Base de jurisprudence


Analyse n° 463014
8 février 2023
Conseil d'État

N° 463014
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du mercredi 8 février 2023



095-04-01-01-02-03 : Asile- Privation de la protection- Exclusion du droit au bénéfice de l'asile- Clauses d'exclusion de la qualité de réfugié- Comportement excluant le bénéfice de la protection (art- F de la convention de Genève)- Article F, b) de la convention de Genève-

Crime grave de droit commun - Illustration - Condamnation définitive par une juridiction pénale d'un autre Etat membre de l'UE à une peine d'emprisonnement pour l'organisation, de façon habituelle et en lien avec des complices, du transport de plusieurs dizaines de migrants contre des sommes d'argent.




Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) ayant, sur le fondement de l'article L. 711-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) devenu l'article L. 511-8, mis fin à la protection d'une personne ayant été définitivement condamnée par une juridiction pénale d'un autre Etat membre de l'Union européenne (UE) à une peine de trois ans et huit mois de prison pour avoir organisé contre rémunération à plusieurs reprises l'entrée et le transfert de migrants sur le territoire de cet autre Etat entre octobre et décembre 2011. Chambre de l'instruction d'une cour d'appel, saisie par les autorités de l'Etat membre en cause d'une demande d'exécution d'un mandat d'arrêt européen, ayant ordonné sa remise à ces dernières, après avoir constaté que les faits pour lesquels l'intéressé avait été condamné relevaient de la traite des êtres humains, catégorie mentionnée au 3° de l'article 694-32 du code de procédure pénale (CPP), de sorte qu'en application du deuxième alinéa de l'article 695-23 du même code, il n'y avait pas lieu d'examiner si ces faits constituaient également une infraction en droit français. Pour rétablir l'intéressé dans la qualité de réfugié, Cour nationale du droit d'asile (CNDA) s'étant fondée sur l'ancienneté des faits qui lui étaient reprochés, sur la circonstance que ses agissements n'étaient pas intervenus dans le cadre d'un réseau transnational important, sur la modestie des sommes récoltées, sur ce que la qualification de « trafic d'être humain » retenue par la cour d'appel ne pouvait être retenue par la CNDA dès lors que les éléments constitutifs de cette infraction définie à l'article 225-4-1 du code pénal n'étaient pas réunis, et sur ce qu'aucun élément de l'instruction ne suggérait qu'il aurait été impliqué antérieurement ou postérieurement dans des faits similaires. Toutefois, l'ancienneté des faits est par elle-même sans incidence sur la qualification de crime grave de droit commun. En outre, il n'appartient pas au juge de l'asile, pour apprécier s'il existe des raisons sérieuses de penser qu'un tel crime a été commis par le demandeur, de remettre en cause la qualification à laquelle la chambre de l'instruction procède lorsqu'elle statue, par une décision juridictionnelle sur le fondement de l'article 695-31 du CPP, sur une demande d'exécution d'un mandat d'arrêt européen émis par les autorités judiciaires d'un autre Etat membre de l'Union en vue de l'exécution d'une condamnation définitive prononcée par ces dernières, après avoir vérifié que ces faits constituent une infraction au regard de la loi française ou relèvent de l'une des catégories énumérées à l'article 694-32 du CPP. Dans ces conditions, il existait des raisons sérieuses de penser que l'intéressé avait commis un crime grave de droit commun, dès lors qu'il a été condamné définitivement par une juridiction pénale d'un Etat membre l'UE à une peine d'emprisonnement pour neuf infractions, qualifiées de « traite d'êtres humains » par l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel faisant droit à la demande d'exécution du mandat d'arrêt européen émis par l'autorité judiciaire de cet Etat, consistant à organiser, de façon habituelle et en lien avec des complices situés dans ce même Etat et un Etat tiers, le transport de plusieurs dizaines de migrants contre des sommes d'argent.