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Ariane Web: Conseil d'État 439949, lecture du 17 avril 2020

Analyse n° 439949
17 avril 2020
Conseil d'État

N° 439949
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Lecture du vendredi 17 avril 2020



29-06 : Energie- Marché de l'énergie-

Délibération de la CRE interprétant la portée de la clause de suspension pour cause de force majeure des accords-cadres conclus avec EDF pour l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH) - Référé-suspension (art. L. 521-1 du CJA) - Défaut d'urgence, la délibération 1) ayant seulement pour conséquence de reporter la mise en oeuvre de cette clause jusqu'à ce que le juge compétent se prononce, sans qu'il soit démontré que les pertes encourues par les fournisseurs mettent leur survie en péril dans ce délai, et 2) ne faisant pas obstacle à la négociation avec EDF de modalités dérogatoires de mise en oeuvre des obligations des parties tenant compte de circonstances particulières.




Fournisseurs d'électricité ayant procédé à l'achat d'électricité et de garanties de capacité auprès d'Electricité de France (EDF), pour des quantités fixées à l'avance, dans le cadre du dispositif d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH) prévu par l'article L. 336-1 du code de l'énergie. Crise sanitaire ayant entraîné une baisse générale de la consommation d'électricité en France ainsi qu'une forte baisse des prix de l'électricité sur les marchés de gros. Fournisseurs tenus d'écouler la partie excédentaire de l'électricité achetée auprès d'EDF à des prix de marché très inférieurs au prix régulé de l'ARENH. Fournisseurs estimant que la crise sanitaire a la nature d'un évènement de force majeure, au sens de l'article 10 du modèle d'accord-cadre déterminé par l'arrêté du ministre de l'énergie du 12 mars 2019, qui permet la suspension des livraisons d'électricité acquises par avance auprès d'EDF en vertu de l'article 13 de ces accords-cadres. Fournisseurs ayant demandé à la Commission de régulation de l'énergie (CRE) de modifier en conséquences les quantités d'électricité devant être injectées sur le réseau en application du mécanisme de l'ARENH, que la CRE notifie à EDF et au Réseau de transport d'électricité (RTE) en application de l'article R. 336-19 du code de l'énergie. Requérantes demandant au juge des référés de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative (CJA), l'exécution de la délibération n° 2020-071 du 26 mars 2020, par laquelle la CRE a rejeté cette demande. 1) La divergence d'interprétation opposant les associations requérantes à la CRE au sujet de la portée des dispositions des articles 10 et 13 du modèle d'accord-cadre a pour conséquence non pas une impossibilité générale et définitive de mise en oeuvre effective de la clause de suspension d'exécution des contrats pour cause de force majeure, mais seulement le report de cette mise en oeuvre jusqu'à ce que, pour chacun des fournisseurs concernés, le juge compétent, dont les associations requérantes indiquent qu'il a d'ores et déjà été saisi d'actions en référé par certains des fournisseurs intéressés, apprécie, au cas par cas, si les conditions posées par l'article 10 du modèle d'accord-cadre sont réunies. Par ailleurs, l'interprétation des dispositions de l'article 10 du modèle d'accord-cadre donnée par la CRE dans la délibération contestée n'a pas pour objet et ne saurait avoir pour effet, contrairement à ce qui est soutenu, de lier l'appréciation du juge. A supposer qu'en dépit des gains pouvant par ailleurs résulter de la mise en oeuvre sur une longue période du mécanisme d'ARENH, dont l'objet est de leur permettre de disposer d'une source d'approvisionnement à un prix le plus souvent inférieur à celui du marché, les pertes subies par les fournisseurs d'électricité concernés soient d'une ampleur telle qu'elles mettent en péril, ainsi qu'il est soutenu, leur survie à horizon de quelques mois, il n'est pas établi que ces pertes auraient un tel effet dans le délai nécessaire au juge compétent pour statuer sur les demandes dont il a été saisi. 2) Par ailleurs, la délibération contestée ne fait nullement obstacle à ce que, indépendamment de la mise en oeuvre de la clause de suspension d'exécution des contrats pour cause de force majeure, les fournisseurs concernés et EDF négocient, en application de l'article 19 du modèle d'accord cadre, des modalités dérogatoires de mise en oeuvre des obligations des parties tenant compte des circonstances particulières liées à la crise sanitaire. La CRE a au contraire, dans sa délibération, invité EDF à prendre en compte la situation individuelle des fournisseurs, en particulier ceux qui sont de petite taille et en situation de fragilité. Il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence, au sens et pour l'application de l'article L. 521-1 du CJA, n'est pas satisfaite.





54-035-02-03-02 : Procédure- Procédures instituées par la loi du juin - Référé suspension (art- L- du code de justice administrative)- Conditions d'octroi de la suspension demandée- Urgence-

Délibération de la CRE interprétant la portée de la clause de suspension pour cause de force majeure des accords-cadres conclus avec EDF pour l'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH) - Absence.




Fournisseurs d'électricité ayant procédé à l'achat d'électricité et de garanties de capacité auprès d'Electricité de France (EDF), pour des quantités fixées à l'avance, dans le cadre du dispositif d'accès régulé à l'électricité nucléaire historique (ARENH) prévu par l'article L. 336-1 du code de l'énergie. Crise sanitaire ayant entraîné une baisse générale de la consommation d'électricité en France ainsi qu'une forte baisse des prix de l'électricité sur les marchés de gros. Fournisseurs tenus d'écouler la partie excédentaire de l'électricité achetée auprès d'EDF à des prix de marché très inférieurs au prix régulé de l'ARENH. Fournisseurs estimant que la crise sanitaire a la nature d'un évènement de force majeure, au sens de l'article 10 du modèle d'accord-cadre déterminé par l'arrêté du ministre de l'énergie du 12 mars 2019, qui permet la suspension des livraisons d'électricité acquises par avance auprès d'EDF en vertu de l'article 13 de ces accords-cadres. Fournisseurs ayant demandé à la Commission de régulation de l'énergie (CRE) de modifier en conséquences les quantités d'électricité devant être injectées sur le réseau en application du mécanisme de l'ARENH, que la CRE notifie à EDF et Réseau de transport d'électricité (RTE) en application de l'article R. 336-19 du code de l'énergie. Requérantes demandant au juge des référés de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative (CJA), l'exécution de la délibération n° 2020-071 du 26 mars 2020, par laquelle la CRE a rejeté cette demande. La divergence d'interprétation opposant les associations requérantes à la CRE au sujet de la portée des dispositions des articles 10 et 13 du modèle d'accord-cadre a pour conséquence non pas une impossibilité générale et définitive de mise en oeuvre effective de la clause de suspension d'exécution des contrats pour cause de force majeure, mais seulement le report de cette mise en oeuvre jusqu'à ce que, pour chacun des fournisseurs concernés, le juge compétent, dont les associations requérantes indiquent qu'il a d'ores et déjà été saisi d'actions en référé par certains des fournisseurs intéressés, apprécie, au cas par cas, si les conditions posées par l'article 10 du modèle d'accord-cadre sont réunies. Par ailleurs, l'interprétation des dispositions de l'article 10 du modèle d'accord-cadre donnée par la CRE dans la délibération contestée n'a pas pour objet et ne saurait avoir pour effet, contrairement à ce qui est soutenu, de lier l'appréciation du juge. A supposer qu'en dépit des gains pouvant par ailleurs résulter de la mise en oeuvre sur une longue période du mécanisme d'ARENH, dont l'objet est de leur permettre de disposer d'une source d'approvisionnement à un prix le plus souvent inférieur à celui du marché, les pertes subies par les fournisseurs d'électricité concernés soient d'une ampleur telle qu'elles mettent en péril, ainsi qu'il est soutenu, leur survie à horizon de quelques mois, il n'est pas établi que ces pertes auraient un tel effet dans le délai nécessaire au juge compétent pour statuer sur les demandes dont il a été saisi. Par ailleurs, la délibération contestée ne fait nullement obstacle à ce que, indépendamment de la mise en oeuvre de la clause de suspension d'exécution des contrats pour cause de force majeure, les fournisseurs concernés et EDF négocient, en application de l'article 19 du modèle d'accord cadre, des modalités dérogatoires de mise en oeuvre des obligations des parties tenant compte des circonstances particulières liées à la crise sanitaire. La CRE a au contraire, dans sa délibération, invité EDF à prendre en compte la situation individuelle des fournisseurs, en particulier ceux qui sont de petite taille et en situation de fragilité. Il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence, au sens et pour l'application de l'article L. 521-1 du CJA, n'est pas satisfaite.


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