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Ariane Web: Conseil d'État 232276, lecture du 28 juin 2002

Analyse n° 232276
28 juin 2002
Conseil d'État

N° 232276
Publié au recueil Lebon

Lecture du vendredi 28 juin 2002



19-01-01-05 : Contributions et taxes- Généralités- Textes fiscaux- Conventions internationales-

I. Principe de subsidiarité des conventions fiscales - a) Possibilité, pour une convention fiscale, de servir directement de base légale à une décision relative à l'imposition - Absence (1) - b) Ordre d'examen, par le juge, des questions soulevées par une contestation relative à une convention fiscale internationale - Recherche, en premier lieu, de la base légale, au regard de la loi fiscale nationale, de l'imposition et de sa qualification - Rapprochement, en deuxième lieu -le cas échéant d'office (2)- entre cette qualification et les stipulations de la convention fiscale - Détermination, par suite, de la possibilité d'appliquer la loi fiscale - II. Régime d'imposition des bénéfices d'une société établie en Suisse (1° de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse) - a) Dispositions du I de l'article 209 B du CGI - Interprétation - Taxation des bénéfices résultant de l'exploitation d'une société établie dans un Etat à fiscalité privilégiée - b) Notion de "bénéfices" au sens des stipulations du 1° de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse - En l'absence d'élément exigeant une interprétation différente, identité de nature entre ces "bénéfices" et ceux mentionnés au I de l'article 209 B du CGI - Conséquence - Stipulations de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse s'opposant à l'application des dispositions de l'article 209 B du CGI.




I. Principe de subsidiarité des conventions fiscales. a) Si une convention bilatérale conclue en vue d'éviter les doubles impositions peut, en vertu de l'article 55 de la Constitution, conduire à écarter, sur tel ou tel point, la loi fiscale nationale, elle ne peut pas, par elle-même, directement servir de base légale à une décision relative à l'imposition. b) Il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une telle convention, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer - en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office - si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale. II. Régime d'imposition des bénéfices d'une société établie en Suisse (1° de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse). a) Il ressort des termes mêmes des dispositions I de l'article 209 B du code général des impôts qu'elles ont pour objet de permettre l'imposition en France des bénéfices résultant de l'exploitation d'une société établie à l'étranger et non des distributions de bénéfices réputées opérées par cette société étrangère à son actionnaire résidant en France. b) Aux termes du 1° de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse : "Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé". Le terme "bénéfices" n'est pas défini par la convention et doit, dès lors, être interprété selon le principe énoncé au paragraphe 2 de l'article 3 de ladite convention, aux termes duquel : "Pour l'application de la convention par un Etat contractant, toute expression qui n'est pas autrement définie a le sens qui lui est attribué par la législation dudit Etat régissant les impôts faisant l'objet de la convention, à moins que le contexte n'exige une interprétation différente". En l'absence d'élément exigeant une interprétation différente, les "bénéfices" auxquels fait référence l'article 7 de la convention sont ceux déterminés selon les règles fixées par le code général des impôts. Par suite, il y a identité de nature entre les bénéfices d'exploitation d'une société établie en Suisse, dont l'imposition est attribuée à la Suisse par le 1° de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse et les résultats bénéficiaires de cette même société, imposés en France au nom de sa société mère sur le fondement de l'article 209 B du code général des impôts. En conséquence, en jugeant que les stipulations de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse s'opposent à l'application des dispositions de l'article 209 B du code général des impôts, une cour administrative d'appel ne commet pas d'erreur de droit.





19-04-01-04-01 : Contributions et taxes- Impôts sur les revenus et bénéfices- Règles générales- Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales- Personnes morales et bénéfices imposables-

a) Dispositions du I de l'article 209 B du CGI - Interprétation - Taxation des bénéfices résultant de l'exploitation d'une société établie dans un Etat à fiscalité privilégiée - b) Notion de "bénéfices" au sens des stipulations du 1° de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse - En l'absence d'élément exigeant une interprétation différente, identité de nature entre ces "bénéfices" et ceux mentionnés au I de l'article 209 B du CGI - Conséquence - Stipulations de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse s'opposant à l'application des dispositions de l'article 209 B du CGI.




a) Il ressort des termes mêmes des dispositions I de l'article 209 B du code général des impôts qu'elles ont pour objet de permettre l'imposition en France des bénéfices résultant de l'exploitation d'une société établie à l'étranger et non des distributions de bénéfices réputées opérées par cette société étrangère à son actionnaire résidant en France. b) Aux termes du 1° de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse : "Les bénéfices d'une entreprise d'un Etat contractant ne sont imposables que dans cet Etat, à moins que l'entreprise n'exerce son activité dans l'autre Etat contractant par l'intermédiaire d'un établissement stable qui y est situé". Le terme "bénéfices" n'est pas défini par la convention et doit, dès lors, être interprété selon le principe énoncé au paragraphe 2 de l'article 3 de ladite convention, aux termes duquel : "Pour l'application de la convention par un Etat contractant, toute expression qui n'est pas autrement définie a le sens qui lui est attribué par la législation dudit Etat régissant les impôts faisant l'objet de la convention, à moins que le contexte n'exige une interprétation différente". En l'absence d'élément exigeant une interprétation différente, les "bénéfices" auxquels fait référence l'article 7 de la convention sont ceux déterminés selon les règles fixées par le code général des impôts. Par suite, il y a identité de nature entre les bénéfices d'exploitation d'une société établie en Suisse, dont l'imposition est attribuée à la Suisse par le 1° de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse et les résultats bénéficiaires de cette même société, imposés en France au nom de sa société mère sur le fondement de l'article 209 B du code général des impôts. En conséquence, en jugeant que les stipulations de l'article 7 de la convention fiscale franco-suisse s'opposent à l'application des dispositions de l'article 209 B du code général des impôts, une cour administrative d'appel ne commet pas d'erreur de droit.





54-07-01-04-01-02-01 : Procédure- Pouvoirs et devoirs du juge- Questions générales- Moyens- Moyens d'ordre public à soulever d'office- Existence- Champ d'application de la loi-

Rapprochement entre, d'une part, la qualification d'une imposition au regard de la loi fiscale et, d'autre part, les stipulations d'une convention internationale (3).




Il incombe au juge de l'impôt, lorsqu'il est saisi d'une contestation relative à une convention fiscale internationale, de se placer d'abord au regard de la loi fiscale nationale pour rechercher si, à ce titre, l'imposition contestée a été valablement établie et, dans l'affirmative, sur le fondement de quelle qualification. Il lui appartient ensuite, le cas échéant, en rapprochant cette qualification des stipulations de la convention, de déterminer si cette convention fait ou non obstacle à l'application de la loi fiscale. Ce rapprochement est opéré par le juge en fonction des moyens invoqués devant lui ou même, s'agissant de déterminer le champ d'application de la loi, d'office.


(1) Comp. Assemblée, 20 octobre 1989, Nicolo, p. 190 , 24 septembre 1990, Boisdet, p. 251, 28 février 1992, S.A. Rothmans International France et S.A. Philip Morris France, p. 81. (2) Cf. 19 décembre 1986, Ministre de l'économie, des finances et du budget, c/ société "Carboline Europe", n° 54101 ; Comp. Section, 11 janvier 1991, S.A. Morgane, p. 9 (3) Comp. Section, 11 janvier 1991, S.A. Morgane, p. 9.

Voir aussi