CAA de NANTES
N° 18NT04618
5ème chambre
M. CELERIER, président
Mme Catherine BUFFET, rapporteur
M. SACHER, rapporteur public
MONAMY, avocats
Lecture du vendredi 6 décembre 2019
Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 31 décembre 2018 et 14 janvier, 1er mars, 22 juillet et 19 septembre 2019, M. J... H..., la société L'Entêté, l'association Robin des bois, l'association Fédération environnement durable, l'association des commerçants de Noirmoutier, M. E... B..., M. K... I... et la société Sirius, représentés par Me Monamy, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime au large des îles d'Yeu et de Noirmoutier conclue, le 29 octobre 2018, entre l'Etat et la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier, l'arrêté du même jour par lequel le préfet de la Vendée a approuvé cette convention et l'arrêté préfectoral du 13 décembre 2018 confirmant l'approbation de cette convention ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils disposent chacun d'un intérêt pour contester les décisions litigieuses ;
- l'article 12 de la directive 2006/123/CE a été méconnu en ce que la conclusion de la concession d'utilisation du domaine public maritime litigieuse n'a pas été précédée des mesures de publicité et de mise en concurrence adéquates ;
- les actes attaqués ont été pris sur une procédure irrégulière ;
- il n'est pas établi que le préfet a procédé à la publicité préalable à l'instruction administrative de la demande de convention, prescrite par l'article R. 2124-5 du code général de la propriété des personnes publiques ;
- les dispositions de l'article R. 2124-6 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ; il n'est pas établi que les consultations prescrites par ces dispositions ont été effectuées ni qu'elles seraient intervenues dans des conditions régulières ; il n'est pas démontré que les avis auraient été émis par des autorités compétentes, notamment dans l'hypothèse d'avis émis par délégation, ni que ces autorités auraient été mises à même de se prononcer en toute connaissance de cause, au vu d'un dossier complet et actualisé correspondant au dernier état de la demande de concession déposée par la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier ; s'agissant de la consultation de la commission nautique locale, il n'est pas justifié de ce que l'avis du préfet maritime aurait été joint au dossier soumis à consultation ; il n'est pas démontré que les instances collégiales (commissions nautiques, organes délibérants des communes et établissements publics de coopération intercommunale notamment) auraient été convoquées dans des conditions régulières (délai de convocation, contenu de la convocation) ou se seraient prononcées dans des conditions régulières ; l'avis du 23 janvier 2018 émis par le directeur départemental des finances publiques de la Vendée a été signé, par délégation, par la chef du service local du domaine, inspectrice des finances publiques, dont on ignore l'identité, en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ; enfin, il n'est pas établi que la chef du service local du domaine aurait été titulaire d'une délégation régulière à cette fin ;
- la commission départementale de la nature, des paysages et des sites a été consultée dans des conditions irrégulières ; des représentants de la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier ont assisté voire participé aux débats de la commission ainsi qu'une représentante du bureau d'études Abies et n'ont pas quitté la salle de réunion au moment du vote sur le projet, en méconnaissance de l'article R. 341-25 du code de l'environnement ; les membres de la commission n'ont pu voter en toute indépendance et impartialité ;
- l'étude d'impact ne peut être considérée comme suffisante ; les insuffisances dont elle est entachée ont privé le public et l'administration de la garantie d'être informés de manière complète et ont pu influer sur le sens de la décision prise par le préfet ;
- le dossier d'enquête publique était irrégulièrement composé en ce qu'il ne comportait pas le second avis du préfet maritime émis le 30 octobre 2017 en application du 3° de l'article R. 2124-7 du code général de la propriété des personnes publiques ; cette irrégularité a privé le public d'une information complète quant aux problématiques liées à l'impact environnemental du projet, la sécurité maritime et l'utilisation de la zone par les usagers de la mer ;
- l'enquête publique préalable prescrite par l'article R. 2124-7 du code de la propriété des personnes publiques est entachée d'irrégularité en ce que sa durée était insuffisante pour permettre aux populations des communes concernées de prendre connaissance du dossier soumis à leur avis ;
- les membres de la commission d'enquête ont manqué à leur obligation d'impartialité ; cette irrégularité a privé le public d'un examen impartial du projet soumis à enquête publique par l'ensemble des membres de la commission et a pu influer sur le sens de la décision prise par l'administration sur la demande de concession ;
- les dispositions de l'article R. 2124-56 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ; il n'est pas établi que le commandant de la zone maritime Atlantique et le préfet maritime auraient émis leur avis en toute connaissance de cause, c'est-à-dire au vu d'un dossier complet et actualisé correspondant au dernier état de la demande de concession déposée par la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier ; il n'est pas établi que la consultation du commandant de la zone maritime Atlantique serait intervenue dans des conditions régulières, notamment que son avis aurait été signé par une autorité compétente dans l'hypothèse d'un avis émis par délégation ; ainsi l'accord du 30 novembre 2018 confirmant celui, illégal, du 4 décembre 2017 doit être regardé comme émanant d'une autorité incompétente ; il n'est pas non plus établi qu'à la date du 30 octobre 2017, les conditions d'une suppléance régulière du préfet maritime étaient remplies ; l'avis conforme du 30 octobre 2017 est ainsi également illégal ;
- les dispositions de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ; le projet est de nature à porter atteinte aux paysages au sein desquels il va prendre place ; les actes litigieux ne tiennent pas compte des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques ;
- l'arrêté du 2 avril 2008 méconnaît les dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques ; le montant des redevances pour l'utilisation du domaine public maritime par un parc éolien, calculé en se fondant sur les dispositions de cet arrêté, n'est pas proportionné aux " avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation " ;
- les dispositions de l'article R. 2124-8 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ; alors que la convention précise les conditions dans lesquelles le préfet met en oeuvre les garanties financières, en cas de défaut d'exécution par le titulaire des opérations de remise en état, de restauration ou de réhabilitation du site, rien n'est dit à propos de la mise en oeuvre de ces garanties par le préfet en cas de disparition juridique du titulaire ;
- les dispositions de l'article R. 2124-9 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ;
- l'arrêté du 13 décembre 2018 est entaché d'illégalité en raison de son caractère rétroactif ;
- l'arrêté préfectoral du 29 octobre 2018 et l'arrêté d'approbation confirmatif du 13 décembre 2018 seront annulés par voie de conséquence de l'annulation de la convention.
Par des mémoires, enregistrés les 23 août et 19 septembre 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. H... et autres ne sont pas fondés ou sont inopérants en tout état de cause.
Par des mémoires, enregistrés les 20 mai, 5 septembre et 4 octobre 2019, la société éoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier, représentée par Me Cassin, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable ; il n'est pas justifié de l'accomplissement des formalités obligatoires prévues à l'article 3 du décret du 8 janvier 2016 ; la requête initiale et les conclusions additionnelles, qui n'annoncent aucun mémoire complémentaire, sont entachées d'un défaut de motivation ; les associations et sociétés requérantes ne justifient ni de leur qualité ni de leur intérêt à agir ;
- les moyens de la requête sont inopérants et, en tout état de cause, non fondés.
Par lettre enregistrée le 14 janvier 2019, M. H... a été désigné par son mandataire, Me Monamy, représentant unique, destinataire de la notification de la décision à venir.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Charte de l'environnement ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de l'environnement ;
- le décret n° 2004-112 du 6 février 2004 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Buffet,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,
- et les observations de Me Monamy, pour M. H... et autres et de Me Cassin, pour la société Éoliennes en mer Îles d'Yeu et de Noirmoutier.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 12 octobre 2018, le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire a autorisé la société Éoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier à exploiter une installation éolienne de production d'électricité en mer, d'une capacité de production de 496 MW, localisée sur le domaine public maritime au large des îles d'Yeu et de Noirmoutier (Vendée). Cette société a, sur le fondement des articles L. 2124-1 et suivants du code général de la propriété des personnes publiques, sollicité, le 9 mai 2017, l'octroi d'une concession d'utilisation du domaine public maritime en dehors des ports afin d'installer, d'exploiter et d'assurer la maintenance de cette installation. Une convention de concession d'utilisation du domaine public maritime a été conclue, le 29 octobre 2018, entre l'Etat et la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier et a été approuvée par un arrêté du même jour du préfet de la Vendée, qui a été confirmé par un arrêté préfectoral du 13 décembre 2018. M. H... et autres demandent l'annulation de la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime du 29 octobre 2018 et des arrêtés préfectoraux des 29 octobre et 13 décembre 2018.
2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. La légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer, ne peut être contestée qu'à l'occasion du recours ainsi défini.
3. Le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini. Les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Saisi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l'auteur du recours autre que le représentant de l'Etat dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu'il critique sont de celles qu'il peut utilement invoquer, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences.
4. Indépendamment du recours de pleine juridiction dont disposent les tiers à un contrat administratif pour en contester la validité dans les conditions rappelées aux point 2 et 3, les tiers qui se prévalent d'intérêts auxquels l'exécution du contrat est de nature à porter une atteinte directe et certaine sont recevables à contester devant le juge de l'excès de pouvoir la légalité de l'acte administratif portant approbation du contrat. Ils ne peuvent toutefois soulever, dans le cadre d'un tel recours, que des moyens tirés de vices propres à l'acte d'approbation, et non des moyens relatifs au contrat lui-même.
Sur les conclusions dirigées contre la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime :
5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 2124-5 du code général de la propriété des personnes publiques : " Avant ouverture de l'instruction administrative prévue à l'article R. 2124-6, le préfet procède à une publicité préalable consistant en un avis publié dans deux journaux à diffusion locale ou régionale habilités à recevoir des annonces légales diffusées dans le ou les départements intéressés. Si l'importance du projet le justifie, le préfet procède à la même publication dans deux journaux à diffusion nationale. / L'avis mentionne les caractéristiques principales de la demande. (...) ".
6. Il résulte de l'instruction que la demande de concession déposée, le 9 mai 2017, par la société Éoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier a fait objet d'une publication dans les journaux, à diffusion locale et régionale, Presse Océan et Ouest France, le 5 juillet 2017, et le Courrier Vendéen, le 6 juillet 2017, ainsi que dans les journaux, à diffusion nationale, Les Echos, les 4, 7 et 8 juillet 2017, Le Monde, le 5 juillet 2017 et Le Marin, le 6 juillet 2017. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions précitées n'auraient pas été respectées manque en fait.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 341-25 du code de l'environnement, relatif à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites : " Lorsque la commission ou l'une de ses formations spécialisées est appelée à émettre un avis sur une affaire individuelle, la personne intéressée est invitée à formuler ses observations. La commission délibère en son absence. (...)".
8. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne résulte pas de l'instruction que des personnes autres que les membres de la commission, notamment les représentants de la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier et du bureau d'études Abies, auraient été présents lors du vote, le 16 février 2018, de cette commission portant sur le projet en litige, le procès-verbal de la réunion précisant sur ce point que " les membres ne formulant pas d'autres observations, M. G... soumet au vote global des membres l'avis favorable du service rapporteur, pour le volet paysager et pour le volet EBC/PLU ". Le moyen tiré de ce que la commission départementale de la nature, des paysages et des sites aurait été consultée de façon irrégulière ne peut donc qu'être écarté.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 2124-7 du code général de la propriété des personnes publiques : " Le projet fait l'objet, préalablement à son approbation, d'une enquête publique menée dans les formes prévues par les articles R. 123-2 à R. 123-27 du code de l'environnement. / Le dossier soumis à l'enquête comprend obligatoirement : (...) 2° Les pièces énumérées à l'article R. 2124-2 du présent code ; 3° L'avis du préfet maritime ou du délégué du Gouvernement pour l'action de l'Etat en mer ; 4° Les avis recueillis lors de l'instruction administrative ; (...) / A l'issue de l'enquête publique, la convention est approuvée par arrêté du préfet. En cas d'avis défavorable du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête, le préfet peut néanmoins approuver la convention par arrêté motivé. ". Aux termes de l'article R. 2124-2 du même code : " La demande de concession est adressée au préfet. Elle est accompagnée d'un dossier comportant les renseignements suivants (...) S'il y a lieu, le demandeur fournit également l'étude d'impact ou la notice d'impact établies dans les conditions prévues par les articles R. 122-1 à R. 122-6 du code de l'environnement ". Il résulte du 31° du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable, que les installations en mer de production d'énergie font l'objet d'une étude d'impact.
10. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) II. - En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : (...) / 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; / 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres :a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; b) De l'utilisation des ressources naturelles, en particulier (...) l'eau et la biodiversité (...) ; c)(...) du bruit, de la vibration, (...)de la création de nuisances (...);d) Des risques (...) pour l'environnement ; e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés, en tenant compte le cas échéant des problèmes environnementaux relatifs à l'utilisation des ressources naturelles et des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement susceptibles d'être touchées.(...). ".
11. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
12. Les requérants soutiennent que l'étude d'impact est entachée d'insuffisance en s'appuyant sur des extraits qu'ils reproduisent de l'avis émis le 22 juin 2018 par le Conseil national de la protection de la nature, consulté dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement, distincte de celle faisant l'objet de la présente instance, applicable aux demandes de dérogation aux interdictions de destruction des espèces protégées et de leurs habitats naturels.
13. Ainsi que l'a précisé le Conseil national de la protection de la nature, des moyens importants ont été consacrés par la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier à la réalisation de l'état des lieux, des expertises ayant été effectuées, sur une aire d'étude de 5 000 km2, pendant deux années, selon les protocoles d'inventaires, les fréquences et les durées des campagnes d'expertise recommandés par le guide national de l'étude d'impact des parcs éoliens en mer. La seule circonstance, relevée par le Conseil national de la protection de la nature dans le cadre de son examen de la demande de dérogation, qu'une " véritable estimation de densité " des oiseaux et mammifères marins aurait pu " être présentée " n'est pas de nature, à elle-seule, à caractériser une insuffisance de l'état initial décrit dans l'étude d'impact dès lors qu'il n'est pas contesté que l'ensemble des espèces présentes dans la zone concernée ont été recensées. En ce qui concerne le risque de collision des oiseaux, le Conseil national de la protection de la nature a lui-même précisé qu'il s'agit d'un " impact difficilement appréciable " et, s'il indique que l'impact cumulé du projet et du parc éolien de St-Nazaire est " certainement minimisé ", il n'apporte pas d'élément justificatif sur ce point. S'agissant du Puffin des Baléares, l'avis du Conseil national de la protection de la nature se borne à souligner que " la difficulté de chiffrer une prévision d'impact cumulé doit se traduire par l'application du principe de précaution pour cette espèce. En accord avec la littérature, le risque de mortalité directe par collision peut être faible. Mais est-il possible de le qualifier de négligeable quand l'espèce décline du fait d'une surmortalité due aux captures dans les engins de pêche ' ". De la même façon, s'agissant des chiroptères, les énonciations de l'avis sur lesquelles se fondent les requérants se bornent à mentionner que " des incertitudes fortes demeurent " .quant à la fréquentation et aux couloirs de migration des chiroptères et font état des mêmes incertitudes, s'agissant de la tortue Luth Enfin, en ce qui concerne les effets acoustiques du projet sur les mammifères marins, dont l'importance est limitée à la phase de construction, si le Conseil national de la protection de la nature remet en cause la méthodologie utilisée, il en conclut seulement que les résultats sur les prévisions de ces effets sont " fortement sujets à caution ". Dans ces conditions, alors en outre que, dans son avis du 21 février 2018, l'autorité environnementale a considéré, dans sa partie consacrée à l'analyse de l'étude d'impact, que celle-ci était complète, les seules énonciations du Conseil national de la protection de la nature reproduites par les requérants relatives à l'examen par ce dernier, dans le cadre d'une procédure distincte, d'une demande ayant un autre objet ne suffisent pas à faire regarder l'étude d'impact comme entachée d'inexactitudes, d'omissions ou d'insuffisances ayant pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou de nature à exercer une influence sur la décision prise.
14. En quatrième lieu, les requérants soutiennent que le dossier d'enquête publique était irrégulièrement composé en ce qu'il ne comportait pas le second avis du préfet maritime émis le 30 octobre 2017, en application du 3° de l'article R. 2124-7 du code général de la propriété des personnes publiques. Il résulte, toutefois, de l'instruction que, par cet avis, émis à la suite du remplacement, dans le projet, d'une éolienne de type Adwen 8MG par une éolienne de type Siemens 8MW, le préfet maritime " confirme dans les mêmes conditions, l'avis favorable émis le 6 octobre 2017 " aux motifs que " sur le plan environnemental, l'impact est tout à fait comparable d'autant que les schémas d'implantation proposés pour les éoliennes et les câbles sont rigoureusement identiques ", qu'en ce qui concerne " la sécurité maritime, aucune différence significative n'est identifiée vis-à-vis des de radars des sémaphores " et que si le tirant d'air est réduit du fait du changement du type d'éolienne, " cette évolution est sans effet sur la sécurité maritime ". Par suite, la circonstance, à la supposer établie, que l'avis du 30 octobre 2017 du préfet maritime n'aurait pas figuré au dossier d'enquête publique n'a pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population. Dès lors, le moyen tiré de ce que " cette irrégularité a privé le public d'une information complète quant aux problématiques liées à l'impact environnemental du projet, la sécurité maritime et l'utilisation de la zone par les usagers de la mer " doit être écarté.
15. En cinquième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'impartialité qui s'impose à la commission d'enquête tout au long de la procédure aurait été méconnue. Les propos tenus par deux des membres de la commission d'enquête, dans un échange de mails avec les autres membres de la commission, à la suite de l'incident qui s'est produit le 28 avril 2018, lors d'une permanence, avec un groupe d'opposants au projet, pour regrettables qu'ils soient, et qui révèlent seulement le contexte de tensions entourant cette opération, ne suffisent pas, à eux seuls, à faire regarder la commission d'enquête comme ayant manqué à cette obligation alors, en outre, qu'il n'est pas contesté qu'une rencontre a ultérieurement été proposée par cette commission aux intéressés.
16. En sixième lieu, selon l'article L. 123-9 du code de l'environnement, la durée de l'enquête publique ne peut être inférieure à trente jours et peut être prolongée pour une durée maximale de quinze jours, par décision motivée du commissaire enquêteur ou du président de la commission d'enquête.
17. L'enquête publique s'est déroulée du 4 avril au 23 mai 2018 et a été accompagnée de plusieurs mesures destinées à favoriser l'information et la participation du public, y compris par la voie électronique grâce à la mise en place d'un registre dématérialisé. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que la durée de l'enquête a été insuffisante.
18. En septième lieu, aux termes de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les décisions d'utilisation du domaine public maritime tiennent compte de la vocation des zones concernées et de celles des espaces terrestres avoisinants, ainsi que des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques ;(...) ".
19. Le projet de parc éolien, d'une surface de 89 km2, composé de 62 aérogénérateurs disposant de pales de 81 mètres, de câbles sous-marins inter-éoliennes, d'un poste de livraison, d'un mât de mesure et des éléments accessoires, d'une capacité de production de 496 MW est situé à 12 kilomètres environ de l'île d'Yeu, à 17 kilomètres environ de l'île de Noirmoutier et à 21 kilomètres de NotreDame-de-Monts qui constitue la commune littorale la plus proche.
20. D'une part, les requérants relèvent le caractère remarquable de l'île d'Yeu et de l'île de Noirmoutier, qui comporte notamment un site inscrit dénommé " Le Bois des Éloux et de la Mougendrie ", sur le plan tant patrimonial que paysager. Il résulte, toutefois, de l'instruction, notamment de l'étude d'impact dont les énonciations, sur ce point, ne sont pas contestées, que l'impact visuel du parc a été réduit, notamment, par la disposition en ligne des éoliennes, le nombre des alignements visibles étant de 5 pour l'île d'Yeu et de 13 pour l'île de Noirmoutier, que seules la façade littorale nord de l'île d'Yeu et la façade ouest de l'ile de Noirmoutier offrent des vues directes sur le parc dont les éoliennes apparaitront " comme des objets de plus d'un centimètre placés à 1 mètre de l'oeil ". Ainsi, compte tenu de la distance par rapport à la côte et du schéma d'implantation des éoliennes, la visibilité d'ensemble du projet apparait limitée. Si les requérants invoquent, également, les effets cumulés du projet avec le parc éolien du banc de Guérande au large de Saint-Nazaire, ils relèvent seulement un impact depuis la pointe de l'Herbaudière, sur l'île de Noirmoutier, les deux parcs étant en outre éloignés d'une vingtaine de kilomètres.
21. D'autre part, s'agissant de la biodiversité, il est constant que le parc éolien n'est pas compris dans une zone Natura 2000. Les requérants font, néanmoins, valoir qu'il existe à proximité une zone spéciale de conservation (ZSC) " Le Plateau rocheux de l'ile d'Yeu " et deux zones de protection spéciale (ZPS) " Le secteur marin de l'ile d'Yeu jusqu'au continent " et " Le marais breton, baie de Bourgneuf, ile de Noirmoutier et forêts de Monts " et que le secteur d'implantation se caractérise par une grande richesse de l'avifaune, de la faune marine et de chiroptères à laquelle le projet va porter atteinte de façon temporaire et permanente. En ce qui concerne les impacts temporaires, les éléments produits par les requérants, constitués d'extraits de l'avis émis le 21 février 2018 par l'autorité environnementale, portent sur les effets de la partie terrestre du projet, liés au tracé du raccordement électrique, sur les mammifères terrestres et des espèces d'oiseaux terrestres ou non observés en mer durant les expertises et non sur la partie maritime du projet, objet de la concession litigieuse. En ce qui concerne les autres impacts environnementaux évoqués, il résulte de l'instruction que ceux-ci ont été réduits en raison du choix effectué par la société de recourir à des éoliennes de grande puissance (MR1), lequel a pour effet de limiter le nombre d'aérogénérateurs et, par voie de conséquence, le nombre d'obstacles en mer et le risque de collision associé ainsi que l'emprise sur les fonds marins. Il résulte, également, de l'instruction, notamment de ce même avis de l'autorité environnementale, s'agissant de l'avifaune, que le risque de collision est qualifié de moyen à fort pour la seule espèce du goéland marin, pour laquelle d'importantes mesures compensatoires ont été prévues dans les secteurs de reproduction et de stationnement de ces oiseaux, que cinq espèces " paraissent affectées par le parc " au regard de l'effet barrière de perturbations des oiseaux en vol, l'impact étant jugé " moyen " et que l'impact sur les chiroptères est limité, la pipistrelle de Nathusius, espèce migratrice, étant seule susceptible de passer au-dessus de la mer. Enfin, les requérants se bornent à citer des extraits de l'avis du Conseil national de la protection de la nature, dont il a été dit au point 13, s'agissant du Puffin des Baléares, qu'il faisait état de la difficulté d'évaluer l'impact du projet sur cette espèce et, s'agissant des mammifères marins, qu'il se bornait à contester la méthodologie employée pour estimer l'impact acoustique durant la phase de construction. Il résulte des développements qui précèdent que, contrairement à ce qui est soutenu par les requérants, la décision d'utilisation du domaine public n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques.
22. En huitième lieu, les requérants font grief à la convention de ne pas comporter les conditions de mise en oeuvre des garanties financières à fin de réhabilitation du site par le préfet en cas de disparition juridique du titulaire de la concession, en se prévalant des dispositions de l'article R. 2124-8 du code général de la propriété des personnes publiques, aux termes desquelles : " Lorsque le titulaire est une personne physique ou une personne morale de droit privé, la convention peut prévoir, afin d'assurer la réversibilité effective des modifications apportées au milieu naturel, la constitution de garanties financières ou une consignation auprès de la Caisse des dépôts et consignations, dont le montant est établi compte tenu du coût estimé des opérations de remise en état, de restauration ou de réhabilitation du site / La convention précise les conditions dans lesquelles le préfet met en oeuvre ces garanties, notamment en cas de défaut d'exécution par le titulaire des opérations de remise en état, de restauration ou de réhabilitation du site, ou en cas de disparition juridique du titulaire ".
23. L'article 4-3 de la convention de concession d'utilisation du domaine public fixe les obligations du concessionnaire en ce qui concerne le démantèlement des installations objet de l'exploitation, la remise en état, la restauration ou la réhabilitation du site afin d'assurer la réversibilité effective des modifications apportées au milieu naturel et précise que ses dispositions sont applicables dans tous les cas de fin anticipée de la concession. L'article 4-1 " Constitution de garanties financières " de la convention, qui renvoie à l'article 6.1 (Garanties financières pour démantèlement) du cahier des charges de l'appel d'offres, fixe les modalités de constitution des garanties financières mises à la charge du concessionnaire, leur nature et leur montant, et dispose que le concédant peut mettre en oeuvre ces garanties financières en cas d'absence de démantèlement et de remise en état du domaine public maritime après exploitation, à la fin normale ou anticipée de la concession, dans les conditions prévues à l'article 4-3. L'hypothèse visée par les requérants d'une disparition du concessionnaire avant le terme de la convention, qui correspond à l'un des cas de cessation anticipée de la convention est, par suite, prévue au contrat, tout comme les garanties propres à assurer une remise en état du site concédé. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 2124-8 du code général de la propriété des personnes publiques ne peut donc être accueilli.
24. En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la convention de concession, il résulte de l'instruction que les personnes publiques mentionnées à l'article R. 2124-6 du code général de la propriété des personnes publiques ont été consultées préalablement à l'enquête publique. Les requérants soutiennent, néanmoins, que ces dispositions ont été méconnues en ce qu'il n'est pas établi " que les consultations prescrites (...) seraient intervenues dans des conditions régulières ", " que leurs avis auraient été émis par des autorités compétentes, notamment dans l'hypothèse d'avis émis par délégation, ni que ces autorités auraient été mises à même de se prononcer en toute connaissance de cause, au vu d'un dossier complet et actualisé correspondant au dernier état de la demande de concession déposée par la société EMYN (dossier modifié en dernier lieu début 2018 : changement de modèle d'anode sacrificielle) ". Ils soutiennent, en particulier, qu'il n'est pas établi que " les instances collégiales ((...) organes délibérants des communes et établissements publics de coopération intercommunale notamment), auraient été convoquées dans des conditions régulières (délai de convocation, contenu de la convocation) ou se seraient prononcées dans des conditions régulières (problématiques de la composition de l'organe délibérant et du quorum par exemple) ", que " l'avis du 23 janvier 2018 émis par le directeur départemental des finances publiques de la Vendée a été signé, par délégation, par la chef du service local du Domaine, inspectrice des finances publiques, dont on ignore l'identité, en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration " et que la chef du service local du Domaine n'était pas " titulaire d'une délégation régulière à cette fin ".
25. Toutefois, les vices ainsi allégués, au demeurant de façon très générale, ne sont pas en rapport direct avec l'intérêt lésé dont les associations requérantes se prévalent qui se rapportent à la protection de la nature et de l'environnement, à la préservation des milieux et ressources maritimes, à la protection des sites et des paysages, à la défense des espèces menacées, de la biodiversité animale et végétale, ni en tout état de cause, avec les intérêts lésés, à les supposer même suffisamment directs et certains, qu'invoquent les autres requérants, liés aux effets du projet sur l'activité de la pêche, sur les conditions de la navigation de plaisance et, plus généralement, sur leurs conditions et lieux de vie. Par suite, et alors que les vices allégués ne présentent pas un caractère de gravité telle que le juge devrait les relever d'office, ils ne peuvent utilement être invoqués par les requérants en application des principes énoncés au point 3 du présent arrêt. S'agissant de la consultation de la commission nautique locale, qui a examiné le projet en tant qu'il emporte des effets sur la navigation maritime, il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal de la réunion, que ses membres auxquels a été transmis le dossier de présentation du projet, ont été convoqués le 20 octobre 2017 et que le quorum était atteint le 8 novembre 2017, jour de sa réunion. Si les avis du préfet maritime de l'Atlantique n'ont pu leur être communiqués en même temps que la convocation du fait de ce que le second avis de ce dernier n'avait pas été émis à cette date, le contenu de ces avis a été discuté lors de la séance qui s'est tenue en présence du représentant de la préfecture maritime. Par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que la commission nautique locale n'aurait pas été régulièrement consultée doit être écarté.
26. Les requérants soutiennent, enfin, que l'article 12 de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur a été méconnu en ce que la concession litigieuse n'aurait pas fait l'objet de publicité et de mise en concurrence préalables. Ils invoquent la méconnaissance de l'article R. 2124-9 du code général de la propriété des personnes publiques qui prévoit que " La convention indique que la mise en oeuvre par le préfet des mesures indispensables à la conservation du domaine public maritime n'ouvre pas droit à indemnité au profit du titulaire ". Ils excipent de l'illégalité, au regard des principes de fixation des redevances domaniales résultant de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques, de l'arrêté du 2 avril 2008 fixant le tarif des redevances dues pour occupation du domaine public de l'Etat par des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, au vu duquel le directeur départemental des finances publiques a émis son avis, le montant des parts fixe et variable de la redevance ayant été arrêté par le service des domaines sur le fondement des articles 1er et 4 de cet arrêté. Toutefois, aucun de ces moyens, par lesquels les requérants invoquent, soit la méconnaissance de règles relatives au droit de la concurrence, soit les conditions financières de la convention, n'est en rapport direct avec les intérêts rappelés ci-dessus au point 25 dont ils se prévalent au soutien de leurs conclusions. Sur ce point, M. H..., M. B... et M. I... ne démontrent pas davantage être lésés dans leurs intérêts de façon suffisamment directe et certaine par la concession d'autorisation du domaine public en se prévalant de ce que " leurs intérêts financiers en qualité de contribuables nationaux seraient immanquablement lésés du fait de l'octroi d'avantages financiers considérables au promoteur " du projet. Enfin, les vices allégués ne sont pas d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Ces moyens ne peuvent, dès lors, qu'être écartés en application des principes rappelés précédemment.
27. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la requête, que M. H... et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de la convention de concession conclue le 29 octobre 2018 entre l'Etat et la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier.
Sur les conclusions dirigées contre les arrêtés préfectoraux des 29 octobre et 13 décembre 2018 approuvant la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime :
28. En premier lieu, ainsi qu'il a été rappelé au point 4, les tiers ne peuvent invoquer, à l'encontre de l'acte administratif portant approbation du contrat, que des moyens tirés de vices propres à l'arrêté d'approbation, et non des moyens relatifs au contrat lui-même. Les moyens articulés, sans distinction, contre les arrêtés d'approbation et la convention de concession, tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 2124-1, L. 2125-3, R. 2124-5, R. 2124-6, R. 2124-8 et R. 2124-9 du code général de la propriété des personnes publiques, de l'irrégularité de la consultation de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, du caractère incomplet de l'étude d'impact et du dossier d'enquête publique, de l'insuffisante durée de l'enquête publique, de la partialité des membres de la commission d'enquête et de la méconnaissance des règles relatives au droit de la concurrence et aux conditions financières de la convention ne peuvent, dès lors, qu'être écartés. Enfin, compte tenu de qui a été dit aux points 5 à 27, le moyen tiré de ce que les arrêtés d'approbation devraient être annulés " par voie de conséquence de la nullité de la convention " auquel ils se rapportent ne peut être accueilli.
29. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 2124-56 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les avis conformes du préfet maritime ou du délégué du Gouvernement pour l'action de l'Etat en mer et de l'autorité militaire compétente doivent être demandés pour les autorisations relatives à la formation d'établissement de quelque nature que ce soit sur la mer ou sur ses rivages. / L'autorité militaire compétente est, en métropole, le commandant de zone maritime (...) ". Aux termes de l'article 6 du décret du 6 février 2004 relatif à l'organisation de l'Etat en mer : " (...) Le préfet maritime de l'Atlantique est le commandant de la zone maritime Atlantique. Le siège de la préfecture maritime est à Brest. (...) ".
30. D'une part, s'agissant de l'avis conforme émis, le 30 octobre 2017, par le préfet maritime, l'article 7 du décret mentionné ci-dessus du 6 février 2004 dispose qu'en cas " d'absence ou d'empêchement, la suppléance du préfet maritime est exercée par l'officier de marine qui assure la suppléance du commandant de la zone maritime ". M. L... A..., capitaine de vaisseau, a été promu au grade de contre-amiral, grade des officiers généraux de la marine, et nommé adjoint au commandant de l'arrondissement maritime de l'Atlantique et commandant de base de défense de Brest-Lorient, le 1er septembre 2017, par décret du 12 juillet 2017. Par ordre de circonstance du 23 octobre 2017, le vice-amiral d'escadre Emmanuel de Oliveira, alors " commandant de la zone maritime Atlantique, commandant de l'arrondissement maritime Atlantique et préfet maritime de l'Atlantique ", a désigné le contre-amiral M... A... pour assurer la suppléance de ses fonctions du vendredi 27 octobre 2017 au 6 novembre 2017. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet maritime, commandant de la zone maritime, n'ait pas été absent ou empêché à la date du 30 octobre 2017. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'avis conforme complémentaire du 30 octobre 2017 signé par le contre-amiral M... A... serait entaché d'incompétence doit être écarté.
31. D'autre part, s'agissant de l'avis émis par l'autorité militaire, le vice-amiral d'escadre Emmanuel de Oliveira, commandant la zone maritime Atlantique, a émis, le 4 décembre 2017, l'avis conforme requis par les dispositions de l'article R. 2124-56 du code général de la propriété des personnes publiques. Cet avis a été signé, par délégation, par le contre-amiral Arnaud Provost-Fleury, adjoint au commandant de la zone maritime Atlantique. Le préfet de la Vendée a considéré que la délégation de signature n'avait pas fait l'objet de mesures de publicité suffisantes et a sollicité un nouvel avis, qui a été rendu, le 30 novembre 2018, par le vice-amiral d'escadre Jean-Louis Lozier, commandant la zone maritime Atlantique.
32. L'avis du 30 novembre 2018 confirmant celui du 4 décembre 2017 a été pris par le vice-amiral d'escadre Jean-Louis Lozier, en sa qualité de commandant de la zone maritime Atlantique, ainsi qu'il est expressément mentionné dans cet avis. La circonstance qu'apparaisse également, sous la signature de l'intéressé, la mention " commandant d'arrondissement maritime Atlantique " s'avère sans incidence, celui-ci ayant été nommé, par décret du 11 juillet 2018 " commandant de la zone maritime Atlantique, commandant d'arrondissement maritime Atlantique et préfet maritime ". Le moyen tiré de ce que cet avis émane d'une autorité incompétente ne peut donc être accueilli.
33. Les requérants soutiennent, également, que le dossier de demande de concession présenté par la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier ayant été modifié au début de l'année 2018 pour tenir compte du changement de modèle d'anodes, le commandant de la zone maritime Atlantique qui a émis son avis le 4 décembre 2017 et le préfet maritime qui a émis son avis les 6 et 30 octobre 2017 n'auraient pas disposé d'une information complète sur le projet de sorte que ces avis seraient entachés d'irrégularité. Toutefois, il n'est pas contesté que la modification du type d'anodes revêt un caractère mineur et est sans incidence sur la sécurité maritime du projet. Par suite, et alors en tout état de cause que l'autorité militaire s'est de nouveau prononcée le 30 novembre 2018, le moyen ne peut qu'être écarté.
34. Enfin, ainsi qu'il a été dit au point 31, le préfet de la Vendée a considéré que la délégation de signature consentie au contre-amiral Arnaud Provost-Fleury, adjoint au commandant de la zone maritime Atlantique, signataire de l'avis du 4 décembre 2017 n'avait pas fait l'objet de mesures de publicité suffisantes. Il a sollicité de l'autorité militaire, un nouvel avis, qui a été rendu, le 30 novembre 2018, dans des termes identiques au premier, par le vice-amiral d'escadre Jean-Louis Lozier, commandant la zone maritime Atlantique. Le préfet a pris, au vu de cet avis, à titre de régularisation, le 13 décembre 2018, un arrêté, confirmant l'arrêté du 29 octobre 2018, dont l'article 1er énonce que " Les dispositions de l'arrêté préfectoral (...) du 29 octobre 2018 sont confirmées avec effet à compter du 29 octobre 2018 ". Compte tenu de ce que l'irrégularité de l'avis relevée par le préfet, qui affecte seulement les modalités selon lesquelles la personne publique a donné son consentement, était susceptible d'être régularisée et que le contenu de l'avis émis le 30 novembre 2018 était identique à celui du 4 décembre 2017, le préfet a pu légalement réitérer l'acte d'approbation, avec effet rétroactif au 29 octobre 2018, par l'arrêté du 13 décembre 2018 dépourvu du vice entachant l'acte d'approbation du 29 octobre 2018. Par suite, le moyen tiré par les requérants de ce que cet arrêté serait entaché d'illégalité en raison de son caractère rétroactif ne peut qu'être écarté.
35. Il résulte de tout ce qui précède que M. H... et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime au large des îles d'Yeu et de Noirmoutier conclue, le 29 octobre 2018, entre l'Etat et la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier, de l'arrêté du même jour par lequel le préfet de la Vendée a approuvé cette convention et de l'arrêté préfectoral du 13 décembre 2018 confirmant l'approbation de cette convention.
Sur les frais liés au litige :
36. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat et de la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement à M. H... et autres de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. J... H..., de la société L'Entêté, de l'association Robin des bois, de l'association Fédération environnement durable, de l'association des commerçants de Noirmoutier, de M. E... B..., de M. K... I... et de la société Sirius, le versement à la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier d'une somme globale de 1 500 euros au titre des mêmes frais.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. H... et autres est rejetée.
Article 2 : M. J... H..., la société L'Entêté, l'association Robin des bois, l'association Fédération environnement durable, l'association des commerçants de Noirmoutier, M. E... B..., M. K... I... et la société Sirius verseront à la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. J... H..., désigné comme représentant unique, à la ministre de la transition écologique et solidaire et à la société éoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Vendée.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme C..., présidente-assesseur,
- M. Bréchot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2019.
Le rapporteur,
C. Buffet
Le président,
T. CELERIER
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18NT04618
N° 18NT04618
5ème chambre
M. CELERIER, président
Mme Catherine BUFFET, rapporteur
M. SACHER, rapporteur public
MONAMY, avocats
Lecture du vendredi 6 décembre 2019
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la procédure suivante :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 31 décembre 2018 et 14 janvier, 1er mars, 22 juillet et 19 septembre 2019, M. J... H..., la société L'Entêté, l'association Robin des bois, l'association Fédération environnement durable, l'association des commerçants de Noirmoutier, M. E... B..., M. K... I... et la société Sirius, représentés par Me Monamy, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :
1°) d'annuler la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime au large des îles d'Yeu et de Noirmoutier conclue, le 29 octobre 2018, entre l'Etat et la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier, l'arrêté du même jour par lequel le préfet de la Vendée a approuvé cette convention et l'arrêté préfectoral du 13 décembre 2018 confirmant l'approbation de cette convention ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils disposent chacun d'un intérêt pour contester les décisions litigieuses ;
- l'article 12 de la directive 2006/123/CE a été méconnu en ce que la conclusion de la concession d'utilisation du domaine public maritime litigieuse n'a pas été précédée des mesures de publicité et de mise en concurrence adéquates ;
- les actes attaqués ont été pris sur une procédure irrégulière ;
- il n'est pas établi que le préfet a procédé à la publicité préalable à l'instruction administrative de la demande de convention, prescrite par l'article R. 2124-5 du code général de la propriété des personnes publiques ;
- les dispositions de l'article R. 2124-6 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ; il n'est pas établi que les consultations prescrites par ces dispositions ont été effectuées ni qu'elles seraient intervenues dans des conditions régulières ; il n'est pas démontré que les avis auraient été émis par des autorités compétentes, notamment dans l'hypothèse d'avis émis par délégation, ni que ces autorités auraient été mises à même de se prononcer en toute connaissance de cause, au vu d'un dossier complet et actualisé correspondant au dernier état de la demande de concession déposée par la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier ; s'agissant de la consultation de la commission nautique locale, il n'est pas justifié de ce que l'avis du préfet maritime aurait été joint au dossier soumis à consultation ; il n'est pas démontré que les instances collégiales (commissions nautiques, organes délibérants des communes et établissements publics de coopération intercommunale notamment) auraient été convoquées dans des conditions régulières (délai de convocation, contenu de la convocation) ou se seraient prononcées dans des conditions régulières ; l'avis du 23 janvier 2018 émis par le directeur départemental des finances publiques de la Vendée a été signé, par délégation, par la chef du service local du domaine, inspectrice des finances publiques, dont on ignore l'identité, en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ; enfin, il n'est pas établi que la chef du service local du domaine aurait été titulaire d'une délégation régulière à cette fin ;
- la commission départementale de la nature, des paysages et des sites a été consultée dans des conditions irrégulières ; des représentants de la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier ont assisté voire participé aux débats de la commission ainsi qu'une représentante du bureau d'études Abies et n'ont pas quitté la salle de réunion au moment du vote sur le projet, en méconnaissance de l'article R. 341-25 du code de l'environnement ; les membres de la commission n'ont pu voter en toute indépendance et impartialité ;
- l'étude d'impact ne peut être considérée comme suffisante ; les insuffisances dont elle est entachée ont privé le public et l'administration de la garantie d'être informés de manière complète et ont pu influer sur le sens de la décision prise par le préfet ;
- le dossier d'enquête publique était irrégulièrement composé en ce qu'il ne comportait pas le second avis du préfet maritime émis le 30 octobre 2017 en application du 3° de l'article R. 2124-7 du code général de la propriété des personnes publiques ; cette irrégularité a privé le public d'une information complète quant aux problématiques liées à l'impact environnemental du projet, la sécurité maritime et l'utilisation de la zone par les usagers de la mer ;
- l'enquête publique préalable prescrite par l'article R. 2124-7 du code de la propriété des personnes publiques est entachée d'irrégularité en ce que sa durée était insuffisante pour permettre aux populations des communes concernées de prendre connaissance du dossier soumis à leur avis ;
- les membres de la commission d'enquête ont manqué à leur obligation d'impartialité ; cette irrégularité a privé le public d'un examen impartial du projet soumis à enquête publique par l'ensemble des membres de la commission et a pu influer sur le sens de la décision prise par l'administration sur la demande de concession ;
- les dispositions de l'article R. 2124-56 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ; il n'est pas établi que le commandant de la zone maritime Atlantique et le préfet maritime auraient émis leur avis en toute connaissance de cause, c'est-à-dire au vu d'un dossier complet et actualisé correspondant au dernier état de la demande de concession déposée par la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier ; il n'est pas établi que la consultation du commandant de la zone maritime Atlantique serait intervenue dans des conditions régulières, notamment que son avis aurait été signé par une autorité compétente dans l'hypothèse d'un avis émis par délégation ; ainsi l'accord du 30 novembre 2018 confirmant celui, illégal, du 4 décembre 2017 doit être regardé comme émanant d'une autorité incompétente ; il n'est pas non plus établi qu'à la date du 30 octobre 2017, les conditions d'une suppléance régulière du préfet maritime étaient remplies ; l'avis conforme du 30 octobre 2017 est ainsi également illégal ;
- les dispositions de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ; le projet est de nature à porter atteinte aux paysages au sein desquels il va prendre place ; les actes litigieux ne tiennent pas compte des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques ;
- l'arrêté du 2 avril 2008 méconnaît les dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques ; le montant des redevances pour l'utilisation du domaine public maritime par un parc éolien, calculé en se fondant sur les dispositions de cet arrêté, n'est pas proportionné aux " avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation " ;
- les dispositions de l'article R. 2124-8 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ; alors que la convention précise les conditions dans lesquelles le préfet met en oeuvre les garanties financières, en cas de défaut d'exécution par le titulaire des opérations de remise en état, de restauration ou de réhabilitation du site, rien n'est dit à propos de la mise en oeuvre de ces garanties par le préfet en cas de disparition juridique du titulaire ;
- les dispositions de l'article R. 2124-9 du code général de la propriété des personnes publiques ont été méconnues ;
- l'arrêté du 13 décembre 2018 est entaché d'illégalité en raison de son caractère rétroactif ;
- l'arrêté préfectoral du 29 octobre 2018 et l'arrêté d'approbation confirmatif du 13 décembre 2018 seront annulés par voie de conséquence de l'annulation de la convention.
Par des mémoires, enregistrés les 23 août et 19 septembre 2019, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. H... et autres ne sont pas fondés ou sont inopérants en tout état de cause.
Par des mémoires, enregistrés les 20 mai, 5 septembre et 4 octobre 2019, la société éoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier, représentée par Me Cassin, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable ; il n'est pas justifié de l'accomplissement des formalités obligatoires prévues à l'article 3 du décret du 8 janvier 2016 ; la requête initiale et les conclusions additionnelles, qui n'annoncent aucun mémoire complémentaire, sont entachées d'un défaut de motivation ; les associations et sociétés requérantes ne justifient ni de leur qualité ni de leur intérêt à agir ;
- les moyens de la requête sont inopérants et, en tout état de cause, non fondés.
Par lettre enregistrée le 14 janvier 2019, M. H... a été désigné par son mandataire, Me Monamy, représentant unique, destinataire de la notification de la décision à venir.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Charte de l'environnement ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de l'environnement ;
- le décret n° 2004-112 du 6 février 2004 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Buffet,
- les conclusions de M. Sacher, rapporteur public,
- et les observations de Me Monamy, pour M. H... et autres et de Me Cassin, pour la société Éoliennes en mer Îles d'Yeu et de Noirmoutier.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 12 octobre 2018, le ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire a autorisé la société Éoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier à exploiter une installation éolienne de production d'électricité en mer, d'une capacité de production de 496 MW, localisée sur le domaine public maritime au large des îles d'Yeu et de Noirmoutier (Vendée). Cette société a, sur le fondement des articles L. 2124-1 et suivants du code général de la propriété des personnes publiques, sollicité, le 9 mai 2017, l'octroi d'une concession d'utilisation du domaine public maritime en dehors des ports afin d'installer, d'exploiter et d'assurer la maintenance de cette installation. Une convention de concession d'utilisation du domaine public maritime a été conclue, le 29 octobre 2018, entre l'Etat et la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier et a été approuvée par un arrêté du même jour du préfet de la Vendée, qui a été confirmé par un arrêté préfectoral du 13 décembre 2018. M. H... et autres demandent l'annulation de la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime du 29 octobre 2018 et des arrêtés préfectoraux des 29 octobre et 13 décembre 2018.
2. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. La légalité du choix du cocontractant, de la délibération autorisant la conclusion du contrat et de la décision de le signer, ne peut être contestée qu'à l'occasion du recours ainsi défini.
3. Le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini. Les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Saisi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l'auteur du recours autre que le représentant de l'Etat dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu'il critique sont de celles qu'il peut utilement invoquer, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences.
4. Indépendamment du recours de pleine juridiction dont disposent les tiers à un contrat administratif pour en contester la validité dans les conditions rappelées aux point 2 et 3, les tiers qui se prévalent d'intérêts auxquels l'exécution du contrat est de nature à porter une atteinte directe et certaine sont recevables à contester devant le juge de l'excès de pouvoir la légalité de l'acte administratif portant approbation du contrat. Ils ne peuvent toutefois soulever, dans le cadre d'un tel recours, que des moyens tirés de vices propres à l'acte d'approbation, et non des moyens relatifs au contrat lui-même.
Sur les conclusions dirigées contre la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime :
5. En premier lieu, aux termes de l'article R. 2124-5 du code général de la propriété des personnes publiques : " Avant ouverture de l'instruction administrative prévue à l'article R. 2124-6, le préfet procède à une publicité préalable consistant en un avis publié dans deux journaux à diffusion locale ou régionale habilités à recevoir des annonces légales diffusées dans le ou les départements intéressés. Si l'importance du projet le justifie, le préfet procède à la même publication dans deux journaux à diffusion nationale. / L'avis mentionne les caractéristiques principales de la demande. (...) ".
6. Il résulte de l'instruction que la demande de concession déposée, le 9 mai 2017, par la société Éoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier a fait objet d'une publication dans les journaux, à diffusion locale et régionale, Presse Océan et Ouest France, le 5 juillet 2017, et le Courrier Vendéen, le 6 juillet 2017, ainsi que dans les journaux, à diffusion nationale, Les Echos, les 4, 7 et 8 juillet 2017, Le Monde, le 5 juillet 2017 et Le Marin, le 6 juillet 2017. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions précitées n'auraient pas été respectées manque en fait.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 341-25 du code de l'environnement, relatif à la commission départementale de la nature, des paysages et des sites : " Lorsque la commission ou l'une de ses formations spécialisées est appelée à émettre un avis sur une affaire individuelle, la personne intéressée est invitée à formuler ses observations. La commission délibère en son absence. (...)".
8. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, il ne résulte pas de l'instruction que des personnes autres que les membres de la commission, notamment les représentants de la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier et du bureau d'études Abies, auraient été présents lors du vote, le 16 février 2018, de cette commission portant sur le projet en litige, le procès-verbal de la réunion précisant sur ce point que " les membres ne formulant pas d'autres observations, M. G... soumet au vote global des membres l'avis favorable du service rapporteur, pour le volet paysager et pour le volet EBC/PLU ". Le moyen tiré de ce que la commission départementale de la nature, des paysages et des sites aurait été consultée de façon irrégulière ne peut donc qu'être écarté.
9. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 2124-7 du code général de la propriété des personnes publiques : " Le projet fait l'objet, préalablement à son approbation, d'une enquête publique menée dans les formes prévues par les articles R. 123-2 à R. 123-27 du code de l'environnement. / Le dossier soumis à l'enquête comprend obligatoirement : (...) 2° Les pièces énumérées à l'article R. 2124-2 du présent code ; 3° L'avis du préfet maritime ou du délégué du Gouvernement pour l'action de l'Etat en mer ; 4° Les avis recueillis lors de l'instruction administrative ; (...) / A l'issue de l'enquête publique, la convention est approuvée par arrêté du préfet. En cas d'avis défavorable du commissaire enquêteur ou de la commission d'enquête, le préfet peut néanmoins approuver la convention par arrêté motivé. ". Aux termes de l'article R. 2124-2 du même code : " La demande de concession est adressée au préfet. Elle est accompagnée d'un dossier comportant les renseignements suivants (...) S'il y a lieu, le demandeur fournit également l'étude d'impact ou la notice d'impact établies dans les conditions prévues par les articles R. 122-1 à R. 122-6 du code de l'environnement ". Il résulte du 31° du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable, que les installations en mer de production d'énergie font l'objet d'une étude d'impact.
10. Aux termes de l'article R. 122-5 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) II. - En application du 2° du II de l'article L. 122-3, l'étude d'impact comporte les éléments suivants, en fonction des caractéristiques spécifiques du projet et du type d'incidences sur l'environnement qu'il est susceptible de produire : (...) / 4° Une description des facteurs mentionnés au III de l'article L. 122-1 susceptibles d'être affectés de manière notable par le projet : la population, la santé humaine, la biodiversité, les terres, le sol, l'eau, l'air, le climat, les biens matériels, le patrimoine culturel, y compris les aspects architecturaux et archéologiques, et le paysage ; / 5° Une description des incidences notables que le projet est susceptible d'avoir sur l'environnement résultant, entre autres :a) De la construction et de l'existence du projet, y compris, le cas échéant, des travaux de démolition ; b) De l'utilisation des ressources naturelles, en particulier (...) l'eau et la biodiversité (...) ; c)(...) du bruit, de la vibration, (...)de la création de nuisances (...);d) Des risques (...) pour l'environnement ; e) Du cumul des incidences avec d'autres projets existants ou approuvés, en tenant compte le cas échéant des problèmes environnementaux relatifs à l'utilisation des ressources naturelles et des zones revêtant une importance particulière pour l'environnement susceptibles d'être touchées.(...). ".
11. Les inexactitudes, omissions ou insuffisances d'une étude d'impact ne sont susceptibles de vicier la procédure et donc d'entraîner l'illégalité de la décision prise au vu de cette étude que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l'autorité administrative.
12. Les requérants soutiennent que l'étude d'impact est entachée d'insuffisance en s'appuyant sur des extraits qu'ils reproduisent de l'avis émis le 22 juin 2018 par le Conseil national de la protection de la nature, consulté dans le cadre de la procédure prévue à l'article L. 411-2 du code de l'environnement, distincte de celle faisant l'objet de la présente instance, applicable aux demandes de dérogation aux interdictions de destruction des espèces protégées et de leurs habitats naturels.
13. Ainsi que l'a précisé le Conseil national de la protection de la nature, des moyens importants ont été consacrés par la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier à la réalisation de l'état des lieux, des expertises ayant été effectuées, sur une aire d'étude de 5 000 km2, pendant deux années, selon les protocoles d'inventaires, les fréquences et les durées des campagnes d'expertise recommandés par le guide national de l'étude d'impact des parcs éoliens en mer. La seule circonstance, relevée par le Conseil national de la protection de la nature dans le cadre de son examen de la demande de dérogation, qu'une " véritable estimation de densité " des oiseaux et mammifères marins aurait pu " être présentée " n'est pas de nature, à elle-seule, à caractériser une insuffisance de l'état initial décrit dans l'étude d'impact dès lors qu'il n'est pas contesté que l'ensemble des espèces présentes dans la zone concernée ont été recensées. En ce qui concerne le risque de collision des oiseaux, le Conseil national de la protection de la nature a lui-même précisé qu'il s'agit d'un " impact difficilement appréciable " et, s'il indique que l'impact cumulé du projet et du parc éolien de St-Nazaire est " certainement minimisé ", il n'apporte pas d'élément justificatif sur ce point. S'agissant du Puffin des Baléares, l'avis du Conseil national de la protection de la nature se borne à souligner que " la difficulté de chiffrer une prévision d'impact cumulé doit se traduire par l'application du principe de précaution pour cette espèce. En accord avec la littérature, le risque de mortalité directe par collision peut être faible. Mais est-il possible de le qualifier de négligeable quand l'espèce décline du fait d'une surmortalité due aux captures dans les engins de pêche ' ". De la même façon, s'agissant des chiroptères, les énonciations de l'avis sur lesquelles se fondent les requérants se bornent à mentionner que " des incertitudes fortes demeurent " .quant à la fréquentation et aux couloirs de migration des chiroptères et font état des mêmes incertitudes, s'agissant de la tortue Luth Enfin, en ce qui concerne les effets acoustiques du projet sur les mammifères marins, dont l'importance est limitée à la phase de construction, si le Conseil national de la protection de la nature remet en cause la méthodologie utilisée, il en conclut seulement que les résultats sur les prévisions de ces effets sont " fortement sujets à caution ". Dans ces conditions, alors en outre que, dans son avis du 21 février 2018, l'autorité environnementale a considéré, dans sa partie consacrée à l'analyse de l'étude d'impact, que celle-ci était complète, les seules énonciations du Conseil national de la protection de la nature reproduites par les requérants relatives à l'examen par ce dernier, dans le cadre d'une procédure distincte, d'une demande ayant un autre objet ne suffisent pas à faire regarder l'étude d'impact comme entachée d'inexactitudes, d'omissions ou d'insuffisances ayant pu avoir pour effet de nuire à l'information complète de la population ou de nature à exercer une influence sur la décision prise.
14. En quatrième lieu, les requérants soutiennent que le dossier d'enquête publique était irrégulièrement composé en ce qu'il ne comportait pas le second avis du préfet maritime émis le 30 octobre 2017, en application du 3° de l'article R. 2124-7 du code général de la propriété des personnes publiques. Il résulte, toutefois, de l'instruction que, par cet avis, émis à la suite du remplacement, dans le projet, d'une éolienne de type Adwen 8MG par une éolienne de type Siemens 8MW, le préfet maritime " confirme dans les mêmes conditions, l'avis favorable émis le 6 octobre 2017 " aux motifs que " sur le plan environnemental, l'impact est tout à fait comparable d'autant que les schémas d'implantation proposés pour les éoliennes et les câbles sont rigoureusement identiques ", qu'en ce qui concerne " la sécurité maritime, aucune différence significative n'est identifiée vis-à-vis des de radars des sémaphores " et que si le tirant d'air est réduit du fait du changement du type d'éolienne, " cette évolution est sans effet sur la sécurité maritime ". Par suite, la circonstance, à la supposer établie, que l'avis du 30 octobre 2017 du préfet maritime n'aurait pas figuré au dossier d'enquête publique n'a pas eu pour effet de nuire à l'information complète de la population. Dès lors, le moyen tiré de ce que " cette irrégularité a privé le public d'une information complète quant aux problématiques liées à l'impact environnemental du projet, la sécurité maritime et l'utilisation de la zone par les usagers de la mer " doit être écarté.
15. En cinquième lieu, il ne résulte pas de l'instruction que l'impartialité qui s'impose à la commission d'enquête tout au long de la procédure aurait été méconnue. Les propos tenus par deux des membres de la commission d'enquête, dans un échange de mails avec les autres membres de la commission, à la suite de l'incident qui s'est produit le 28 avril 2018, lors d'une permanence, avec un groupe d'opposants au projet, pour regrettables qu'ils soient, et qui révèlent seulement le contexte de tensions entourant cette opération, ne suffisent pas, à eux seuls, à faire regarder la commission d'enquête comme ayant manqué à cette obligation alors, en outre, qu'il n'est pas contesté qu'une rencontre a ultérieurement été proposée par cette commission aux intéressés.
16. En sixième lieu, selon l'article L. 123-9 du code de l'environnement, la durée de l'enquête publique ne peut être inférieure à trente jours et peut être prolongée pour une durée maximale de quinze jours, par décision motivée du commissaire enquêteur ou du président de la commission d'enquête.
17. L'enquête publique s'est déroulée du 4 avril au 23 mai 2018 et a été accompagnée de plusieurs mesures destinées à favoriser l'information et la participation du public, y compris par la voie électronique grâce à la mise en place d'un registre dématérialisé. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que la durée de l'enquête a été insuffisante.
18. En septième lieu, aux termes de l'article L. 2124-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les décisions d'utilisation du domaine public maritime tiennent compte de la vocation des zones concernées et de celles des espaces terrestres avoisinants, ainsi que des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques ;(...) ".
19. Le projet de parc éolien, d'une surface de 89 km2, composé de 62 aérogénérateurs disposant de pales de 81 mètres, de câbles sous-marins inter-éoliennes, d'un poste de livraison, d'un mât de mesure et des éléments accessoires, d'une capacité de production de 496 MW est situé à 12 kilomètres environ de l'île d'Yeu, à 17 kilomètres environ de l'île de Noirmoutier et à 21 kilomètres de NotreDame-de-Monts qui constitue la commune littorale la plus proche.
20. D'une part, les requérants relèvent le caractère remarquable de l'île d'Yeu et de l'île de Noirmoutier, qui comporte notamment un site inscrit dénommé " Le Bois des Éloux et de la Mougendrie ", sur le plan tant patrimonial que paysager. Il résulte, toutefois, de l'instruction, notamment de l'étude d'impact dont les énonciations, sur ce point, ne sont pas contestées, que l'impact visuel du parc a été réduit, notamment, par la disposition en ligne des éoliennes, le nombre des alignements visibles étant de 5 pour l'île d'Yeu et de 13 pour l'île de Noirmoutier, que seules la façade littorale nord de l'île d'Yeu et la façade ouest de l'ile de Noirmoutier offrent des vues directes sur le parc dont les éoliennes apparaitront " comme des objets de plus d'un centimètre placés à 1 mètre de l'oeil ". Ainsi, compte tenu de la distance par rapport à la côte et du schéma d'implantation des éoliennes, la visibilité d'ensemble du projet apparait limitée. Si les requérants invoquent, également, les effets cumulés du projet avec le parc éolien du banc de Guérande au large de Saint-Nazaire, ils relèvent seulement un impact depuis la pointe de l'Herbaudière, sur l'île de Noirmoutier, les deux parcs étant en outre éloignés d'une vingtaine de kilomètres.
21. D'autre part, s'agissant de la biodiversité, il est constant que le parc éolien n'est pas compris dans une zone Natura 2000. Les requérants font, néanmoins, valoir qu'il existe à proximité une zone spéciale de conservation (ZSC) " Le Plateau rocheux de l'ile d'Yeu " et deux zones de protection spéciale (ZPS) " Le secteur marin de l'ile d'Yeu jusqu'au continent " et " Le marais breton, baie de Bourgneuf, ile de Noirmoutier et forêts de Monts " et que le secteur d'implantation se caractérise par une grande richesse de l'avifaune, de la faune marine et de chiroptères à laquelle le projet va porter atteinte de façon temporaire et permanente. En ce qui concerne les impacts temporaires, les éléments produits par les requérants, constitués d'extraits de l'avis émis le 21 février 2018 par l'autorité environnementale, portent sur les effets de la partie terrestre du projet, liés au tracé du raccordement électrique, sur les mammifères terrestres et des espèces d'oiseaux terrestres ou non observés en mer durant les expertises et non sur la partie maritime du projet, objet de la concession litigieuse. En ce qui concerne les autres impacts environnementaux évoqués, il résulte de l'instruction que ceux-ci ont été réduits en raison du choix effectué par la société de recourir à des éoliennes de grande puissance (MR1), lequel a pour effet de limiter le nombre d'aérogénérateurs et, par voie de conséquence, le nombre d'obstacles en mer et le risque de collision associé ainsi que l'emprise sur les fonds marins. Il résulte, également, de l'instruction, notamment de ce même avis de l'autorité environnementale, s'agissant de l'avifaune, que le risque de collision est qualifié de moyen à fort pour la seule espèce du goéland marin, pour laquelle d'importantes mesures compensatoires ont été prévues dans les secteurs de reproduction et de stationnement de ces oiseaux, que cinq espèces " paraissent affectées par le parc " au regard de l'effet barrière de perturbations des oiseaux en vol, l'impact étant jugé " moyen " et que l'impact sur les chiroptères est limité, la pipistrelle de Nathusius, espèce migratrice, étant seule susceptible de passer au-dessus de la mer. Enfin, les requérants se bornent à citer des extraits de l'avis du Conseil national de la protection de la nature, dont il a été dit au point 13, s'agissant du Puffin des Baléares, qu'il faisait état de la difficulté d'évaluer l'impact du projet sur cette espèce et, s'agissant des mammifères marins, qu'il se bornait à contester la méthodologie employée pour estimer l'impact acoustique durant la phase de construction. Il résulte des développements qui précèdent que, contrairement à ce qui est soutenu par les requérants, la décision d'utilisation du domaine public n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des impératifs de préservation des sites et paysages du littoral et des ressources biologiques.
22. En huitième lieu, les requérants font grief à la convention de ne pas comporter les conditions de mise en oeuvre des garanties financières à fin de réhabilitation du site par le préfet en cas de disparition juridique du titulaire de la concession, en se prévalant des dispositions de l'article R. 2124-8 du code général de la propriété des personnes publiques, aux termes desquelles : " Lorsque le titulaire est une personne physique ou une personne morale de droit privé, la convention peut prévoir, afin d'assurer la réversibilité effective des modifications apportées au milieu naturel, la constitution de garanties financières ou une consignation auprès de la Caisse des dépôts et consignations, dont le montant est établi compte tenu du coût estimé des opérations de remise en état, de restauration ou de réhabilitation du site / La convention précise les conditions dans lesquelles le préfet met en oeuvre ces garanties, notamment en cas de défaut d'exécution par le titulaire des opérations de remise en état, de restauration ou de réhabilitation du site, ou en cas de disparition juridique du titulaire ".
23. L'article 4-3 de la convention de concession d'utilisation du domaine public fixe les obligations du concessionnaire en ce qui concerne le démantèlement des installations objet de l'exploitation, la remise en état, la restauration ou la réhabilitation du site afin d'assurer la réversibilité effective des modifications apportées au milieu naturel et précise que ses dispositions sont applicables dans tous les cas de fin anticipée de la concession. L'article 4-1 " Constitution de garanties financières " de la convention, qui renvoie à l'article 6.1 (Garanties financières pour démantèlement) du cahier des charges de l'appel d'offres, fixe les modalités de constitution des garanties financières mises à la charge du concessionnaire, leur nature et leur montant, et dispose que le concédant peut mettre en oeuvre ces garanties financières en cas d'absence de démantèlement et de remise en état du domaine public maritime après exploitation, à la fin normale ou anticipée de la concession, dans les conditions prévues à l'article 4-3. L'hypothèse visée par les requérants d'une disparition du concessionnaire avant le terme de la convention, qui correspond à l'un des cas de cessation anticipée de la convention est, par suite, prévue au contrat, tout comme les garanties propres à assurer une remise en état du site concédé. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article R. 2124-8 du code général de la propriété des personnes publiques ne peut donc être accueilli.
24. En ce qui concerne les autres moyens dirigés contre la convention de concession, il résulte de l'instruction que les personnes publiques mentionnées à l'article R. 2124-6 du code général de la propriété des personnes publiques ont été consultées préalablement à l'enquête publique. Les requérants soutiennent, néanmoins, que ces dispositions ont été méconnues en ce qu'il n'est pas établi " que les consultations prescrites (...) seraient intervenues dans des conditions régulières ", " que leurs avis auraient été émis par des autorités compétentes, notamment dans l'hypothèse d'avis émis par délégation, ni que ces autorités auraient été mises à même de se prononcer en toute connaissance de cause, au vu d'un dossier complet et actualisé correspondant au dernier état de la demande de concession déposée par la société EMYN (dossier modifié en dernier lieu début 2018 : changement de modèle d'anode sacrificielle) ". Ils soutiennent, en particulier, qu'il n'est pas établi que " les instances collégiales ((...) organes délibérants des communes et établissements publics de coopération intercommunale notamment), auraient été convoquées dans des conditions régulières (délai de convocation, contenu de la convocation) ou se seraient prononcées dans des conditions régulières (problématiques de la composition de l'organe délibérant et du quorum par exemple) ", que " l'avis du 23 janvier 2018 émis par le directeur départemental des finances publiques de la Vendée a été signé, par délégation, par la chef du service local du Domaine, inspectrice des finances publiques, dont on ignore l'identité, en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration " et que la chef du service local du Domaine n'était pas " titulaire d'une délégation régulière à cette fin ".
25. Toutefois, les vices ainsi allégués, au demeurant de façon très générale, ne sont pas en rapport direct avec l'intérêt lésé dont les associations requérantes se prévalent qui se rapportent à la protection de la nature et de l'environnement, à la préservation des milieux et ressources maritimes, à la protection des sites et des paysages, à la défense des espèces menacées, de la biodiversité animale et végétale, ni en tout état de cause, avec les intérêts lésés, à les supposer même suffisamment directs et certains, qu'invoquent les autres requérants, liés aux effets du projet sur l'activité de la pêche, sur les conditions de la navigation de plaisance et, plus généralement, sur leurs conditions et lieux de vie. Par suite, et alors que les vices allégués ne présentent pas un caractère de gravité telle que le juge devrait les relever d'office, ils ne peuvent utilement être invoqués par les requérants en application des principes énoncés au point 3 du présent arrêt. S'agissant de la consultation de la commission nautique locale, qui a examiné le projet en tant qu'il emporte des effets sur la navigation maritime, il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal de la réunion, que ses membres auxquels a été transmis le dossier de présentation du projet, ont été convoqués le 20 octobre 2017 et que le quorum était atteint le 8 novembre 2017, jour de sa réunion. Si les avis du préfet maritime de l'Atlantique n'ont pu leur être communiqués en même temps que la convocation du fait de ce que le second avis de ce dernier n'avait pas été émis à cette date, le contenu de ces avis a été discuté lors de la séance qui s'est tenue en présence du représentant de la préfecture maritime. Par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que la commission nautique locale n'aurait pas été régulièrement consultée doit être écarté.
26. Les requérants soutiennent, enfin, que l'article 12 de la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur a été méconnu en ce que la concession litigieuse n'aurait pas fait l'objet de publicité et de mise en concurrence préalables. Ils invoquent la méconnaissance de l'article R. 2124-9 du code général de la propriété des personnes publiques qui prévoit que " La convention indique que la mise en oeuvre par le préfet des mesures indispensables à la conservation du domaine public maritime n'ouvre pas droit à indemnité au profit du titulaire ". Ils excipent de l'illégalité, au regard des principes de fixation des redevances domaniales résultant de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques, de l'arrêté du 2 avril 2008 fixant le tarif des redevances dues pour occupation du domaine public de l'Etat par des installations de production d'électricité utilisant l'énergie mécanique du vent, au vu duquel le directeur départemental des finances publiques a émis son avis, le montant des parts fixe et variable de la redevance ayant été arrêté par le service des domaines sur le fondement des articles 1er et 4 de cet arrêté. Toutefois, aucun de ces moyens, par lesquels les requérants invoquent, soit la méconnaissance de règles relatives au droit de la concurrence, soit les conditions financières de la convention, n'est en rapport direct avec les intérêts rappelés ci-dessus au point 25 dont ils se prévalent au soutien de leurs conclusions. Sur ce point, M. H..., M. B... et M. I... ne démontrent pas davantage être lésés dans leurs intérêts de façon suffisamment directe et certaine par la concession d'autorisation du domaine public en se prévalant de ce que " leurs intérêts financiers en qualité de contribuables nationaux seraient immanquablement lésés du fait de l'octroi d'avantages financiers considérables au promoteur " du projet. Enfin, les vices allégués ne sont pas d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Ces moyens ne peuvent, dès lors, qu'être écartés en application des principes rappelés précédemment.
27. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non-recevoir opposées à la requête, que M. H... et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de la convention de concession conclue le 29 octobre 2018 entre l'Etat et la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier.
Sur les conclusions dirigées contre les arrêtés préfectoraux des 29 octobre et 13 décembre 2018 approuvant la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime :
28. En premier lieu, ainsi qu'il a été rappelé au point 4, les tiers ne peuvent invoquer, à l'encontre de l'acte administratif portant approbation du contrat, que des moyens tirés de vices propres à l'arrêté d'approbation, et non des moyens relatifs au contrat lui-même. Les moyens articulés, sans distinction, contre les arrêtés d'approbation et la convention de concession, tirés de la méconnaissance des dispositions des articles L. 2124-1, L. 2125-3, R. 2124-5, R. 2124-6, R. 2124-8 et R. 2124-9 du code général de la propriété des personnes publiques, de l'irrégularité de la consultation de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites, du caractère incomplet de l'étude d'impact et du dossier d'enquête publique, de l'insuffisante durée de l'enquête publique, de la partialité des membres de la commission d'enquête et de la méconnaissance des règles relatives au droit de la concurrence et aux conditions financières de la convention ne peuvent, dès lors, qu'être écartés. Enfin, compte tenu de qui a été dit aux points 5 à 27, le moyen tiré de ce que les arrêtés d'approbation devraient être annulés " par voie de conséquence de la nullité de la convention " auquel ils se rapportent ne peut être accueilli.
29. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 2124-56 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les avis conformes du préfet maritime ou du délégué du Gouvernement pour l'action de l'Etat en mer et de l'autorité militaire compétente doivent être demandés pour les autorisations relatives à la formation d'établissement de quelque nature que ce soit sur la mer ou sur ses rivages. / L'autorité militaire compétente est, en métropole, le commandant de zone maritime (...) ". Aux termes de l'article 6 du décret du 6 février 2004 relatif à l'organisation de l'Etat en mer : " (...) Le préfet maritime de l'Atlantique est le commandant de la zone maritime Atlantique. Le siège de la préfecture maritime est à Brest. (...) ".
30. D'une part, s'agissant de l'avis conforme émis, le 30 octobre 2017, par le préfet maritime, l'article 7 du décret mentionné ci-dessus du 6 février 2004 dispose qu'en cas " d'absence ou d'empêchement, la suppléance du préfet maritime est exercée par l'officier de marine qui assure la suppléance du commandant de la zone maritime ". M. L... A..., capitaine de vaisseau, a été promu au grade de contre-amiral, grade des officiers généraux de la marine, et nommé adjoint au commandant de l'arrondissement maritime de l'Atlantique et commandant de base de défense de Brest-Lorient, le 1er septembre 2017, par décret du 12 juillet 2017. Par ordre de circonstance du 23 octobre 2017, le vice-amiral d'escadre Emmanuel de Oliveira, alors " commandant de la zone maritime Atlantique, commandant de l'arrondissement maritime Atlantique et préfet maritime de l'Atlantique ", a désigné le contre-amiral M... A... pour assurer la suppléance de ses fonctions du vendredi 27 octobre 2017 au 6 novembre 2017. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet maritime, commandant de la zone maritime, n'ait pas été absent ou empêché à la date du 30 octobre 2017. Dès lors, le moyen tiré de ce que l'avis conforme complémentaire du 30 octobre 2017 signé par le contre-amiral M... A... serait entaché d'incompétence doit être écarté.
31. D'autre part, s'agissant de l'avis émis par l'autorité militaire, le vice-amiral d'escadre Emmanuel de Oliveira, commandant la zone maritime Atlantique, a émis, le 4 décembre 2017, l'avis conforme requis par les dispositions de l'article R. 2124-56 du code général de la propriété des personnes publiques. Cet avis a été signé, par délégation, par le contre-amiral Arnaud Provost-Fleury, adjoint au commandant de la zone maritime Atlantique. Le préfet de la Vendée a considéré que la délégation de signature n'avait pas fait l'objet de mesures de publicité suffisantes et a sollicité un nouvel avis, qui a été rendu, le 30 novembre 2018, par le vice-amiral d'escadre Jean-Louis Lozier, commandant la zone maritime Atlantique.
32. L'avis du 30 novembre 2018 confirmant celui du 4 décembre 2017 a été pris par le vice-amiral d'escadre Jean-Louis Lozier, en sa qualité de commandant de la zone maritime Atlantique, ainsi qu'il est expressément mentionné dans cet avis. La circonstance qu'apparaisse également, sous la signature de l'intéressé, la mention " commandant d'arrondissement maritime Atlantique " s'avère sans incidence, celui-ci ayant été nommé, par décret du 11 juillet 2018 " commandant de la zone maritime Atlantique, commandant d'arrondissement maritime Atlantique et préfet maritime ". Le moyen tiré de ce que cet avis émane d'une autorité incompétente ne peut donc être accueilli.
33. Les requérants soutiennent, également, que le dossier de demande de concession présenté par la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier ayant été modifié au début de l'année 2018 pour tenir compte du changement de modèle d'anodes, le commandant de la zone maritime Atlantique qui a émis son avis le 4 décembre 2017 et le préfet maritime qui a émis son avis les 6 et 30 octobre 2017 n'auraient pas disposé d'une information complète sur le projet de sorte que ces avis seraient entachés d'irrégularité. Toutefois, il n'est pas contesté que la modification du type d'anodes revêt un caractère mineur et est sans incidence sur la sécurité maritime du projet. Par suite, et alors en tout état de cause que l'autorité militaire s'est de nouveau prononcée le 30 novembre 2018, le moyen ne peut qu'être écarté.
34. Enfin, ainsi qu'il a été dit au point 31, le préfet de la Vendée a considéré que la délégation de signature consentie au contre-amiral Arnaud Provost-Fleury, adjoint au commandant de la zone maritime Atlantique, signataire de l'avis du 4 décembre 2017 n'avait pas fait l'objet de mesures de publicité suffisantes. Il a sollicité de l'autorité militaire, un nouvel avis, qui a été rendu, le 30 novembre 2018, dans des termes identiques au premier, par le vice-amiral d'escadre Jean-Louis Lozier, commandant la zone maritime Atlantique. Le préfet a pris, au vu de cet avis, à titre de régularisation, le 13 décembre 2018, un arrêté, confirmant l'arrêté du 29 octobre 2018, dont l'article 1er énonce que " Les dispositions de l'arrêté préfectoral (...) du 29 octobre 2018 sont confirmées avec effet à compter du 29 octobre 2018 ". Compte tenu de ce que l'irrégularité de l'avis relevée par le préfet, qui affecte seulement les modalités selon lesquelles la personne publique a donné son consentement, était susceptible d'être régularisée et que le contenu de l'avis émis le 30 novembre 2018 était identique à celui du 4 décembre 2017, le préfet a pu légalement réitérer l'acte d'approbation, avec effet rétroactif au 29 octobre 2018, par l'arrêté du 13 décembre 2018 dépourvu du vice entachant l'acte d'approbation du 29 octobre 2018. Par suite, le moyen tiré par les requérants de ce que cet arrêté serait entaché d'illégalité en raison de son caractère rétroactif ne peut qu'être écarté.
35. Il résulte de tout ce qui précède que M. H... et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation de la convention de concession d'utilisation du domaine public maritime au large des îles d'Yeu et de Noirmoutier conclue, le 29 octobre 2018, entre l'Etat et la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier, de l'arrêté du même jour par lequel le préfet de la Vendée a approuvé cette convention et de l'arrêté préfectoral du 13 décembre 2018 confirmant l'approbation de cette convention.
Sur les frais liés au litige :
36. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat et de la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes, le versement à M. H... et autres de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. J... H..., de la société L'Entêté, de l'association Robin des bois, de l'association Fédération environnement durable, de l'association des commerçants de Noirmoutier, de M. E... B..., de M. K... I... et de la société Sirius, le versement à la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier d'une somme globale de 1 500 euros au titre des mêmes frais.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. H... et autres est rejetée.
Article 2 : M. J... H..., la société L'Entêté, l'association Robin des bois, l'association Fédération environnement durable, l'association des commerçants de Noirmoutier, M. E... B..., M. K... I... et la société Sirius verseront à la société Eoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier une somme globale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. J... H..., désigné comme représentant unique, à la ministre de la transition écologique et solidaire et à la société éoliennes en mer Iles d'Yeu et de Noirmoutier.
Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Vendée.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2019, à laquelle siégeaient :
- M. Célérier, président de chambre,
- Mme C..., présidente-assesseur,
- M. Bréchot, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 décembre 2019.
Le rapporteur,
C. Buffet
Le président,
T. CELERIER
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 18NT04618