle, justifiant l'annulation du refus de mettre en oeuvre des mesures complémentaires de nature à renforcer l'efficacité de ce système de contrôle. Injonction de mettre en oeuvre des mesures complémentaires permettant d'estimer de manière fiable le nombre de captures annuelles de petits cétacés, notamment en poursuivant le renforcement du dispositif d'observation en mer, et de disposer d'éléments suffisamment précis pour définir et évaluer les mesures de conservation nécessaires.
54-07-01-07 : Procédure- Pouvoirs et devoirs du juge- Questions générales- Devoirs du juge-
Refus d'adopter des mesures de protection complémentaires relatives à la pêche maritime - Légalité - Appréciation - Date à laquelle le juge se prononce (1).
L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à une demande tendant à prendre des mesures complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles de petits cétacés à l'occasion des activités de pêche menées dans le golfe de Gascogne réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu de l'article L. 911-1 du code de justice administrative (CJA), pour l'autorité compétente, de prendre les mesures jugées nécessaires. La légalité de ce refus doit, dès lors, être appréciée par ce juge au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.
(1) Rappr., s'agissant du refus d'abroger un acte réglementaire, CE, Assemblée, 19 juillet 2019, Association des Américains accidentels, n°s 424216 424217, p. 296 ; s'agissant du refus de prendre des mesures de police, CE, 7 février 2020, Confédération paysanne et autres, n° 388649, p. 25. (2) Rappr., s'agissant de la portée du principe de précaution, CE, Assemblée, 12 avril 2013, Association coordination interrégionale stop THT et autres, n°s 342409 et autres, p. 60. (4) Rappr., s'agissant de la prise en compte du principe de précaution dans l'adoption de mesures de prévention des risques liés à l'utilisation de certaines variétés de plantes, CE, 7 février 2020, Confédération paysanne et autres, n° 388649, p. 25.
N° 449788
Publié au recueil Lebon
Lecture du lundi 20 mars 2023
01-05-01 : Actes législatifs et administratifs- Validité des actes administratifs motifs- Pouvoirs et obligations de l'administration-
Refus d'adopter des mesures de protection complémentaires relatives à la pêche maritime - Légalité - Appréciation - Date à laquelle le juge statue (1).
L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à une demande tendant à prendre des mesures complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles de petits cétacés à l'occasion des activités de pêche menées dans le golfe de Gascogne réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu de l'article L. 911-1 du code de justice administrative (CJA), pour l'autorité compétente, de prendre les mesures jugées nécessaires. La légalité de ce refus doit, dès lors, être appréciée par ce juge au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.
395-04-02 : Mer- Pêche maritime- Réglementation européenne-
Refus d'adopter des mesures de protection complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles d'espèces protégées - Légalité - 1) a) Obligations de réduction des captures accidentelles d'espèces protégées - Principe de précaution (art. 5 de la Charte de l'environnement, art. 191 du TFUE, art. 2 du règlement (UE) n° 1380/2013, art. 3 et 4 du règlement (UE) 2019/1241, art. 12 de la directive 92/43/CEE) - Portée - b) Mise en oeuvre par les autorités publiques - Méthode (2) - c) Office du juge saisi d'un recours contre un refus de mettre en oeuvre de telles mesures - i) Légalité s'appréciant à la date à laquelle il statue (1) - ii) Cas où il estime que l'application du principe de précaution est justifiée - Appréciation globale du choix des mesures de protection - Contrôle restreint - Injonction - Détermination des mesures à mettre en oeuvre (4) - 2) Espèce - Mesures applicables aux petits cétacés protégés du golfe de Gascogne - a) Mesures de protection - Insuffisance, y compris en ce qui concerne les sites Natura 2000 - Conséquences - b) Système de contrôle des captures - Insuffisance - Conséquences.
Requérants demandant l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à leur demande tendant à prendre des mesures complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles de petits cétacés à l'occasion des activités de pêche menées dans le golfe de Gascogne. 1) a) Il résulte des articles 2 du règlement (UE) n° 1380/2013 « PCP » et 3 et 4 du règlement (UE) 2019/1241 qu'il incombe à l'Etat de réduire au minimum et si possible éliminer les captures accidentelles d'espèces protégées imputables à la pêche, et de l'article 12 de la directive 92/43/CEE « Habitats » qu'il lui appartient de prendre les mesures de conservation nécessaires pour faire en sorte que les captures ou mises à mort involontaires n'aient pas une incidence négative importante sur ces espèces, au regard de l'objectif consistant à assurer leur maintien ou leur rétablissement dans un état de conservation favorable. Il résulte de l'article 11 du règlement (UE) 2019/1241 que l'Etat peut, sur la base des meilleurs avis scientifiques disponibles et pour les navires battant son pavillon, mettre en place, à cette fin, des mesures d'atténuation ou des restrictions relatives à l'utilisation de certains engins de pêche. Ainsi qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), l'article 12 de la directive 92/43/CEE doit être interprété à la lumière du principe de précaution mentionné au paragraphe 2 de l'article 191 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) pour apprécier la conformité aux objectifs qu'il définit des mesures adoptées. Celles-ci doivent, de même, s'inscrire dans l'approche de précaution en matière de gestion des pêches exigée par l'article 2 du règlement n° 1380/2013. Il appartient également à l'Etat, lorsqu'il prend des mesures qui ne découlent pas des prescriptions inconditionnelles résultant du droit de l'Union européenne (UE) mais supposent l'exercice d'un pouvoir d'appréciation, de veiller au respect du principe de précaution garanti par l'article 5 de la Charte de l'environnement. b) Dans ce cadre, il appartient aux autorités compétentes, saisies d'une demande de renforcement des mesures de protection existantes, de rechercher s'il existe des éléments circonstanciés de nature à accréditer l'hypothèse d'un risque de dommage grave et irréversible pour l'environnement, qui justifierait, en dépit des incertitudes subsistant quant à sa réalité et à sa portée en l'état des connaissances scientifiques, l'application du principe de précaution. Si cette condition est remplie, il leur incombe de veiller à ce que des procédures d'évaluation du risque identifié soient mises en oeuvre par les autorités publiques ou sous leur contrôle et de vérifier que des mesures de précaution soient prises. c) i) L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à cette demande réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour l'autorité compétente, de prendre les mesures jugées nécessaires. La légalité de ce refus doit, dès lors, être appréciée par ce juge au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision. ii) Il appartient au juge, saisi de conclusions dirigées contre la décision par laquelle les autorités compétentes ont refusé de prendre des mesures de précaution supplémentaires et au vu de l'argumentation dont il est saisi, de déterminer si l'application du principe de précaution est justifiée à la date à laquelle il se prononce, et dans l'affirmative, en cas d'erreur manifeste d'appréciation dans le choix des mesures de précaution déjà prises, caractérisant l'insuffisance globale de la protection assurée au regard des exigences résultant tant du droit de l'Union que du droit national, quelles sont les mesures qui doivent être ordonnées au titre de ses pouvoirs d'injonction. 2) a) D'une part, données démontrant que le niveau des captures se maintient à un niveau bien supérieur au prélèvement biologique potentiel pour le dauphin commun, et concluant à l'insuffisance des dispositifs de dissuasion acoustique et à la nécessité de les combiner avec des fermetures spatio-temporelles. D'autre part, absence d'analyses de risque et de mesures de protection spécifiques, sauf rares exceptions, pour les sites Natura 2000 désignés dans le golfe de Gascogne pour assurer la conservation du grand dauphin et du marsouin commun, protégés au titre de l'annexe II de la directive 92/43/CEE. Insuffisance des mesures de protection, justifiant l'annulation du refus de les assortir de mesures complémentaires. Injonction de modifier la réglementation de manière à permettre d'assurer le maintien ou le rétablissement dans un état de conservation favorable du dauphin commun, du grand dauphin et du marsouin commun, en portant une attention particulière, s'agissant de ces deux dernières espèces, aux zones spéciales de conservation désignées pour leur protection. Mesures qui ne sauraient se limiter à l'extension de l'équipement des navires en dispositifs de dissuasion acoustique, tant que n'est pas établie l'efficacité de ces dispositifs pour réduire le niveau des captures accidentelles à un niveau compatible avec un maintien en état de conservation favorable des espèces concernées, sans porter atteinte dans des conditions contraires à cet objectif à leur accès aux zones de nutrition essentielles à leur survie, mais doivent comprendre des mesures de fermeture spatiales et temporelles appropriées, dans un délai de six mois. b) Système de contrôle des captures et mises à mort accidentelles des espèces de petits cétacés protégées laissant persister des niveaux élevés d'incertitude sur la fréquence et les causes des captures accidentelles, aucun dispositif ne permettant de produire des données fiables et complètes. Insuffisance du dispositif de contrôle, justifiant l'annulation du refus de mettre en oeuvre des mesures complémentaires de nature à renforcer l'efficacité de ce système de contrôle. Injonction de mettre en oeuvre des mesures complémentaires permettant d'estimer de manière fiable le nombre de captures annuelles de petits cétacés, notamment en poursuivant le renforcement du dispositif d'observation en mer, et de disposer d'éléments suffisamment précis pour définir et évaluer les mesures de conservation nécessaires.
395-04-02 : Mer- Pêche maritime- Réglementation européenne-
Capture intentionnelle d'une espèce protégée (art. 12 de la directive « Habitats » et art. L. 411-1 du code de l'environnement) - Exclusion - Captures involontaires, lorsque les règles de prévention ont été respectées.
Il résulte des termes mêmes tant des règlements relatifs à la politique commune de la pêche, qui mentionnent l'impératif de réduction des captures accidentelles à un niveau tel qu'elles ne représentent pas une menace pour l'état de conservation de l'espèce, et énumèrent diverses mesures destinées à favoriser la réduction des captures accidentelles de cétacés, que de la directive « Habitats », dont l'article 12 impose aux Etats membres de mettre en place un système de contrôle des captures accidentelles d'espèces animales protégées et de prendre les mesures de conservation appropriées pour faire en sorte que ces captures involontaires n'aient pas une incidence négative importante sur les espèces en question, que la capture de cétacés relevant d'une espèce protégée, dans le cadre d'une activité de pêche d'autres espèces, ne saurait, sauf si le pêcheur concerné ne respecte pas les règles édictées pour prévenir ces captures, être qualifiée de capture intentionnelle au sens de l'article 12 de la directive « Habitats », prohibée par l'article L. 411-1 du code de l'environnement.
395-04-03 : Mer- Pêche maritime- Réglementation nationale-
Refus d'adopter des mesures de protection complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles d'espèces protégées - Légalité - 1) a) Obligations de réduction des captures accidentelles d'espèces protégées - Principe de précaution (art. 5 de la Charte de l'environnement, art. 191 du TFUE, art. 2 du règlement (UE) n° 1380/2013, art. 3 et 4 du règlement (UE) 2019/1241, art. 12 de la directive 92/43/CEE) - Portée - b) Mise en oeuvre par les autorités publiques - Méthode (2) - c) Office du juge saisi d'un recours contre un refus de mettre en oeuvre de telles mesures - i) Légalité s'appréciant à la date à laquelle il statue (1) - ii) Cas où il estime que l'application du principe de précaution est justifiée - Appréciation globale du choix des mesures de protection - Contrôle restreint - Injonction - Détermination des mesures à mettre en oeuvre (4) - 2) Espèce - Mesures applicables aux petits cétacés protégés du golfe de Gascogne - a) Mesures de protection - Insuffisance, y compris en ce qui concerne les sites Natura 2000 - Conséquences - b) Système de contrôle des captures - Insuffisance - Conséquences.
Requérants demandant l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à leur demande tendant à prendre des mesures complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles de petits cétacés à l'occasion des activités de pêche menées dans le golfe de Gascogne. 1) a) Il résulte des articles 2 du règlement (UE) n° 1380/2013 « PCP » et 3 et 4 du règlement (UE) 2019/1241 qu'il incombe à l'Etat de réduire au minimum et si possible éliminer les captures accidentelles d'espèces protégées imputables à la pêche, et de l'article 12 de la directive 92/43/CEE « Habitats » qu'il lui appartient de prendre les mesures de conservation nécessaires pour faire en sorte que les captures ou mises à mort involontaires n'aient pas une incidence négative importante sur ces espèces, au regard de l'objectif consistant à assurer leur maintien ou leur rétablissement dans un état de conservation favorable. Il résulte de l'article 11 du règlement (UE) 2019/1241 que l'Etat peut, sur la base des meilleurs avis scientifiques disponibles et pour les navires battant son pavillon, mettre en place, à cette fin, des mesures d'atténuation ou des restrictions relatives à l'utilisation de certains engins de pêche. Ainsi qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), l'article 12 de la directive 92/43/CEE doit être interprété à la lumière du principe de précaution mentionné au paragraphe 2 de l'article 191 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) pour apprécier la conformité aux objectifs qu'il définit des mesures adoptées. Celles-ci doivent, de même, s'inscrire dans l'approche de précaution en matière de gestion des pêches exigée par l'article 2 du règlement n° 1380/2013. Il appartient également à l'Etat, lorsqu'il prend des mesures qui ne découlent pas des prescriptions inconditionnelles résultant du droit de l'Union européenne (UE) mais supposent l'exercice d'un pouvoir d'appréciation, de veiller au respect du principe de précaution garanti par l'article 5 de la Charte de l'environnement. b) Dans ce cadre, il appartient aux autorités compétentes, saisies d'une demande de renforcement des mesures de protection existantes, de rechercher s'il existe des éléments circonstanciés de nature à accréditer l'hypothèse d'un risque de dommage grave et irréversible pour l'environnement, qui justifierait, en dépit des incertitudes subsistant quant à sa réalité et à sa portée en l'état des connaissances scientifiques, l'application du principe de précaution. Si cette condition est remplie, il leur incombe de veiller à ce que des procédures d'évaluation du risque identifié soient mises en oeuvre par les autorités publiques ou sous leur contrôle et de vérifier que des mesures de précaution soient prises. c) i) L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à cette demande réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, pour l'autorité compétente, de prendre les mesures jugées nécessaires. La légalité de ce refus doit, dès lors, être appréciée par ce juge au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision. ii) Il appartient au juge, saisi de conclusions dirigées contre la décision par laquelle les autorités compétentes ont refusé de prendre des mesures de précaution supplémentaires et au vu de l'argumentation dont il est saisi, de déterminer si l'application du principe de précaution est justifiée à la date à laquelle il se prononce, et dans l'affirmative, en cas d'erreur manifeste d'appréciation dans le choix des mesures de précaution déjà prises, caractérisant l'insuffisance globale de la protection assurée au regard des exigences résultant tant du droit de l'Union que du droit national, quelles sont les mesures qui doivent être ordonnées au titre de ses pouvoirs d'injonction. 2) a) D'une part, données démontrant que le niveau des captures se maintient à un niveau bien supérieur au prélèvement biologique potentiel pour le dauphin commun, et concluant à l'insuffisance des dispositifs de dissuasion acoustique et à la nécessité de les combiner avec des fermetures spatio-temporelles. D'autre part, absence d'analyses de risque et de mesures de protection spécifiques, sauf rares exceptions, pour les sites Natura 2000 désignés dans le golfe de Gascogne pour assurer la conservation du grand dauphin et du marsouin commun, protégés au titre de l'annexe II de la directive 92/43/CEE. Insuffisance des mesures de protection, justifiant l'annulation du refus de les assortir de mesures complémentaires. Injonction de modifier la réglementation de manière à permettre d'assurer le maintien ou le rétablissement dans un état de conservation favorable du dauphin commun, du grand dauphin et du marsouin commun, en portant une attention particulière, s'agissant de ces deux dernières espèces, aux zones spéciales de conservation désignées pour leur protection. Mesures qui ne sauraient se limiter à l'extension de l'équipement des navires en dispositifs de dissuasion acoustique, tant que n'est pas établie l'efficacité de ces dispositifs pour réduire le niveau des captures accidentelles à un niveau compatible avec un maintien en état de conservation favorable des espèces concernées, sans porter atteinte dans des conditions contraires à cet objectif à leur accès aux zones de nutrition essentielles à leur survie, mais doivent comprendre des mesures de fermeture spatiales et temporelles appropriées, dans un délai de six mois. b) Système de contrôle des captures et mises à mort accidentelles des espèces de petits cétacés protégées laissant persister des niveaux élevés d'incertitude sur la fréquence et les causes des captures accidentelles, aucun dispositif ne permettant de produire des données fiables et complètes. Insuffisance du dispositif de contrôle, justifiant l'annulation du refus de mettre en oeuvre des mesures complémentaires de nature à renforcer l'efficacité de ce système de contrôle. Injonction de mettre en oeuvre des mesures complémentaires permettant d'estimer de manière fiable le nombre de captures annuelles de petits cétacés, notamment en poursuivant le renforcement du dispositif d'observation en mer, et de disposer d'éléments suffisamment précis pour définir et évaluer les mesures de conservation nécessaires.
54-07-01-07 : Procédure- Pouvoirs et devoirs du juge- Questions générales- Devoirs du juge-
Refus d'adopter des mesures de protection complémentaires relatives à la pêche maritime - Légalité - Appréciation - Date à laquelle le juge se prononce (1).
L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus opposé à une demande tendant à prendre des mesures complémentaires de nature à réduire au minimum les captures accidentelles de petits cétacés à l'occasion des activités de pêche menées dans le golfe de Gascogne réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu de l'article L. 911-1 du code de justice administrative (CJA), pour l'autorité compétente, de prendre les mesures jugées nécessaires. La légalité de ce refus doit, dès lors, être appréciée par ce juge au regard des règles applicables et des circonstances prévalant à la date de sa décision.
(1) Rappr., s'agissant du refus d'abroger un acte réglementaire, CE, Assemblée, 19 juillet 2019, Association des Américains accidentels, n°s 424216 424217, p. 296 ; s'agissant du refus de prendre des mesures de police, CE, 7 février 2020, Confédération paysanne et autres, n° 388649, p. 25. (2) Rappr., s'agissant de la portée du principe de précaution, CE, Assemblée, 12 avril 2013, Association coordination interrégionale stop THT et autres, n°s 342409 et autres, p. 60. (4) Rappr., s'agissant de la prise en compte du principe de précaution dans l'adoption de mesures de prévention des risques liés à l'utilisation de certaines variétés de plantes, CE, 7 février 2020, Confédération paysanne et autres, n° 388649, p. 25.