CAA de NANTES
N° 19NT01040
2eme Chambre
Mme DOUET, président
Mme Karima BOUGRINE, rapporteur
M. GIRAUD, rapporteur public
MONAMY, avocats
Lecture du vendredi 11 juin 2021
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association " Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien ", l'association " Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de France ", l'association " Belle-Normandie Environnement ", M. BB... C..., Mme V... C..., M. AE... Z..., M. AV... Z..., Mme G... K..., M. W... AZ..., M. AF... AQ..., M. R... AA..., Mme L... AB..., M. T... AB..., Mme AN... H..., M. Y... AM..., Mme J... AM..., M. AX... AS..., M. AH... N..., Mme AK... AT..., M. M... P..., M. B... BD..., M. et Mme AY... AD..., M. X... Q..., M. et Mme E... AO..., Mme BA..., M. AC... D..., Mme AP... D..., Mme AI... D..., M. AR... portant, Mme O... portant, Mme AU... AW..., M. F... AJ..., M. T... AJ... et Mme U... AJ... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 14 juin 2017 par lequel le préfet de l'Orne a accordé à la société par actions simplifiée (SAS) Futures Energies Parc du Haut du Perche une autorisation unique portant sur la construction et l'exploitation d'un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire de l'ancienne commune de Moussonvilliers.
Par un jugement n° 1701506 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 mars 2019 et le 12 juin 2019, l'association " Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien ", l'association " Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de France ", l'association " Belle-Normandie Environnement ", M. BB... C..., Mme V... C..., M. AE... Z..., M. AV... Z..., Mme G... K..., M. W... AZ..., M. AF... AQ..., M. R... AA..., Mme L... AB..., M. T... AB..., Mme AN... H..., M. Y... AM..., Mme J... AM..., M. AX... AS..., M. AH... N..., Mme AK... AT..., M. M... P..., M. B... BD..., M. et Mme AY... AD..., M. X... Q..., M. et Mme E... AO..., Mme BA..., M. AC... D..., Mme AP... D..., Mme AI... D..., M. AR... portant, Mme O... portant, Mme AU... AW..., M. F... AJ..., M. T... AJ... et Mme U... AJ..., représentés par Me Monamy, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 31 décembre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SAS Futures Energies du Parc du Haut du Perche une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- les dispositions du XI de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 ont été méconnues, l'article R. 423-5-6 du code de l'urbanisme ne pouvant recevoir application en raison de son illégalité ;
- le projet architectural produit à l'appui de la demande est insuffisant ;
- les dispositions de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ont été méconnues, l'arrêté du 26 août 2011 ne pouvant recevoir application en raison de son illégalité ;
- l'étude d'impact est entachée d'insuffisances nombreuses et substantielles ;
- la demande d'autorisation est muette sur les modalités de financement de l'opération, en méconnaissance des articles L. 512-1 et R. 512-3 du code de l'environnement ;
- l'avis de l'autorité environnementale a été rendu dans des conditions irrégulières ;
- en limitant le montant des garanties financières à la somme de 50 000 euros par aérogénérateur alors que l'arrêté du 26 août 2011 ne pouvait recevoir application en raison de son illégalité, le préfet de l'Orne a fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 553-1 du code de l'environnement reprises à l'article R. 515-101 du même code ;
- l'autorisation attaquée méconnaît les dispositions de l'article R. 515-106 du code de l'environnement, l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 ne pouvant recevoir application en raison de son illégalité ;
- le projet porte atteinte au paysage et au patrimoine culturel en méconnaissance, d'une part, des dispositions combinées des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement et, d'autre part, de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ;
- en s'abstenant d'exiger une distance d'éloignement par rapport aux zones habitées supérieures à 500 mètres et en faisant application de l'article 3 de l'arrêté du 26 août 2011 en dépit de son illégalité, le préfet de l'Orne a méconnu les dispositions de l'article L. 515-44 du code de l'environnement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2019, la SAS Futures Energies Parc du Haut du Perche, représentée par Me Gelas, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête ;
2°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer, en application des dispositions du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, afin de permettre la régularisation des éventuels vices entachant l'autorisation ou, à défaut, limiter l'annulation, en application des dispositions du 1° du I du même article, à la phase de la procédure d'instruction concernée par l'avis de l'autorité environnementale ou par les capacités financières et ordonner à l'autorité administrative de reprendre l'instruction à cette phase ;
3°) de mettre à la charge de chacun des requérants une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les demandeurs ne justifient pas d'un intérêt à agir ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 515-106 du code de l'environnement est inopérant ;
- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
La clôture d'instruction est intervenue le 21 juin 2019 en application d'une ordonnance du même jour.
Un mémoire présenté par le ministre de la transition écologique et solidaire a été enregistré le 16 décembre 2019.
Par une lettre du 4 mai 2021, la cour a invité les parties à présenter leurs observations sur l'application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.
La SAS Futures Energies Parc du Haut du Perche a présenté des observations en réponse à invitation qui ont été enregistrées le 7 mai 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 ;
- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 ;
- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ;
- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;
- le décret n° 2012-41 du 12 janvier 2012 ;
- le décret n° 2014-450 du 2 mai 2014 ;
- le décret n° 2017-81 du 26 janvier 2017 ;
- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ;
- l'arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bougrine,
- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
- les observations de Me Monamy, représentant les requérants et les observations de Me Kerjean-Gauducheau, substituant Me Gelas et représentant la SAS Futures Energies du Parc du Haut du Perche.
Considérant ce qui suit :
1. Le 18 décembre 2015, la société par actions simplifiée (SAS) Futures Energies Parc du Haut Perche, a présenté une demande, complétée le 13 juillet 2016, d'autorisation unique portant sur un parc éolien, composé de quatre aérogénérateurs d'une hauteur en bout de pale de 146,25 mètres et d'un poste de livraison, situé sur le territoire de l'ancienne commune de Moussonvilliers, devenue commune déléguée de la commune nouvelle de Charencey (Orne). Par un arrêté du 14 juin 2017, le préfet de l'Orne lui a délivré l'autorisation sollicitée. L'association " Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien ", l'association " Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de France ", l'association " Belle-Normandie Environnement " ainsi que plusieurs résidents des anciennes communes de Moussonvilliers et de Saint-Maurice-lès-Charencey ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler cet arrêté. Ils relèvent appel du jugement du 31 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, pour écarter le moyen soulevé par les demandeurs dans le troisième de leurs six mémoires et tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 90 de la loi n° 2018-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, le tribunal a, d'une part, cité les dispositions de l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme et, d'autre part, jugé qu'il résultait de la combinaison de ces dispositions que l'autorité administrative est tenue de consulter seulement les communes et établissements publics de coopération intercommunale limitrophes de l'unité foncière d'implantation du projet. Ce faisant, et alors qu'aucune exception d'illégalité de l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme n'était soulevée, ils ont suffisamment motivé leur décision sur ce point.
3. En deuxième lieu, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, le tribunal a jugé que : " S'agissant du recueil de l'avis du conseil municipal de Moussonvilliers, en tant que propriétaire du chemin rural de la Chapelle Fortin, s'il a porté sur la totalité de l'enlèvement des câbles, alors que seul leur enlèvement dans un rayon de 10 mètres est exigé, cette circonstance n'est pas susceptible d'entacher la consultation d'irrégularité. S'agissant du recueil de l'avis des propriétaires de terrains, les pièces ne permettent pas d'établir que leur avis aurait été sollicité sur le démantèlement de plus de 10 mètres de câbles. S'agissant du recueil de l'avis du conseil départemental, il résulte des dispositions précitées de l'article 1er de l'arrêté du 6 août 2011 que le démantèlement des câbles électriques n'est exigé que dans un rayon de 10 mètres, si bien que l'avis du conseil départemental de l'Orne, propriétaire de la RD 45, dont il est constant qu'elle se trouve à plus de dix mètres de l'emplacement projeté des éoliennes, n'avait pas à être recueilli. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, faute de recueil régulier de l'avis des propriétaires de terrains, du conseil municipal de Moussonvilliers et du conseil départemental de l'Orne, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation, en ce qui concerne le démantèlement des câbles au-delà de dix mètres, doit être écarté. ". Ce faisant, il a suffisamment motivé sa réponse au moyen soulevé devant lui. A supposer qu'il ait commis une erreur en confondant l'avis du conseil municipal et l'avis du maire, celle-ci est sans incidence sur la régularité du jugement.
4. En troisième lieu, le tribunal, qui a notamment considéré que " l'étude d'impact ne dissimule pas que plusieurs hameaux [...] auront nécessairement des vues sur chacun des parcs, et mentionne, sur les photographies produites, l'emplacement du parc éolien voisin du parc en litige. L'étude d'impact souligne toutefois que ces vues seront compensées par la disposition des éoliennes du parc en litige, alignées sur celles des éoliennes voisines pour éviter les effets d'encerclement ", a énoncé les considérations de fait qui l'ont conduit à écarter le moyen tiré de l'insuffisance du volet paysager de l'étude d'impact.
5. Par suite, le jugement attaqué, qui n'est entaché ni d'un défaut de réponse à ces moyens ni d'une insuffisante motivation, n'est pas irrégulier.
Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :
6. Aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'environnement : " Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci. / Toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 ainsi que les fédérations départementales des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique et les associations agréées de pêcheurs professionnels justifient d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec leur objet et leurs activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elles bénéficient de l'agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de leur agrément. ".
7. L'association " Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de France ", agréée au niveau national au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement, a pour objet, notamment, la préservation des sites. Elle justifie ainsi d'un intérêt à agir contre l'autorisation unique portant sur la construction et l'exploitation d'un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs d'une hauteur en bout de pale de 146,25 mètres. La demande de première instance est, par suite, recevable sans qu'il soit besoin d'examiner l'intérêt à agir des autres demandeurs.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
8. D'une part, en application des dispositions du 1° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale, les autorisations uniques délivrées au titre de l'ordonnance du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement sont considérées, depuis le 1er mars 2017, comme des autorisations environnementales. D'autre part, l'article 2 de l'ordonnance du 20 mars 2014 dispose que l'autorisation unique vaut permis de construire au titre de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme. En revanche, il résulte des dispositions de l'article L. 181-2 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017, que l'autorisation environnementale, contrairement à l'autorisation unique, ne tient pas lieu du permis de construire le cas échéant requis. Il en résulte que l'autorisation unique, alors même qu'elle doit être regardée comme une autorisation environnementale depuis le 1er mars 2017, continue également à produire ses effets en tant qu'elle vaut permis de construire.
En ce qui concerne l'autorisation de construire :
9. En premier lieu, au soutien d'une demande d'autorisation unique, le pétitionnaire doit, en vertu des dispositions combinées des articles R. 431-7 et R. 431-9 du code de l'urbanisme et de l'article 4 du décret du 2 mai 2014 relatif à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement, produire un projet architectural comportant notamment un plan de masse et indiquant les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics.
10. Il ressort des pièces du dossier que le sous-dossier n° 4, joint à la demande, précise que le poste de livraison, qui présentera une superficie d'environ 25 mètres carrés et une hauteur de 3 mètres, constitue la limite de propriété entre le réseau interne au parc éolien et le réseau externe. L'emplacement de ce poste de livraison figure sur les plans joints à la demande. Il est, enfin, fait état de ce qu'il sera raccordé soit au poste source d'Aube, soit au poste source de Verneuil-sur-Avre. Le dossier de la demande ne présentait pas, pour l'application des articles du code de l'urbanisme mentionnés au point précédent, d'insuffisance en ce qui concerne l'indication des modalités de raccordement.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 de l'ordonnance du 20 mars 2014 : " L'autorisation unique est instruite et délivrée dans les conditions applicables à l'autorisation prévue aux articles L. 512-1 et L. 512-2 du code de l'environnement. ". L'article 4 de cette même ordonnance prévoit que le projet reste soumis : " lorsque l'autorisation unique tient lieu de permis de construire, aux dispositions du chapitre Ier, du chapitre II, de la section 1 du chapitre V du titre II du chapitre Ier du titre III du livre IV du code de l'urbanisme. ". Aux termes de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 : " XI. - Pour les projets éoliens dont les caractéristiques les soumettent à des autorisations d'urbanisme, les communes et établissements de coopération intercommunale limitrophes du périmètre de ces projets sont consultés pour avis dans le cadre de la procédure d'instruction de la demande d'urbanisme concernée. ". Selon l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date du permis contesté issue du décret n° 2012-41 du 12 janvier 2012 : " Dans le cas d'un projet éolien soumis à permis de construire et situé en dehors d'une zone de développement de l'éolien définie par le préfet, l'autorité compétente recueille, conformément aux dispositions prévues au XI de l'article 90 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, l'avis des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme ou d'autorisations d'urbanisme limitrophes de l'unité foncière d'implantation du projet ". Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme ne figure pas parmi les dispositions auxquelles est soumise l'autorisation unique, lorsqu'elle tient lieu de permis de construire, et que l'avis des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme ou d'autorisations d'urbanisme limitrophes de l'unité foncière d'implantation du projet n'est pas requis. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 et celui tiré de l'illégalité de l'article R. 423-5-6 doivent être écartés comme inopérants.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel au sens de cet article, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
13. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'étude paysagère produite par la société pétitionnaire que le projet de parc en litige est implanté sur un plateau de parcelles agricoles ponctuellement boisées à Moussonvilliers entre le Pays d'Ouche et le Perche. La zone d'implantation du projet est, quant à elle, entourée de nombreux hameaux et s'inscrit dans une aire, s'étendant jusqu'à 3 kilomètres, caractérisée notamment par la qualité de l'habitat et des espaces publics ainsi qu'une grande homogénéité contribuant à la qualité paysagère. La construction d'un parc éolien de trois aérogénérateurs à environ 1 500 mètres du projet, le long de la route RN 12, a néanmoins été autorisée. Enfin, sont localisés, dans un périmètre plus éloigné, notamment dans le centre urbain de Verneuil-sur-Avre, plusieurs éléments de patrimoine d'intérêt, certains bénéficiant d'ailleurs d'une protection au titre de la législation sur les monuments historiques.
14. L'espace agricole qui constitue les abords immédiats du projet et qui accueille quelques habitations, dont l'intérêt paysager est relatif, n'est pas foncièrement impacté par le projet litigieux, constitué d'un poste de livraison et de quatre aérogénérateurs. Ces quatre aérogénérateurs sont séparés par des distances inter-machines identiques et implantés en ligne droite en suivant la même orientation, sud-ouest / nord-est, que celle des lignes fortes du paysage et de l'autre parc mentionné au point précédent de sorte que, à l'échelle de l'aire d'étude rapprochée, la cohérence et la lisibilité du projet dans le paysage sont assurées. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la vue vers le château de la Corbière, dont il n'est pas contesté qu'il bénéficie d'un environnement très boisé, serait altérée par la perception simultanée du projet. S'agissant du château de Chennebrun, inscrit sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, s'il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux sera partiellement visible, de manière cumulée avec l'autre parc éolien, cette seule circonstance ne suffit pas, en l'espèce, à caractériser une atteinte significative à ce site. Il suit de là qu'en autorisant la construction du parc en litige, le préfet de l'Orne n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne l'autorisation environnementale :
S'agissant de la demande d'autorisation :
Quant aux avis des propriétaires intéressés :
15. Aux termes des dispositions de l'article R. 512-6, alors en vigueur, du code de l'environnement : " I.-A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : / (...) / 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ; / (...) ".
16. D'abord, il est constant que le maire de l'ancienne commune de Moussonvilliers a, le 9 février 2016, émis un avis sur la remise en état du site. Il résulte des dispositions du 1° de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales que le maire est compétent en matière de conservation et d'administration des biens de la commune. Partant, la commune de Moussonvilliers a, en sa qualité de propriétaire du chemin rural de la chapelle Fortin, été régulièrement consultée. Ensuite, s'il ne résulte pas de l'instruction que le département de l'Orne, propriétaire de la route RD 45, aurait été spécifiquement consulté sur la remise en état du site, le sous-préfet de Mortagne-sur-Perche a, le 30 novembre 2016, saisi pour avis sur le projet le département de l'Orne, lequel ne s'est pas prononcé. Enfin, il ne ressort d'aucun élément de l'instruction, notamment pas de la teneur des avis figurant en annexe n° 3 du sous-dossier n° 3 joint à la demande, que les propriétaires consultés sur l'état dans lequel le site devra être remis en état aient été trompés quant à l'étendue des opérations de démantèlement et de remise en état exigées par l'arrêté, alors en vigueur, du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent. En particulier, il n'est pas établi que leur aurait été communiquée l'information selon laquelle il serait procédé au démantèlement de l'intégralité des câbles alors que seuls ceux situés dans un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison sont concernés par l'article 1er de l'arrêté mentionné ci-dessus. Il s'ensuit que, d'une part, les dispositions précitées de l'article R. 512-6, alors en vigueur, du code de l'environnement n'ont pas été méconnues et, d'autre part, l'illégalité entachant l'article 1er de cet arrêté en ce qu'il prévoit le démantèlement " des câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison " n'est pas utilement excipée.
Quant à la présentation des capacités financières de la société pétitionnaire :
17. En vertu des dispositions du 5° de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, alors en vigueur, la demande d'autorisation mentionne les capacités financières de l'exploitant. Il résulte de ces dispositions que le pétitionnaire est tenu de fournir, à l'appui de sa demande, des indications précises et étayées sur ses capacités financières.
18. En l'espèce, le sous-dossier n° 3 joint à la demande expose que le capital de la société Futures Energies Parc du Haut Perche est entièrement détenu par la société Futures Energies SARL, filiale de la holding Futures Energies laquelle appartient au groupe Engie. Il précise que le capital apporté s'élève à 40 000 euros et que ce capital est variable avec un maximum de 100 000 000 euros. Un bilan simplifié de la société mère, Futures Energies SARL, ainsi qu'un tableau reprenant les principales données de son compte de résultat au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 sont reproduits tandis que les comptes annuels de la société pétitionnaire au titre de l'exercice clos en 2015 figurent en annexes. Le dossier de la demande comporte également une lettre d'intention émanant d'une société de caution et portant uniquement sur les garanties financières de démantèlement. Alors qu'il est précisé que les " capacités financières de Futures Energies Parc du Haut Perche sont directement liées à celles de Futures Energies SARL et donc de Engie ", le dossier ne comporte pas d'engagement financier de la société Futures Energies SARL ni de précisions sur le coût du projet. Cependant, la société Engie Green France s'est engagée, par une lettre du 28 février 2016, dont il n'est ni soutenu ni même allégué qu'elle aurait été portée à la connaissance du public, à mettre à la disposition de la société pétitionnaire, " pendant tout le temps où [elle] sera actionnaire " de cette dernière, " les fonds nécessaires à la construction et à l'exploitation du Projet sous la forme d'une contribution au financement du Projet à hauteur de sa Quote-Part via : / (i) un apport en fonds propres pour 25 % du cout total du projet au titre des fonds propres apportés par la FUTURES ENERGIES - Parc du Haut du Perche ; ou / (ii) un apport en fonds propres égal à 100 % du coût total du Projet si absence de financement par un emprunt bancaire ". Aucune information ne renseigne toutefois l'identité des autres actionnaires, alors que l'actionnariat semble avoir évolué. Dans ces conditions, les indications particulièrement succinctes et non étayées figurant dans le dossier de la demande d'autorisation ne permettaient pas d'apprécier les capacités financières dont la société pétitionnaire serait effectivement en mesure de disposer pour financer un projet dont le coût est estimé, selon la lettre du 28 février 2016, à 11 580 000 euros. Cette lacune a eu pour effet de nuire à l'information complète du public.
Quant à l'étude d'impact :
19. Aux termes des dispositions de l'article R. 512-6, alors en vigueur, du code de l'environnement : " I.-A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : / (...) / 4° L'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1 dont le contenu est défini à l'article R. 122-5 et complété par l'article R. 512-8 ; / (...) ". L'article R. 122-5 de ce code, dans sa version applicable au litige, dispose : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / (...) l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : / (...) / 3° Une description des aspects pertinents de l'état actuel de l'environnement, (...) / 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; / 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : / a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; / b) De l'utilisation des ressources naturelles, en particulier les terres, le sol, l'eau et la biodiversité, en tenant compte, dans la mesure du possible, de la disponibilité durable de ces ressources ; / c) De l'émission de polluants, du bruit, de la vibration, de la lumière, la chaleur et la radiation, de la création de nuisances et de l'élimination et la valorisation des déchets ; / d) Des risques pour la santé humaine, pour le patrimoine culturel ou pour l'environnement ; / e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés, en tenant compte le cas échéant des problèmes environnementaux relatifs à l'utilisation des ressources naturelles et des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement susceptibles d'être touchées. Ces projets sont ceux qui, lors du dépôt de l'étude d'impact : / (...) / - ont fait l'objet d'une évaluation environnementale au titre du présent code et pour lesquels un avis de l'autorité environnementale a été rendu public. / (...) / La description des éventuelles incidences notables sur les facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 porte sur les effets directs et, le cas échéant, sur les effets indirects secondaires, cumulatifs, transfrontaliers, à court, moyen et long termes, permanents et temporaires, positifs et négatifs du projet ; / (...) ". Aux termes des dispositions du I de l'article R. 512-8, alors en vigueur, du même code : " Le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. ".
20. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
21. En premier lieu, ainsi que le soutiennent les requérants, l'étude d'impact se borne à indiquer, s'agissant du raccordement du projet au réseau public de transport et de distribution, que celui-ci sera réalisé par ERDF ou RTE au moyen de câbles souterrains reliant le parc soit au poste source de Verneuil-sur-Avre situé à 24 kilomètres, soit à celui d'Aube situé à 20 kilomètres. Les incidences de ce raccordement sur l'environnement ne sont pas analysées. Toutefois, les requérants n'apportent aucun commencement de justification de nature à établir la réalité, la nature et l'ampleur des incidences sur l'environnement dont ils se prévalent. Il ne résulte pas de l'instruction, dans ces conditions, que le raccordement critiqué serait susceptible d'emporter pour l'environnement des effets notables dont l'absence de traitement par l'étude d'impact entacherait cette dernière d'insuffisance.
22. En deuxième lieu, la seule circonstance qu'un bureau d'études a mis en évidence, s'agissant d'un projet de parc éolien situé en Haute-Vienne, l'exposition des habitations riveraines au phénomène d'ombres portées ne suffit pas à démontrer que le projet contesté dans le cadre du présent litige serait susceptible de générer le même phénomène et d'emporter ainsi pour le voisinage des effets notables que l'étude d'impact aurait dû mentionner.
23. En troisième lieu, le secteur d'implantation du projet présente une très forte de densité de cavités souterraines. Il ressort de la mission de diagnostic géotechnique diligentée par l'association " Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien " en août 2017 qu'une marnière remblayée est localisée à proximité de l'emprise de l'aérogénérateur E2 projeté. Toutefois, si l'étude d'impact énonce, à propos des vides souterrains, qu'" aucun indice n'est recensé sur la zone d'implantation du projet ou ses abords immédiats ", elle expose également que " l'existence de cavités souterraines au droit de la zone du projet n'est pas avérée, mais une présence éventuelle ne peut être totalement écartée. Des investigations géotechniques détaillées sur chacune des parcelles d'implantation des éoliennes permettront d'écarter tout risque de découverte d'une telle cavité ". Elle souligne, par ailleurs, que le secteur est soumis au risque d'effondrement et que la zone d'implantation du projet est concernée dans sa totalité à une prédisposition à ce phénomène. Ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'étude serait, sur ce point, entachée d'inexactitudes, omissions ou insuffisances.
24. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que le secteur d'implantation du projet est caractérisé par une richesse chiroptérologique. En particulier, se trouve dans l'aire d'étude immédiate le site " Forêts, étangs et tourbières du Haut-Perche ", identifié comme site du réseau Natura 2000 en raison de l'intérêt qu'il présente en ce qui concerne plusieurs espèces de chiroptères. L'étude chiroptérologique s'appuie sur un inventaire dressé grâce à quatorze sorties de terrain réalisées en 2010-2011 et en 2014 au cours de trois des quatre phases du cycle de vie des chiroptères. D'une part, il résulte de l'instruction et notamment de l'avis de l'autorité environnementale que la hêtraie plantée dans la zone d'implantation du projet et qu'il est prévu de détruire à raison de 500 mètres carrés, héberge potentiellement des arbres gîtes pour les chauve-souris et que la présence de tels gîtes n'a pas été vérifiée. Si l'arrêté contesté prescrit à l'exploitant de procéder à cette vérification avant d'entreprendre la coupe, cette prescription n'est pas de nature à pallier l'insuffisance de l'information dont a disposé le public au cours de l'enquête publique. D'autre part, il ressort des mentions de l'étude que les écoutes réalisées en 2010-2011 puis en 2014, selon des protocoles, du matériel et des traitements de données différents, n'ont pas pu être analysées ensemble et que " Les indices d'activité acoustique ont été calculés pour les investigations menées en 2014 uniquement. (...) la nature des protocoles de 2010 et 2011 ne permet pas une évaluation pertinente de tels indices ". Or, seules six des quatorze sorties ont été réalisées en 2014 alors que les recommandations de la société française pour l'étude et la protection des Mammifères (SFEPM) et d'Eurobats, bien que n'ayant pas de valeur réglementaires, fixe un minimum de 21 à 22 sorties. Certains mois, correspondant à une activité précise, n'ont été couverts que par des sorties de 2010-2011 alors, au demeurant, que, ainsi que l'énonce une note du 31 juillet 2017 d'une société de conseil en environnement, sollicitée par les requérants, il est d'usage d'exploiter les données de moins de trois ans. D'ailleurs, cette société a émis de sérieuses réserves quant à la fiabilité du diagnostic exposé dans l'étude d'impact. Il résulte de l'ensemble de ces circonstances que l'étude chiroptérologique présente des défauts et des insuffisances de nature, dans la présente espèce, à entraîner une sous-estimation des incidences réelles du projet. Celle-ci a eu pour effet de nuire à l'information complète de la population et été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
25. En cinquième lieu, le lieudit " La Vallée ", situé à seulement 511 mètres du projet, correspond au groupe d'habitations le plus proche de celui-ci. Il résulte de l'instruction que les mesures acoustiques censées rendre compte des incidences sonores du projet depuis cet espace ont été réalisées depuis un autre hameau plus distant de quelques centaines de mètres. La société pétitionnaire n'était pas, il est vrai, tenue de procéder à des mesures depuis chaque habitation ni même depuis chaque hameau. Toutefois, alors que l'article L. 515-44 du code de l'environnement prévoit que le préfet apprécie la distance minimale d'éloignement entre les installations et les constructions à usage d'habitation au regard de l'étude d'impact, l'erreur dont est entachée l'étude sur ce point a, en l'espèce, compte tenu de la situation particulièrement proche de ce hameau par rapport au projet, été de nature à induire l'autorité décisionnaire en erreur et à nuire à la bonne information du public.
26. En sixième lieu, si l'étude d'impact fait état de la situation particulière des hameaux situés entre le parc litigieux et un autre parc éolien ainsi que du risque d'effet d'encerclement qui en résulte, les simulations visuelles qui correspondent aux perceptions depuis les lieudits Le Rouilly et les Clottes, au nord et au sud de la zone d'implantation du projet, ainsi que celle correspondant au hameau de La Haudière ne suffisent pas à rendre compte de l'impact visuel pour les hameaux les plus exposés au risque ci-dessus évoqué, en particulier ceux de La Vallée, Les Létumières ou la Roberdière, dont la proximité avec chacun des deux parcs, à raison de 700 mètres environ, ainsi que la localisation particulière entre deux lignes d'aérogénérateurs génèrent une sensibilité singulièrement forte. Ils ne permettent pas davantage d'apprécier la réalité des " espaces de respiration " ménagés par la pétitionnaire. Ainsi, alors même que l'étude d'impact, qui doit être proportionnée aux enjeux, n'a pas à contenir une simulation visuelle depuis chaque habitation ou groupes d'habitations riveraines, le volet paysager de cette étude, laquelle doit permettre au préfet, ainsi qu'il a été dit au point précédent, d'apprécier, en application de l'article L. 515-44 du code de l'environnement, l'adéquation de la distance d'éloignement entre les installations et les constructions à usage d'habitation, est, en l'espèce, entachée sur ce point d'une insuffisance. Celle-ci a d'ailleurs été relevée par l'autorité environnementale dont l'avis énonce : " il aurait été intéressant de disposer de photomontages permettant d'appréhender, depuis les hameaux, la pertinence de ces espaces de respiration au vu des surfaces occupées par les éoliennes dans le champ de vision (à l'est et à l'ouest) ". Cette insuffisance, qui a, de surcroît, conduit le préfet de l'Orne à prescrire, par l'article 2.3.2 de l'arrêté contesté, une " analyse des visibilités, depuis les hameaux se trouvant encadrés par les deux projets de parcs ", a été de nature à induire l'autorité décisionnaire en erreur et à nuire à la bonne information du public.
S'agissant de l'avis de l'autorité environnementale :
27. L'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation de l'article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, il résulte clairement des dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.
28. Lorsqu'un projet est autorisé par un préfet de département autre que le préfet de région, l'avis rendu sur le projet par le préfet de région en tant qu'autorité environnementale doit, en principe, être regardé comme ayant été émis par une autorité disposant d'une autonomie réelle répondant aux exigences de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, sauf dans le cas où c'est le même service qui a, à la fois, instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis de l'autorité environnementale. En particulier, les exigences de la directive, tenant à ce que l'entité administrative appelée à rendre l'avis environnemental sur le projet dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, ne peuvent être regardées comme satisfaites lorsque le projet a été instruit pour le compte du préfet de département par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement et que l'avis environnemental émis par le préfet de région a été préparé par la même direction, à moins que l'avis ait été préparé, au sein de cette direction, par le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales.
29. Il résulte de l'instruction, notamment des écritures du préfet de l'Orne devant le tribunal et du rapport de l'inspecteur des installations classées du 4 avril 2017, que la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Normandie (Unité départementale de l'Orne) a instruit, au moins en partie, la demande d'autorisation, pour le compte du préfet de l'Orne. Si ce dernier a fait valoir devant les premiers juges que l'avis du 15 septembre 2016 de l'autorité environnementale signé par le préfet de région a pu être préparé, au sein de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement par le Pôle d'évaluation environnementale, aucun élément de l'instruction ne permet de l'établir, pas plus qu'il n'est justifié de ce que ce pôle serait effectivement le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales. Par suite, l'avis de l'autorité environnementale a été émis dans des conditions qui ne répondent pas aux exigences de la directive du 13 décembre 2011. Ce vice a été de nature à priver le public de la garantie tendant à ce qu'un avis objectif soit émis sur les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement par une autorité disposant d'une autonomie réelle. Il a nui à une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération et été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision.
S'agissant du montant initial de la garantie financière de démantèlement :
30. Aux termes de l'article R. 515-101 du code de l'environnement : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l'article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation. / II. - Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe, en fonction de l'importance des installations, les modalités de détermination et de réactualisation du montant des garanties financières qui tiennent notamment compte du coût des travaux de démantèlement. / (...) ". Les articles 30 à 32 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans leur rédaction issue de l'arrêté du 22 juin 2020, précisent ces dispositions. En vertu du II de l'annexe I à cet arrêté, auquel renvoie l'article 30, le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur est égal au nombre d'éoliennes multiplié par le coût unitaire d'un aérogénérateur qui varie selon la puissance de l'éolienne. Celui-ci s'établit à 50 000 euros lorsque la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est inférieure ou égale à 2 MW. Lorsque la puissance unitaire de l'aérogénérateur est supérieure à 2 MW, ce coût unitaire est calculé selon la formule définie par le b) du I de cette annexe selon laquelle : " Cu = 50 000 + 10 000 * (P-2) où : Cu est le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur ; -P est la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur, en mégawatt (MW). ".
31. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce.
32. Il résulte de l'instruction que le montant initial des garanties financières fixé à 202 867 euros par l'article 2.2 de l'arrêté d'autorisation du 14 juin 2017 contesté a été calculé conformément aux dispositions de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, en vigueur à la date de l'arrêté préfectoral, sur la base d'un coût forfaitaire de 50 000 euros, par éolienne, quelle que soit sa puissance. Ces dispositions ont, toutefois, été abrogées par l'arrêté du 22 juin 2020 précité et remplacées, s'agissant des éoliennes d'une puissance supérieure à 2 MW, comme en l'espèce, par un coût variable selon leur puissance, calculé ainsi qu'il a été dit au point 30. Par suite, le montant initial des garanties financières de 202 867 euros fixé à l'article 5 de l'arrêté litigieux est insuffisant au regard des dispositions désormais applicables.
33. En revanche, si les requérants font valoir, en s'appuyant sur le coût estimé pour d'autres projets de parc éolien, que le préfet de l'Orne aurait dû écarter les dispositions de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, aujourd'hui abrogé, ils n'établissent ni même n'allèguent que le montant initial des garanties financières prévu par les dispositions introduites par l'arrêté du 22 juin 2020 ne serait pas suffisant pour assurer le démantèlement des installations et la remise en état de leur site d'implantation.
S'agissant des opérations de démantèlement et de remise en état :
34. Aux termes de l'article R. 515-106 du code de l'environnement " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : / 1° Le démantèlement des installations de production ; / 2° L'excavation d'une partie des fondations ; / 3° La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; / 4° La valorisation ou l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. / Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de remise en état. ".
35. Ces dispositions sont relatives au démantèlement et à la remise en état des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent lors de la cessation de leur exploitation. Elles ne sont, dès lors, pas utilement invocables à l'encontre de l'autorisation en litige, laquelle est relative à la mise en service de l'installation et n'a pas été prise en application de ces dispositions. Le moyen tiré de ce qu'en n'imposant pas au futur exploitant le démantèlement de la totalité du réseau inter-éolien, le préfet aurait méconnu les dispositions de l'article R. 515-106 du code de l'environnement doit ainsi être écarté comme inopérant.
36. Il résulte de tout ce qui précède que l'autorisation environnementale délivrée par l'arrêté du préfet de l'Orne du 14 juin 2017 est illégale dès lors, premièrement, qu'elle n'a pas été précédée d'un avis régulièrement émis par l'autorité environnementale, deuxièmement, que le public et l'administration n'ont pas été suffisamment informés quant aux capacités financières dont disposait la société pétitionnaire, troisièmement, que l'étude d'impact est, sur certains points, entachée d'inexactitude et d'insuffisance et, quatrièmement, que le montant initial des garanties financières est limité à 50 000 euros par aérogénérateur.
Sur l'application des dispositions du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :
37. Aux termes du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / (...) / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. ".
38. Les différentes illégalités, rappelées au point 36 du présent arrêt, entachant l'autorisation environnementale en litige sont susceptibles d'être régularisées par l'intervention d'une autorisation modificative de régularisation prise, d'une part, au vu d'un dossier actualisé à la lumière des motifs du présent arrêt et après consultation d'une autorité environnementale présentant les garanties d'impartialité requises et fixant, d'autre part, un montant propre à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues par l'article R. 515-106 du code de l'environnement et au moins équivalent à la somme du coût unitaire forfaitaire des quatre aérogénérateurs déterminé selon les modalités prévues à l'annexe de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans sa version applicable à la date de cette autorisation modificative.
39. L'avis émis, le cas échéant par l'autorité environnementale ainsi que le dossier actualisé, seront soumis à une nouvelle phase d'information du public organisée selon les modalités suivantes :
- un dossier présenté par la société Futures Energies du Parc du Haut du Perche sera soumis au public pour compléter son information sur le projet. Ce dossier comprendra des éléments rappelant la nature du projet. Il précisera l'objet de la nouvelle phase d'information du public et une copie du présent arrêt y sera annexée. Il précisera l'objet de la nouvelle phase d'information du public et une copie du présent arrêt y sera annexée. Il comportera, d'une part, des indications précises et étayées sur les capacités financières de la société pétitionnaire et, d'autre part, tous éléments utiles relatifs à l'état initial du site au plan chiroptérologique et les effets du projet sur les chiroptères ainsi qu'à l'impact visuel et acoustique pour les hameaux situés entre le projet et l'autre parc éolien.
- ce dossier sera mis à la disposition du public pendant une durée de quinze jours consécutifs dans les locaux de la mairie de la commune nouvelle de Charencey aux jours et heures d'ouverture de la mairie et il sera mis en ligne, pendant la même durée, sur le site internet de cette commune ;
- le public pourra, pendant cette durée de quinze jours, présenter des observations ; celles-ci seront soit portées sur un registre mis à la disposition du public, soit envoyées par courrier à l'adresse de la mairie à destination d'une personne désignée par le président du tribunal administratif de Caen et qui sera choisie sur la liste départementale d'aptitude à l'exercice des fonctions de commissaire-enquêteur ;
- un avis au public devra être publié afin de porter à sa connaissance l'ouverture de cette nouvelle phase d'information ; il devra préciser l'objet de cette phase en indiquant en particulier qu'il s'agit d'assurer l'exécution du présent arrêt en vue de la régularisation de l'arrêté du préfet de l'Orne du 14 juin 2017 par l'intervention d'une autorisation modificative de régularisation corrigeant les vices censurés par le présent arrêt ;
- cet avis sera publié quinze jours au moins avant le début et pendant toute la durée de celle-ci par voie d'affiches et éventuellement par tout autre moyen dans la commune nouvelle de Charencey ainsi que sur le site internet de cette commune ; ce même avis sera également affiché dans les communes concernées au sens de l'article R. 512-4 du code de l'environnement ; il sera publié dans deux journaux locaux diffusés dans le département de l'Orne, quinze jours au moins avant le début de cette nouvelle phase d'information du public ; il sera en outre rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci ; la société Futures Energies du Parc du Haut du Perche procédera enfin dans les mêmes conditions de délais à l'affichage de l'avis d'ouverture de cette phase d'information sur le site de réalisation du projet ;
- dans un délai de quinze jours suivant la clôture du registre par la personne désignée par le président du tribunal administratif de Caen, cette personne remettra au préfet de l'Orne et au président du tribunal un rapport dont le contenu devra relater le déroulement de cette nouvelle phase d'information et synthétiser le cas échéant les observations recueillies ;
- la société Futures Energies du Parc du Haut du Perche prendra en charge les frais de cette phase d'information du public, notamment l'indemnisation de la personne qui sera désignée par le président du tribunal ;
- le préfet de l'Orne devra, dans le délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt, saisir le président du tribunal administratif de Caen d'une demande tendant à la désignation de cette personne.
40. Eu égard aux modalités de régularisation ainsi fixées, l'éventuelle autorisation modificative devra être communiquée à la cour dans un délai d'un an à compter du présent arrêt.
41. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur la requête de l'association Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien et autres jusqu'à l'expiration du délai mentionné au point précédent afin de permettre cette régularisation.
42. Enfin, compte tenu des lacunes de l'étude d'impact qui, ainsi qu'il a été dit aux point 24 à 26, entachent le dossier de demande, en ce qui concerne l'étude chiroptérologique, l'étude acoustique et l'étude paysagère, la cour n'est pas en mesure d'apprécier la conformité du projet aux articles L. 515-44 et L. 511-1 du code de l'environnement. Il y a dès lors lieu pour la cour de réserver la réponse aux moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions, lesquels demeurent susceptibles d'être écartés après la régularisation du dossier de demande d'autorisation environnementale.
D E C I D E :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête de l'association Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien et autres jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an, courant à compter de la notification du présent arrêt, imparti à l'État pour produire devant la cour une autorisation environnementale modificative conforme aux modalités définies aux points 37 à 39.
Article 2 : Tous droits, moyens et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien, représentant unique désigné par Me Monamy, mandataire, au ministre de la transition écologique et à la société Futures Energies du Parc du Haut du Perche.
Une copie sera adressée à la préfète de l'Orne.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2021, à laquelle siégeaient :
Mme Douet, présidente de la formation de jugement,
M. L'hirondel, premier conseiller,
Mme Bougrine, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juin 2021.
La rapporteure,
K. Bougrine
La présidente,
H. DOUET
La greffière,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°
N° 19NT01040
2eme Chambre
Mme DOUET, président
Mme Karima BOUGRINE, rapporteur
M. GIRAUD, rapporteur public
MONAMY, avocats
Lecture du vendredi 11 juin 2021
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'association " Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien ", l'association " Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de France ", l'association " Belle-Normandie Environnement ", M. BB... C..., Mme V... C..., M. AE... Z..., M. AV... Z..., Mme G... K..., M. W... AZ..., M. AF... AQ..., M. R... AA..., Mme L... AB..., M. T... AB..., Mme AN... H..., M. Y... AM..., Mme J... AM..., M. AX... AS..., M. AH... N..., Mme AK... AT..., M. M... P..., M. B... BD..., M. et Mme AY... AD..., M. X... Q..., M. et Mme E... AO..., Mme BA..., M. AC... D..., Mme AP... D..., Mme AI... D..., M. AR... portant, Mme O... portant, Mme AU... AW..., M. F... AJ..., M. T... AJ... et Mme U... AJ... ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler l'arrêté du 14 juin 2017 par lequel le préfet de l'Orne a accordé à la société par actions simplifiée (SAS) Futures Energies Parc du Haut du Perche une autorisation unique portant sur la construction et l'exploitation d'un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs et d'un poste de livraison sur le territoire de l'ancienne commune de Moussonvilliers.
Par un jugement n° 1701506 du 31 décembre 2018, le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 11 mars 2019 et le 12 juin 2019, l'association " Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien ", l'association " Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de France ", l'association " Belle-Normandie Environnement ", M. BB... C..., Mme V... C..., M. AE... Z..., M. AV... Z..., Mme G... K..., M. W... AZ..., M. AF... AQ..., M. R... AA..., Mme L... AB..., M. T... AB..., Mme AN... H..., M. Y... AM..., Mme J... AM..., M. AX... AS..., M. AH... N..., Mme AK... AT..., M. M... P..., M. B... BD..., M. et Mme AY... AD..., M. X... Q..., M. et Mme E... AO..., Mme BA..., M. AC... D..., Mme AP... D..., Mme AI... D..., M. AR... portant, Mme O... portant, Mme AU... AW..., M. F... AJ..., M. T... AJ... et Mme U... AJ..., représentés par Me Monamy, demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 31 décembre 2018 ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la SAS Futures Energies du Parc du Haut du Perche une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- les dispositions du XI de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 ont été méconnues, l'article R. 423-5-6 du code de l'urbanisme ne pouvant recevoir application en raison de son illégalité ;
- le projet architectural produit à l'appui de la demande est insuffisant ;
- les dispositions de l'article R. 512-6 du code de l'environnement ont été méconnues, l'arrêté du 26 août 2011 ne pouvant recevoir application en raison de son illégalité ;
- l'étude d'impact est entachée d'insuffisances nombreuses et substantielles ;
- la demande d'autorisation est muette sur les modalités de financement de l'opération, en méconnaissance des articles L. 512-1 et R. 512-3 du code de l'environnement ;
- l'avis de l'autorité environnementale a été rendu dans des conditions irrégulières ;
- en limitant le montant des garanties financières à la somme de 50 000 euros par aérogénérateur alors que l'arrêté du 26 août 2011 ne pouvait recevoir application en raison de son illégalité, le préfet de l'Orne a fait une inexacte application des dispositions de l'article R. 553-1 du code de l'environnement reprises à l'article R. 515-101 du même code ;
- l'autorisation attaquée méconnaît les dispositions de l'article R. 515-106 du code de l'environnement, l'article 1er de l'arrêté du 26 août 2011 ne pouvant recevoir application en raison de son illégalité ;
- le projet porte atteinte au paysage et au patrimoine culturel en méconnaissance, d'une part, des dispositions combinées des articles L. 181-3 et L. 511-1 du code de l'environnement et, d'autre part, de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme ;
- en s'abstenant d'exiger une distance d'éloignement par rapport aux zones habitées supérieures à 500 mètres et en faisant application de l'article 3 de l'arrêté du 26 août 2011 en dépit de son illégalité, le préfet de l'Orne a méconnu les dispositions de l'article L. 515-44 du code de l'environnement.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2019, la SAS Futures Energies Parc du Haut du Perche, représentée par Me Gelas, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête ;
2°) à titre subsidiaire, de surseoir à statuer, en application des dispositions du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, afin de permettre la régularisation des éventuels vices entachant l'autorisation ou, à défaut, limiter l'annulation, en application des dispositions du 1° du I du même article, à la phase de la procédure d'instruction concernée par l'avis de l'autorité environnementale ou par les capacités financières et ordonner à l'autorité administrative de reprendre l'instruction à cette phase ;
3°) de mettre à la charge de chacun des requérants une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- les demandeurs ne justifient pas d'un intérêt à agir ;
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 515-106 du code de l'environnement est inopérant ;
- les autres moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.
La clôture d'instruction est intervenue le 21 juin 2019 en application d'une ordonnance du même jour.
Un mémoire présenté par le ministre de la transition écologique et solidaire a été enregistré le 16 décembre 2019.
Par une lettre du 4 mai 2021, la cour a invité les parties à présenter leurs observations sur l'application des dispositions de l'article L. 181-18 du code de l'environnement.
La SAS Futures Energies Parc du Haut du Perche a présenté des observations en réponse à invitation qui ont été enregistrées le 7 mai 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la directive 2001/42/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 ;
- la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 ;
- le code de l'environnement ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 ;
- l'ordonnance n° 2014-355 du 20 mars 2014 ;
- l'ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 ;
- le décret n° 2012-41 du 12 janvier 2012 ;
- le décret n° 2014-450 du 2 mai 2014 ;
- le décret n° 2017-81 du 26 janvier 2017 ;
- l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- l'arrêté du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent ;
- l'arrêté du 22 juin 2020 portant modification des prescriptions relatives aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bougrine,
- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,
- les observations de Me Monamy, représentant les requérants et les observations de Me Kerjean-Gauducheau, substituant Me Gelas et représentant la SAS Futures Energies du Parc du Haut du Perche.
Considérant ce qui suit :
1. Le 18 décembre 2015, la société par actions simplifiée (SAS) Futures Energies Parc du Haut Perche, a présenté une demande, complétée le 13 juillet 2016, d'autorisation unique portant sur un parc éolien, composé de quatre aérogénérateurs d'une hauteur en bout de pale de 146,25 mètres et d'un poste de livraison, situé sur le territoire de l'ancienne commune de Moussonvilliers, devenue commune déléguée de la commune nouvelle de Charencey (Orne). Par un arrêté du 14 juin 2017, le préfet de l'Orne lui a délivré l'autorisation sollicitée. L'association " Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien ", l'association " Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de France ", l'association " Belle-Normandie Environnement " ainsi que plusieurs résidents des anciennes communes de Moussonvilliers et de Saint-Maurice-lès-Charencey ont demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler cet arrêté. Ils relèvent appel du jugement du 31 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté leur demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, pour écarter le moyen soulevé par les demandeurs dans le troisième de leurs six mémoires et tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 90 de la loi n° 2018-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, le tribunal a, d'une part, cité les dispositions de l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme et, d'autre part, jugé qu'il résultait de la combinaison de ces dispositions que l'autorité administrative est tenue de consulter seulement les communes et établissements publics de coopération intercommunale limitrophes de l'unité foncière d'implantation du projet. Ce faisant, et alors qu'aucune exception d'illégalité de l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme n'était soulevée, ils ont suffisamment motivé leur décision sur ce point.
3. En deuxième lieu, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, le tribunal a jugé que : " S'agissant du recueil de l'avis du conseil municipal de Moussonvilliers, en tant que propriétaire du chemin rural de la Chapelle Fortin, s'il a porté sur la totalité de l'enlèvement des câbles, alors que seul leur enlèvement dans un rayon de 10 mètres est exigé, cette circonstance n'est pas susceptible d'entacher la consultation d'irrégularité. S'agissant du recueil de l'avis des propriétaires de terrains, les pièces ne permettent pas d'établir que leur avis aurait été sollicité sur le démantèlement de plus de 10 mètres de câbles. S'agissant du recueil de l'avis du conseil départemental, il résulte des dispositions précitées de l'article 1er de l'arrêté du 6 août 2011 que le démantèlement des câbles électriques n'est exigé que dans un rayon de 10 mètres, si bien que l'avis du conseil départemental de l'Orne, propriétaire de la RD 45, dont il est constant qu'elle se trouve à plus de dix mètres de l'emplacement projeté des éoliennes, n'avait pas à être recueilli. Par suite le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 512-6 du code de l'environnement, faute de recueil régulier de l'avis des propriétaires de terrains, du conseil municipal de Moussonvilliers et du conseil départemental de l'Orne, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation, en ce qui concerne le démantèlement des câbles au-delà de dix mètres, doit être écarté. ". Ce faisant, il a suffisamment motivé sa réponse au moyen soulevé devant lui. A supposer qu'il ait commis une erreur en confondant l'avis du conseil municipal et l'avis du maire, celle-ci est sans incidence sur la régularité du jugement.
4. En troisième lieu, le tribunal, qui a notamment considéré que " l'étude d'impact ne dissimule pas que plusieurs hameaux [...] auront nécessairement des vues sur chacun des parcs, et mentionne, sur les photographies produites, l'emplacement du parc éolien voisin du parc en litige. L'étude d'impact souligne toutefois que ces vues seront compensées par la disposition des éoliennes du parc en litige, alignées sur celles des éoliennes voisines pour éviter les effets d'encerclement ", a énoncé les considérations de fait qui l'ont conduit à écarter le moyen tiré de l'insuffisance du volet paysager de l'étude d'impact.
5. Par suite, le jugement attaqué, qui n'est entaché ni d'un défaut de réponse à ces moyens ni d'une insuffisante motivation, n'est pas irrégulier.
Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance :
6. Aux termes de l'article L. 142-1 du code de l'environnement : " Toute association ayant pour objet la protection de la nature et de l'environnement peut engager des instances devant les juridictions administratives pour tout grief se rapportant à celle-ci. / Toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 ainsi que les fédérations départementales des associations agréées de pêche et de protection du milieu aquatique et les associations agréées de pêcheurs professionnels justifient d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec leur objet et leurs activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elles bénéficient de l'agrément dès lors que cette décision est intervenue après la date de leur agrément. ".
7. L'association " Société pour la Protection des Paysages et de l'Esthétique de France ", agréée au niveau national au titre de l'article L. 141-1 du code de l'environnement, a pour objet, notamment, la préservation des sites. Elle justifie ainsi d'un intérêt à agir contre l'autorisation unique portant sur la construction et l'exploitation d'un parc éolien composé de quatre aérogénérateurs d'une hauteur en bout de pale de 146,25 mètres. La demande de première instance est, par suite, recevable sans qu'il soit besoin d'examiner l'intérêt à agir des autres demandeurs.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
8. D'une part, en application des dispositions du 1° de l'article 15 de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale, les autorisations uniques délivrées au titre de l'ordonnance du 20 mars 2014 relative à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement sont considérées, depuis le 1er mars 2017, comme des autorisations environnementales. D'autre part, l'article 2 de l'ordonnance du 20 mars 2014 dispose que l'autorisation unique vaut permis de construire au titre de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme. En revanche, il résulte des dispositions de l'article L. 181-2 du code de l'environnement, issu de l'article 1er de l'ordonnance du 26 janvier 2017, que l'autorisation environnementale, contrairement à l'autorisation unique, ne tient pas lieu du permis de construire le cas échéant requis. Il en résulte que l'autorisation unique, alors même qu'elle doit être regardée comme une autorisation environnementale depuis le 1er mars 2017, continue également à produire ses effets en tant qu'elle vaut permis de construire.
En ce qui concerne l'autorisation de construire :
9. En premier lieu, au soutien d'une demande d'autorisation unique, le pétitionnaire doit, en vertu des dispositions combinées des articles R. 431-7 et R. 431-9 du code de l'urbanisme et de l'article 4 du décret du 2 mai 2014 relatif à l'expérimentation d'une autorisation unique en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement, produire un projet architectural comportant notamment un plan de masse et indiquant les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics.
10. Il ressort des pièces du dossier que le sous-dossier n° 4, joint à la demande, précise que le poste de livraison, qui présentera une superficie d'environ 25 mètres carrés et une hauteur de 3 mètres, constitue la limite de propriété entre le réseau interne au parc éolien et le réseau externe. L'emplacement de ce poste de livraison figure sur les plans joints à la demande. Il est, enfin, fait état de ce qu'il sera raccordé soit au poste source d'Aube, soit au poste source de Verneuil-sur-Avre. Le dossier de la demande ne présentait pas, pour l'application des articles du code de l'urbanisme mentionnés au point précédent, d'insuffisance en ce qui concerne l'indication des modalités de raccordement.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 de l'ordonnance du 20 mars 2014 : " L'autorisation unique est instruite et délivrée dans les conditions applicables à l'autorisation prévue aux articles L. 512-1 et L. 512-2 du code de l'environnement. ". L'article 4 de cette même ordonnance prévoit que le projet reste soumis : " lorsque l'autorisation unique tient lieu de permis de construire, aux dispositions du chapitre Ier, du chapitre II, de la section 1 du chapitre V du titre II du chapitre Ier du titre III du livre IV du code de l'urbanisme. ". Aux termes de l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 : " XI. - Pour les projets éoliens dont les caractéristiques les soumettent à des autorisations d'urbanisme, les communes et établissements de coopération intercommunale limitrophes du périmètre de ces projets sont consultés pour avis dans le cadre de la procédure d'instruction de la demande d'urbanisme concernée. ". Selon l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date du permis contesté issue du décret n° 2012-41 du 12 janvier 2012 : " Dans le cas d'un projet éolien soumis à permis de construire et situé en dehors d'une zone de développement de l'éolien définie par le préfet, l'autorité compétente recueille, conformément aux dispositions prévues au XI de l'article 90 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement, l'avis des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme ou d'autorisations d'urbanisme limitrophes de l'unité foncière d'implantation du projet ". Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que l'article R. 423-56-1 du code de l'urbanisme ne figure pas parmi les dispositions auxquelles est soumise l'autorisation unique, lorsqu'elle tient lieu de permis de construire, et que l'avis des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de plan local d'urbanisme ou d'autorisations d'urbanisme limitrophes de l'unité foncière d'implantation du projet n'est pas requis. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions l'article 90 de la loi du 12 juillet 2010 et celui tiré de l'illégalité de l'article R. 423-5-6 doivent être écartés comme inopérants.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales. ". Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel au sens de cet article, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
13. Il ressort des pièces du dossier et notamment de l'étude paysagère produite par la société pétitionnaire que le projet de parc en litige est implanté sur un plateau de parcelles agricoles ponctuellement boisées à Moussonvilliers entre le Pays d'Ouche et le Perche. La zone d'implantation du projet est, quant à elle, entourée de nombreux hameaux et s'inscrit dans une aire, s'étendant jusqu'à 3 kilomètres, caractérisée notamment par la qualité de l'habitat et des espaces publics ainsi qu'une grande homogénéité contribuant à la qualité paysagère. La construction d'un parc éolien de trois aérogénérateurs à environ 1 500 mètres du projet, le long de la route RN 12, a néanmoins été autorisée. Enfin, sont localisés, dans un périmètre plus éloigné, notamment dans le centre urbain de Verneuil-sur-Avre, plusieurs éléments de patrimoine d'intérêt, certains bénéficiant d'ailleurs d'une protection au titre de la législation sur les monuments historiques.
14. L'espace agricole qui constitue les abords immédiats du projet et qui accueille quelques habitations, dont l'intérêt paysager est relatif, n'est pas foncièrement impacté par le projet litigieux, constitué d'un poste de livraison et de quatre aérogénérateurs. Ces quatre aérogénérateurs sont séparés par des distances inter-machines identiques et implantés en ligne droite en suivant la même orientation, sud-ouest / nord-est, que celle des lignes fortes du paysage et de l'autre parc mentionné au point précédent de sorte que, à l'échelle de l'aire d'étude rapprochée, la cohérence et la lisibilité du projet dans le paysage sont assurées. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la vue vers le château de la Corbière, dont il n'est pas contesté qu'il bénéficie d'un environnement très boisé, serait altérée par la perception simultanée du projet. S'agissant du château de Chennebrun, inscrit sur l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, s'il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux sera partiellement visible, de manière cumulée avec l'autre parc éolien, cette seule circonstance ne suffit pas, en l'espèce, à caractériser une atteinte significative à ce site. Il suit de là qu'en autorisant la construction du parc en litige, le préfet de l'Orne n'a pas entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne l'autorisation environnementale :
S'agissant de la demande d'autorisation :
Quant aux avis des propriétaires intéressés :
15. Aux termes des dispositions de l'article R. 512-6, alors en vigueur, du code de l'environnement : " I.-A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : / (...) / 7° Dans le cas d'une installation à implanter sur un site nouveau, l'avis du propriétaire, lorsqu'il n'est pas le demandeur, ainsi que celui du maire ou du président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme, sur l'état dans lequel devra être remis le site lors de l'arrêt définitif de l'installation ; ces avis sont réputés émis si les personnes consultées ne se sont pas prononcées dans un délai de quarante-cinq jours suivant leur saisine par le demandeur ; / (...) ".
16. D'abord, il est constant que le maire de l'ancienne commune de Moussonvilliers a, le 9 février 2016, émis un avis sur la remise en état du site. Il résulte des dispositions du 1° de l'article L. 2122-21 du code général des collectivités territoriales que le maire est compétent en matière de conservation et d'administration des biens de la commune. Partant, la commune de Moussonvilliers a, en sa qualité de propriétaire du chemin rural de la chapelle Fortin, été régulièrement consultée. Ensuite, s'il ne résulte pas de l'instruction que le département de l'Orne, propriétaire de la route RD 45, aurait été spécifiquement consulté sur la remise en état du site, le sous-préfet de Mortagne-sur-Perche a, le 30 novembre 2016, saisi pour avis sur le projet le département de l'Orne, lequel ne s'est pas prononcé. Enfin, il ne ressort d'aucun élément de l'instruction, notamment pas de la teneur des avis figurant en annexe n° 3 du sous-dossier n° 3 joint à la demande, que les propriétaires consultés sur l'état dans lequel le site devra être remis en état aient été trompés quant à l'étendue des opérations de démantèlement et de remise en état exigées par l'arrêté, alors en vigueur, du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent. En particulier, il n'est pas établi que leur aurait été communiquée l'information selon laquelle il serait procédé au démantèlement de l'intégralité des câbles alors que seuls ceux situés dans un rayon de dix mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison sont concernés par l'article 1er de l'arrêté mentionné ci-dessus. Il s'ensuit que, d'une part, les dispositions précitées de l'article R. 512-6, alors en vigueur, du code de l'environnement n'ont pas été méconnues et, d'autre part, l'illégalité entachant l'article 1er de cet arrêté en ce qu'il prévoit le démantèlement " des câbles dans un rayon de 10 mètres autour des aérogénérateurs et des postes de livraison " n'est pas utilement excipée.
Quant à la présentation des capacités financières de la société pétitionnaire :
17. En vertu des dispositions du 5° de l'article R. 512-3 du code de l'environnement, alors en vigueur, la demande d'autorisation mentionne les capacités financières de l'exploitant. Il résulte de ces dispositions que le pétitionnaire est tenu de fournir, à l'appui de sa demande, des indications précises et étayées sur ses capacités financières.
18. En l'espèce, le sous-dossier n° 3 joint à la demande expose que le capital de la société Futures Energies Parc du Haut Perche est entièrement détenu par la société Futures Energies SARL, filiale de la holding Futures Energies laquelle appartient au groupe Engie. Il précise que le capital apporté s'élève à 40 000 euros et que ce capital est variable avec un maximum de 100 000 000 euros. Un bilan simplifié de la société mère, Futures Energies SARL, ainsi qu'un tableau reprenant les principales données de son compte de résultat au titre des exercices clos en 2012, 2013 et 2014 sont reproduits tandis que les comptes annuels de la société pétitionnaire au titre de l'exercice clos en 2015 figurent en annexes. Le dossier de la demande comporte également une lettre d'intention émanant d'une société de caution et portant uniquement sur les garanties financières de démantèlement. Alors qu'il est précisé que les " capacités financières de Futures Energies Parc du Haut Perche sont directement liées à celles de Futures Energies SARL et donc de Engie ", le dossier ne comporte pas d'engagement financier de la société Futures Energies SARL ni de précisions sur le coût du projet. Cependant, la société Engie Green France s'est engagée, par une lettre du 28 février 2016, dont il n'est ni soutenu ni même allégué qu'elle aurait été portée à la connaissance du public, à mettre à la disposition de la société pétitionnaire, " pendant tout le temps où [elle] sera actionnaire " de cette dernière, " les fonds nécessaires à la construction et à l'exploitation du Projet sous la forme d'une contribution au financement du Projet à hauteur de sa Quote-Part via : / (i) un apport en fonds propres pour 25 % du cout total du projet au titre des fonds propres apportés par la FUTURES ENERGIES - Parc du Haut du Perche ; ou / (ii) un apport en fonds propres égal à 100 % du coût total du Projet si absence de financement par un emprunt bancaire ". Aucune information ne renseigne toutefois l'identité des autres actionnaires, alors que l'actionnariat semble avoir évolué. Dans ces conditions, les indications particulièrement succinctes et non étayées figurant dans le dossier de la demande d'autorisation ne permettaient pas d'apprécier les capacités financières dont la société pétitionnaire serait effectivement en mesure de disposer pour financer un projet dont le coût est estimé, selon la lettre du 28 février 2016, à 11 580 000 euros. Cette lacune a eu pour effet de nuire à l'information complète du public.
Quant à l'étude d'impact :
19. Aux termes des dispositions de l'article R. 512-6, alors en vigueur, du code de l'environnement : " I.-A chaque exemplaire de la demande d'autorisation doivent être jointes les pièces suivantes : / (...) / 4° L'étude d'impact prévue à l'article L. 122-1 dont le contenu est défini à l'article R. 122-5 et complété par l'article R. 512-8 ; / (...) ". L'article R. 122-5 de ce code, dans sa version applicable au litige, dispose : " I. - Le contenu de l'étude d'impact est proportionné à la sensibilité environnementale de la zone susceptible d'être affectée par le projet, à l'importance et la nature des travaux, installations, ouvrages, ou autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage projetés et à leurs incidences prévisibles sur l'environnement ou la santé humaine. / (...) l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : / (...) / 3° Une description des aspects pertinents de l'état actuel de l'environnement, (...) / 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; / 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres : / a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; / b) De l'utilisation des ressources naturelles, en particulier les terres, le sol, l'eau et la biodiversité, en tenant compte, dans la mesure du possible, de la disponibilité durable de ces ressources ; / c) De l'émission de polluants, du bruit, de la vibration, de la lumière, la chaleur et la radiation, de la création de nuisances et de l'élimination et la valorisation des déchets ; / d) Des risques pour la santé humaine, pour le patrimoine culturel ou pour l'environnement ; / e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés, en tenant compte le cas échéant des problèmes environnementaux relatifs à l'utilisation des ressources naturelles et des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement susceptibles d'être touchées. Ces projets sont ceux qui, lors du dépôt de l'étude d'impact : / (...) / - ont fait l'objet d'une évaluation environnementale au titre du présent code et pour lesquels un avis de l'autorité environnementale a été rendu public. / (...) / La description des éventuelles incidences notables sur les facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 porte sur les effets directs et, le cas échéant, sur les effets indirects secondaires, cumulatifs, transfrontaliers, à court, moyen et long termes, permanents et temporaires, positifs et négatifs du projet ; / (...) ". Aux termes des dispositions du I de l'article R. 512-8, alors en vigueur, du même code : " Le contenu de l'étude d'impact mentionnée à l'article R. 512-6 doit être en relation avec l'importance de l'installation projetée et avec ses incidences prévisibles sur l'environnement, au regard des intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. ".
20. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
21. En premier lieu, ainsi que le soutiennent les requérants, l'étude d'impact se borne à indiquer, s'agissant du raccordement du projet au réseau public de transport et de distribution, que celui-ci sera réalisé par ERDF ou RTE au moyen de câbles souterrains reliant le parc soit au poste source de Verneuil-sur-Avre situé à 24 kilomètres, soit à celui d'Aube situé à 20 kilomètres. Les incidences de ce raccordement sur l'environnement ne sont pas analysées. Toutefois, les requérants n'apportent aucun commencement de justification de nature à établir la réalité, la nature et l'ampleur des incidences sur l'environnement dont ils se prévalent. Il ne résulte pas de l'instruction, dans ces conditions, que le raccordement critiqué serait susceptible d'emporter pour l'environnement des effets notables dont l'absence de traitement par l'étude d'impact entacherait cette dernière d'insuffisance.
22. En deuxième lieu, la seule circonstance qu'un bureau d'études a mis en évidence, s'agissant d'un projet de parc éolien situé en Haute-Vienne, l'exposition des habitations riveraines au phénomène d'ombres portées ne suffit pas à démontrer que le projet contesté dans le cadre du présent litige serait susceptible de générer le même phénomène et d'emporter ainsi pour le voisinage des effets notables que l'étude d'impact aurait dû mentionner.
23. En troisième lieu, le secteur d'implantation du projet présente une très forte de densité de cavités souterraines. Il ressort de la mission de diagnostic géotechnique diligentée par l'association " Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien " en août 2017 qu'une marnière remblayée est localisée à proximité de l'emprise de l'aérogénérateur E2 projeté. Toutefois, si l'étude d'impact énonce, à propos des vides souterrains, qu'" aucun indice n'est recensé sur la zone d'implantation du projet ou ses abords immédiats ", elle expose également que " l'existence de cavités souterraines au droit de la zone du projet n'est pas avérée, mais une présence éventuelle ne peut être totalement écartée. Des investigations géotechniques détaillées sur chacune des parcelles d'implantation des éoliennes permettront d'écarter tout risque de découverte d'une telle cavité ". Elle souligne, par ailleurs, que le secteur est soumis au risque d'effondrement et que la zone d'implantation du projet est concernée dans sa totalité à une prédisposition à ce phénomène. Ainsi, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'étude serait, sur ce point, entachée d'inexactitudes, omissions ou insuffisances.
24. En quatrième lieu, il résulte de l'instruction que le secteur d'implantation du projet est caractérisé par une richesse chiroptérologique. En particulier, se trouve dans l'aire d'étude immédiate le site " Forêts, étangs et tourbières du Haut-Perche ", identifié comme site du réseau Natura 2000 en raison de l'intérêt qu'il présente en ce qui concerne plusieurs espèces de chiroptères. L'étude chiroptérologique s'appuie sur un inventaire dressé grâce à quatorze sorties de terrain réalisées en 2010-2011 et en 2014 au cours de trois des quatre phases du cycle de vie des chiroptères. D'une part, il résulte de l'instruction et notamment de l'avis de l'autorité environnementale que la hêtraie plantée dans la zone d'implantation du projet et qu'il est prévu de détruire à raison de 500 mètres carrés, héberge potentiellement des arbres gîtes pour les chauve-souris et que la présence de tels gîtes n'a pas été vérifiée. Si l'arrêté contesté prescrit à l'exploitant de procéder à cette vérification avant d'entreprendre la coupe, cette prescription n'est pas de nature à pallier l'insuffisance de l'information dont a disposé le public au cours de l'enquête publique. D'autre part, il ressort des mentions de l'étude que les écoutes réalisées en 2010-2011 puis en 2014, selon des protocoles, du matériel et des traitements de données différents, n'ont pas pu être analysées ensemble et que " Les indices d'activité acoustique ont été calculés pour les investigations menées en 2014 uniquement. (...) la nature des protocoles de 2010 et 2011 ne permet pas une évaluation pertinente de tels indices ". Or, seules six des quatorze sorties ont été réalisées en 2014 alors que les recommandations de la société française pour l'étude et la protection des Mammifères (SFEPM) et d'Eurobats, bien que n'ayant pas de valeur réglementaires, fixe un minimum de 21 à 22 sorties. Certains mois, correspondant à une activité précise, n'ont été couverts que par des sorties de 2010-2011 alors, au demeurant, que, ainsi que l'énonce une note du 31 juillet 2017 d'une société de conseil en environnement, sollicitée par les requérants, il est d'usage d'exploiter les données de moins de trois ans. D'ailleurs, cette société a émis de sérieuses réserves quant à la fiabilité du diagnostic exposé dans l'étude d'impact. Il résulte de l'ensemble de ces circonstances que l'étude chiroptérologique présente des défauts et des insuffisances de nature, dans la présente espèce, à entraîner une sous-estimation des incidences réelles du projet. Celle-ci a eu pour effet de nuire à l'information complète de la population et été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
25. En cinquième lieu, le lieudit " La Vallée ", situé à seulement 511 mètres du projet, correspond au groupe d'habitations le plus proche de celui-ci. Il résulte de l'instruction que les mesures acoustiques censées rendre compte des incidences sonores du projet depuis cet espace ont été réalisées depuis un autre hameau plus distant de quelques centaines de mètres. La société pétitionnaire n'était pas, il est vrai, tenue de procéder à des mesures depuis chaque habitation ni même depuis chaque hameau. Toutefois, alors que l'article L. 515-44 du code de l'environnement prévoit que le préfet apprécie la distance minimale d'éloignement entre les installations et les constructions à usage d'habitation au regard de l'étude d'impact, l'erreur dont est entachée l'étude sur ce point a, en l'espèce, compte tenu de la situation particulièrement proche de ce hameau par rapport au projet, été de nature à induire l'autorité décisionnaire en erreur et à nuire à la bonne information du public.
26. En sixième lieu, si l'étude d'impact fait état de la situation particulière des hameaux situés entre le parc litigieux et un autre parc éolien ainsi que du risque d'effet d'encerclement qui en résulte, les simulations visuelles qui correspondent aux perceptions depuis les lieudits Le Rouilly et les Clottes, au nord et au sud de la zone d'implantation du projet, ainsi que celle correspondant au hameau de La Haudière ne suffisent pas à rendre compte de l'impact visuel pour les hameaux les plus exposés au risque ci-dessus évoqué, en particulier ceux de La Vallée, Les Létumières ou la Roberdière, dont la proximité avec chacun des deux parcs, à raison de 700 mètres environ, ainsi que la localisation particulière entre deux lignes d'aérogénérateurs génèrent une sensibilité singulièrement forte. Ils ne permettent pas davantage d'apprécier la réalité des " espaces de respiration " ménagés par la pétitionnaire. Ainsi, alors même que l'étude d'impact, qui doit être proportionnée aux enjeux, n'a pas à contenir une simulation visuelle depuis chaque habitation ou groupes d'habitations riveraines, le volet paysager de cette étude, laquelle doit permettre au préfet, ainsi qu'il a été dit au point précédent, d'apprécier, en application de l'article L. 515-44 du code de l'environnement, l'adéquation de la distance d'éloignement entre les installations et les constructions à usage d'habitation, est, en l'espèce, entachée sur ce point d'une insuffisance. Celle-ci a d'ailleurs été relevée par l'autorité environnementale dont l'avis énonce : " il aurait été intéressant de disposer de photomontages permettant d'appréhender, depuis les hameaux, la pertinence de ces espaces de respiration au vu des surfaces occupées par les éoliennes dans le champ de vision (à l'est et à l'ouest) ". Cette insuffisance, qui a, de surcroît, conduit le préfet de l'Orne à prescrire, par l'article 2.3.2 de l'arrêté contesté, une " analyse des visibilités, depuis les hameaux se trouvant encadrés par les deux projets de parcs ", a été de nature à induire l'autorité décisionnaire en erreur et à nuire à la bonne information du public.
S'agissant de l'avis de l'autorité environnementale :
27. L'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement a pour objet de garantir qu'une autorité compétente et objective en matière d'environnement soit en mesure de rendre un avis sur l'évaluation environnementale des projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement, avant leur approbation ou leur autorisation, afin de permettre la prise en compte de ces incidences. Eu égard à l'interprétation de l'article 6 de la directive du 27 juin 2001 donnée par la Cour de justice de l'Union européenne par son arrêt rendu le 20 octobre 2011 dans l'affaire C-474/10, il résulte clairement des dispositions de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011 que, si elles ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet soit en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, elles imposent cependant que, dans une telle situation, une séparation fonctionnelle soit organisée au sein de cette autorité, de manière à ce que l'entité administrative concernée dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, et soit ainsi en mesure de remplir la mission de consultation qui lui est confiée en donnant un avis objectif sur le projet concerné.
28. Lorsqu'un projet est autorisé par un préfet de département autre que le préfet de région, l'avis rendu sur le projet par le préfet de région en tant qu'autorité environnementale doit, en principe, être regardé comme ayant été émis par une autorité disposant d'une autonomie réelle répondant aux exigences de l'article 6 de la directive du 13 décembre 2011, sauf dans le cas où c'est le même service qui a, à la fois, instruit la demande d'autorisation et préparé l'avis de l'autorité environnementale. En particulier, les exigences de la directive, tenant à ce que l'entité administrative appelée à rendre l'avis environnemental sur le projet dispose d'une autonomie réelle, impliquant notamment qu'elle soit pourvue de moyens administratifs et humains qui lui soient propres, ne peuvent être regardées comme satisfaites lorsque le projet a été instruit pour le compte du préfet de département par la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement et que l'avis environnemental émis par le préfet de région a été préparé par la même direction, à moins que l'avis ait été préparé, au sein de cette direction, par le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales.
29. Il résulte de l'instruction, notamment des écritures du préfet de l'Orne devant le tribunal et du rapport de l'inspecteur des installations classées du 4 avril 2017, que la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Normandie (Unité départementale de l'Orne) a instruit, au moins en partie, la demande d'autorisation, pour le compte du préfet de l'Orne. Si ce dernier a fait valoir devant les premiers juges que l'avis du 15 septembre 2016 de l'autorité environnementale signé par le préfet de région a pu être préparé, au sein de la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement par le Pôle d'évaluation environnementale, aucun élément de l'instruction ne permet de l'établir, pas plus qu'il n'est justifié de ce que ce pôle serait effectivement le service mentionné à l'article R. 122-21 du code de l'environnement qui a spécialement pour rôle de préparer les avis des autorités environnementales. Par suite, l'avis de l'autorité environnementale a été émis dans des conditions qui ne répondent pas aux exigences de la directive du 13 décembre 2011. Ce vice a été de nature à priver le public de la garantie tendant à ce qu'un avis objectif soit émis sur les projets susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement par une autorité disposant d'une autonomie réelle. Il a nui à une bonne information de l'ensemble des personnes intéressées par l'opération et été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision.
S'agissant du montant initial de la garantie financière de démantèlement :
30. Aux termes de l'article R. 515-101 du code de l'environnement : " I. - La mise en service d'une installation de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent soumise à autorisation au titre du 2° de l'article L. 181-1 est subordonnée à la constitution de garanties financières visant à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues à l'article R. 515-106. Le montant des garanties financières exigées ainsi que les modalités d'actualisation de ce montant sont fixés par l'arrêté d'autorisation de l'installation. / II. - Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe, en fonction de l'importance des installations, les modalités de détermination et de réactualisation du montant des garanties financières qui tiennent notamment compte du coût des travaux de démantèlement. / (...) ". Les articles 30 à 32 de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans leur rédaction issue de l'arrêté du 22 juin 2020, précisent ces dispositions. En vertu du II de l'annexe I à cet arrêté, auquel renvoie l'article 30, le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur est égal au nombre d'éoliennes multiplié par le coût unitaire d'un aérogénérateur qui varie selon la puissance de l'éolienne. Celui-ci s'établit à 50 000 euros lorsque la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur est inférieure ou égale à 2 MW. Lorsque la puissance unitaire de l'aérogénérateur est supérieure à 2 MW, ce coût unitaire est calculé selon la formule définie par le b) du I de cette annexe selon laquelle : " Cu = 50 000 + 10 000 * (P-2) où : Cu est le montant initial de la garantie financière d'un aérogénérateur ; -P est la puissance unitaire installée de l'aérogénérateur, en mégawatt (MW). ".
31. Il appartient au juge du plein contentieux des installations classées pour la protection de l'environnement d'apprécier le respect des règles de fond régissant l'installation au regard des circonstances de fait et de droit en vigueur à la date à laquelle il se prononce.
32. Il résulte de l'instruction que le montant initial des garanties financières fixé à 202 867 euros par l'article 2.2 de l'arrêté d'autorisation du 14 juin 2017 contesté a été calculé conformément aux dispositions de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, en vigueur à la date de l'arrêté préfectoral, sur la base d'un coût forfaitaire de 50 000 euros, par éolienne, quelle que soit sa puissance. Ces dispositions ont, toutefois, été abrogées par l'arrêté du 22 juin 2020 précité et remplacées, s'agissant des éoliennes d'une puissance supérieure à 2 MW, comme en l'espèce, par un coût variable selon leur puissance, calculé ainsi qu'il a été dit au point 30. Par suite, le montant initial des garanties financières de 202 867 euros fixé à l'article 5 de l'arrêté litigieux est insuffisant au regard des dispositions désormais applicables.
33. En revanche, si les requérants font valoir, en s'appuyant sur le coût estimé pour d'autres projets de parc éolien, que le préfet de l'Orne aurait dû écarter les dispositions de l'article 2 de l'arrêté ministériel du 26 août 2011 relatif à la remise en état et à la constitution des garanties financières pour les installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, aujourd'hui abrogé, ils n'établissent ni même n'allèguent que le montant initial des garanties financières prévu par les dispositions introduites par l'arrêté du 22 juin 2020 ne serait pas suffisant pour assurer le démantèlement des installations et la remise en état de leur site d'implantation.
S'agissant des opérations de démantèlement et de remise en état :
34. Aux termes de l'article R. 515-106 du code de l'environnement " Les opérations de démantèlement et de remise en état d'un site après exploitation comprennent : / 1° Le démantèlement des installations de production ; / 2° L'excavation d'une partie des fondations ; / 3° La remise en état des terrains sauf si leur propriétaire souhaite leur maintien en l'état ; / 4° La valorisation ou l'élimination des déchets de démolition ou de démantèlement dans les filières dûment autorisées à cet effet. / Un arrêté du ministre chargé de l'environnement fixe les conditions techniques de remise en état. ".
35. Ces dispositions sont relatives au démantèlement et à la remise en état des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent lors de la cessation de leur exploitation. Elles ne sont, dès lors, pas utilement invocables à l'encontre de l'autorisation en litige, laquelle est relative à la mise en service de l'installation et n'a pas été prise en application de ces dispositions. Le moyen tiré de ce qu'en n'imposant pas au futur exploitant le démantèlement de la totalité du réseau inter-éolien, le préfet aurait méconnu les dispositions de l'article R. 515-106 du code de l'environnement doit ainsi être écarté comme inopérant.
36. Il résulte de tout ce qui précède que l'autorisation environnementale délivrée par l'arrêté du préfet de l'Orne du 14 juin 2017 est illégale dès lors, premièrement, qu'elle n'a pas été précédée d'un avis régulièrement émis par l'autorité environnementale, deuxièmement, que le public et l'administration n'ont pas été suffisamment informés quant aux capacités financières dont disposait la société pétitionnaire, troisièmement, que l'étude d'impact est, sur certains points, entachée d'inexactitude et d'insuffisance et, quatrièmement, que le montant initial des garanties financières est limité à 50 000 euros par aérogénérateur.
Sur l'application des dispositions du 2° du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement :
37. Aux termes du I de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / (...) / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. ".
38. Les différentes illégalités, rappelées au point 36 du présent arrêt, entachant l'autorisation environnementale en litige sont susceptibles d'être régularisées par l'intervention d'une autorisation modificative de régularisation prise, d'une part, au vu d'un dossier actualisé à la lumière des motifs du présent arrêt et après consultation d'une autorité environnementale présentant les garanties d'impartialité requises et fixant, d'autre part, un montant propre à couvrir, en cas de défaillance de l'exploitant lors de la remise en état du site, les opérations prévues par l'article R. 515-106 du code de l'environnement et au moins équivalent à la somme du coût unitaire forfaitaire des quatre aérogénérateurs déterminé selon les modalités prévues à l'annexe de l'arrêté du 26 août 2011 relatif aux installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent au sein d'une installation soumise à autorisation au titre de la rubrique 2980 de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement, dans sa version applicable à la date de cette autorisation modificative.
39. L'avis émis, le cas échéant par l'autorité environnementale ainsi que le dossier actualisé, seront soumis à une nouvelle phase d'information du public organisée selon les modalités suivantes :
- un dossier présenté par la société Futures Energies du Parc du Haut du Perche sera soumis au public pour compléter son information sur le projet. Ce dossier comprendra des éléments rappelant la nature du projet. Il précisera l'objet de la nouvelle phase d'information du public et une copie du présent arrêt y sera annexée. Il précisera l'objet de la nouvelle phase d'information du public et une copie du présent arrêt y sera annexée. Il comportera, d'une part, des indications précises et étayées sur les capacités financières de la société pétitionnaire et, d'autre part, tous éléments utiles relatifs à l'état initial du site au plan chiroptérologique et les effets du projet sur les chiroptères ainsi qu'à l'impact visuel et acoustique pour les hameaux situés entre le projet et l'autre parc éolien.
- ce dossier sera mis à la disposition du public pendant une durée de quinze jours consécutifs dans les locaux de la mairie de la commune nouvelle de Charencey aux jours et heures d'ouverture de la mairie et il sera mis en ligne, pendant la même durée, sur le site internet de cette commune ;
- le public pourra, pendant cette durée de quinze jours, présenter des observations ; celles-ci seront soit portées sur un registre mis à la disposition du public, soit envoyées par courrier à l'adresse de la mairie à destination d'une personne désignée par le président du tribunal administratif de Caen et qui sera choisie sur la liste départementale d'aptitude à l'exercice des fonctions de commissaire-enquêteur ;
- un avis au public devra être publié afin de porter à sa connaissance l'ouverture de cette nouvelle phase d'information ; il devra préciser l'objet de cette phase en indiquant en particulier qu'il s'agit d'assurer l'exécution du présent arrêt en vue de la régularisation de l'arrêté du préfet de l'Orne du 14 juin 2017 par l'intervention d'une autorisation modificative de régularisation corrigeant les vices censurés par le présent arrêt ;
- cet avis sera publié quinze jours au moins avant le début et pendant toute la durée de celle-ci par voie d'affiches et éventuellement par tout autre moyen dans la commune nouvelle de Charencey ainsi que sur le site internet de cette commune ; ce même avis sera également affiché dans les communes concernées au sens de l'article R. 512-4 du code de l'environnement ; il sera publié dans deux journaux locaux diffusés dans le département de l'Orne, quinze jours au moins avant le début de cette nouvelle phase d'information du public ; il sera en outre rappelé dans les huit premiers jours de celle-ci ; la société Futures Energies du Parc du Haut du Perche procédera enfin dans les mêmes conditions de délais à l'affichage de l'avis d'ouverture de cette phase d'information sur le site de réalisation du projet ;
- dans un délai de quinze jours suivant la clôture du registre par la personne désignée par le président du tribunal administratif de Caen, cette personne remettra au préfet de l'Orne et au président du tribunal un rapport dont le contenu devra relater le déroulement de cette nouvelle phase d'information et synthétiser le cas échéant les observations recueillies ;
- la société Futures Energies du Parc du Haut du Perche prendra en charge les frais de cette phase d'information du public, notamment l'indemnisation de la personne qui sera désignée par le président du tribunal ;
- le préfet de l'Orne devra, dans le délai de huit jours à compter de la notification du présent arrêt, saisir le président du tribunal administratif de Caen d'une demande tendant à la désignation de cette personne.
40. Eu égard aux modalités de régularisation ainsi fixées, l'éventuelle autorisation modificative devra être communiquée à la cour dans un délai d'un an à compter du présent arrêt.
41. Il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de surseoir à statuer sur la requête de l'association Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien et autres jusqu'à l'expiration du délai mentionné au point précédent afin de permettre cette régularisation.
42. Enfin, compte tenu des lacunes de l'étude d'impact qui, ainsi qu'il a été dit aux point 24 à 26, entachent le dossier de demande, en ce qui concerne l'étude chiroptérologique, l'étude acoustique et l'étude paysagère, la cour n'est pas en mesure d'apprécier la conformité du projet aux articles L. 515-44 et L. 511-1 du code de l'environnement. Il y a dès lors lieu pour la cour de réserver la réponse aux moyens tirés de la méconnaissance de ces dispositions, lesquels demeurent susceptibles d'être écartés après la régularisation du dossier de demande d'autorisation environnementale.
D E C I D E :
Article 1er : Il est sursis à statuer sur les conclusions de la requête de l'association Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien et autres jusqu'à l'expiration d'un délai d'un an, courant à compter de la notification du présent arrêt, imparti à l'État pour produire devant la cour une autorisation environnementale modificative conforme aux modalités définies aux points 37 à 39.
Article 2 : Tous droits, moyens et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Libre Association de Vigilance et de Résistance à l'Eolien, représentant unique désigné par Me Monamy, mandataire, au ministre de la transition écologique et à la société Futures Energies du Parc du Haut du Perche.
Une copie sera adressée à la préfète de l'Orne.
Délibéré après l'audience du 11 mai 2021, à laquelle siégeaient :
Mme Douet, présidente de la formation de jugement,
M. L'hirondel, premier conseiller,
Mme Bougrine, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 juin 2021.
La rapporteure,
K. Bougrine
La présidente,
H. DOUET
La greffière,
A. BRISSET
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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