Conseil d'État
N° 370306
Publié au recueil Lebon
Lecture du mercredi 30 juillet 2014
10-01-04-01 : Associations et fondations- Questions communes- Dissolution- Associations et groupements de fait loi du janvier -
1) Association ou groupement ayant fait l'objet d'une dissolution volontaire - Possibilité de prononcer une dissolution sur le fondement de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure - a) Existence, dès lors que l'activité s'est maintenue et que la dissolution n'a donc eu pour objet que d'éviter les sanctions pénales - b) Espèce - 2) Notion de milice privée (2° de l'art. L. 212-1 du code de la sécurité intérieure) - a) Inclusion - i) Groupement doté d'une organisation hiérarchisée et d'une devise, d'un mode de recrutement et d'activités à caractère martial - ii) Groupement étroitement imbriqué par son organisation, son fonctionnement et son activité avec un autre présentant le caractère d'une milice - b) Exclusion - Association accueillant les réunions de membres de milices privées mais dont les activités n'ont pas ce seul objet.
1) a) Une mesure de dissolution peut être prononcée, sur le fondement de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, à l'égard d'une association ou d'un groupement de fait dont les organes statutaires ou les dirigeants auraient prononcé la dissolution lorsque l'activité de l'entité volontairement dissoute s'est maintenue, le cas échéant dans le cadre d'un groupement de fait, consécutivement à cette dissolution et que, par suite, cette dissolution n'a eu d'autre objet que d'éviter l'application des incriminations pénales prévues par l'article L. 212-1. b) En l'espèce, la dissolution volontaire, antérieure au décret de dissolution, de " Troisième voie " et des " Jeunesses nationalistes révolutionnaires ", n'avait pas immédiatement mis un terme à leur activité, laquelle s'était poursuivie au cours de la procédure contradictoire préalable à l'édiction du décret de dissolution. En outre, eu égard au contexte dans lequel est intervenue cette dissolution volontaire et à la date à laquelle elle a été décidée, elle doit être regardée comme n'ayant eu d'autre objet que d'éviter l'application des sanctions pénales. Dès lors, le décret a pu légalement regarder " Troisième voie " et les " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " comme des groupements de fait susceptibles de faire l'objet d'une mesure de dissolution sur le fondement de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. 2) a) i) Le groupement de fait " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " constituait une organisation hiérarchisée, rassemblée autour de son chef, avec comme devise : " Croire, combattre, obéir ". Ses membres étaient recrutés selon des critères d'aptitude physique pour, le cas échéant, mener des actions de force en cas " d'affrontement " et ils procédaient à des rassemblements, notamment sur la voie publique, en uniformes et en cortèges d'aspect martial. A raison de ces caractéristiques, ce groupement de fait constituait une milice privée au sens du 2° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. ii) Les groupements de fait " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " et " Troisième voie " étaient, par leur organisation, leur fonctionnement et leurs activités, étroitement imbriqués dès lors que ces entités partageaient les mêmes dirigeants, poursuivaient les mêmes objectifs et que les membres des " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " prenaient une part active aux événements, rassemblements ou manifestations, de toute nature, suscités ou organisés par " Troisième voie ". Cette imbrication était telle qu'elle a conduit le dirigeant des " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " à prononcer leur dissolution " par voie de conséquence de la dissolution " de l'association " Troisième voie ". Ainsi, ces deux entités doivent être regardées comme formant ensemble une milice privée au sens du 2° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. b) La circonstance que des membres ou dirigeants de " Troisième Voie " et des " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " se réunissaient dans le local de l'association " Envie de rêver " et participaient aux activités organisées ou accueillies par celle-ci qui, si elles s'inscrivaient dans des thématiques relevant pour partie des idées véhiculées par des deux groupements, n'avaient pas ce seul objet, ne saurait suffire, à elle seule, à caractériser une atteinte à l'ordre public susceptible, à raison de la qualification de milice privée, au sens du 2° de l'article L. 212-1, reconnue aux groupements de faits " Troisième Voie " et " Jeunesses nationalistes révolutionnaires ", de conduire à la dissolution de l'association " Envie de rêver " sur le fondement de ce même article.
N° 370306
Publié au recueil Lebon
Lecture du mercredi 30 juillet 2014
10-01-04-01 : Associations et fondations- Questions communes- Dissolution- Associations et groupements de fait loi du janvier -
1) Association ou groupement ayant fait l'objet d'une dissolution volontaire - Possibilité de prononcer une dissolution sur le fondement de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure - a) Existence, dès lors que l'activité s'est maintenue et que la dissolution n'a donc eu pour objet que d'éviter les sanctions pénales - b) Espèce - 2) Notion de milice privée (2° de l'art. L. 212-1 du code de la sécurité intérieure) - a) Inclusion - i) Groupement doté d'une organisation hiérarchisée et d'une devise, d'un mode de recrutement et d'activités à caractère martial - ii) Groupement étroitement imbriqué par son organisation, son fonctionnement et son activité avec un autre présentant le caractère d'une milice - b) Exclusion - Association accueillant les réunions de membres de milices privées mais dont les activités n'ont pas ce seul objet.
1) a) Une mesure de dissolution peut être prononcée, sur le fondement de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure, à l'égard d'une association ou d'un groupement de fait dont les organes statutaires ou les dirigeants auraient prononcé la dissolution lorsque l'activité de l'entité volontairement dissoute s'est maintenue, le cas échéant dans le cadre d'un groupement de fait, consécutivement à cette dissolution et que, par suite, cette dissolution n'a eu d'autre objet que d'éviter l'application des incriminations pénales prévues par l'article L. 212-1. b) En l'espèce, la dissolution volontaire, antérieure au décret de dissolution, de " Troisième voie " et des " Jeunesses nationalistes révolutionnaires ", n'avait pas immédiatement mis un terme à leur activité, laquelle s'était poursuivie au cours de la procédure contradictoire préalable à l'édiction du décret de dissolution. En outre, eu égard au contexte dans lequel est intervenue cette dissolution volontaire et à la date à laquelle elle a été décidée, elle doit être regardée comme n'ayant eu d'autre objet que d'éviter l'application des sanctions pénales. Dès lors, le décret a pu légalement regarder " Troisième voie " et les " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " comme des groupements de fait susceptibles de faire l'objet d'une mesure de dissolution sur le fondement de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. 2) a) i) Le groupement de fait " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " constituait une organisation hiérarchisée, rassemblée autour de son chef, avec comme devise : " Croire, combattre, obéir ". Ses membres étaient recrutés selon des critères d'aptitude physique pour, le cas échéant, mener des actions de force en cas " d'affrontement " et ils procédaient à des rassemblements, notamment sur la voie publique, en uniformes et en cortèges d'aspect martial. A raison de ces caractéristiques, ce groupement de fait constituait une milice privée au sens du 2° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. ii) Les groupements de fait " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " et " Troisième voie " étaient, par leur organisation, leur fonctionnement et leurs activités, étroitement imbriqués dès lors que ces entités partageaient les mêmes dirigeants, poursuivaient les mêmes objectifs et que les membres des " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " prenaient une part active aux événements, rassemblements ou manifestations, de toute nature, suscités ou organisés par " Troisième voie ". Cette imbrication était telle qu'elle a conduit le dirigeant des " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " à prononcer leur dissolution " par voie de conséquence de la dissolution " de l'association " Troisième voie ". Ainsi, ces deux entités doivent être regardées comme formant ensemble une milice privée au sens du 2° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure. b) La circonstance que des membres ou dirigeants de " Troisième Voie " et des " Jeunesses nationalistes révolutionnaires " se réunissaient dans le local de l'association " Envie de rêver " et participaient aux activités organisées ou accueillies par celle-ci qui, si elles s'inscrivaient dans des thématiques relevant pour partie des idées véhiculées par des deux groupements, n'avaient pas ce seul objet, ne saurait suffire, à elle seule, à caractériser une atteinte à l'ordre public susceptible, à raison de la qualification de milice privée, au sens du 2° de l'article L. 212-1, reconnue aux groupements de faits " Troisième Voie " et " Jeunesses nationalistes révolutionnaires ", de conduire à la dissolution de l'association " Envie de rêver " sur le fondement de ce même article.